Emploi rural

52 millions de travailleurs ruraux en Amérique latine et dans les Caraïbes

Il faut intensifier les efforts pour améliorer les conditions de travail dans les campagnes, affirme un nouveau rapport régional de l’OIT sur l’emploi rural.

Communiqué de presse | 14 octobre 2016
© Nahuel Berger / Banque mondiale
LIMA (OIT Info) – En Amérique latine et dans les Caraïbes, un travailleur sur cinq vit à la campagne où le marché du travail rural se caractérise par davantage d’emplois vulnérables, moins d’emplois salariés et une pauvreté deux fois plus fréquente que dans les zones urbaines, souligne un nouveau rapport de l’OIT.

Le rapport intitulé «Travailler en zone rurale au 21e siècle» (disponible en espagnol) en Amérique latine et dans les Caraïbes, présenté dans la capitale colombienne, offre pour la première fois un panorama de la réalité de l’emploi rural et de ses perspectives dans la région.

«Aujourd’hui, les campagnes ne sont plus ce qu’elles étaient il y a 20 ou 30 ans de cela. Nous constatons de grandes transformations: l’urbanisation, moins de jeunes, des adultes plus âgés, une réduction de l’emploi agricole et une augmentation des professions non agricoles», a déclaré le Directeur régional de l’OIT pour l’Amérique latine et les Caraïbes, Jose Manuel Salazar.

Le rapport rappelle que s’il y a eu une hausse de la productivité dans les campagnes, de fortes disparités perdurent entre la situation de l’emploi en zone rurale et celle des zones urbaines. L’une d’elles est la place plus importante occupée par l’emploi vulnérable dans les régions rurales: 56 pour cent, contre 27 pour cent en zone urbaine.

«On dénombre 52 millions de travailleurs ruraux, parmi lesquels au moins 27 millions occupent un emploi vulnérable», a précisé le Directeur régional de l’OIT à Bogotá.

Le secteur rural représente le noyau dur de la pauvreté, de l’exclusion et de l’informalité dans la région.»

Directeur régional de l’OIT, Bogotá
«En dépit des progrès, de grosses lacunes persistent. Le secteur rural représente le noyau dur de la pauvreté, de l’exclusion et de l’informalité dans la région», a-t-il ajouté, et pour pallier les principaux manques, «les politiques publiques doivent redoubler d’efforts afin d’intégrer les employés et les travailleurs indépendants sur le marché du travail rural de manière productive».

Le rapport relève que le chômage est faible en zone rurale puisque le taux régional de chômage régional est de 3,1 pour cent, contre 6,9 pour cent en zone urbaine. Cependant, cette situation s’explique en partie par la nécessité de travailler (en raison des taux élevés de pauvreté) et par un accès limité à l’éducation.

«Etant donné que, dans la région, l’essentiel des revenus des travailleurs provient du travail, il est clair que le bien-être et le développement des régions rurales dépendent de ce qui se passe sur le marché du travail, en matière de revenu et de conditions de travail», a déclaré M. Salazar.

Il a souligné que les zones rurales recevaient en proportion moins d’investissements publics et privés et que c’était l’une des raisons pour lesquelles «il existe de nombreuses disparités en matière d’infrastructures sociales et de production entre zones rurales et urbaines, ce qui finit par se traduire par un sérieux manque de productivité.»

Amélioration des conditions de travail en zone rurale entre 2005 et 2014

Le rapport de l’OIT atteste d’une série de progrès des conditions de travail dans les régions rurales entre 2005 et 2014.

Par exemple, en ce qui concerne la sécurité sociale, on constate une hausse de la couverture d’assurance maladie, mais seuls 37 pour cent de la population en bénéficient contre 62 pour cent dans les zones urbaines; en outre, les systèmes de retraite semblent couvrir davantage de personnes alors que seulement 26 pour cent sont couvertes, contre 56 pour cent dans les villes.

Concernant les revenus des travailleurs, le rapport note que s’ils ont grimpé plus vite que dans les zones urbaines, en 2014, les revenus moyens dans les régions rurales équivalaient à 68 pour cent du revenu du travail moyen en zone urbaine.

De plus, le taux de pauvreté rurale de 46,2 pour cent affecte 60 millions de personnes, ce qui est nettement plus élevé que le taux de pauvreté urbaine, estimé à 23,8 pour cent.

Recommandations stratégiques

L’OIT présente une série de recommandations stratégiques dans son rapport, y compris des politiques de développement productif et d’investissement dans l’éducation et la formation professionnelle. Ici, l’accent est mis sur la propriété foncière, l’investissement dans les infrastructures physiques, la diversification et le développement productif avec une approche territoriale, et des mesures destinées à faire le lien entre les petits producteurs ruraux et les chaînes d’approvisionnement à l’échelle mondiale.

Le rapport recommande aussi de former les travailleurs ruraux, y compris avec la validation des compétences, des brevets d’aptitude et une formation destinée aux entrepreneurs. De plus, les politiques publiques d’emploi devraient lutter contre les préjugés à l’encontre des régions rurales.

Un second volet de mesures a trait à la protection des travailleurs et à la protection sociale: extension de la couverture de la sécurité sociale, respect des politiques de salaire minimum, formalisation des contrats de travail (sous forme écrite), renforcement de l’inspection du travail et promotion des organisations de travailleurs et d’employeurs.

L’étude, qui comprend des données par pays, s’appuie sur les informations statistiques recueillies grâce aux enquêtes auprès des ménages dans 14 pays.