Année internationale des coopératives

Soigner les pharmacies

Tandis que l’Année internationale des coopératives touche à sa fin, OIT Info s’intéresse à la façon dont les coopératives turques offrent un accès plus facile et plus sûr aux médicaments.

Reportage | 12 novembre 2012
GENÈVE (OIT Info) – FatihBaşer, 35 ans, travaille comme traducteur à Istanbul. Comme c’est souvent le cas en Turquie, il ne lui a pas toujours été facile de se procurer régulièrement des médicaments à un prix convenable.

«Dans notre pays, on court le risque que les produits vendus sur les marchés soient des faux, a-t-il confié à OIT Info. Le prix des médicaments et des autres produits a également augmenté, ce qui ne fait qu’aggraver les choses.»

M. Başer a récemment trouvé une petite pharmacie qui propose des produits de qualité à un prix décent. L’officine appartient à un réseau de petites pharmacies qui contribue à faire évoluer l’industrie pharmaceutique turque de manière substantielle.

«J’achète mes médicaments ici depuis cinq ans, essentiellement parce que je fais confiance au pharmacien. Si je viens à la pharmacie coopérative, je sais que j’aurai le produit original, pas une contrefaçon, et à un prix qui reste abordable», précise-t-il.

Abdullah Özyiğit dirige l’Association des coopératives de pharmaciens en Turquie
Abdullah Özyiğit est à la tête de l’Association des coopératives de pharmaciens en Turquie. Originaire de Mersin, sur les rives de la Méditerranée, ce pharmacien de 45 ans est fier de ce qui a été accompli depuis la fondation de l’association en 1989.

«Nous disposons maintenant d’un réseau de 13 000 pharmacies dans l’ensemble de la Turquie qui emploient 40 000 personnes. Notre réputation est liée à la qualité de notre service, en particulier pour la délivrance de médicaments en urgence», explique-t-il.

«En outre, nos pharmaciens sont tous des professionnels confirmés, et les gens apprécient de pouvoir demander des conseils avisés et éviter ainsi d’acheter des produits qui peuvent être très dangereux pour leur santé.» Un commerce qui évolue avec son temps

A la fin des années 1970 en Turquie, les approvisionnements en médicaments dépendaient en grande partie des importations. Les fournisseurs ne voulaient faire affaire qu’avec les pharmacies capables de payer en devises étrangères qui faisaient défaut. «De nombreuses pharmacies ont fermé boutique à cette époque», se souvient M. Özyiğit. C’est ce qui a mené à la création de l’Association des coopératives de pharmaciens. Les petites officines peuvent désormais s’associer à d’autres et bénéficier d’un pouvoir d’achat collectif.

Comme les coopératives ne sont pas guidées par le profit, une partie des gains est redistribuée aux employés qui bénéficient d’un ensemble de prestations sociales bien supérieur à ce qu’obtiennent généralement les employés turcs. L’Association et ses coopératives ont été mises à l’épreuve pendant la crise économique mondiale qui a frappé assez durement la Turquie, mais elles s’en sont plutôt bien sorties.

«Nous avons été affectés par la crise dans la mesure où les clients achetaient moins mais nous avons réussi à conserver notre part de marché, notamment parce que nous avons dispensé une formation de gestion financière à nos membres pour les aider à faire tourner leurs affaires… Dans certains cas, nous leur avons également suggéré de vendre d’autres produits pour maintenir leur activité», déclare M. Özyiğit.

Les coopératives ont aussi su réduire de manière drastique lafacture énergétique de leurs adhérents en négociant d’importants rabais sur le prix du fuel. Une fois encore, cela a été possible grâce à leur pouvoir d’achat collectif.

Aller plus loin

M. Özyiğit pense qu’il faut faire connaître davantage les coopératives en Turquie.

«Les coopératives sont un excellent modèle qui devrait être davantage promu par le gouvernement», ajoute-t-il. «Si tel était le cas, alors les coopératives pourraient se développer dans d’autres domaines comme l’agriculture, la santé, l’éducation et l’assurance.»

On recense près de 85 000 coopératives en Turquie pour un total de 8,1 millions d’adhérents.

«L’exemple des coopératives de pharmaciens en Turquie pourrait donner des idées à d’autres pays qui se battent encore pour offrir à leur population des médicaments sûrs et accessibles», explique Simel Esim, qui dirige le Département des coopératives à l’Organisation internationale du Travail (OIT).

«L’Année internationale des coopératives qui se terminera les 19 et 20 novembre à New York a donné au monde entier l’occasion de mettre en lumière le travail effectué par des millions de coopératives. Ce sont des institutions qui peuvent faire ressortir ce qu’il y a de meilleur en l’homme. Par ces temps de crise et de changement, elles peuvent faire une différence considérable dans la vie des gens», conclut-elle.

Directives de l’OIT pour promouvoir les coopératives
  • La recommandation n° 193 sur la promotion des coopératives, (2002) donne une orientation sur la politique et la législation en matière de coopératives et souligne la nécessité d’instaurer des conditions de concurrence loyale entre les coopératives et les autres entreprises. Plus de 70 pays ont révisé leur législation sur les coopératives depuis l’adoption de la recommandation il y a 10 ans, conformément à ses dispositions.
  • La deuxième édition du «Guide de législation coopérative» est un outil utile pour promouvoir les coopératives parce qu’il s’appuiesur les dernières informations disponibles concernant les législations. La troisième édition sera bientôt disponible.