L'OIT est une institution spécialisée des Nations-Unies
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87e session
Genève, juin 1999


 

Raport VI

 

 

Le rôle de l'OIT en matière de coopération technique

 

 


 

 

Bureau international du Travail  Genève

 

 

 

 


Complément au rapport VI
«Le rôle de l'OIT en matière de coopération technique»

Coopération technique: une perspective stratégique
Note du Directeur général

A cette session, la Conférence va examiner en profondeur le programme de coopération technique de l'OIT. Elle est saisie d'un rapport consacré à cette question, question que j'aborde aussi dans mon rapport à la Conférence. La présente note complète ces deux rapports ainsi que les Propositions de programme et de budget pour 2000-01. Elle vise à répondre à des demandes qui ont été formulées à la dernière session du Conseil d'administration et précise mes vues sur certains points importants afin de faciliter les débats.

Ci-après je donne mon avis sur l'orientation future de la coopération technique de l'OIT; je présente certaines des mesures déjà prises ou prévues à court terme; enfin, j'indique les points sur lesquels il serait souhaitable que la Conférence donne des orientations.

1. Orientation future de la politique
de coopération technique de l'OIT

a) Réaffirmation d'un engagement

L'OIT réaffirmera son attachement à la coopération technique, qu'elle considère comme un moyen d'action fondamental pour accomplir sa mission, pour réaliser les objectifs que j'ai présentés à la Conférence. La coopération technique, qu'il s'agisse des services consultatifs ou des activités pratiques, sera l'un des principaux instruments dont se servira le BIT pour donner aux femmes et aux hommes le maximum de possibilités d'obtenir un travail décent et productif, dans des conditions de liberté, d'équité, de sécurité et de dignité. Le rôle de la coopération technique est d'aider à créer, aux niveaux national et international, un environnement propice à la réalisation des valeurs et des principes de l'Organisation en ce qui concerne le développement, la capacité institutionnelle, la législation et la politique socio-économique.

A cette fin, la coopération technique s'attachera à promouvoir les quatre objectifs stratégiques de l'OIT: respect des droits au travail; emploi; protection sociale; dialogue social. Cela implique de focaliser les activités de coopération technique et de mieux les intégrer dans l'ensemble des autres activités - du point de vue des programmes comme du point de vue de l'organisation.

Ces activités s'inscriront dans un environnement en perpétuelle mutation du fait de la mondialisation de l'économie et de l'évolution rapide des besoins nationaux. Le rôle de l'OIT, ainsi que je le souligne dans mon rapport à la Conférence, est d'aider les Etats Membres à adapter leur économie et leurs institutions à la mondialisation et à adapter celle-ci aux besoins de l'homme. L'OIT sera appelée à aider ses mandants durant une longue période d'ajustement aux nouvelles réalités tout en continuant à lutter contre les problèmes de pauvreté, de chômage et d'insécurité des individus, des familles, des collectivités. Elle doit s'organiser en conséquence.

b) Répondre aux besoins des mandants

Ces dernières années, l'OIT a jeté les bases d'une politique participative, souple et dynamique de coopération technique en tirant des enseignements de la décentralisation et des programmes régionaux des années soixante-dix et quatre-vingt. Toutefois, si l'on veut tirer le meilleur parti possible de la politique de partenariat actif, il faut soumettre celle-ci à un examen critique et la situer dans le nouveau contexte stratégique né des changements, en matière de programmes et d'organisation, initiés par le Conseil d'administration en mars dernier. Il s'agit surtout de faire en sorte que cette politique soit en phase avec les spécificités régionales et nationales. Il ne saurait y avoir de modèle unique, applicable partout dans le monde. Les objectifs par pays doivent refléter les besoins mouvants des mandants; au stade de l'exécution, il faut exploiter les capacités institutionnelles nationales; enfin, pour que les programmes répondent effectivement aux préoccupations des mandants, il faut que des consultations soient systématiquement organisées aux niveaux régional et sous-régional. C'est ce que l'on a déjà commencé à faire pour la préparation des prochaines réunions régionales.

