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GB.274/8/1
274e session
Genève, mars 1999


HUITIÈME QUESTION À L'ORDRE DU JOUR

313e rapport du Comité de la liberté syndicale

Table des matières

Introduction

Cas no 1947 (Argentine): Rapport définitif

Recommandation du comité

Cas no 1982 (Brésil): Rapport définitif

Recommandation du comité

Cas no 1987 (El Salvador): Rapport définitif

Recommandations du comité

Cas no 1927 (Mexique): Rapport définitif

Recommandation du comité

Cas no 1967 (Panama): Rapport dans lequel le comité demande à être tenu informé de l'évolution de la situation

Recommandations du comité

Cas no 1880 (Pérou): Rapport intérimaire

Recommandations du comité

Cas no 1906 (Pérou): Rapport définitif

Recommandations du comité

Cas no 1983 (Portugal): Rapport définitif

Recommandation du comité

Cas no 1959 (Royaume-Uni/Bermudes): Rapport intérimaire

Recommandations du comité

Cas no 1977 (Togo): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution de la situation

Recommandation du comité

Cas no 1981 (Turquie): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution de la situation

Recommandations du comité

Cas no 1812 (Venezuela): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution de la situation

Recommandations du comité

Cas no 1952 (Venezuela): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution de la situation

Recommandations du comité


Introduction

1. Le Comité de la liberté syndicale, institué par le Conseil d'administration à sa 117e session (novembre 1951), s'est réuni au Bureau international du Travail à Genève les 4, 5 et 17 mars 1999, sous la présidence de M. le professeur Max Rood.

2. Les membres de nationalité argentine, britannique, mexicaine et panaméenne n'étaient pas présents lors de l'examen des cas relatifs à l'Argentine (cas no 1947), au Royaume-Uni/Bermudes (cas no 1959), au Mexique (cas no 1927) et au Panama (cas no 1967).

* * *

3. Le comité est actuellement saisi de 77 cas dans lesquels les plaintes ont été transmises aux gouvernements intéressés pour observations. A la présente session, le comité a examiné 21 cas quant au fond et a abouti à des conclusions définitives dans 13 cas et à des conclusions intérimaires dans 8 cas; les autres cas ont été ajournés pour les raisons indiquées aux paragraphes suivants.

Nouveaux cas

4. Le comité a ajourné à sa prochaine session l'examen des cas suivants: nos 1995 (Cameroun), 1997 (Brésil), 1998 (Bangladesh), 1999 (Canada/ Saskatchewan), 2001 (Ukraine), 2003 (Pérou), 2004 (Pérou), 2005 (République centrafricaine), 2006 (Pakistan), 2007 (Bolivie), 2008 (Guatemala), 2009 (Maurice), 2010 (Equateur), 2011 (Estonie) et 2012 (Fédération de Russie), car il attend les informations et observations des gouvernements concernés. Tous ces cas se réfèrent à des plaintes présentées ou à des réclamations transmises depuis la dernière session du comité.

Observations attendues des gouvernements

5. Le comité attend encore les observations ou les informations des gouvernements sur les cas suivants: nos 1851 (Djibouti), 1922 (Djibouti), 1961 (Cuba), 1974 (Mexique), 1976 (Zambie), 1978 (Gabon), 1980 (Luxembourg), 1990 (Mexique), 1991 (Japon) et 1993 (Venezuela). Dans les cas nos 1974 et 1990 (Mexique), le gouvernement a annoncé l'envoi prochain de ses observations. Dans le cas no 1931 (Panama), le gouvernement a demandé l'assistance technique du Bureau. Le comité lui demande de fournir une réponse sur le fond des questions soulevées dans le cas afin que l'assistance technique demandée puisse se fonder sur les conclusions et recommandations définitives du comité.

Observations attendues des plaignants

6. Dans le cas no 1929 (France/Guyane), le comité n'a toujours pas reçu les commentaires de l'organisation plaignante et, compte tenu de la longue période écoulée depuis la demande qu'il a formulée en ce sens, le comité décide de clore le cas.

Observations partielles reçues des gouvernements

7. Dans les cas nos 1835 (République tchèque), 1865 (République de Corée), 1953 (Argentine), 1965 (Panama) et 1986 (Venezuela), le gouvernement a envoyé des informations partielles sur les allégations formulées. Le comité demande à ces gouvernements de compléter sans tarder leurs observations afin qu'il puisse examiner les cas en question en pleine connaissance de cause.

Observations reçues des gouvernements

8. Dans les cas nos 1773 (Indonésie), 1888 (Ethiopie), 1930 (Chine), 1934 (Cambodge), 1943 (Canada/Ontario), 1949 (Bahreïn), 1951 (Canada/Ontario), 1960 (Guatemala), 1970 (Guatemala), 1971 (Danemark), 1972 (Pologne), 1975 (Canada/Ontario), 1979 (Pérou), 1984 (Costa Rica), 1985 (Canada), 1989 (Bulgarie), 1992 (Brésil), 1994 (Sénégal), 1996 (Ouganda), 2000 (Maroc) et 2002 (Chili), le comité a reçu les observations du gouvernement et se propose de les examiner à sa prochaine session.

Appels pressants

9. Dans les cas nos 1939 (Argentine), 1963 (Australie) et 1988 (Comores), le comité observe que, en dépit du temps écoulé depuis le dépôt de la plainte ou depuis le dernier examen du cas, il n'a pas reçu les observations des gouvernements concernés ou tout au moins n'en a reçu que des réponses partielles. Le comité attire l'attention des gouvernements en question sur le fait que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvée par le Conseil d'administration, il pourra présenter un rapport sur le fond de ces affaires, même si leurs informations et observations n'étaient pas fournies ou complétées à temps. En conséquence, le comité prie instamment les gouvernements de transmettre d'urgence leurs observations et informations.

Plainte irrecevable

10. Les 26 novembre 1998 et 19 janvier 1999, le Syndicat New Wood a adressé au président du comité des communications alléguant des violations des droits syndicaux commises par l'Organisation des Nations Unies à Genève. Aux termes de sa procédure, le comité ne peut être saisi que de plaintes présentées contre des Etats. Dans ces conditions, le comité doit déclarer la communication en question irrecevable et ne peut donc l'examiner quant au fond.

