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En première ligne de la sécurité incendie: les leçons des pompiers bangladais

A l’approche de la Journée internationale de la sécurité et la santé au travail le 28 avril, les pompiers bangladais ont un message à adresser à tous les propriétaires d’usines.

Reportage | Bangladesh | 1 avril 2016
Des pompiers du Bangladesh lors d’une formation financée par l’OIT consacrée à la sécurité-incendie dans les ateliers de confection
DHAKA, Bangladesh (OIT Info) – «L’incendie de Tazreen a été très difficile», se souvient Mohammad Shams Arman, principal responsable de la caserne, à propos de l’incendie qui avait éclaté à Dhaka en 2012, tuant 112 personnes et en blessant beaucoup d’autres. Ce fut un rappel à l’ordre brutal du risque d’incendie présent dans les usines de prêt-à-porter.

«Nous avons reçu l’information tardivement, il y avait un terrible manque d’eau et le seul accès à l’usine était une route étroite à sens unique», raconte Shams Arman.

Moins de six mois plus tard, le Rana Plaza, un immeuble abritant cinq ateliers de confection, s’effondrait, tuant 1 136 personnes. La tragédie a mis en lumière de nouveaux défis à relever pour le service incendie: ceux liés aux problèmes de structures.

«L’effondrement de l’immeuble du Rana Plaza posait problème mais pour des raisons différentes, principalement des équipements de secours insuffisants et une mauvaise gestion de la foule. Nous avons directement sauvé la vie de plus de 250 personnes et avons contribué à en secourir beaucoup d’autres. Nous aidons maintenant les propriétaires d’usine à faire en sorte que de tels accidents ne se reproduisent pas», ajoute M. Arman.

Cette nouvelle mission exige des services incendie du Bangladesh de visiter les usines presque chaque jour, d’inspecter les bâtiments et de dispenser des formations.

Des pompiers bangladais se rendent dans les usines et inspectent les bâtiments
Pour l’aider à assumer cette tâche de spécialiste, M. Arman a participé à une formation soutenue par l’OIT, centrée sur la sécurité incendie et des bâtiments dans les usines textile. Quarante inspecteurs ont été formés et 16 ont acquis des compétences supplémentaires afin de pouvoir former les autres. Cette formation a été donnée dans le cadre du projet de l’OIT (Improving Fire and Building Safety project) visant à améliorer la prévention des incendies et la sécurisation des bâtiments, financé par le ministère du Travail des Etats-Unis.

«La formation dispensée par l’OIT était de grande qualité. Elle nous a dotés des compétences techniques pour détecter les problèmes dans les contextes industriels, qui se caractérisent par des risques multiples, différents de ceux que l’on trouve habituellement chez les particuliers. Les thèmes qui nous ont paru les plus utiles concernaient les droits des travailleurs, la conception des bâtiments industriels, les systèmes de séparation et de ségrégation et les matériaux dangereux que l’on trouve dans les usines de prêt-à-porter», ajoute M. Arman.

«Avant la formation, nous ne connaissions pas les différentes structures des bâtimenfts industriels, les forces et les faiblesses de chaque conception. Nous ne savions pas faire les calculs des taux d’occupation qui sont essentiels vu le nombre de personnes présentes dans les ateliers. Nous apprenons beaucoup, ce qui est utile car les usines évoluent beaucoup. De nouvelles choses sont installées, des portes coupe-feu et des systèmes de détection précoce. La plupart des propriétaires sont favorables, ils veulent que leurs usines soient sures et nous pouvons leur faire comprendre que la sécurité est aussi une bonne chose pour les affaires.»

«Depuis que nous avons suivi la formation, nous avons apporté nos compétences dans les casernes des sept divisions du Bangladesh», ajoute M. Arman. «Au cours des deux dernières années, j’ai inspecté plus de 600 usines textile.»

Les initiatives du gouvernement du Bangladesh, du secteur, des syndicats et des organisations de développement font vraiment bouger les choses.»

Maurice Brooks
«Nous avons élaboré notre propre module de formation et 16 d’entre nous ont formé une centaine d’inspecteurs supplémentaires, ce qui porte le total des inspecteurs formés au risque d’incendie à 140. Ainsi, plus de la moitié de nos effectifs d’inspection seront maintenant professionnellement formés au contrôle des bâtiments industriels. Nous participons à un examen hebdomadaire pour vérifier que nous n’oublions pas ce que nous avons appris.»

«Les initiatives du gouvernement du Bangladesh, du secteur, des syndicats et des organisations de développement font vraiment bouger les choses», déclare Maurice Brooks, coordinateur du projet de l’OIT concernant la sécurité incendie et des bâtiments. «La priorité accordée à la sensibilisation et à la prévention des incendies, associées au renforcement des capacités des services incendie, s’est déjà traduite par une diminution du nombre d’incendies, de pertes humaines et matérielles. C’est non seulement bon pour l’industrie textile mais également pour d’autres secteurs, comme pour la société dans son ensemble.»

La formation couvrait aussi les risques inhérents aux usines en matière de sécurité et explorait comment collaborer avec la direction de l’usine pour les minimiser.

«Si je pouvais donner un conseil à tous les propriétaires d’usine, ce serait le suivant», conclut M. Arman: «Vous pouvez réduire le risque d’incendie de plus de 90 pour cent en prenant cinq mesures simples: ne jamais bloquer les issues, adopter une approche à base d’exercices d’incendie, disposer de systèmes de stockage appropriés, utiliser des équipements électriques de bonne qualité et assurer une maintenance régulière.»