Statut du Tribunal administratif de l'Organisation internationale du Travail

adopté par la Conférence internationale du Travail le 9 octobre 1946 et modifié par la Conférence le 29 juin 1949, le 17 juin 1986, le 19 juin 1992, le 16 juin 1998, le 11 juin 2008, le 7 juin 2016, le 17 juin 2019 et le 18 juin 2021

Article premier

Un tribunal est constitué par le présent Statut sous la dénomination de Tribunal administratif de l'Organisation internationale du Travail.

Article II

1. Le Tribunal est compétent pour connaître des requêtes invoquant l'inobservation, soit quant au fond, soit quant à la forme, des stipulations du contrat d'engagement des fonctionnaires du Bureau international du Travail et des dispositions du Statut du personnel qui sont applicables à l'espèce.

2. Le Tribunal est compétent pour statuer sur tout différend concernant les indemnités prévues pour les cas d'invalidité et d'accident ou de maladie survenus à un fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions, et pour fixer définitivement le montant de l'indemnité, s'il y a lieu.

3. [Supprimé]

4. Le Tribunal est compétent pour connaître des différends issus de contrats auxquels l'Organisation internationale du Travail est partie et qui lui attribuent compétence en cas de différend au sujet de leur exécution.

5. Le Tribunal connaît en outre des requêtes invoquant l'inobservation, soit quant au fond, soit quant à la forme, des stipulations du contrat d'engagement des fonctionnaires ou des dispositions du statut du personnel des autres organisations internationales satisfaisant aux critères définis à l'annexe au présent Statut qui auront adressé au Directeur général une déclaration reconnaissant, conformément à leur Constitution ou à leurs règles administratives internes, la compétence du Tribunal à l'effet ci-dessus, de même que son Règlement, et qui auront été agréées par le Conseil d'administration. Toute organisation concernée peut retirer sa déclaration de reconnaissance de la compétence du Tribunal au titre de la procédure exposée dans l’annexe.

6. Ont accès au Tribunal:

a) le fonctionnaire, même si son emploi a cessé, ainsi que toute personne ayant succédé mortis causa aux droits du fonctionnaire;

b) toute personne autre pouvant justifier de droits résultant du contrat d'engagement du fonctionnaire décédé ou des dispositions du statut du personnel dont pouvait se prévaloir ce dernier.

7. En cas de contestation de sa compétence, le Tribunal décide.

Article III

1. Le Tribunal comprend sept juges, tous de nationalité différente. Les juges sont des personnes jouissant de la plus haute considération morale et connues pour leur impartialité et leur intégrité, et doivent avoir exercé dans leurs États respectifs les plus hautes fonctions judiciaires ou réunir les conditions requises à cet effet. Ils doivent maîtriser l’une au moins des langues de travail du Tribunal et devraient disposer au minimum de compétences de base en ce qui concerne la compréhension écrite et orale de l’autre langue de travail. Il est dûment tenu compte de la répartition géographique et de l’équilibre hommes-femmes dans la composition du Tribunal. La composition du Tribunal doit permettre au Tribunal de rendre à tout moment des jugements dans ses deux langues de travail.

2. Sous réserve du paragraphe 3 ci-après, les juges sont nommés pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois par la Conférence internationale du Travail. Si, pour une raison quelconque, la Conférence internationale du Travail ne tient pas session à l’expiration de ces mandats, les juges resteront en fonctions jusqu’à la session suivante de la Conférence et à l’adoption, par celle-ci, d’une décision sur cette question.

3. Si la durée maximale de nomination de quatre juges ou plus arrive à expiration la même année, la Conférence internationale du Travail peut à titre exceptionnel la prolonger pour deux d’entre eux, désignés par tirage au sort,
pour une durée de trois ans.

4. Les juges exercent leurs fonctions en toute indépendance et ne doivent recevoir aucune instruction ni être soumis à aucune contrainte. Les juges sont des fonctionnaires au service de l’Organisation internationale du Travail non fonctionnaires du Bureau international du Travail, au sens de la Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées.

5. Le Tribunal, pour siéger, doit être composé de trois juges, ou, dans des cas exceptionnels, de cinq juges, désignés par le président, ou des sept juges.

Article IV

Le Tribunal se réunit en session ordinaire aux dates fixées par son Règlement, sous réserve qu'il y ait des affaires au rôle et que, de l'avis du président, ces affaires justifient la tenue de la session. Une session extraordinaire pourra être convoquée à la demande du président du Conseil d'administration du Bureau international du Travail.

Article V

Le Tribunal peut, s'il en décide ainsi, accepter ou refuser d'organiser une procédure orale, y compris à la demande d'une des parties. Le Tribunal décidera, dans chaque cas, du point de savoir si les débats à intervenir devant lui seront, en tout ou partie, tenus en public ou à huis clos.

Article VI

1. Le Tribunal statue à la majorité des voix. Les jugements sont définitifs et sans appel. Le Tribunal peut néanmoins être saisi de demandes d’interprétation, d’exécution ou de révision d’un jugement.

2. Tout jugement doit être motivé. II sera communiqué par écrit au Directeur général du Bureau international du Travail et au requérant.

3. Les jugements sont rédigés en un seul exemplaire, qui sera déposé aux archives du Bureau international du Travail, où il sera à la disposition de tout intéressé.

Article VII

1. Une requête n'est recevable que si la décision attaquée est définitive, l'intéressé ayant épuisé tous moyens de recours mis à sa disposition par le Statut du personnel.

