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Jugement n° 4001

Décision

1. La décision attaquée du 25 août 2015 et la décision antérieure du Directeur général de nommer Mme S. au poste litigieux sont annulées.
2. L’affaire est renvoyée à l’OMPI pour que le Directeur général obtienne une nouvelle recommandation du Comité des nominations sur les actes de candidature initialement soumis pour le poste de chef de la Section des Caraïbes et prenne une nouvelle décision.
3. L’OMPI veillera à ce que la candidate sélectionnée soit tenue indemne de tout préjudice pouvant résulter de l’annulation de la décision attaquée et de l’annulation d’une nomination qu’elle avait acceptée de bonne foi.
4. L’OMPI versera au requérant une indemnité pour tort moral d’un montant de 20 000 francs suisses.
5. L’OMPI versera au requérant la somme de 8 000 francs suisses à titre de dépens.
6. Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Synthèse

Le requérant conteste la décision de confirmer la nomination de Mme S. au poste de chef de la Section des Caraïbes.

Mots-clés du jugement

Mots-clés

Requête admise; Annulation de la décision; Renvoi à l'organisation; Nomination; Procédure de sélection

Considérant 1

Extrait:

Le requérant a demandé que la présente requête soit jointe à sa première requête, qui a donné lieu à un jugement également prononcé ce jour. Cependant, il convient de traiter les requêtes séparément, car elles soulèvent des questions juridiques distinctes qui requièrent un examen particulier. La jonction des deux requêtes n’est donc pas ordonnée.

Mots-clés

Jonction

Considérant 2

Extrait:

Le requérant sollicite en outre la tenue d’un débat oral et indique qu’il souhaiterait appeler comme témoin un ancien Directeur général adjoint. Le Tribunal relève que cette personne a déjà fourni au requérant un témoignage écrit [...]. Par ailleurs, le requérant n’explique pas pourquoi un débat oral serait nécessaire ni en quoi la déposition de ce témoin serait pertinente au regard des questions soulevées dans la requête. En tout état de cause, les écritures et les pièces fournies par les parties étant très complètes et suffisamment claires pour que le Tribunal soit pleinement informé du dossier, il n’y a pas lieu d’organiser un débat oral. Cette demande sera donc rejetée.

Mots-clés

Débat oral

Considérant 4

Extrait:

Les principes fondamentaux qui guident le Tribunal lorsqu’une telle décision est contestée ont notamment été rappelés dans le jugement 3652, au considérant 7, comme suit :
«Selon la jurisprudence du Tribunal, la décision d’une organisation internationale de procéder à une nomination relève du pouvoir d’appréciation de son chef exécutif. Une telle décision ne peut faire l’objet que d’un contrôle limité et ne peut être annulée que si elle a été prise par un organe incompétent, est entachée d’un vice de forme ou de procédure, repose sur une erreur de fait ou de droit, omet de tenir compte de faits essentiels, est entachée de détournement de pouvoir ou tire du dossier des conclusions manifestement erronées (voir le jugement 3537, au considérant 10). Cela dit, toute personne qui s’est portée candidate à un poste qu’une organisation a décidé de pourvoir par voie de concours a le droit de voir sa candidature examinée dans le respect de la bonne foi et des principes fondamentaux assurant une concurrence loyale entre les candidats. Ce droit appartient à tout candidat, indépendamment de ses possibilités réelles d’obtenir le poste à pourvoir (voir, entre autres, le jugement 2163, au considérant 1, et la jurisprudence qui y est citée, et le jugement 3209, au considérant 11). Il ressort également de la jurisprudence que toute organisation doit se conformer aux règles régissant la sélection des candidats et, lorsque la procédure se révèle viciée, le Tribunal peut annuler toute nomination qui en a résulté, étant entendu que l’organisation devra tenir le candidat retenu indemne de tout préjudice pouvant résulter de l’annulation d’une nomination qu’il a acceptée de bonne foi (voir, par exemple, le jugement 3130, aux considérants 10 et 11).»
Le requérant doit donc démontrer que la procédure de sélection est entachée d’un vice substantiel. À cet égard, le Tribunal a précisé ce qui suit dans le jugement 1827, au considérant 6 :
«La sélection des candidats à une promotion est nécessairement basée sur le mérite et exige d’excellentes qualités de jugement de la part des personnes impliquées dans le processus de sélection. Ceux qui souhaiteraient que le Tribunal interfère dans le processus doivent prouver que celui-ci présentait de graves imperfections; il ne suffit pas d’affirmer que quelqu’un était mieux qualifié que le candidat retenu.»
Cependant, lorsqu’une organisation organise un concours pour pourvoir un poste, la procédure doit être conforme aux règles applicables et à la jurisprudence. Le Tribunal a indiqué ce qui suit dans le jugement 1549, aux considérants 11 et 13 :
«Lorsqu’une organisation décide de procéder à une nomination par la voie d’une mise au concours du poste à pourvoir, il lui appartient de respecter les règles fixées à ce sujet dans ses dispositions statutaires et celles qui découlent des principes généraux mis en évidence par la jurisprudence.
[...]
En effet, la procédure de mise au concours est destinée à permettre à toutes les personnes intéressées d’offrir leurs services pour le poste à pourvoir, dans le respect de l’égalité des chances. Aussi la jurisprudence du Tribunal exige-t-elle une stricte observation des règles d’un concours qui ne sauraient être modifiées après que le processus de sélection ait commencé, l’organisation étant tenue au respect des règles qu’elle s’est elle-même données (patere legem quam ipse fecisti) : voir les jugements 107 [...], 729 [...], 1071 [...], 1077 [...], 1158 [...], 1223 [...] et 1359 [...].»