Les mandants attendent de la coopération technique de l'OIT qu'elle soit de qualité et qu'elle donne des résultats. Elle doit être axée sur les objectifs stratégiques des mandants dans leur ensemble et avoir un impact maximal. Elle doit être réaliste, c'est-à-dire tenir compte des compétences institutionnelles de l'OIT et des ressources disponibles. Il faut chercher à améliorer le contenu des programmes de coopération technique aini que leur gestion. Il faut réexaminer les systèmes organisationnels et s'attacher à améliorer les procédures. En résumé, la coopération technique doit être considérée comme partie intégrante de l'ensemble des activités de l'OIT; il ne s'agit pas uniquement de fournir des «produits» en aval, mais aussi de contribuer, en amont, à la définition de ces produits et des politiques de l'Organisation en général.

c) Partenariats

A mon avis, l'ensemble du système multilatéral devrait s'efforcer de mieux intégrer ses activités de coopération technique. Mon intention est d'amener l'OIT à jouer un rôle à part entière grâce à l'établissement de partenariats qui porteront tant sur la conception que sur l'exécution. Le partenariat est essentiel pour améliorer les services et mobiliser les ressources, pour obtenir un effet multiplicateur, pour développer les réseaux du savoir, pour assurer la participation des partenaires sociaux et l'essor des institutions nationales. Le partenariat fondamental est celui qui existe entre le Bureau et ses mandants constitutionnels, à savoir les gouvernements, les employeurs et les travailleurs.

C'est le fondement de toute une série d'alliances - avec la communauté des donateurs et les banques de développement; avec le système des Nations Unies et les institutions de Bretton Woods; avec les organismes nationaux, régionaux et internationaux de recherche, d'étude et de coopération économique et sociale. Un effort particulier sera fait pour renforcer les partenariats avec les organisations d'intégration et de coopération régionales et sous-régionales.

Au niveau des pays, l'OIT jouera un rôle actif dans le plan-cadre des Nations Unies pour l'aide au développement: elle veillera à ce que les priorités de ses mandants soient dûment prises en compte et s'attachera à optimiser les capacités potentielles du système des Nations Unies dans son ensemble. Tous ces partenariats doivent reposer sur une vision réaliste des objectifs communs, mais aussi des intérêts propres à chaque partie, de sorte que l'OIT puisse défendre les valeurs et préoccupations de ses mandants plus efficacement et dans une sphère plus étendue. Ces activités s'inscriront notamment dans le cadre du suivi des grandes conférences organisées par les Nations Unies dans les années quatre-vingt-dix.

En tant qu'organisation ayant pour vocation de savoir, de servir et de sensibiliser, l'OIT doit forger des liens avec les acteurs qui partagent ses valeurs et objectifs, notamment les parlementaires, les universitaires et chercheurs, les organisations non gouvernementales, les collectivités locales et les réseaux mondiaux d'information et de communication.

2. Plan d'action

Plusieurs mesures ont été prises, ou le seront incessamment, en vue de concrétiser l'orientation stratégique de la politique de coopération technique de l'OIT.

a) Des activités mieux ciblées et plus efficaces

Les quatre objectifs stratégiques et en particulier les huit programmes focaux qui leur sont liés et qui ont été approuvés par le Conseil d'administration constitueront le point de départ et la raison d'être de toutes les activités de coopération technique de l'OIT. Il s'agira de répondre au mieux aux besoins des mandants, à mesure qu'ils évoluent, compte tenu des compétences institutionnelles et des contraintes en matière de ressources, dans le cadre des objectifs stratégiques. Le mandat constitutionnel de l'Organisation fixera les grandes orientations des activités pratiques.

J'ai déjà commencé à identifier les éléments de coopération technique des programmes focaux. Tous les programmes mondiaux qui sont en cours seront examinés et intégrés dans toute la mesure du possible dans les programmes focaux correspondants, tout en conservant s'il y a lieu leur identité propre. De vastes consultations seront organisées au niveau national pour que les objectifs par pays reflètent la spécificité des demandes des mandants et pour qu'ils soient réalistes, qu'il s'agisse des objectifs organisationnels, des capacités ou des ressources disponibles. Mieux cibler la coopération technique signifie aussi intégrer parmi les objectifs opérationnels des activités destinées à promouvoir les concepts qui sous-tendent les programmes de manière à mobiliser des appuis extérieurs, à sensibiliser l'opinion et à s'assurer son adhésion et à obtenir que chacun fasse siens les résultats.

