Briser les entraves à l’égalité entre hommes et femmes: la quête d’une jeune femme dans un métier d’hommes

Un milliard de personnes vont atteindre l’âge de travailler au cours de la prochaine décennie – la génération la mieux éduquée et la mieux formée de jeunes gens, de jeunes femmes en particulier, qui ait jamais existé. Mais en dépit des grands efforts déployés par les gouvernements et les partenaires sociaux, la crise du chômage des jeunes s’amplifie, et il faut aussi palier les entraves liées au genre. Les jeunes gens, en particulier les femmes des pays en développement, ont besoin d’un accès égal à la formation et à l’emploi. Ce qui demande avant tout de la détermination, comme le montre l’histoire de Paula.

Article | 12 août 2008

BELO HORIZONTE, Brésil (BIT en ligne) – Comme de nombreux enfants d’Amérique Latine, Paula Correa n’a pas eu une enfance facile. Son père, alcoolique, a abandonné la famille quand elle avait sept ans et n’est jamais revenu. Quelques années plus tard, elle a perdu son grand-père, son principal soutien de famille.

«Ma mère avait un emploi à plein temps, elle vendait des chaussures. Elle me laissait à la maison, pour que je m’occupe de mon frère et des tâches ménagères», raconte Paula. «De temps en temps, je faisais aussi des petits boulots pour gagner un peu d’argent en plus.»

Les années ont passé et Paula a vu s’évanouir ses chances d’acquérir une éducation formelle. Son frère est d’abord allé à l’école, mais il a ensuite abandonné et a pris deux emplois pour contribuer aux revenus de la famille.

Paula rêvait d’aider sa mère et son frère mais elle ne savait tout simplement pas comment.

Un jour, quand elle avait quinze ans, elle se baladait dans les rues de sa ville natale, Belo Horizonte, dans le Sud-est du Brésil, quand elle a vu une affiche proposant des cours gratuits de formation en mécanique automobile. Elle n’avait jamais imaginé que cette affiche allait changer sa vie.

C’était une affiche du Service national d’apprentissage professionnel (SENAI), le plus grand centre de formation professionnelle d’Amérique Latine, membre du Centre interaméricain de recherche et de documentation sur la formation professionnelle de l’Organisation internationale du Travail (OIT-CINTERFOR).

Le SENAI et l’OIT-CINTERFOR ont joint leurs forces à Belo Horizonte et dans d’autres villes brésiliennes pour promouvoir l’emploi des jeunes et aider des personnes comme Paula qui rêvent d’aider leur famille tout en améliorant leur propre vie.

Mais Paula a rapidement découvert que trouver un cours qui lui plaise n’était que le début d’un long parcours du combattant. Elle a dû s’inscrire sans avertir sa mère, qui voulait qu’elle reste à la maison; elle devait parcourir trois kilomètres chaque jour pour se rendre en classe, une marche qu’elle a souvent effectuée le ventre vide.

«C’était très dur. J’ai suivi cinq cours pendant une période de cinq mois et ai finalement été sélectionnée pour devenir stagiaire. Ce n’est qu’à ce moment-là que j’ai réalisé que tout cela en valait a peine», explique-t-elle.

Trouver un travail en tant que mécanicien automobile – une profession dominée par les hommes – n’a pas été simple non plus. «Je faisais l’objet de discriminations en tant que femme. J’ai même perdu un fiancé à cause de ma profession», se souvient Paula, mettant en lumière les difficultés engendrées par les stéréotypes sexuels – l’un des nombreux problèmes rencontrés par les femmes qui travaillent.

«L’un des principaux défis de l’emploi est de s’attaquer à la division du travail basée sur le sexe entre emplois traditionnellement dits «féminins» ou «masculins», et de briser les entraves liées au genre en ouvrant les professions aux deux sexes», déclare Ernesto Abdala, expert du BIT sur la formation à l’emploi des jeunes en Amérique Latine. «Les jeunes femmes comme Paula, en particulier dans les pays en développement, sont rarement en mesure de profiter des possibilités de formation et d’emploi en raison des obstacles à l’entrée sur le marché, à la sélection discriminatoire et aux stéréotypes sexuels», ajoute-t-il.

L’emploi des jeunes figure en bonne place sur l’agenda de la communauté internationale; il a généré une réponse globale à travers le Réseau OIT/ONU/Banque mondiale pour l’emploi des jeunes et le propre Programme de l’OIT en faveur de l’emploi des jeunes. Le Bureau pour l’égalité des genres du BIT a également lancé une campagne d’une année entière pour mettre en lumière l’importance de l’égalité hommes-femmes dans le monde du travail.

Cependant, beaucoup reste à faire.

«Environ un milliard de personnes vont atteindre l’âge de travailler au cours de la prochaine décennie. Et malgré tous nos efforts, les jeunes gens sont encore deux à trois fois plus menacés par le chômage que les adultes, et la tendance est particulièrement marquée chez les jeunes femmes. Avec des programmes pour l’emploi des jeunes tels que ceux mis en œuvre par l’OIT et le SENAI, nous avançons dans la bonne direction», affirme José Manuel Salazar-Xirinachs, Directeur exécutif du Secteur Emploi du BIT.

«L’éducation est sans aucun doute le bien le plus précieux. Elle transforme notre vie sociale. Nous devons promouvoir l’éducation, car c’est un investissement qui engendre d’énormes bénéfices», selon Alexandre Magno Leão dos Santos, directeur du SENAI de Minas Gerais.

Paula peut en attester. Après avoir travaillé comme mécanicienne pour plusieurs sociétés, elle est retournée au SENAI, cette fois en tant qu’instructrice à temps plein et lauréate de deux médailles d’or aux Olympiades du Savoir. Elle est maintenant mariée et mère d’un bébé d’un an. «La seule chose qui me manque, dit elle, c’est d’avoir ma propre maison.» Mais elle a aujourd’hui les moyens de poursuivre son rêve.