MAGUINDANAO, Philippines (OIT Infos) – Les cours ont commencé mais il manque la moitié des élèves. Dehors, dans la cour de l’école primaire de Maguindanao, il y a une longue queue formée d’enfants âgés de 5 à 12 ans qui mène à une simple borne-fontaine. Chacun d’eux tient à la main un récipient en plastique ou une bouteille d’eau. Le chemin qui y mène est boueux et glissant en raison de l’eau qui s’échappe des seaux beaucoup trop lourds à porter pour des enfants.

Il s’agit pourtant de la seule source en eau à leur disposition pour se laver les mains et vider les toilettes.

«Tous les jours, je dois aller chercher de l’eau. Je suis fatigué. Parfois, je n’ai même pas le temps d’avaler quelque chose à manger durant la pause parce que je dois aller chercher de l’eau», explique Charles Tarala, un garçon âgé de 12 ans.

«Je ne peux pas commencer ma leçon de sciences car mes élèves doivent aller chercher de l’eau le matin, ainsi que l’après-midi pendant la récréation», confie l’enseignante, Larlyn Alquisar, «Nous n’avons pas l’eau courante dans la classe ou dans les toilettes de l’école et nous ne disposons que d’un seul point d’eau pour toute l’école.»

L’école primaire est située dans la région autonome de Bangsamoro dans le Mindanao musulman (BARMM) au sud des Philippines. Ella a été le théâtre d’un conflit depuis des dizaines d’années. Créée en février 2019, la région BARMM est l’une des plus pauvres du pays et elle doit faire face à de nombreux défis, y compris pour bénéficier d’un accès fiable et sûr à l’eau.

Il est déjà arrivé que l’école se retrouve sans eau, empêchant ainsi les élèves d’utiliser les toilettes. Mais le déficit en matière d’assainissement affecte aussi l’école sous d’autres formes.

«Par le passé, nous cultivions des légumes dans le potager de l’école pour les donner à nos élèves afin de compléter leur panier repas. Mais à présent, il est impossible de cultiver des légumes à l’école et, de toute façon, nous n’avons pas assez d’eau pour faire la cuisine. Le manque d’eau touche non seulement l’établissement scolaire mais aussi les populations environnantes qui dépendent de notre réserve d’eau», explique Mme Alquisar.

L’OIT et le gouvernement du Japon ont créé un partenariat visant à améliorer les services d’eau et d’assainissement dans la région. Le projet «Amélioration des capacités en matière d’équipement et de gestion de l’approvisionnement en eau pour établir la paix à Mindanao» a pour but de mobiliser les populations locales pour le développement, la construction, la gestion et la maintenance des installations en eau et assainissement.

Les combattants démobilisés, les jeunes en situation de vulnérabilité, les populations autochtones, les personnes déplacées ainsi que celles qui restent vulnérables en raison du conflit font partie de celles et ceux qui recevront une formation en entreprenariat local. Ce sont ainsi 1800 emplois qui seront créés et près de 12 000 foyers, de même que des établissements scolaires comme l’école primaire, qui bénéficieront d’un meilleur approvisionnement en eau.

«Notre action dans la région autonome de Bangsamoro a pour objectif de créer des emplois tout en faisant la promotion du travail décent et en réduisant la pauvreté. L’accès fiable et sûr à l’eau constitue un besoin de base essentiel pour disposer d’une main-d’œuvre à la fois en bonne santé, éduquée et productive. Ceci est aussi indispensable pour la paix et la sécurité», affirme Khalid Hassan, directeur du bureau de pays de l’OIT aux Philippines.

Le projet s’appuie sur le travail effectué par l’OIT aux Philippines dans les domaines de la sortie de crise et de la prévention, du développement des compétences et de la création d’emplois, notamment pour les personnes les plus vulnérables. Ce travail s’aligne sur l’Objectif 6 des Objectifs de développement durable de l’ONU qui garantit l’accès à tous à l’eau et à l’assainissement, sur l’Objectif 8 relatif au travail décent et au développement économique, et sur l’Objectif 16 qui concerne la paix, la justice et les institutions efficaces.