2. La requête, pour être recevable, doit, en outre, être introduite dans un délai de quatre-vingt-dix jours, à compter de la notification au requérant de la décision attaquée ou, s'il s'agit d'une décision affectant toute une catégorie de fonctionnaires, de la date de sa publication.

3. Au cas où l'administration, saisie d'une réclamation, n'a pris aucune décision touchant ladite réclamation dans un délai de soixante jours à dater du jour de la notification qui lui en a été faite, l'intéressé est fondé à saisir le Tribunal, et sa requête est recevable au même titre qu'une requête contre une décision définitive. Le délai de quatre-vingt-dix jours prévu au paragraphe précédent est compté à dater de l'expiration du délai de soixante jours imparti à l'administration pour prendre une décision.

4. L'introduction d'une requête n'a pas pour effet de suspendre l'exécution de la décision attaquée.

Article VIII

Dans les cas visés à l'article II, le Tribunal, s'il reconnaît le bien-fondé de la requête, ordonne l'annulation de la décision attaquée ou l'exécution de l'obligation invoquée. Si cette annulation ou exécution n'est pas possible, ou opportune, le Tribunal alloue à l'intéressé une indemnité pour le préjudice subi.

Article IX

1. Le Bureau international du Travail prend, en consultation avec le Tribunal, les mesures administratives nécessaires au fonctionnement de celui-ci.

2. Les frais occasionnés par les sessions du Tribunal seront à la charge du Bureau international du Travail.

3. Les indemnités accordées par le Tribunal sont supportées par le budget de l'Organisation internationale du Travail.

Article X

1. Sous réserve des dispositions du présent Statut, le Tribunal arrête son Règlement concernant:

a) l'élection du président et du vice-président;

b) la convocation et la tenue des sessions;

c) les règles à suivre pour l'introduction des requêtes et le déroulement de la procédure, y compris l'intervention dans l'instance des personnes, qui, comme fonctionnaires, peuvent voir leurs droits affectés par le jugement à intervenir;

d) la procédure applicable aux requêtes et différends soumis au Tribunal en vertu du paragraphe 4 de l'article II;

e) et, d'une façon générale, toutes les questions relatives à son fonctionnement qui ne sont pas réglées par le présent Statut.

2. Le Tribunal a qualité pour amender son Règlement.

Article XI

Le présent Statut pourra être amendé, après consultation du Tribunal, par la Conférence internationale du Travail ou par tout autre organe de l’Organisation internationale du Travail que la Conférence pourra désigner.

 

ANNEXE AU STATUT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE L'ORGANISATION INTERNATIONALE DU TRAVAIL

 

1. Pour pouvoir prétendre à reconnaître la compétence du Tribunal administratif de l’Organisation internationale du Travail conformément au paragraphe 5 de l’article II de son Statut, une organisation internationale doit soit être de caractère interétatique, soit remplir les conditions suivantes :

a) être manifestement de caractère international, en ce qui concerne sa composition, sa structure et son domaine d’activité;

b) ne pas être tenue d’appliquer une législation nationale quelconque dans ses relations avec ses fonctionnaires, et bénéficier de l’immunité de juridiction, laquelle doit être attestée par un accord de siège conclu avec le pays hôte; et

c) être dotée de fonctions à caractère permanent au niveau international et offrir, de l’avis du Conseil d’administration, des garanties suffisantes quant à sa capacité institutionnelle de s’acquitter de ces fonctions, ainsi que des garanties quant à l’exécution des jugements du Tribunal.

 

2. Le Statut du Tribunal s’applique intégralement à ces organisations internationales, sous réserve des dispositions suivantes, qui, dans les causes intéressant l’une desdites organisations, sont applicables dans les termes qui suivent :

Article VI, paragraphe 2

Tout jugement doit être motivé. Il sera communiqué par écrit au Directeur général du Bureau international du Travail, au chef exécutif de l’organisation internationale faisant l’objet de la requête et au requérant.

Article VI, paragraphe 3

Les jugements sont rédigés en deux exemplaires, dont l’un sera déposé aux archives du Bureau international du Travail et l’autre aux archives de l’organisation internationale faisant l’objet de la requête, où ils seront à la disposition de tout intéressé.

Article IX, paragraphe 2

Les frais occasionnés par les sessions ou audiences du Tribunal seront à la charge de l'organisation internationale objet de la requête.

Article IX, paragraphe 3

Les indemnités accordées par le Tribunal sont supportées par le budget de l'organisation internationale objet de la requête.

3. Une organisation internationale peut retirer la déclaration par laquelle elle a reconnu la compétence du Tribunal conformément aux principes de bonne foi et de transparence. Elle informe le Directeur général de sa décision par une communication officielle qui devrait émaner de l’organe ayant pris la décision initiale de reconnaître la compétence du Tribunal ou d’un autre organe ayant aujourd’hui compétence pour prendre une telle décision, en réaffirmant son engagement à exécuter rigoureusement tout jugement relatif aux requêtes en instance et en indiquant, s’il y a lieu, les motifs du retrait, les autres moyens de recours envisagés pour régler les conflits du travail et les consultations éventuellement menées avec les organes de représentation du personnel avant l’adoption de la décision.

4. À la session suivant la notification, par l’organisation concernée, du retrait de sa déclaration reconnaissant la compétence du Tribunal, le Conseil d’administration, après consultation du Tribunal, prend note du retrait et confirme que ladite organisation ne relève plus de la compétence du Tribunal à compter de cette date ou de toute autre date postérieure convenue avec elle. Aucune nouvelle requête déposée contre l’organisation après la date effective du retrait ne sera examinée par le Tribunal.