b) Un nouveau cadre de programmation

Les objectifs stratégiques définissent un cadre commun de programmation qui établit un lien entre les programmes relevant du budget ordinaire et ceux qui sont financés par des ressources extrabudgétaires. Les Propositions de programme et de budget pour 2000-01 reflètent mon intention de passer à une structure de programmation intégrée. Celle-ci fournira les synergies au niveau opérationnel et sur le plan des politiques. Elle facilitera la mobilisation des ressources en donnant à nos partenaires pour le développement une indication beaucoup plus claire de la contribution qu'ils peuvent apporter à la réalisation du programme de coopération technique de l'OIT. Elle permettra aussi de définir plus facilement l'apport du budget ordinaire aux programmes de coopération technique.

c) La recherche constante de l'excellence technique

Le fonds de connaissances d'une institution détermine sa capacité de fournir des services pertinents et fiables. Nos projets de coopération technique doivent être d'une qualité technique irréprochable. J'ai amorcé un processus visant à déterminer quels sont nos points forts et nos points faibles dans ce domaine en commençant par solliciter l'avis des directeurs du siège. Dans le courant de l'année, je consulterai les responsables en poste sur le terrain. J'entends appliquer des politiques propres à stimuler et renforcer l'excellence et la modernisation de nos capacités. Il est fondamental de comprendre que nos efforts pour accéder à des ressources internationales qui diminuent se heurtent à une vive concurrence. Cela exige que nous renforcions notre capacité dans les domaines de la recherche, des statistiques et de l'analyse économique. Pour satisfaire bénéficiaires et donateurs, il faut viser en permanence la qualité, au stade de la conception et de l'exécution.

d) Gestion de la coopération technique

Le succès de la coopération technique dépend d'une saine gestion, d'une bonne coordination et d'un mécanisme d'appui efficace. J'ai déjà lancé le processus devant conduire à une meilleure gestion, à plus de transparence et à une définition plus claire des responsabilités en créant une équipe de direction organisée autour des quatre objectifs stratégiques. Renforcer la capacité de gestion de l'Organisation dans son ensemble, y compris dans le domaine de la coopération technique, est essentiel pour clarifier les objectifs institutionnels et assurer les services d'appui nécessaires aux structures extérieures.

e) Une mobilisation plus efficace des ressources

Je compte mettre l'accent sur la mobilisation des ressources afin de remédier au déclin de la coopération technique. L'approche stratégique décrite ci-dessus donnera à la communauté des donateurs un panorama plus clair des activités et cibles de l'OIT.

J'envisage aussi d'approfondir les relations avec les partenaires pour le développement, y compris les ministères et autres organismes de coopération et le Comité d'aide au développement de l'OCDE. Des contacts plus systématiques seront établis avec les experts de la communauté des donateurs, et un dialogue plus nourri s'instaurera avec les ministères du Travail, les syndicats et les organisations d'employeurs en vue de les associer plus directement à l'effort de mobilisation des ressources et de s'assurer leur appui au niveau politique. L'importance d'intensifier les relations avec le système des Nations Unies et les institutions de Bretton Woods a été mentionnée. Des rapports nouveaux seront établis avec le secteur privé, avec des fondations et autres organismes ne comptant pas parmi nos partenaires classiques, dans le cadre de nos valeurs et principes.

Les contributions extrabudgétaires sont par définition volontaires. Elles correspondent normalement aux grandes priorités et préférences définies par les Parlements lors des débats budgétaires. Il est donc naturel que les donateurs veuillent indiquer les domaines d'activité de l'OIT qu'ils souhaitent financer. Les bénéficiaires des programmes de coopération technique, quant à eux, souhaitent avoir la maîtrise des projets qui les concernent. C'est le rôle du Bureau de tenir compte à la fois des demandes des donateurs et de celles des bénéficiaires et de les concilier de manière cohérente à la satisfaction de tous, en favorisant le dialogue entre toutes les parties intéressées, et en concevant des programmes adaptés dans un esprit novateur.

f) Réexamen des structures extérieures

Je sais que certains problèmes se posent parce que la répartition des rôles et responsabilités entre le siège et le terrain, et sur le terrain même, n'est pas suffisamment claire. J'entends m'occuper de cette question de toute urgence. Il s'agit d'affirmer la présence de l'OIT sur le terrain en améliorant l'efficience de ses services et en les rendant plus accessibles, de sorte que les structures extérieures soient à même de répondre de façon souple et rapide aux besoins des mandants en mobilisant l'ensemble des ressources de l'Organisation. Outre des orientations techniques, le siège devrait être capable de fournir aux structures extérieures des informations comparatives sur les mesures de politique sociale mises en œuvre dans les différents pays, ainsi que des analyses des répercussions économiques et budgétaires des initiatives sociales. Nous devons tout à la fois être suffisamment décentralisés pour pouvoir associer les bénéficiaires aux décisions et maintenir une cohérence stratégique globale qui permette à l'OIT d'affirmer clairement son identité partout dans le monde.

