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Le Myanmar libère le potentiel des entrepreneurs locaux

Un programme de formation de l’OIT pose les jalons pour aider les petites entreprises, existantes ou nouvelles, à adhérer aux changements économiques et sociaux en profondeur que connaît le pays.

Reportage | 25 avril 2016
Gauch à Droite: Aye Pearl Hlaing, M&E officer of the MSME project; Daw Nang Marlar Tun and Aye Aye Theint, AAT Trainer
YANGON, Myanmar (OIT Info) – Pour Daw Nang Marlar Tun, l’une des leçons qu’elle a tirées du programme de l’OIT «Gérez mieux votre entreprise (GERME)» comporte une connotation personnelle: «J’ai fait les exercices prévus dans le programme pour identifier les questions ou les problèmes auxquels j’étais confrontée au sein de mon entreprise. Il s’agissait pour l’essentiel de problèmes liés au personnel. Lorsque mon formateur de AAT Business Park m’a demandé comment j’avais perçu cet exercice, je me suis rendu compte que certains des problèmes liés au personnel provenaient de moi.»

En 2012, Daw Nang Marlar Tun a créé Dew Drops, une société d’embouteillage d’eau purifiée à Mandalay, qui a connu une forte expansion. Mais à mesure que la société se développait, elle a commencé à sentir la pression imposée par la gestion de tous les détails liés à l’expansion de l’entreprise. «Après la formation, j’ai pu résoudre certains problèmes de personnel en mettant en place une politique des ressources humaines et en procédant à une description des tâches. La formation m’a beaucoup aidée à améliorer la gestion du personnel.»

Si le programme GERME est l’un des plus anciens programmes de développement mis en place par l’OIT, il a été récemment introduit au Myanmar, comme la plupart des interventions internationales. En 2014, le programme de soutien aux entrepreneurs et aux petites et moyennes entreprises de l’OIT, financé par l’Agence norvégienne pour le développement international (Norad) et la coopération suisse (SECO, Secrétariat d’Etat à l’économie), a pu pénétrer dans une économie qui avait été isolée durant des décennies.

La propriétaire de Dew Drops est l’une des 3000 chefs d’entreprises ou futurs entrepreneurs qui ont bénéficié d’une formation commerciale au Myanmar. Si le plan d’introduction se déroule comme prévu, les exemples de réussite comme le sien se multiplieront. Dans d’autres pays en développement, le nombre de bénéficiaires du programme GERME se compte en dizaines ou en centaines de milliers. En Chine, il se compte en millions.

Pranati Mehtha, responsable technique du programme GERME, explique certaines des difficultés de la phase d’introduction: «Lorsque nous avons lancé le projet, nous avons dû partir de zéro; il a fallu former les formateurs et les maîtres de formation, mettre au point le matériel, trouver des institutions partenaires... Nous avons dû tout mettre en place depuis le début. Maintenant que nous avons surmonté cette phase, nous pouvons consacrer davantage de temps et de ressources pour former les bénéficiaires finals. Cette phase intermédiaire étant passée, nous pouvons désormais passer à la vitesse supérieure et atteindre un plus grand nombre de bénéficiaires.»

Le programme GERME est un programme de formation à la gestion d’entreprise, axé principalement sur la création et l’amélioration des petites entreprises. Mis au point dans les années quatre-vingt, il a été traduit dans plus de 40 langues et introduit dans plus de 100 pays. En collaborant avec des organisations partenaires locales, il vise à mettre en place un réseau de formateurs recrutés localement et, à terme, des maîtres de formation («Master Trainers»), qui sont habilités à former d’autres formateurs à enseigner le programme. L’objectif est de dispenser des cours à des tarifs qui reflètent la situation économique locale, les participants et les entreprises clientes étant censés payer au moins une partie des coûts de formation.

Merten Sievers, le coordinateur des unités de développement des chaînes de valeur et de formation professionnelle pour les PME, s’est senti encouragé par l’accueil qu’a reçu le programme au Myanmar: «Les personnes qui ont participé au programme ont réussi à développer une marque commerciale et à créer le buzz autour du programme GERME, condition indispensable pour que les petits entrepreneurs, qui ont de la peine à débourser de l’argent – et pour cause –, participent au coût de la formation, ce qui est la clé pour assurer la viabilité financière du programme à long terme.

L’un de ces entrepreneurs s’appelle U Chan Myae Htun, directeur exécutif de Amazing Myanmar Scenery Travel and Tours. Il a suivi six des modules de formation du programme GERME avec l’Association des professionnels de l’hôtellerie du Myanmar. Pour lui, les cours sur la gestion des dossiers l’ont aidé à mieux comprendre les coûts réels et les bénéfices potentiels des circuits panoramiques: «L’estimation des coûts est très importante pour notre entreprise; nous devons calculer tous les coûts de chaque forfait de voyage pour pouvoir fixer des prix de vente raisonnables. Pour connaître notre bénéfice net, nous n’avons qu’à déduire les coûts directs de notre revenu. Avant de suivre la formation, nous appelions cela notre bénéfice net, mais c’était faux. Depuis que j’ai suivi le module du programme GERME sur l’évaluation des coûts, je sais calculer le bénéfice net réel d’un forfait touristique, y compris, par exemple, les frais généraux et administratifs.

Au Myanmar, il est particulièrement difficile de trouver les partenaires appropriés sur le terrain pour dispenser la formation GERME et tirer tous les avantages qu’elle offre.

«Il n’y avait pratiquement aucun fournisseur de services aux entreprises qui dispensait régulièrement des cours de formation à la gestion d’entreprise», explique Merten Sievers. «Cela s’explique en partie par le fait que le Myanmar est resté isolé pendant si longtemps. Il n’est pas possible de comparer ce qui se passe sur le terrain là-bas avec ce qui se passe dans tout autre pays en développement ayant un revenu par habitant similaire.»

Grâce à une équipe de consultants nationaux et internationaux dirigée par Michel Jamar, conseiller technique principal, le programme GERME a identifié un certain nombre d’institutions locales créées au cours des dernières années pour répondre aux besoins d’étudiants désireux de poursuivre leurs études à l’étranger. Dans ce contexte, les consultants du GERME ont formé neuf maîtres de formation et plus de 200 formateurs.

L’une de ces formatrices s’appelle Mya Myo Chel, de l’Ecole de commerce PS à Yangon. Elle explique que ses étudiants ont apprécié la formation, même si certaines des idées présentées étaient difficiles à accepter: «Mes étudiants ne voulaient pas faire d’étude de marché. Maintenant, ils se rendent compte des avantages que cela présente pour créer leur propre entreprise.»

Parmi les participants, Yu Lin, responsable des ventes chez Aung Moe Khine Soft Shell Crab, estime que non seulement son entreprise, mais aussi l’ensemble du pays profitera des avantages de la formation GERME. «Quand j’ai terminé cette formation, j’ai discuté avec mon personnel de notre travail et de la façon de l’améliorer et, désormais, nous faisons les choses différemment. Je crois que ce type de cours est pleinement nécessaire dans notre pays. C’est une bonne chose pour nous autres habitants du Myanmar.»
Michel Jamar partage ce point de vue: «Il est encourageant de voir ce que le programme GERME peut apporter au nouveau Myanmar. Formateurs et entrepreneurs rencontrent des personnes qui sont attachées aux mêmes principes, échangent des idées et établissent un climat de confiance. Ils peuvent discuter des difficultés que rencontrent leurs entreprises, et le programme GERME leur offre des solutions simples. Tout cela n’existait pas auparavant au Myanmar. Le programme GERME est arrivé au bon moment au bon endroit.»