Transmission de cas à la commission d'experts

11. Le comité signale à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations les aspects législatifs des cas suivants: Colombie (cas no 1916), Nigéria (cas nos 1793 et 1935), Panama (cas no 1967), Pérou (cas no 1906), Turquie (cas no 1981).

Suites données aux recommandations
du Comité et du Conseil d'administration

Cas no 1867 (Argentine)

12. Le comité a examiné ce cas à sa session de juin 1998 [voir 310e rapport, paragr. 68 à 69] et il a demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de réintégrer le dirigeant syndical M. Rojo au poste de travail qu'il occupait et, si cela s'avérait impossible compte tenu du temps écoulé, pour qu'il soit indemnisé de façon complète.

13. Par une communication en date du 22 octobre 1998, le gouvernement indique qu'il a notifié à la province de Salta la recommandation formulée par le comité.

14. Par une communication d'octobre 1998, l'Association des travailleurs de l'Etat (ATE) précise qu'ayant pris connaissance de la recommandation du comité M. Miguel Hugo Rojo a présenté une photocopie de cette recommandation au juge de première instance, chargé du contentieux administratif de la ville de Salta, dans la province de Salta, en République d'Argentine. Dans le cadre du contentieux administratif qui, actuellement, fait l'objet d'un examen des preuves, le délégué à la province de Salta a nié et a refusé expressément l'existence et l'approbation d'une telle recommandation et il a demandé la suppression de cet élément de preuve. De l'avis de l'organisation plaignante, ce fait constitue une méconnaissance voulue des effets de la recommandation du comité de la part de la province de Salta, étant donné qu'à ce jour M. Miguel Hugo Rojo n'a toujours pas été réintégré dans son poste de travail, et qu'il n'a pas touché les salaires qui lui sont dus.

15. Le comité prend note de ces informations. Le comité regrette profondément que M. Rojo n'a toujours pas été réintégré dans son poste de travail antérieur ni été indemnisé de façon complète. Dans ces conditions, le comité réitère ses recommandations antérieures et demande à nouveau au gouvernement de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour faire exécuter les recommandations qui ont été formulées en juin 1998.

Cas no 1873 (Barbade)

16. Lors de son dernier examen du cas en novembre 1998 [voir 311e rapport, paragr. 97-110], le comité avait demandé au gouvernement de vérifier d'une manière objective si le Syndicat national des travailleurs du secteur public (NUPW) représentait la majorité des travailleurs du secteur public et de lui envoyer les résultats de la vérification.

17. Le gouvernement, dans une communication du 4 janvier 1999, confirme que le NUPW est, en vérité, le plus grand syndicat représentant les fonctionnaires de la Barbade. Toutefois, en ce qui concerne sa représentativité, le gouvernement indique que le NUPW compte un nombre d'affiliés moindre que les autres syndicats du secteur public, lesquels sont représentés par le Congrès des syndicats et les Associations de personnel de la Barbade (CTUSAB). Le gouvernement précise que bien que le CTUSAB ne soit pas accrédité comme syndicat mais plutôt comme organisation faîtière, il conduit cependant des négociations au nom de ses affiliés, notamment les enseignants, le Syndicat des travailleurs de la Barbade (BWU), les infirmières, ainsi que les employés des services en uniforme chargés de la discipline tels que les policiers, les gardiens de prison et les pompiers. En conséquence, explique le gouvernement, le CTUSAB est une organisation plus représentative des fonctionnaires que ne l'est le NUPW, et, c'est avec cette organisation que le gouvernement a conclu un accord sur la nouvelle grille des salaires après une négociation de bonne foi. Le comité prend bonne note de cette information.

Cas no 1509 (Brésil)

18. Le comité a examiné ce cas relatif à l'assassinat du dirigeant syndical Valdicio Barbosa dos Santos lors de sa session de novembre 1998 [voir 311e rapport, paragr. 21]; il a prié le gouvernement de le tenir informé du résultat des procédures judiciaires intentées en relation avec cette affaire. Dans une communication en date du 25 janvier 1999, le gouvernement indique que les procédures pénales en question sont en instance devant le tribunal de justice de l'Etat du Espíritu santo (seconde instance de justice pénale) en vertu d'un recours d'appel intenté par le condamné, M. Romualdo Eustáquio Luz Faria. Egalement, le gouvernement indique que l'autre accusé, M. Gilberto Marçal da Rocha, est toujours en fuite et n'a pu être dès lors informé de la sentence. Le comité prend note de ces informations et prie le gouvernement de le tenir informé du résultat des procédures pénales en question.

Cas no 1916 (Colombie)

19. Lors du dernier examen du cas, le comité avait prié instamment le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour réintégrer dans leurs postes de travail les dirigeants syndicaux, les syndicalistes et les travailleurs qui avaient été licenciés pour avoir participé à une grève dans l'entreprise «Empresas Varias Municipales de Medellín» (en fait, dans le secteur du ramassage des ordures ménagères) et, si cela était impossible, pour qu'une entière compensation leur soit allouée. Il avait aussi demandé au gouvernement de prendre des mesures pour qu'à l'avenir ce soit un organe indépendant et non l'autorité administrative qui se prononce sur la légalité des grèves, et pour modifier les dispositions du Code du travail interdisant la grève dans un vaste éventail de services qui ne peuvent être considérés comme essentiels au sens strict du terme. [Voir 309e rapport, paragr. 105.]

20. Dans ses communications des 10 novembre 1998 et 15 janvier 1999, le gouvernement envoie copie de l'arrêt de la Cour suprême prononcé le 9 mars 1998 dans lequel il est indiqué que, en juin 1993, la plupart des travailleurs ont été réintégrés dans leur emploi et que les quatre travailleurs plaignants ont poursuivi leur arrêt de travail après qu'il eut été déclaré illégal. Ils n'ont donc pas droit aux indemnités de licenciement sans juste motif. Le gouvernement ajoute que le gouvernement de la Colombie, comme tout pays respectant l'Etat de droit, ne peut avoir d'autre attitude vis-à-vis des décisions judiciaires que de les accepter, de les respecter et de s'y conformer, eu égard à la séparation des pouvoirs. En conséquence, les travailleurs qui s'adressent maintenant à cet organisme international ont eu accès à toutes les actions et à tous les recours qui garantissaient l'exercice des droits de la défense, et ils en ont fait usage. Les décisions judiciaires qui en ont résulté, même si elles leur sont défavorables, ont l'autorité de la chose jugée et doivent être respectées par tous.