Référence(s)

Jugement(s) TAOIT: 1549, 1827, 3652

Mots-clés

Charge de la preuve; Partialité; Procédure de sélection; Parti pris

Considérant 8

Extrait:

Les circonstances de la présente affaire ne sont pas les mêmes que celles qui sont décrites dans le jugement 3184, par exemple, dans lequel le Tribunal a indiqué, au considérant 15, que, si un membre du Comité de recours, après avoir déjà pris position sur le fond d’un recours, était par la suite appelé à siéger dans un nouveau comité de recours pour exprimer un avis sur les mêmes questions de fond dans le cadre d’un recours ultérieur, son impartialité et son objectivité pourraient être mises en doute.

Référence(s)

Jugement(s) TAOIT: 3184

Mots-clés

Organe de recours interne; Conflit d'intérêts; Composition de l'organe de recours interne

Considérant 19

Extrait:

Étant donné que [...] deux des moyens avancés par le requérant sont fondés, la décision attaquée [...] et la décision antérieure du Directeur général de nommer Mme S. au poste litigieux seront annulées. [...] L’affaire sera renvoyée à l’OMPI pour que le Directeur général obtienne une nouvelle recommandation du Comité des nominations sur les candidatures au poste qui ont été initialement soumises et prenne une nouvelle décision.

Mots-clés

Renvoi à l'organisation

Considérant 20

Extrait:

Le Tribunal n’est pas en mesure d’accorder au requérant un reclassement au niveau P-4 ou de le nommer au poste litigieux, comme il le demande. Les dispositions applicables, à savoir les articles 4.8 et 4.9 du Statut du personnel, ne prévoient en aucun cas la possibilité de nommer directement une personne à un poste avec effet rétroactif, sans passer par la procédure de sélection exigée par les Statut et Règlement du personnel. Il n’appartient pas non plus au Tribunal de reclasser le poste du requérant, comme il le demande par ailleurs. Il n’y a aucune base légale sur laquelle le Tribunal pourrait se fonder pour octroyer au requérant des dommages-intérêts pour tort matériel. Cependant, si les écritures du requérant ne permettent pas d’établir l’existence d’un préjudice matériel, l’illégalité des décisions contestées lui a néanmoins causé un préjudice moral, qu’il convient de réparer en lui allouant une indemnité de 20 000 francs suisses.

Mots-clés

Dommages-intérêts pour tort matériel

Considérant 15

Extrait:

Selon la jurisprudence du Tribunal, une organisation internationale doit observer la règle essentielle de toute procédure de sélection qui prescrit que la personne nommée doit posséder les qualifications minimales indiquées dans l’avis de vacance (voir le jugement 3372, au considérant 19). Il ressort en outre de la jurisprudence qu’une organisation internationale qui décide de procéder à une nomination par la voie d’une mise au concours ne peut finalement retenir un candidat qui ne remplirait pas l’une des conditions touchant aux qualifications requises spécifiées dans l’avis de vacance. Un tel procédé, qui revient à modifier les critères exigés pour la nomination à cet emploi pendant les opérations de sélection, encourt en effet la censure du Tribunal à un double titre. D’une part, il constitue une violation du principe tu patere legem quam ipse fecisti, qui interdit à l’administration de méconnaître les règles qu’elle a elle-même définies. Une modification des critères applicables au cours de la procédure de sélection porte atteinte, plus généralement, aux obligations de confiance mutuelle et de loyauté que les organisations internationales sont tenues de respecter dans les rapports qu’elles entretiennent avec leur personnel. D’autre part, la remise en cause par l’autorité de nomination, après le début de la procédure, des qualifications initialement exigées pour occuper le poste à pourvoir entache les opérations de sélection d’une grave irrégularité au regard du principe d’égalité des chances entre les candidats. Quels que puissent être les motifs qui aient pu conduire à en user, un tel procédé porte inévitablement atteinte aux garanties d’objectivité et de transparence indispensables pour assurer le respect de ce principe essentiel, dont la violation vicie toute nomination par voie de concours (voir le jugement 3641, au considérant 4 a)).

Référence(s)

Jugement(s) TAOIT: 3372, 3641

Mots-clés

Patere legem; Procédure de sélection

Considérant 7

Extrait:

[L]e requérant a formé la présente requête contre [la] décision en invoquant plusieurs moyens. Certains de ces moyens dépassent le cadre de la requête, qui ne porte que sur la décision de ne pas sélectionner le requérant pour pourvoir le poste litigieux. Ainsi, le requérant conteste le reclassement de son poste dans l’Unité/Section des Caraïbes intervenu à la suite d’une restructuration. Or cette contestation est au cœur de sa première requête et dépasse le cadre de la requête à l’examen. Elle ne sera donc pas examinée dans le présent jugement.
Le requérant conteste aussi la restructuration de l’Unité/Section des Caraïbes et la création du nouveau poste de chef de la Section des Caraïbes, la définition de son rôle au sein de la section nouvellement créée et ce qu’il décrit comme la suppression de fait de son poste par la création de celui de chef de la Section des Caraïbes, dont il prétend que s’y attachent exactement les mêmes fonctions que celles dont il s’acquittait en sa qualité de chef de l’Unité des Caraïbes. Le Tribunal relève que le requérant n’a pas contesté ces décisions au niveau interne dans les délais prescrits. Il n’a donc pas épuisé les voies de recours interne en ce qui concerne ces décisions, comme l’exige l’article VII, paragraphe 1, du Statut du Tribunal. Ces moyens sont irrecevables.

Mots-clés

Recevabilité de la requête; Moyens de recours interne non épuisés



 
Dernière mise à jour: 21.10.2021 ^ haut