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Comment veiller à ce que les travailleurs âgés participent pleinement à la reprise après la pandémie

Les travailleurs âgés sont une ressource précieuse pour les entreprises, pourtant l’histoire récente a montré que beaucoup d’entre eux risquent de perdre leur emploi, en raison de la crise et de la récession.

Editorial | 25 mai 2020
Carla Henry, spécialiste technique principale, Département Recherche de l’OIT
À l’heure où les économies réduisent les restrictions imposées aux entreprises, de nombreux travailleurs vont être rappelés au travail, mais il est possible qu’on demande à ceux dont la santé est considérée comme plus à risque de rester chez eux plus longtemps, voire de ne jamais revenir.

Les personnes âgées, définies comme celles qui ont 55 ans et plus, sont considérées comme une catégorie à haut risque car ils peuvent développer des complications médicales ou prendre plus de temps pour se remettre.

La responsabilité des gouvernements et des employeurs est de veiller à ce que les travailleurs âgés ne soient pas confrontés à des discriminations à l’emploi en raison de leur âge et de leur vulnérabilité perçue aux effets du virus COVID-19.

Quelles sont les politiques et les actions qui peuvent réduire le risque de chômage pour les travailleurs âgés ou comment accompagner leur transition vers de nouvelles sources d’emploi durant et après la pandémie?

Les personnes âgées forment le groupe démographique qui croît le plus vite dans les pays membres de l’OCDE. Au cours de la dernière décennie, leur taux de participation à la main-d’œuvre a augmenté de 8 points de pourcentage pour atteindre 64 pour cent en 2018, la plus forte augmentation parmi les groupes d’âge. Cette augmentation de leur participation à la main-d’œuvre contribue à la croissance du PIB et améliore la sécurité de revenu pour leur retraite future. Ils représentent également un segment important de la main-d’œuvre dans les pays à revenu faible et intermédiaire où l’emploi formel et la couverture des régimes de retraite sont moins courants. La plupart d’entre eux doivent se contenter d’un travail informel pour obtenir un revenu.

© Scott Lewis
L’histoire récente suggère que les travailleurs âgés les moins éduqués sont plus défavorisés dans les contextes de crise et de récession. Après la grande récession de 2007 à 2009, les taux de chômage des travailleurs âgés et des jeunes ont très fortement augmenté. Beaucoup d’entre eux ont perdu leur emploi stable et se sont retrouvés dans des situations de travail plus précaires, avec une baisse de leurs revenus. Cependant, les travailleurs âgés ont mis plus de temps avant de retrouver un travail.

Certains ont choisi de sortir complètement du marché du travail et ont arrêté de chercher un emploi. D’autres ont accepté des emplois informels plus précaires. Cela a eu des conséquences à long terme, comme une baisse de leur épargne, du montant de leurs pensions et de leur qualité de vie, avec l’obligation de travailler plus longtemps qu’ils ne l’avaient prévu. Il semble aujourd’hui que les effets sur l’emploi de la pandémie seront encore plus graves, ce qui suggère que les travailleurs âgés seront une nouvelle fois durement touchés.

Que peut-on faire ?

Aider les travailleurs âgés à garder leur emploi n’a rien à voir avec la compassion. Il s’agit de ne pas gâcher des ressources précieuses et aussi de protéger ces travailleurs de la discrimination au travail. Dans le contexte de la crise liée au COVID-19, les pays devraient prendre les devants et fournir des congés de maladie, des congés payés pour raisons familiales, et une assurance santé dans le cadre de programmes publics, au lieu de laisser cela à la discrétion des employeurs.

Pour bénéficier de la valeur que peuvent apporter les travailleurs âgés à la main-d’œuvre, les entreprises vont également devoir repenser leurs engagements vis-à-vis des horaires flexibles et des programmes de reconversion.

Il sera également moins coûteux pour les gouvernements de maintenir les travailleurs âgés dans l’emploi plutôt que d’avoir à les aider à trouver un nouvel emploi. Ils devront mettre en place des mesures incitatives supplémentaires pour les maintenir dans leur emploi ou instaurer des exemptions du paiement des cotisations de retraite durant la quarantaine. Les gouvernements pourraient également encourager la formation technique et le soutien au télétravail.

Dans l’économie informelle, il peut être efficace de mettre en place des programmes d’aide à court terme aux petites entreprises ciblant la préservation des emplois, notamment pour les travailleurs indépendants âgés. L’aide peut aussi revêtir la forme de transferts monétaires vers les travailleurs informels temporairement sans travail.

Il faudra aussi repenser notre concept de l’éducation, pour mettre davantage l’accent sur l’apprentissage tout au long de la vie. Les travailleurs âgés qui perdent leur emploi devront développer de nouvelles compétences pour être concurrentiels sur un marché du travail plus étroit. L’extension de l’assurance chômage couplée au financement de programmes de formation à court terme peut aider les chômeurs à trouver un nouvel emploi. Subventionner la formation dans l’emploi peut également s’avérer une solution efficace.

Les travailleurs âgés ont accumulé une longue expérience de compétences et de connaissances. Quand le monde va retourner au travail dans le cadre du COVID-19, ne perdons pas de vue l’importance de leur valeur ajoutée pour les employeurs et pour l’économie.