21. Par ailleurs, le gouvernement fait valoir que la plainte se fonde sur la notion d'arrêt de travail, qui est différente de la notion légale et constitutionnelle de grève. C'est ce que montre expressément le libellé de la plainte où il est déclaré que: «lors de l'assemblée générale du 7 février 1993, [les intéressés] sont convenus de se déclarer en session permanente», c'est-à-dire qu'ils n'ont jamais décidé de tenir un vote de grève. Il convient de souligner que les travailleurs n'ont jamais voté la grève: ils ont fait usage d'une figure sui generis, dénommée par le syndicat «assemblée permanente», mais, en pratique, il s'agissait d'un arrêt de travail illégal qui affectait le ramassage des ordures ménagères dans la deuxième ville du pays. L'article 56 de la Constitution politique de la Colombie garantit le droit de grève, sauf dans les services publics essentiels. Le législateur a développé ce précepte constitutionnel en précisant les activités qui constituent un service public essentiel, afin de garantir le plein exercice du droit de grève dans les services qui n'ont pas ce caractère. S'il existe actuellement des lois qui qualifient expressément certains services publics comme essentiels (par exemple la loi no 142 de 1994 sur les services publics de proximité, parmi lesquels figure la voirie), à l'époque où a été prise la décision no 00414 du 18 février 1993, ce sont les dispositions invoquées dans cette décision qui étaient en vigueur, puisque le précepte énoncé dans la Constitution politique de 1991 n'avait pas encore été développé, de sorte que sa légalité est incontestable. C'est ce que le Conseil d'Etat a déclaré dans son arrêt du 26 octobre 1994.

22. Le gouvernement déclare que, partant de l'existence d'un contrôle juridictionnel de la procédure administrative de déclaration d'illégalité (voir l'alinéa e)), dans le cadre duquel un arrêt est rendu par l'instance suprême de la juridiction contentieuse administrative, le Conseil d'Etat, arrêt qui doit être respecté par les intéressés et par le gouvernement lui-même, il convient de préciser ce qui suit: la procédure qui précède la décision de déclaration d'illégalité n'est pas arbitraire. Elle est conçue comme suit: a) L'unique autorité compétente pour constater un arrêt de travail ou une grève est l'inspecteur du travail, qui dresse un acte où sont consignés les faits constatés sur le lieu de travail, en requérant la présence des représentants de l'employeur et des travailleurs afin qu'ils interviennent au cours de cette formalité administrative. Si toutefois l'une des parties ne souhaite pas faire usage de ses droits, cela ne peut constituer un motif pour bloquer la procédure administrative. b) L'évaluation des faits incombe à la Sous-direction technique des affaires collectives, laquelle prépare un projet de décision qui est soumis au ministre pour signature. c) La décision appartient exclusivement au ministre, après avis du bureau du Conseiller juridique. d) L'acte administratif peut faire l'objet d'un recours. e) L'acte administratif pris par le ministre qui déclare illégal la grève ou l'arrêt de travail peut être attaqué devant l'autorité juridictionnelle. Ce contrôle protège les intéressés contre un éventuel abus de pouvoir du ministre et contre l'éventuelle illégalité de sa décision, et il a dans l'ordre juridique colombien le même effet qu'aurait la recommandation du Comité de la liberté syndicale tendant à ce que l'adoption de la décision soit confiée aux juges et non au pouvoir administratif. La formule retenue dans le système juridique national tient compte de la nécessité de rendre en la matière des décisions rapides qui puissent jouer un rôle de dissuasion ou de persuasion afin d'obtenir que le groupe de travailleurs qui est éventuellement en train d'enfreindre l'ordre juridique modifie sa conduite; c'est pourquoi cette tâche incombe aux autorités administratives, sans pour autant que leurs décisions soient à l'abri des critiques qui peuvent leur être adressées du point de vue de l'ordre juridique lui-même, par les voies de recours juridictionnelles qui sont ouvertes aux travailleurs.

23. Le gouvernement indique que, une fois qu'un arrêt de travail a été déclaré illégal, l'employeur est en droit de licencier les travailleurs en cause, en tenant compte de leur degré de participation, et sa décision peut être contestée devant les tribunaux du travail, qui peuvent ordonner la réintégration des travailleurs licenciés illégalement ou sans juste motif.

24. En ce qui concerne la qualification des services publics essentiels, dans lesquels la Constitution colombienne interdit l'exercice du droit de grève (art. 56), le gouvernement ne partage pas la préoccupation du Comité de la liberté syndicale au sujet du «vaste éventail de services» dans lesquels la grève est limitée. En droit interne, seuls sont considérés comme essentiels les services publics qui ont expressément été qualifiés comme tels par le législateur et, en ce qui concerne ces services, la Cour constitutionnelle se réserve «un contrôle matériel sur la décision législative afin de déterminer si l'activité en question constitue ou non un service public essentiel» (arrêt C-472 du 27 octobre 1994). Aux termes de cet arrêt, «un service public a le caractère de service essentiel lorsque ses activités contribuent de façon directe à la protection de biens, à la satisfaction d'intérêts ou à la réalisation de valeurs liés au respect, à l'exercice et à la mise en œuvre effective des libertés et droits fondamentaux». Le critère de la Cour constitutionnelle coïncide avec celui de la commission d'experts, énoncé dans l'étude d'ensemble de 1983 (paragr. 213 et 214), selon lequel seuls peuvent être considérés comme essentiels les services publics «dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne».

25. Les activités que le législateur a qualifiées de services publics essentiels sont celles qui correspondent aux circonstances particulières de la réalité colombienne et, ainsi qu'il a déjà été signalé, il ne s'agit pas d'une définition discrétionnaire. Dans les cas où, parce qu'il s'agit de services publics essentiels, l'exercice du droit de grève est interdit en vertu de la Constitution, il est prévu, à titre de garantie compensatoire que le différend sera réglé par voie d'arbitrage. Les dispositions du droit interne sont donc conformes aux interprétations de la commission d'experts concernant les droits d'organisation et de négociation énoncés dans les conventions nos 87 et 98 de l'OIT.

