Accord entre le Conseil fédéral suisse et l'Organisation internationale du Travail pour régler le statut juridique de cette organisation en Suisse

Liberté d'action de l'O.I.T.

Article 1

Le Conseil fédéral suisse garantit à l'Organisation internationale du Travail l'indépendance et la liberté d'action qui lui appartiennent en sa qualité d'institution internationale.

Personnalité de l'O.I.T.

Article 2

Le Conseil fédéral suisse reconnaît la personnalité internationale et la capacité juridique en Suisse de l'Organisation internationale du Travail.

Immunités de l'O.I.T.

Article 3

L'Organisation internationale du Travail est au bénéfice de l'ensemble des immunités connues, en droit des gens, sous le nom d'immunités diplomatiques.

Exterritorialité es terrains et locaux

Article 4

Le Conseil fédéral suisse reconnaît notamment l'exterritorialité des terrains et locaux de l'Organisation internationale du Travail et de tous locaux occupés par elle à l'occasion de la Conférence internationale du Travail ou de toute autre réunion convoquée en Suisse par l'Organisation internationale du Travail.

Liberté de réunion

Article 5

Le Conseil fédéral suisse reconnaît à l'Organisation internationale du Travail et à ses Membres, dans leurs rapports avec elle, une liberté de réunion absolue comportant la liberté de discussion et de décision.

Immunité de juridiction et immunité à l'égard d'autres mesures

Article 6

1. L'Organisation internationale du Travail bénéficie, pour elle-même, ses propriétés et ses biens, quel que soit le lieu où ils se trouvent ou la personne qui les détient, de l'immunité à l'égard de toute forme d'action judiciaire, sauf dans la mesure où cette immunité a été formellement levée par le Directeur du Bureau international du Travail ou son représentant régulièrement autorisé.

2. Les propriétés et biens de l'Organisation internationale du Travail, quel que soit le lieu où ils se trouvent ou la personne qui les détient, sont au bénéfice de l'immunité à l'égard de toute mesure de perquisition, réquisition, confiscation, expropriation et de toute autre forme de saisie ou d'ingérence de toute autorité publique de quelque nature que ce soit.

Inviolabilité des terrains et locaux

Article 7

Les terrains et locaux de l'Organisation internationale du Travail sont inviolables. Nul agent de l'autorité publique suisse ne peut y pénétrer sans le consentement exprès de l'Organisation internationale du Travail.

Inviolabilité des archives

Article 8

Les archives de l'Organisation internationale du Travail et, en général, tous les documents qui lui appartiennent ou se trouvent en sa possession sont inviolables.

Publications

Article 9

L'exportation et l'importation des publications de l'Organisation internationale du Travail ne seront soumises à aucune mesure restrictive.

Régime fiscal de l'OIT

Article 10

L'Organisation internationale du Travail est exonérée des impôts directs et indirects, fédéraux, cantonaux et communaux, sur les immeubles dont elle est propriétaire et qui sont occupés par ses services, de même que sur ses biens mobiliers, étant entendu qu'elle ne sollicite pas l'exemption de taxes auxquelles correspond une prestation de l'autorité publique.

Libre disposition des fonds

Article 11

1. L'Organisation internationale du Travail peut recevoir et détenir tous fonds quelconques, toutes devises, numéraires et autres valeurs mobilières, et en disposer librement tant à l'intérieur de la Suisse que dans ses relations avec l'étranger.

2. Le présent article est applicable aux Etats Membres dans leurs relations avec l'Organisation internationale du Travail.

Communications officielles

Article 12

L'Organisation internationale du Travail bénéficie, dans ses communications officielles, d'un traitement au moins aussi favorable que celui assuré aux missions diplomatiques en Suisse:

a) pour toutes priorités de communications et de moyens de transport;

b) pour les tarifs postaux, télégraphiques, radiotélégraphiques, téléphoniques, radiotéléphoniques, téléphotographiques, etc.

Exemption de censure

Article 13

Aucune censure ne peut être exercée à l'égard des communications officielles dûment authentifiées de l'Organisation internationale du Travail, quelle que soit la voie de communication employée.

