Journée internationale des personnes handicapées

Aider les femmes et les hommes handicapés à développer leur potentiel

Le 3 décembre est célébré comme la Journée internationale des personnes handicapées. Cette année, le thème est l’émancipation des personnes handicapées et de leurs communautés. Emanuela Pozzan, coordinateur sous-régional de l’OIT pour le handicap en Asie de l’Est, s’intéresse à une Vietnamienne dont le travail dans ce domaine est reconnu à l’échelle internationale.

Article | 2 décembre 2009

Ho Chi Minh Ville, Viet Nam (BIT en ligne) – Enfant, Vo Thi Hoang Yen, a été affectée par un syndrome post-polio. Elle ne peut marcher que sur de courtes distances, avec des béquilles, et a besoin d’une chaise roulante pour effectuer de plus longs déplacements. Pourtant, sa mobilité réduite ne l’a pas empêchée de faire bien davantage que d’autres personnes non handicapées et, en novembre 2009, elle a reçu le Prix du Mémorial Kazuo Itoga pour l’extraordinaire action qu’elle a menée en faveur des droits des personnes handicapées.

Mme Vo a été désignée pour recevoir ce prix en reconnaissance d’une vie entière vouée à promouvoir l’insertion des hommes et des femmes handicapés à tous les niveaux de la société. Aujourd’hui, elle est lectrice à l’université ouverte d’Ho Chi Minh Ville et dirige le Centre de ressources et de développement sur le handicap, mais elle a dû surmonter de nombreux obstacles avant d’en arriver là.

Bien qu’elle ait réussi son examen d’entrée à la faculté d’économie d’Ho Chi Minh Ville, son admission lui a été refusée en raison de son handicap physique. Après avoir plaidé sa cause, elle a finalement été acceptée mais on lui a dit qu’on ne pouvait lui garantir un emploi public après son diplôme, ce qui est normalement le cas pour les diplômés.

En 1990, après avoir obtenu son diplôme, Mme Vo s’est vu offrir un emploi de chef comptable dans une entreprise, mais elle a été rejetée dès la révélation de son handicap physique. Ne parvenant pas à trouver un emploi classique, Mme Vo a donc décidé de se former comme tutrice d’anglais, obtenant une licence d’enseignement de l’anglais à la faculté des sciences de l’éducation en 1999.

En 2001, elle s’est vu attribuer une bourse d’études de la Fondation Ford pour étudier à l’Université du Kansas, où elle a obtenu une maîtrise en développement humain en 2004. De retour au Viet Nam, avec le soutien de la Fondation Ford, elle a mis sur pied un Centre de ressources et de développement sur le handicap en 2005. Ce qui avait été à l’origine conçu comme un projet pilote de deux ans existe toujours.

«En 2000, j’ai essayé de chercher de l’information pour les personnes handicapées, mais je n’ai pas pu en trouver», a déploré Mme Vo. «C’était donc mon rêve de créer un centre d’information pour les personnes porteuses de handicap.»

Le projet vise à sensibiliser le grand public et les personnes handicapées à leurs droits et leurs aptitudes et à aider les personnes handicapées à développer leurs compétences.

On dénombre environ 470 millions de personnes handicapées en âge de travailler dans le monde, dont 238 millions en Asie. Le Viet Nam en compte plus de 5 millions, soit 6 pour cent de sa population.

Alors qu’un grand nombre de personnes handicapées parviennent à travailler et sont pleinement intégrées dans la société, un nombre disproportionné d’entre elles sont confrontées au chômage, à de faibles rémunérations et à la pauvreté. Elles sont souvent reléguées dans des emplois informels, peu qualifiés, mal rémunérés et avec peu de protection sociale et juridique, ou exclues du marché du travail officiel. De nombreux autres handicapés sont sous-employés, ce qui nuit à leur confiance en eux et peut les conduire à se décourager et à abandonner.

En excluant les personnes handicapées des possibilités de travail décent, les sociétés subissent l’équivalent de 1,37 à 1,94 milliard de dollars en pertes annuelles de PNB (Note 1). Offrir du travail décent aux personnes handicapées relève donc du bon sens aussi bien social qu’économique.

Parmi les personnes handicapées, les hommes ont deux fois plus de chance d’avoir un emploi que les femmes. Qui plus est, le handicap a un impact sur le taux d’activité de nombreuses femmes parce que, dans la plupart des pays, ce sont elles qui assument l’essentiel des responsabilités familiales.

Si peu de recherches ont été effectuées sur les femmes handicapées en Asie, il existe néanmoins de véritables preuves des discriminations qu’elles subissent – pour accéder à l’éducation primaire et supérieure, aux soins médicaux, à l’information, à la formation qualifiante, au crédit, à l’emploi et au travail décent. Les femmes handicapées mènent une vie à part; l’ostracisme et la discrimination freinent leur pleine et réelle participation à la société sur un pied d’égalité. Elles sont souvent confinées dans des centres qui proposent des qualifications traditionnelles de seconde catégorie. En zone rurale, les croyances traditionnelles et le manque d’offres d’emploi aggravent encore la ségrégation.

«L’expérience montre que, lorsque les femmes et les hommes handicapés trouvent des emplois adaptés à leurs qualifications, leurs aptitudes et leurs intérêts, ils peuvent apporter une contribution précieuse au monde du travail», déclare Bill Salter, Directeur du Bureau sous-régional de l’OIT pour l’Asie de l’Est à Bangkok.

Le Projet INCLUDE de l’OIT (intitulé qui recouvre la «promotion du travail décent pour les personnes handicapées grâce à un service d’appui à l’intégration du handicap») est consacré au plaidoyer et à la promotion du travail décent pour les personnes porteuses de handicap. INCLUDE aide les pays à passer d’une approche fondée sur l’élaboration de politiques et de services dédiés spécifiquement aux personnes handicapées à une approche qui met l’accent sur leur pleine participation et intégration dans la société. Il soutient également la participation des femmes handicapées au développement d’entreprises. En Asie, INCLUDE, qui est financé par Irish Aid, la coopération irlandaise, a récemment lancé des programmes au Cambodge, en République démocratique populaire lao et au Viet Nam.

INCLUDE est mis en œuvre en collaboration avec le programme de l’OIT pour le développement de l’esprit d’entreprise chez les femmes et l’égalité entre les sexes (WEDGE).


Note 1 – Robert L. Metts, Disability Issues, Trends and Recommendations for the World Bank, Banque mondiale, Washington, États-Unis, 2000.