26. Le comité note que la Cour suprême de justice n'a pas accordé la réintégration ni une indemnisation pour licenciement sans juste motif à quatre demandeurs qui avaient participé et persisté à participer à l'arrêt de travail ayant donné lieu à la plainte qui fait l'objet du cas no 1916, arrêt de travail qui avait été déclaré illégal. Le comité observe que la décision de la Cour suprême de justice se fonde sur la législation en vigueur qui habilite le ministre du Travail à déclarer illégal une grève ou un arrêt de travail, et que la déclaration d'illégalité de l'arrêt de travail objet du présent cas se fonde sur l'interdiction de la grève dans les services publics et, notamment, dans les services d'hygiène et de voirie (art. 430 du Code du travail). A cet égard, le comité relève que, selon les documents dont il dispose, l'arrêt de travail a débuté le 7 février 1993 et a été déclaré illégal le 18 février. Le comité n'exclut donc pas que l'interruption du service de ramassage des ordures ménagères pendant onze jours ait pu mettre en péril la santé de la population, et que cela ait pu donner lieu à certaines sanctions. Bien que, comme le signale le gouvernement, l'arrêt de travail objet du présent cas ne se soit pas produit après un vote de grève, le comité rappelle que la décision de déclarer la grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement mais à un organe indépendant des parties et jouissant de leur confiance [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 522], et que la législation interdit la grève dans un très large éventail de services publics qui ne sont pas nécessairement essentiels. [Voir 309e rapport, paragr. 101.] Dans ces conditions, le comité signale les aspects législatifs du cas à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations qui, depuis de nombreuses années, critique les dispositions de la législation interdisant la grève dans certains services qui ne sont pas essentiels.

Cas no 1925 (Colombie)

27. A sa session de mars 1998, le comité avait formulé les recommandations suivantes concernant les allégations qui restaient en suspens. [Voir 309e rapport, paragr. 119.]:

28. Dans une communication du 15 janvier 1999, le gouvernement a fait parvenir ses observations concernant ces questions. Egalement, l'entreprise AVIANCA a envoyé des informations concernant ces mêmes questions. A cet égard, étant donné que l'entreprise AVIANCA ne constitue pas une organisation plaignante dans le présent cas, le Bureau a demandé au gouvernement s'il désirait que l'information fournie par AVIANCA soit considérée comme faisant partie de la réponse du gouvernement. Dans ces conditions, le comité décide de reporter l'examen de ces questions en attendant la réponse du gouvernement sur ce point.

Cas no 1954 (Côte d'Ivoire)

29. Lors du dernier examen de ce cas à sa session de novembre 1998, le comité avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour obtenir la réintégration, dans leur poste de travail, de 300 travailleurs et 40 délégués du personnel nommément désignés, de la Compagnie abidjanaise de réparation navale et de travaux industriels (CARENA) à la suite de mouvements de grève déclenchés en mars 1997; s'agissant du conflit de travail affectant cette société, le comité avait également demandé au gouvernement de rouvrir les négociations à ce sujet et de le tenir informé des décisions de la commission consultative du travail composée des parties concernées sous la supervision des techniciens du ministère de l'Emploi. [Voir 311e rapport, paragr. 411 a) et d)).] Enfin, le comité avait demandé au gouvernement de diligenter des enquêtes pour ce qui est des diverses interventions des forces de l'ordre contre les grévistes participant aux mouvements de grève de mars 1997 ainsi que de l'attaque et de l'occupation des locaux de Dignité pendant plusieurs jours en février 1998. [Voir 311e rapport, paragr. 411 b) et c).]

30. Dans une communication en date du 5 février 1999, le gouvernement réitère ses commentaires antérieurs relatifs aux événements de mars 1997 et selon lesquels Dignité a déclenché une grève illégale violant tant le protocole d'accord conclu entre les parties, que le Code du travail et le décret no 96-208 du 7 mars 1996 relatif à la procédure de conciliation concernant les différends collectifs du travail. Le gouvernement soutient que c'est à bon droit que le ministre de l'Emploi, de la Fonction publique et de la Prévoyance sociale a jugé que la grève du 5 mars 1997 était illégale; dans ce contexte et compte tenu de la règle de la séparation des pouvoirs, le gouvernement ne peut dès lors intervenir pour obtenir la réintégration des travailleurs licenciés à la suite de ces mouvements de grève. A tous égards, le gouvernement rappelle que les travailleurs qui s'estiment lésés peuvent saisir les tribunaux nationaux pour être rétablis dans leurs droits conformément aux règles en vigueur. Tout en prenant note de ces informations, le comité ne peut que rappeler que la décision de déclarer une grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement mais à un organe indépendant des parties et jouissant de leur confiance [voir 311e rapport, paragr. 405]; en l'espèce, la déclaration d'illégalité ayant été utilisée par l'employeur pour licencier abusivement un nombre considérable de travailleurs, le comité ne peut que déplorer cette atteinte à la liberté syndicale et prie instamment à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soient réintégrés, dans leur poste de travail s'ils le souhaitent, tous les travailleurs et tous les délégués des travailleurs victimes de discrimination antisyndicale. En outre, il demande au gouvernement de rouvrir les négociations au sujet du conflit de travail à la société CARENA et de le tenir informé des décisions de la commission consultative du travail mise sur pied dans ce contexte.

31. Pour ce qui est des interventions répétées des forces de l'ordre, le gouvernement souligne à nouveau qu'elles étaient pleinement justifiées puisque les situations concernées présentaient un caractère de gravité où l'ordre public se trouvait sérieusement menacé; à cet égard, le gouvernement précise, en ce qui concerne les événement de mars 1997, que les travailleurs ont non seulement utilisé des piquets de grève en envahissant la voie publique mais également menacé les installations de l'entreprise notamment les bateaux en cours de construction. Pour ce qui est de la marche de protestation du 4 février 1998, Dignité n'aurait jamais obtenu l'autorisation préalable requise du ministère de l'Intérieur au regard de la loi no 92-464 portant répression de certaines formes de violence; cette situation aurait dès lors entraîné l'intervention des forces de la Police nationale qui ont évité des débordements préjudiciables à la paix sociale. Tout en notant ces informations, le comité déplore que le gouvernement ne fournisse aucune information nouvelle et ne peut que réitérer ses conclusions aux termes desquelles l'emploi des forces de l'ordre constituait en l'espèce d'une atteinte aux droits syndicaux des travailleurs concernés. Enfin, le comité prend note du fait que le gouvernement a versé un montant de 100 millions de francs CFA aux centrales syndicales Dignité et la Fédération des syndicats autonomes de Côte d'Ivoire (FESACI) afin qu'elles puissent restaurer et construire leur siège étant entendu que la bourse du travail est entièrement occupée par l'Union générale des travailleurs de la Côte d'Ivoire (UGTCI).

