Le travail forcé demeure un phénomène généralisé au Myanmar

GENÈVE (Nouvelles du BIT) - Dans un rapport transmis le 21 mai aux membres du Conseil d'administration du Bureau international du Travail (BIT) et rendu public aujourd'hui, Juan Somavia, Directeur général du BIT, déclare que malgré les dénégations officielles du gouvernement, le travail forcé demeure un phénomène généralisé au Myanmar.

Communiqué de presse | 25 mai 1999

GENÈVE (Nouvelles du BIT) - Dans un rapport 1 transmis le 21 mai aux membres du Conseil d'administration du Bureau international du Travail (BIT) et rendu public aujourd'hui, Juan Somavia, Directeur général du BIT, déclare que malgré les dénégations officielles du gouvernement, le travail forcé demeure un phénomène généralisé au Myanmar.

Le rapport sur les mesures prises par le gouvernement du Myanmar pour se conformer à ses obligations en droit international, indique qu'aucune des recommandations formulées l'année dernière par une Commission d'enquête de l'OIT n'ont encore été suivies d'effet.

Bien qu'ayant été interdite d'entrée au Myanmar, la Commission d'enquête, instituée en vertu de la Constitution de l'OIT (174 Etats Membres), a interviewé plus de 250 témoins oculaires et réuni une documentation de plus de 6 000 pages. Dans un rapport 2 paru en août 1998, elle concluait que «l'obligation de supprimer le recours au travail forcé ou obligatoire est violée de manière généralisée et systématique dans la législation nationale et dans la pratique, au mépris de la dignité humaine, de la sécurité, de la santé et des besoins fondamentaux de la population du Myanmar».

Relevant le non-respect flagrant et persistant de la Convention (n o 29) de l'OIT sur le travail forcé à laquelle le Myanmar a adhéré en 1955, la Commission a demandé au pays: a) de rendre sa législation, et en particulier les lois sur les villes et les villages, conforme aux dispositions de la Convention sur le travail forcé, comme l'a promis le gouvernement à plusieurs reprises au cours de ces 30 dernières années; b) de veiller à ce que, dans la pratique, aucune forme de travail forcé ne soit plus imposée par les autorités, militaires en particulier; c) d'appliquer strictement, conformément à l'article 25 de la Convention, les peines prévues en cas d'astreinte au travail forcé ou obligatoire.

Le BIT constate que près d'une année s'est écoulée sans qu'aucune mesure de ce type ne soit prise. Le ministère des Affaires intérieures a bien promulgué le 14 mai 1999 un décret instruisant les autorités locales «de ne pas exercer les pouvoirs que leur confèrent les lois sur les villes et les villages», mais les auteurs du dernier rapport font observer que «le 18 mai 1999, ni la Loi sur les villages ni la Loi sur les villes n'avaient été modifiées et qu'aucun projet de loi proposé ou à l'examen dans ce but n'avait été porté à l'attention du BIT».

Les auteurs font en outre observer que toutes les informations sur la pratique en vigueur émanant d'Etats membres, d'organisations de travailleurs et d'employeurs ainsi que d'autres sources sûres, font état d'un «recours persistant et généralisé au travail forcé par les autorités et en particulier par l'armée». Des milliers de villageois sont toujours astreints à des travaux forcés en tant que porteurs, messagers ou dans les travaux de construction de routes, de voies de chemin de fer, de ponts et d'exploitations agricoles. Parmi les preuves fournies à l'appui de ces informations figurent des centaines d'arrêtés officiels émanant de l'armée ou de l'administration civile. «Comme l'indique la CISL (Confédération internationale des syndicats libres)», peut-on lire dans le rapport, «tous ces arrêtés sont quasiment identiques quant à leur forme, leur style et leur contenu, aux centaines d'autres arrêtés de travail forcé que la Commission d'enquête a examinés et considérés comme authentiques».

Le travail forcé a des conséquences économiques et sociales directes et indirectes. Ainsi, les auteurs du rapport font observer que le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a «reçu des informations selon lesquelles, pour éviter de trop perturber les activités rémunératrices des adultes, les familles se sont résolues à envoyer des enfants aux travaux forcés à la place de ceux-ci».

Enfin, «aucune mesure ne semble avoir été prise (…) pour punir ceux qui ordonnent le travail forcé». Le Gouvernement de l'Union du Myanmar ne fournit aucune indication concernant les «recherches approfondies, les poursuites et la punition des coupables» auxquelles auraient dû donner lieu les allégations de travail forcé, conformément aux dispositions de la Convention (n o 29) sur le travail forcé.

1 Rapport du Directeur général aux membres du Conseil d'administration sur les mesures prises par le gouvernement du Myanmar suite aux recommandations de la Commission d'enquête chargée d'examiner l'observation par le Myanmar de la Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930. Bureau international du Travail, Genève, 21 mai 1999.

2 Travail forcé au Myanmar (Birmanie). Rapport de la Commission d'enquête instituée en vertu de l'Article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner le respect par le Myanmar de la Convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930. Genève, 1998.