g) Améliorer le contrôle et l'évaluation

Des indicateurs de performance sont indispensables pour l'OIT, pour ses mandants, pour ses partenaires. Chaque fois que possible, les objectifs identifiables devraient s'assortir d'indicateurs de performance clairs. Le système actuel offre un mécanisme d'autoévaluation. Des évaluations thématiques ont lieu chaque année et leurs résultats sont examinés par le Conseil d'administration. Les projets traditionnels comportent des mécanismes d'évaluation mais ceux-ci ne font guère de place à l'analyse d'impact. Il faut améliorer les mécanismes d'évaluation des programmes et de leur impact au niveau national ou régional. Dans le cadre du système global d'évaluation à l'étude pour le BIT, je propose d'introduire des méthodes d'évaluation systématique de la coopération technique avec les pays bénéficiaires et les partenaires du développement.

h) L'amélioration de l'exécution

Des préoccupations ont été exprimées ces derniers mois concernant le taux d'exécution des projets de coopération technique de l'OIT. C'est un point important car ce taux donne souvent une bonne idée de l'efficacité et de l'efficience de l'interaction entre le BIT, les donateurs et les bénéficiaires. J'ai pris une série d'initiatives en vue de cerner le problème et d'y répondre. On a commencé d'analyser des informations et données pertinentes afin de déterminer les raisons de cette dégradation. A l'avenir, les données seront présentées de façon que le processus d'exécution de la coopération technique soit à la fois plus précis et transparent. Un mécanisme de contrôle de l'exécution à l'échelle du Bureau sera mis en place dans le courant de l'année. Il tiendra lieu de système de contrôle et d'alerte et permettra aussi d'améliorer la communication entre le siège et les structures extérieures.

i) Capacité de réponse rapide

J'indique dans mon rapport à la Conférence que le BIT doit être capable de répondre rapidement à des problèmes nouveaux ou à des opportunités nouvelles, que cela découle d'une crise économique, d'une catastrophe naturelle, de conflits ou de bouleversements sociaux. Cela suppose l'aptitude à suivre les évolutions, organiser l'action, mobiliser les capacités de l'OIT et coordonner les partenariats et les ressources extérieures. Des mesures seront prises pour doter le BIT de cette capacité. Ce genre de crise requerra souvent l'intervention de l'ensemble du système des Nations Unies à laquelle l'OIT contribuera dans les domaines qui relèvent de sa compétence.

3. Points pour la discussion

De mon point de vue, la coopération technique est un moyen fondamental de mettre en œuvre la vision stratégique de l'OIT et je considère donc que c'est pour moi une grande chance de pouvoir bénéficier, dès le début de mon mandat, des orientations de la Conférence dans ce domaine.

Outre les commentaires sur les paragraphes 1 et 2 de la présente note, toute idée ou suggestion serait particulièrement utile sur les points ci-après:

a) Rendre la coopération technique plus pertinente

b) Améliorer la qualité, la visibilité et l'impact de la coopération technique

c) Renforcer les partenariats

Il ressort de ce qui précède que l'examen auquel la Conférence procédera à sa présente session marque le début d'une nouvelle étape dans la coopération technique. Il a été proposé à l'OIT de se donner pour but fondamental de permettre à chacun d'accéder à un travail décent. Pour atteindre ce but, la coopération technique est recentrée sur les quatre objectifs stratégiques. Dans les mois à venir, une série de mesures, allant de l'amélioration de la programmation à la réforme organisationnelle, seront prises. Le Conseil d'administration sera régulièrement saisi de rapports qui indiqueront les résultats de ces mesures. Naturellement, notre action devra être ajustée et affinée à mesure que l'on progresse. A ce stade, les propositions et avis de la Conférence me seront très utiles pour mieux définir cette orientation stratégique qui pourra être approfondie et discutée au Conseil d'administration. Je suis convaincu qu'avec votre appui le BIT peut concevoir une politique de coopération technique propre à répondre à des besoins nationaux et régionaux d'une grande variété sans jamais cesser de défendre les principes et valeurs de notre Organisation.


Mise à jour par VC. Approuvée par NdW. Dernière modification: 26 January 2000.