Cas nos 1512 et 1539 (Guatemala)

32. A ses sessions de novembre 1997 et mars 1998, le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé des progrès accomplis par la Commission d'enquête historique au sujet des allégations en instance, relatives à des assassinats et disparitions de syndicalistes (1990-1994). [Voir 308e rapport, paragr. 394 b), et 309e rapport, paragr. 19.] A cet égard, à sa réunion de novembre 1998, le comité avait pris note du fait que le gouvernement avait indiqué que, lorsque ladite commission aurait présenté son rapport, il serait transmis au comité; le comité a alors indiqué attendre de recevoir le rapport en question.

33. Par une communication en date du 29 janvier 1999, le gouvernement a transmis une copie d'une déclaration de la Commission d'enquête historique aux termes de laquelle elle estime qu'elle terminera son travail au cours du mois de janvier 1999 et qu'à ce moment le rapport sera remis aux partis et au Secrétaire général des Nations Unies qui le rendront public; la commission en question déterminera la date de cette remise qui aura lieu durant le mois de février 1999. Le comité attend de recevoir le rapport en question.

Cas no 1876 (Guatemala)

34. Lors de son dernier examen du cas (novembre 1998), le comité avait noté, en ce qui concernait les enquêtes sur le viol dont aurait été victime la syndicaliste Vilma Cristina Gonzáles et les détentions alléguées des syndicalistes Eswin Rocael Ruiz Zacanías, Edwin Tutio Enríquez García et Belarmino Gonzales de León, que le gouvernement avait déclaré que les intéressés, qui exerçaient normalement leurs activités, continuaient à ne pas collaborer avec les autorités dans le cadre des enquêtes, ce qui n'avait pas permis de progresser. Le comité avait souligné qu'il ne poursuivrait l'examen de ces allégations que si l'organisation plaignante lui envoyait des informations complémentaires sur les faits allégués et sur les raisons pour lesquelles les intéressés ne collaboraient pas à la procédure. [Voir 311e rapport, paragr. 47.] Le comité note que l'organisation plaignante n'a toujours pas envoyé les informations complémentaires qui lui avaient été demandées. Il décide, en conséquence, comme il l'avait annoncé, qu'il ne poursuivra pas l'examen de ces aspects du cas. Par ailleurs, en ce qui concernait les allégations d'acte de discrimination antisyndicale dans l'exploitation agricole «El Salto», le comité avait demandé au gouvernement de diligenter une enquête et de répondre spécifiquement aux allégations de discrimination et de prendre des mesures pour réintégrer les travailleurs licenciés dans leurs postes de travail s'il était avéré qu'ils avaient été licenciés en raison de leurs activités syndicales. [Voir 311e rapport, paragr. 50.] Le gouvernement, dans une communication du 29 janvier 1999, déclare que le 19 septembre le recours en nullité relatif à cette affaire a été classé, aucune des parties n'ayant manifesté d'intérêt à la poursuite de la procédure. Le comité prend note de cette information.

Cas no 1936 (Guatemala)

35. Lors de l'examen précédent du cas (novembre 1998), le comité avait prié le gouvernement de le tenir informé du résultat de deux procédures pénales relatives, pour la première, à la confiscation d'un bien meuble propriété de l'Institut national de l'électrification, intentées contre des membres du syndicat des travailleurs de cette institut et, la seconde, relative à une action individuelle intentée par le gérant de l'institut contre un groupe de travailleurs. [Voir 311e rapport, paragr. 51.] Dans une communication en date du 29 janvier 1999, le gouvernement indique que le bien meuble qui concerne la première procédure pénale a été remis par les dirigeants syndicaux à l'institut et que, par ce fait même, le gérant administratif de cet institut considère le problème comme réglé. En ce qui concerne la seconde procédure, le gouvernement précise qu'il s'agit d'une action individuelle intentée à titre personnel par le gérant et que le ministère public a prié l'autorité judiciaire concernée de classer l'affaire. Le comité prend note de ces informations.

Cas no 1883 (Kenya)

36. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa session de novembre 1997. [Voir 308e rapport, paragr. 45 à 47.] Le comité avait alors prié le gouvernement de transmettre une copie du jugement de la Haute Cour concernant le rétablissement de l'enregistrement de l'Union des travailleurs de la protection des espèces sauvages et des secteurs connexes.

37. Dans une communication en date du 6 octobre 1998, le gouvernement transmet copie de la décision de la Cour en date du 7 octobre 1997, qui rejette la procédure intentée par le syndicat. La décision de la Cour aurait rejeté la procédure du syndicat en raison du fait que le recours en mandamus n'était pas la procédure appropriée dans un tel cas et que l'organisation plaignante aurait dû épuiser les procédures appropriées plutôt qu'une procédure produisant des résultats plus rapides, selon le conseil du syndicat. Selon le gouvernement, la décision autoriserait le syndicat à poursuivre l'affaire. A cet égard, le comité prie le gouvernement de le tenir informé de toutes procédures intentées par le syndicat et de leurs résultats.

Cas no 1877 (Maroc)

38. A sa session de juin 1998, le comité avait prié le gouvernement de le tenir informé de l'évolution des procédures judiciaires intentées par les travailleurs de la société SOMADIR à Casablanca et El Jadidale, qui avaient été licenciés ou suspendus en raison de leurs activités syndicales légitimes. [Voir 310e rapport, paragr. 27 à 29.] Dans une communication en date du 29 octobre 1998, le gouvernement indique que 33 salariés ont été réintégrés dans leur poste, que trois affaires ont été réglées à l'amiable dans le cadre de la procédure de conciliation devant le juge et que trois autres ont été jugées définitivement en faveur des salariés licenciés qui ont bénéficié des indemnités légales de licenciement. En outre, sept dossiers seraient en instance devant la Cour d'appel alors que les autres suivent leur cours devant le tribunal de première instance. Tout en prenant note avec intérêt de ces informations, le comité prie le gouvernement de continuer à le tenir informé de l'évolution des suites judiciaires de cette affaire.

