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Mes cent premiers jours à Bagdad, confinée à cause du COVID-19
Prendre de nouvelles fonctions à Bagdad pendant la pandémie, c’était d’énormes défis à relever: inventer de nouvelles pratiques professionnelles, surmonter les préjugés et gérer la sécurité, mais cela n’a pas empêché la nouvelle coordinatrice de pays de l’OIT de faire des progrès dans la promotion du travail décent et de la justice sociale.
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Maha Kattaa, coordinatrice de pays de l’OIT pour l’Irak |
Ce qu’elle ne savait pas, c’est que j’avais fait l’expérience de l’exact contraire. Le fait de ressembler à la population locale peut m’aider à m’intégrer et à mieux connaître les préoccupations et les aspirations des gens. Les nombreuses batailles que j’ai menées, en raison de mes racines, de mon apparence et de ma nationalité, n’ont fait qu’accroître ma force et ma résilience personnelles et professionnelles.
Je lui ai donc adressé un large sourire en retour et lui ai répondu avec assurance: «Pour moi, c’est une force, pas une faiblesse.»

Je vis et je travaille dans l’enceinte des Nations Unies, dans la zone verte fortifiée. Je suis régulièrement réveillée par le bruit des sirènes quand des obus de mortiers s’abattent sur la Zone – quelque chose à quoi je dois encore m’habituer. Jusqu’à présent, je n’ai quitté l’enceinte que deux fois, pour rencontrer le ministre du Travail et des Affaires sociales. La situation sécuritaire actuelle, couplée à la crise du COVID-19, signifie que j’effectue l’ensemble de mes tâches à distance.

Mais la situation que j’ai trouvée était extrêmement éloignée de mes attentes et je me suis rendu compte que les défis allaient être bien plus grands que ce que j’avais imaginé.
Lors de ma première visite au «bureau», j’ai été surprise de constater qu’il s’agissait seulement d’une chaise et d’une table, dans un espace ouvert partagé avec des dizaines d’employés d’autres agences des Nations Unies. J’ai terminé cette journée avec un sentiment de frustration et de confusion; comment pourrais-je travailler dans cet environnement, où les mouvements à l’extérieur de l’enceinte sont limités, le soutien logistique défaillant, où tous les yeux sont braqués sur moi, une femme jetée dans ce nouveau monde, apparemment dénuée des qualifications nécessaires pour réussir?
A mon deuxième jour en Irak, je me suis réveillée tôt et j’ai commencé à réfléchir aux options qui s’offraient à moi. Je pouvais soit abandonner et partir, soit trouver les moyens de m’adapter et de réussir. J’ai opté pour une approche en trois axes:
- Créer un environnement alternatif qui puisse m’accueillir et accueillir la mission de l’OIT
- Tirer le meilleur parti possible des communications virtuelles
- Transformer les défis en chances de succès
Malgré ces dispositions inhabituelles, beaucoup a été fait. J’ai réalisé quatre évaluations de l’impact de la pandémie sur les travailleurs et les entreprises au Liban, en Jordanie et en Irak, ainsi qu’un rapport consacré aux répercussions sur les réfugiés syriens. J’ai conçu et préparé des projets pour une valeur de 40 millions de dollars en vue de promouvoir le travail et l’emploi en Jordanie, au Liban et au Yémen (ainsi qu’en Irak). J’ai aussi la possibilité de participer – à distance – à plus de séminaires et d’interviews TV, pour mettre en lumière le travail de l’OIT et l’impact du COVID-19 sur les marchés du travail locaux.
Par ailleurs, nous avons signé deux protocoles d’entente avec le ministère jordanien du Travail et six accords avec d’autres agences gouvernementales et nationales en Jordanie et en Irak.
Quand je repense à ma première journée, et à ma rencontre avec la haute fonctionnaire de l’ONU qui doutait de moi, je suis fière de lui avoir démontré le contraire. J’ai accompli ce qui, il y a cent jours, semblait impossible. La mission de l’OIT en Irak est désormais une réalité et, avec notre mandat de promotion du travail décent et de la justice sociale, j’estime que nous sommes sur la bonne voie pour aider les personnes les plus vulnérables.