Liberté d'accès et de séjour

Article 14

1. Les autorités suisses prendront toutes mesures utiles pour faciliter l'entrée sur le territoire suisse, la sortie de ce territoire et le séjour à toutes les personnes appelées, en qualité officielle, auprès de l'Organisation internationale du Travail, soit:

a) les représentants des Etats Membres, quels que soient les rapports existant entre la Suisse et ces Etats;

b) les membres du Conseil d'administration du Bureau international du Travail, quelle que soit leur nationalité;

c) les agents et les fonctionnaires de l'Organisation internationale du Travail;

d) les personnes, quelle que soit leur nationalité, appelées par l'Organisation internationale du Travail.

2. Toutes mesures concernant la police des étrangers et visant à restreindre l'entrée en Suisse des étrangers ou à contrôler les conditions de leur séjour seront sans application à l'égard des personnes visées au présent article.

Immunités des représentants des Membres et du Conseil d'administration

Article 15

Les représentants des Membres de l'Organisation internationale du Travail et les membres du Conseil d'administration appelés en Suisse par leurs fonctions y jouissent des privilèges et immunités suivantes:

a) inviolabilité de la personne, du lieu de résidence et de tous objets quelconques appartenant à l'intéressé;

b) immunité de juridiction;

c) immunité fiscale correspondant à celle qui est accordée aux agents diplomatiques conformément à l'usage international admis en Suisse;

d) facilités douanières correspondant à celles qui sont accordées aux agents diplomatiques conformément à l'usage international admis en Suisse;

e) droit d'user de chiffres dans leurs communications officielles et de recevoir ou d'envoyer des documents ou de la correspondance par l'intermédiaire de courriers ou par valises diplomatiques dûment scellées;

f) exemption des restrictions à la liberté de change dans des conditions identiques à celles accordées aux agents diplomatiques des gouvernements étrangers en mission temporaire.

Immunités diplomatiques du Directeur et de certains fonctionnaires

Article 16

Le Directeur du Bureau international du Travail et les fonctionnaires des catégories désignées par lui et agréées par le Conseil fédéral suisse, jouissent des privilèges, immunités, exemptions et facilités reconnus aux agents diplomatiques conformément au droit des gens et aux usages internationaux.

Immunités et facilités accordées à tous les fonctionnaires

Article 17

Tous les fonctionnaires du Bureau international du Travail, quelle que soit leur nationalité, sont au bénéfice des immunités et facilités suivantes:

a) exemption de toute juridiction pour les actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions;

b) exonération de tous impôts fédéraux, cantonaux et communaux sur les traitements, émoluments et indemnités qui leur sont versés par l'Organisation internationale du Travail.

Exemptions et facilités accordées aux fonctionnaires non suisses

Article 18

Les fonctionnaires du Bureau international du Travail qui n'ont pas la nationalité suisse bénéficient des exemptions et facilités énumérées dans l'arrangement d'exécution du présent accord.

Caisse des pensions, etc.

Article 19

Toute caisse des pensions ou institution de prévoyance exerçant son activité sous l'autorité de l'Organisation internationale du Travail aura la capacité juridique en Suisse si elle en exprime le désir et sera au bénéfice des mêmes exemptions, immunités et privilèges que l'Organisation elle-même.

Arrangements antérieurs

Article 20

Dans la mesure où ils ne sont pas modifiés par le présent accord, les modus vivendi de 1921 et de 1926 et les arrangements complémentaires conclus entre le Département politique fédéral, la Société des Nations et le Bureau international du Travail restent applicables à l'Organisation internationale du Travail.

Objet des immunités>

Article 21

1. Les immunités prévues par le présent accord ne sont pas établies en vue d'accorder aux fonctionnaires de l'Organisation internationale du Travail des avantages et des commodités personnels. Elles sont instituées uniquement afin d'assurer, en toute circonstance, le libre fonctionnement de l'Organisation internationale du Travail et la complète indépendance de ses agents.

Levée des immunités

2. Le Directeur du Bureau international du Travail a le droit et le devoir de lever l'immunité d'un fonctionnaire lorsqu'il estime que cette immunité empêche le jeu normal de la justice et qu'il est possible d'y renoncer sans porter atteinte aux intérêts de l'Organisation internationale du Travail.