Cas no 1719 (Nicaragua)

39. Lors de sa session de novembre 1997, le comité a examiné ce cas relatif à des licenciements dans le domaine des douanes à la suite d'une grève en 1993. [Voir 308e rapport, paragr. 48 à 52.] Le comité rappelle qu'il avait alors invité le gouvernement, afin de faciliter la reprise de relations professionnelles harmonieuses, à s'efforcer de favoriser la réintégration dans leur poste de travail de dirigeants syndicaux et des syndicalistes de l'UNE qui avaient été licenciés dans le secteur des douanes. [Voir 304e rapport, paragr. 395 à 416.]

40. Par des communications en date des 8 janvier, 23 février et 4 mars 1998, l'Union nationale des employés (UNE) a indiqué que le gouvernement n'avait pas respecté les recommandations formulées par le comité en juin 1996, n'ayant pas notamment réintégré et indemnisé les travailleurs licenciés dans le secteur des douanes. L'organisation plaignante insiste sur le fait que les licenciements de 144 personnes ont été pris à la suite d'une grève et qu'ils visaient la totalité de la direction des syndicats William Ruiz Martínez, Héroes et Mártires del Sur, Pablo López, Aduana El Espino et la fédération FETRAP.

41. Par des communications en date des 5 octobre 1998 et 25 janvier 1999, le gouvernement indique que des relations professionnelles harmonieuses existent dans le secteur des douanes et qu'il a conclu une convention collective entre la Direction générale des douanes et le Syndicat des travailleurs des douanes dont il joint copie.

42. Le comité prend note de ces informations. Toutefois, le comité regrette que, malgré le temps écoulé depuis ses recommandations (juin 1996), les parties n'ont pu en venir à un accord en ce qui concerne la réintégration des travailleurs licenciés à la suite de la grève de 1993. Le comité, conscient des difficultés de réintégrer les travailleurs qui ont été licenciés depuis plus de six ans, prie instamment le gouvernement de prendre les mesures relevant de sa compétence pour que les parties en viennent à un accord sur la possibilité d'indemniser justement les travailleurs préjudiciés, si la réintégration est impossible.

Cas no 1903 (Pakistan)

43. Lors de son dernier examen du cas à sa session de juin 1997 [voir 307e rapport, paragr. 39 à 41], le comité avait demandé au gouvernement, en ce qui concernait l'annulation de la décision de suspension des activités syndicales du Syndicat des travailleurs de l'usine Pak China Fertilizer Ltd., de lui envoyer une copie de la décision prononcée en appel par la Commission des relations industrielles (CIRC). Concernant les licenciements de MM. Hakam Khan et Manzoor Hussain, le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé de l'évolution des procédures devant le tribunal du travail, y compris de tout recours en appel qui serait diligenté, et de lui envoyer copie du jugement dès qu'il serait rendu.

44. Le gouvernement, dans une communication du 2 février 1999, a transmis la décision de la CIRC prononcée le 28 mai 1997 d'où il ressort que le recours en appel concernant l'annulation de la décision de suspension du Syndicat des travailleurs de l'usine Pak China Fertilizer Ltd a été déclaré recevable et que l'affaire a été renvoyée sur le fond à une juridiction inférieure chargée de statuer dans les deux mois. La décision de la CIRC indique également que le syndicat en question continuera à être suspendu jusqu'à ce que la décision finale soit rendue.

45. Tout en prenant note de cette décision du 28 mai 1997, le comité observe que le gouvernement avait déclaré dans une communication précédente que le greffier des syndicats avait réenregistré le syndicat le 5 avril 1997. Le comité demande en conséquence au gouvernement d'indiquer quel est le statut actuel de ce syndicat et de confirmer qu'il est bien en mesure d'exercer normalement ses activités. S'agissant du licenciement de MM. Hakam Khan et Manzoor Hussain, le comité demande instamment au gouvernement d'indiquer où en est l'évolution des procédures devant le tribunal du travail et de transmettre une copie du jugement dès qu'il sera rendu.

Cas no 1796 (Pérou)

46. Lors de sa session de juin 1998, le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé du résultat des procédures relatives aux licenciements des dirigeants syndicaux MM. Delfín Quispe Saavedra, Dionisios Mejía Ramos et Iván Arias Vildoso. [Voir 310e rapport, paragr. 38 à 40.]

47. Dans une communication datée du 4 février 1999, le gouvernement indique que: 1) le procès intenté par M. Delfín Quispe Saavedra a été entendu le 10 décembre 1998 et qu'il est en instance de jugement; 2) par un arrêt du 27 octobre 1997, la Chambre constitutionnelle et sociale de la Cour suprême a rejeté le recours en cassation intenté par M. Dionisios Mejía Ramos et renvoyé l'affaire devant la Chambre civile de Sunta le 6 mars 1998. Le dossier a été classé par le premier juge du travail; et 3) en ce qui concerne M. Iván Arias Vildoso, la Cour suprême de justice n'a pas encore statué.

48. Le comité prend note de ces informations. Il demande au gouvernement de le tenir informé de l'issue finale des procès intentés par les dirigeants syndicaux Delfín Quispe Saavedra et Iván Arias Vildoso.

Cas no 1813 (Pérou)

49. A sa session de juin 1998 [voir 310e rapport, paragr. 41 à 43], le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé du résultat de la procédure judiciaire relatif à la mort des syndicalistes Alipio Chueca et Juan Marco Donayre Cisceros suite aux coups de feu tirés par le personnel de la sécurité de CORDECALLAO (le gouvernement avait fait savoir que trois agents étaient impliqués dans cette affaire). Dans une communication du 23 décembre 1998, le gouvernement déclare qu'il y avait suffisamment d'éléments de preuve dans la procédure judiciaire en question pour ouvrir une audience publique et que cette dernière a débuté le 3 septembre 1998 et est toujours en cours. Le comité prend note de ces informations et prie le gouvernement de le tenir informé du résultat final de cette procédure.

