L’OIT avertit: pas de reprise en vue pour les marchés du travail

Le «Rapport sur le travail dans le monde 2012: de meilleurs emplois pour une économie meilleure» de l’OIT affirme que même si la croissance économique montre des signes de reprise dans certaines régions, la situation mondiale de l’emploi est extrêmement inquiétante et ne laisse entrevoir aucun redressement dans un avenir proche, selon l’Organisation internationale du Travail.

Communiqué de presse | 29 avril 2012
GENÈVE (Nouvelles de l’OIT) – Même si la croissance économique montre des signes de reprise dans certaines régions, la situation mondiale de l’emploi est extrêmement inquiétante et ne laisse entrevoir aucun redressement dans un avenir proche, selon l’Organisation internationale du Travail (OIT).

Le «Rapport sur le travail dans le monde 2012: de meilleurs emplois pour une économie meilleure» de l’OIT affirme qu’environ 50 millions d’emplois font toujours défaut par rapport à la situation qui prévalait avant la crise. Il met aussi en garde contre l’amorce d’une nouvelle phase encore plus problématique de la crise mondiale de l’emploi.

Premièrement, cela est dû au fait que de nombreux gouvernements, en particulier dans les économies avancées, ont donné la priorité à une combinaison d’austérité budgétaire et de réforme drastique du marché du travail. Le rapport précise que ces mesures ont des conséquences désastreuses sur les marchés du travail en général et sur la création d’emplois en particulier. Dans la plupart des cas, elles ne sont pas parvenues à réduire les déficits budgétaires.

«La vision étroite qu’ont de nombreux pays de la zone euro de la rigueur budgétaire approfondit la crise de l’emploi et pourrait même déboucher sur une nouvelle récession en Europe», a déclaré Raymond Torres, Directeur de l’Institut international d’études sociales de l’OIT et auteur principal du rapport.

«Les pays qui ont choisi d’investir dans des politiques macroéconomiques privilégiant l’emploi ont fait mieux en matière économique et sociale», a ajouté M. Torres. «Un grand nombre d’entre eux sont aussi devenus plus compétitifs et ont surmonté la crise bien mieux que ceux qui ont suivi la voie de l’austérité. Nous pouvons étudier ce qui s’est passé dans ces pays avec beaucoup d’attention et en tirer les leçons».

Deuxièmement, dans les économies avancées, de nombreux demandeurs d’emploi sont démoralisés et perdent leurs compétences, ce qui affecte leurs chances de trouver un nouvel emploi. Par ailleurs, les petites entreprises ont un accès limité au crédit, ce qui contribue à déprimer leurs investissements et les empêche de créer des emplois. Dans ces pays, en particulier en Europe, le redressement de l’emploi n’est pas attendu avant la fin de 2016 – si les politiques suivent leur cours actuel.

Troisièmement, dans les pays les plus avancés, les nouveaux emplois sont souvent précaires. Les formes d’emploi non conventionnelles sont en augmentation dans 26 des 50 économies pour lesquelles nous disposons de statistiques.

Toutefois, quelques pays ont réussi à créer des emplois tout en améliorant leur qualité, ou au moins l’une de ses deux caractéristiques. Par exemple, au Brésil, en Indonésie et en Uruguay, le taux d’emploi a augmenté tandis que la fréquence du travail informel déclinait. Ce résultat est principalement lié à l’introduction de politiques bien conçues en matière sociale et d’emploi.

Evolution du risque de troubles sociaux entre 2010 et 2011 (échelle de 0 à 1)
Fig 1.14 - Estimations IEES  à partir de Gallup World Poll Data, 2012
Quatrièmement, le climat social s’est détérioré dans de nombreuses régions du monde et de nouveaux troubles sociaux pourraient s’ensuivre. Selon l’Index des troubles sociaux qui figure dans le rapport, 57 des 106 pays analysés montrent un risque accru de troubles sociaux en 2011 par rapport à 2010. Les deux régions qui ont enregistré les plus fortes hausses sont l’Afrique subsaharienne, et le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.

Le rapport affirme que la rigueur budgétaire associée à la déréglementation du marché du travail ne favorisera pas les perspectives d’emploi à court terme. En effet, en général, il n’existe pas de lien clairement établi entre réformes du marché du travail et meilleurs niveaux d’emploi. Qui plus est, certaines réformes récentes – surtout en Europe – ont diminué la stabilité de l’emploi et exacerbé les inégalités tout en échouant à créer des emplois. Cependant, le rapport soutient que si l’on instaure un bon dosage de mesures favorables à l’emploi, alliant fiscalité et hausse des dépenses d’investissements publics et des prestations sociales, environ 2 millions d’emplois pourraient être créés en une année dans les économies avancées.

Autres enseignements principaux du rapport:

  • Depuis 2007, les taux d’emploi n’ont augmenté que dans 6 économies avancées sur 36 (Allemagne, Israël, Luxembourg, Malte et Pologne).
  • Les taux de chômage des jeunes ont augmenté dans quelque 80 pour cent des pays avancés et dans deux tiers des pays en développement.
  • Les taux de pauvreté ont augmenté dans la moitié des économies développées et dans un tiers des économies en développement, tandis que les inégalités se creusaient dans la moitié des pays développés et un quart des économies en développement.
  • En moyenne, plus de 40 pour cent des demandeurs d’emploi des économies avancées sont au chômage depuis un an ou plus. La majorité des économies en développement affiche un recul du chômage de longue durée comme des taux d’inactivité.
  • Le travail à temps partiel contraint s’est accru dans deux tiers des économies avancées. L’emploi temporaire a aussi augmenté dans la majorité de ces économies.
  • La part de l’emploi informel se situe à plus de 40 pour cent dans deux tiers des pays émergents ou en développement.
  • Dans 26 des 40 pays pour lesquels nous disposons de données, la proportion des travailleurs couverts par une convention collective a décliné entre 2000 et 2009.
  • 28 pour cent de la catégorie des pays émergents et en développement ont mis en place des politiques visant à réduire les prestations sociales pendant la crise, contre 65 pour cent dans les économies avancées.
  • Atteignant 19,8 pour cent du PIB en 2010, les investissements mondiaux restent à 3,1 points de pourcentage en deçà de la moyenne historique, avec une tendance baissière plus prononcée dans les économies avancées. Dans toutes les régions, les petites entreprises ont vu leurs investissements affectés de manière disproportionnée par la crise.
Employment and investment changes during 2007–2010, in per cent, selected economies
Fig 4.5 - Note: The Figure shows the per cent change in investment as a share of GDP and the unemployment rate over the period 2007 and 2010. Figures above the axis represent gains in investment and employment, while those below represent losses.

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