Prévention des abus

Article 22

L'Organisation internationale du Travail coopérera en tout temps avec les autorités suisses en vue de faciliter une bonne administration de la justice, d'assurer l'observation des règlements de police et d'empêcher tout abus des privilèges, immunités et facilités prévus par le présent accord.

Différends d'ordre privé

Article 23

L'Organisation internationale du Travail prendra des dispositions appropriées en vue du règlement satisfaisant:

a) de différends résultant de contrats auxquels l'Organisation internationale du Travail serait partie et d'autres différends portant sur un point de droit privé;

b) de différends dans lesquels serait impliqué un fonctionnaire de l'Organisation internationale du Travail qui jouit, du fait de sa situation officielle, de l'immunité, si cette immunité n'a pas été levée par le Directeur.

Non responsabilité de la Suisse

Article 24

La Suisse n'encourt, du fait de l'activité de l'Organisation internationale du Travail sur son territoire, aucune responsabilité internationale quelconque pour les actes et omissions de l'Organisation ou pour ceux de ses agents agissant ou s'abstenant dans le cadre de leurs fonctions.

Sécurité de la Suisse

Article 25

1. Rien dans le présent accord n'affecte le droit du Conseil fédéral suisse de prendre les précautions utiles dans l'intérêt de la sécurité de la Suisse.

2. Au cas où il estimerait nécessaire d'appliquer le premier paragraphe du présent article, le Conseil fédéral suisse se mettra, aussi rapidement que les circonstances le permettront, en rapport avec l'Organisation internationale du Travail en vue d'arrêter, d'un commun accord, les mesures nécessaires pour protéger les intérêts de l'Organisation.

3. L'Organisation internationale du Travail collaborera avec les autorités suisses en vue d'éviter tout préjudice à la sécurité de la Suisse du fait de son activité.

Exécution de l'accord par la Suisse

Article 26

Le Département politique fédéral est chargé de l'exécution par la Confédération suisse du présent accord et de son arrangement d'exécution.

Juridiction

Article 27

1. Toute divergence de vue concernant l'application ou l'interprétation du présent accord ou de son arrangement d'exécution qui n'aurait pas pu être réglée par des pourparlers directs entre les parties pourra être soumise, par l'une ou l'autre partie, à l'appréciation d'un tribunal composé de trois membres qui sera constitué dès l'entrée en vigueur du présent accord.

2. Le Conseil fédéral suisse et l'Organisation internationale du Travail désigneront chacun un membre du tribunal.

3. Les juges ainsi désignés choisiront leur président.

4. En cas de désaccord entre les juges au sujet de la personne du président, ce dernier sera désigné par le président de la Cour suprême des Pays-Bas à la requête des membres du tribunal.

5. Le tribunal sera saisi par l'une ou l'autre partie par voie de requête

6. Le tribunal fixera sa propre procédure.

Entrée en vigueur

Article 28

1. Le présent accord entrera en vigueur dès qu'il aura été approuvé par le Conseil fédéral suisse et le Conseil d'administration du Bureau international du Travail.

2. Il sortira ses effets dès la dissolution de la Société des Nations.

Régime transitoire

Article 29

Jusqu'à la date de la dissolution de la Société des Nations les modus vivendi de 1921 et de 1926, de même que les arrangements complémentaires conclus entre le Département politique, la Société des Nations et le Bureau international du Travail resteront applicables à l'Organisation internationale du Travail.

Modifications de l'accord

Article 30

1. Le présent accord peut être révisé à la demande de l'une ou l'autre partie.

2. Dans cette éventualité, les deux parties se concerteront sur les modifications qu'il pourrait y avoir lieu d'apporter aux dispositions du présent accord.

3. Au cas où les négociations n'aboutiraient pas à une entente dans le délai d'un an, l'accord pourra être dénoncé par l'une ou l'autre partie moyennant un préavis de deux ans.

Arrangement d'exécution

Article 31

Les dispositions du présent accord sont complétées par l'arrangement d'exécution.