Cas no 1944 (Pérou)

50. A sa réunion de novembre 1998, le comité avait, pour ce qui est des allégations encore en instance, formulé les recommandations suivantes [voir 311e rapport, paragr. 547]:

51. Dans ses communications en date des 9 décembre 1998 et 4 février 1999, le gouvernement indique en ce qui concerne le licenciement du syndicaliste M. Mickey Juán Alvarez Aguirre, que, en raison de la publication des lois nos 26546 et 26623, le pouvoir judiciaire est en cours de réorganisation générale qui a pour conséquence une réduction considérable de la main-d'œuvre. Compte tenu du danger réel d'affaiblir l'administration de la justice et en raison des nécessités qu'impose ce service, il a été décidé de ne pas prendre en considération la communication envoyée par M. Alvarez Aguirre alléguant l'usage du congé pour activités syndicales comme secrétaire de défense du Syndicat des travailleurs du district judiciaire de Lambayeque. Le refus n'est aucunement lié à une politique de discrimination antisyndicale comme le conclut le Comité de la liberté syndicale. De plus, la résolution du président de la Cour supérieure de Lambayeque refusant un tel congé et ordonnant de se présenter immédiatement à son poste de travail constitue un ordre à caractère obligatoire. Cette ordonnance n'a pas été respectée par le destinataire qui s'est contenté d'adresser des communications au président de la Cour intentant une réclamation interne sur le refus de congé susmentionné. Ces communications ont été transmises à la commission exécutive, celle-ci notifiant à nouveau le destinataire de l'obligation de réintégrer son poste de travail, sans résultat positif. Dans tous les cas, M. Alvarez Aguirre devait se présenter immédiatement à son poste de travail, sans préjudice de son droit à intenter une réclamation pour la non-reconnaissance du congé syndical. Néanmoins, M. Alvarez Aguirre n'a pas respecté les ordres de ses supérieurs délaissant de manière injustifiée son poste de travail les 23, 24 et 25 février 1996 ainsi que le 8 avril de la même année. Dans ce contexte, la procédure disciplinaire et le licenciement ont été pris en raison de la faute grave constituée par l'abandon injustifié du poste de travail - faute grave flagrante - et non en raison de motifs antisyndicaux de la part du gouvernement péruvien tel qu'allégué par la Fédération nationale des travailleurs du pouvoir judiciaire. Il ne s'agit pas d'actions antisyndicales ni de mesures prises en raison de son statut de syndicaliste. Toutefois, malgré ce qui vient d'être exposé, la législation du travail péruvienne prévoit que les travailleurs exerçant des fonctions syndicales sont protégés dans les cas de réorganisation et de réduction du personnel. A cet égard, l'article 30 du décret-loi no 25593, loi sur les relations collectives de travail, stipule que «le privilège syndical garantit à certains travailleurs de ne pas être licenciés ni mutés à d'autres établissements dans la même entreprise, sans cause juste démontrée ou avec leur consentement. Le consentement du travailleur n'est pas requis dans les cas de transfert qui n'impliquent pas l'abandon de la fonction syndicale».

52. A cet égard, le comité souhaite rappeler que l'organisation plaignante avait allégué (sans que le gouvernement ne l'ait contesté), que M. Alvarez Aguirre a utilisé son congé pour activité syndicale en conformité avec une résolution administrative de la Cour suprême de justice (no 023-A-87 D/GA/PS) qui autorise de tels congés à la seule condition d'en informer les présidents concernés et le bureau du personnel. Dans ces conditions, le comité considère que les nécessités du service, dues à la réorganisation générale invoquée par le gouvernement, ne peuvent être une excuse valable pour nier le droit au congé pour activités syndicales, ce principe étant particulièrement valable dans le cas de réorganisation du personnel, et encore moins pour licencier un dirigeant syndical qui a fait usage de congé pour activités syndicales. En conséquence, le comité prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires sans délai pour que le dirigeant syndical Mickey Juán Alvarez Aguirre soit rétabli à son poste de travail sans perte de ses droits acquis.

53. En ce qui concerne le refus d'octroyer le certificat de zonification pour le fonctionnement de l'Institut supérieur technologique privé «Energie et développement» (ISTED), le gouvernement indique que la municipalité de Lima Metropolitana n'a pas encore rendu sa décision en ce qui concerne le recours en reconsidération intenté par la Fédération des travailleurs de l'électricité du Pérou. Le gouvernement indique qu'il transmettra au comité la décision dès qu'elle sera prononcée par ladite municipalité. Le comité est dans l'attente d'une décision finale concernant ce recours.

54. Enfin, en ce qui concerne l'allégation de non-respect de la sentence arbitrale de la part des entreprises Electro Sur Este S.A. et EGEM S.A. qui a mis fin au processus de négociation collective, le gouvernement déclare que le pouvoir judiciaire n'a pas encore prononcé sa décision sur le recours en appel intenté par la Fédération des travailleurs de l'électricité du Pérou. Le gouvernement indique qu'il transmettra cette décision au comité dès qu'elle sera prononcée par la deuxième Chambre civile de Cusco. Le comité est dans l'attente d'une décision de cette instance judiciaire.

Cas no 1785 (Pologne)

55. A sa session de juin 1998, le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé de tout élément nouveau concernant les questions d'indemnisation en numéraire des organisations syndicales et des attributions des biens immeubles du syndicat NSZZ «Solidarno» et à l'Alliance générale des travailleurs polonais (OPZZ). Le comité avait noté le caractère complexe de la question de la répartition des biens de l'ancienne organisation syndicale, ainsi que les objections de NSZZ «Solidarno» à propos des décisions et décrets du ministère du Travail et de la Politique sociale et des travaux de la Commission des inventaires. [Voir 310e rapport, paragr. 53 à 65.]

56. Dans une communication du 1er octobre 1998, le gouvernement avait indiqué que le ministère du Travail et de la Politique sociale avait préparé le projet d'amendement de la loi du 25 octobre 1990 concernant la restitution des biens confisqués aux syndicats et aux organisations sociales à la suite de l'imposition de la loi martiale, et qu'il les avait soumis le 29 juin 1998 en vue de consultations interministérielles. Cet amendement s'imposait compte tenu de la nécessité pour le Trésor public de devoir régler, de façon urgente, sous d'autres formes qu'en numéraire, les obligations qui sont les siennes:

57. Le gouvernement avait indiqué que le projet d'amendement susmentionné tenait compte également du souhait exprimé par NSZZ «Solidarno» au cours de consultations préliminaires demandant que certaines dispositions de la loi sur les revendications soient modifiées.

58. Le gouvernement avait ajouté qu'un projet de décret d'application du Conseil des ministres avait été soumis pour consultations interministérielles en même temps que le projet d'amendement. Ce décret avait pour objet de régir les aspects pratiques des obligations du Trésor. Conformément à l'article 19 de la loi sur les syndicats, ces deux projets avaient été transmis à NSZZ «Solidarno» et à OPZZ (Alliance générale des syndicats polonais) pour avis.

59. Enfin, le gouvernement avait déclaré que, compte tenu de l'état d'avancement de ces deux textes, le Conseil des ministres les examinerait à l'automne 1998 et qu'il transmettrait immédiatement le projet de loi au Parlement. Le décret d'application du Conseil des ministres devrait être promulgué dès l'entrée en vigueur des dispositions de la loi amendée. Dans sa communication du 18 février 1999, le gouvernement annonce que la loi amendant la loi du 25 octobre 1990 a été adoptée le 3 décembre 1998 et qu'elle est entrée en vigueur le 30 décembre 1998.

60. S'agissant des objections de «Solidarno» selon lesquelles ses droits acquis auraient été violés par l'article 45 de la loi syndicale, l'affaire a été portée devant le Tribunal constitutionnel qui l'a rejetée le 3 décembre 1997. Le gouvernement fait aussi état de l'article 7 de la loi du 9 mai 1997 amendant la loi syndicale concernant le Fonds social (récréatif) des travailleurs, considéré par la loi comme des biens appartenant à une entreprise au sens du Code civil. «Solidarno» a contesté la constitutionnalité de cet article, ce qui a été accepté le 3 juin 1998 par le Tribunal constitutionnel et par la Diet le 28 août 1998. Le Parlement doit adopter un nouveau texte sur l'affectation des biens du Fonds social des travailleurs. Dans sa communication du 18 février 1998, le gouvernement indique, en décembre 1998, que le Sénat a adopté un projet de loi qui a été transmis à la Diet.

61. Le comité prend note avec intérêt des informations détaillées fournies par le gouvernement et exprime à nouveau l'espoir que l'ensemble des questions relatives au patrimoine des syndicats seront réglées dans un proche avenir. Il demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.

Cas no 1581 (Thaïlande)

62. Le comité a examiné ce cas pour la dernière fois à sa session de novembre 1998. A cette occasion, il avait noté que le projet de loi sur les relations professionnelles dans les entreprises d'Etat, auquel le gouvernement se réfère depuis 1993, avait finalement été adopté par la Chambre des représentants à l'automne 1998 mais faisait l'objet d'un recours en inconstitutionnalité devant le Conseil constitutionnel. [Voir 311e rapport, paragr. 89.]

63. Dans une communication du 4 février 1999, le gouvernement indique que, le 12 novembre 1998, le Conseil constitutionnel a déclaré que le projet de loi en question avait été adopté en violation des dispositions de la présente Constitution et que ce projet était donc irrecevable au regard de l'article 262 3) de la Constitution. Le gouvernement insiste sur les efforts qu'il a déployés afin d'accorder de nouveau aux travailleurs des entreprises de l'Etat le droit d'organisation et de négociation collective et regrette que ses tentatives des dernières années afin de garantir l'adoption dudit projet de loi aient échoué en novembre dernier, suite à une technicalité d'ordre juridique déclarant le projet de loi inconstitutionnel. Le gouvernement réaffirme son engagement à modifier ce projet de loi et indique que le ministère du Travail et du Bien-être social a immédiatement réintroduit un nouveau projet de loi qui a été approuvé par le Cabinet et envoyé à la Chambre des représentants qui l'a elle-même adopté en dernière lecture le 20 janvier 1999 avant de le transmettre au Sénat. Le projet de loi a été examiné en première lecture par le Sénat et vient d'être référé pour étude à une commission ad hoc.

64. Le comité prend bonne note de ces informations. Il doit néanmoins rappeler que, lors de son examen de ce cas en novembre 1991, il avait noté avec une vive préoccupation les nombreuses et graves incompatibilités avec les principes de la liberté syndicale contenues dans la loi sur les relations professionnelles dans les entreprises d'Etat et avait demandé instamment au gouvernement de prendre le plus rapidement possible des mesures pour abroger cette loi [voir 279e rapport, paragr. 482]. Le comité veut croire que les mesures nécessaires seront adoptées dans un proche avenir afin de modifier la législation pour garantir de nouveau le droit d'organisation et de négociation collective aux travailleurs des entreprises de l'Etat et demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.

Cas no 1895 (Venezuela)

65. A sa session de juin 1998 [voir 310e rapport, paragr. 66], lors de l'examen du cas relatif à la détention arbitraire du président du Syndicat unique de base des travailleurs du corps enseignant (SUBATRA), le comité avait noté que les autorités judiciaires avaient décidé de mettre en liberté M. José Ramon Pacheco pendant la durée de l'enquête et avait prié le gouvernement de le tenir informé du résultat de la procédure judiciaire contre ce dirigeant syndical pour falsification présumée de documents. Dans une communication du 4 novembre 1998, le gouvernement déclare que l'enquête reste ouverte tant que la responsabilité n'aura pas été établie puisqu'il existe des preuves que la commission a commis une faute, mais que le coupable n'a toujours pas été déterminé. Le comité prend note de ces informations et prie le gouvernement de le tenir informé du résultat final de cette procédure judiciaire.

* * *

66. Finalement, en ce qui concerne les cas nos 1618 (Royaume-Uni), 1834 (Kazakhstan), 1837 (Argentine), 1843 (Soudan), 1849 (Bélarus), 1850 (Congo), 1869 (Lettonie), 1884 (Swaziland), 1886 (Uruguay), 1891 (Roumanie), 1900 (Canada/Ontario), 1914 (Philippines), 1918 (Croatie), 1921 (Niger), 1926 (Pérou), 1937 (Zimbabwe), 1938 (Croatie), 1942 (Chine/Hong-kong), 1956 (Guinée-Bissau), 1957 (Bulgarie) et 1969 (Cameroun), le comité demande aux gouvernements concernés de le tenir informé des développements relatifs aux affaires les concernant. Il espère que ces gouvernements fourniront rapidement les informations demandées. En outre, le comité a reçu des informations concernant les cas nos 1698 (Nouvelle-Zélande), 1826 (Philippines), 1852 (Royaume-Uni), 1854 (Inde), 1862 (Bangladesh), 1890 (Inde), 1908 (Ethiopie), 1912 (Royaume-Uni/île de Man), 1914 (Philippines), 1945 (Chili) et 1966 (Costa Rica) qu'il examinera à sa prochaine session.


Cas no 1947

Rapport définitif

Plainte contre le gouvernement de l'Argentine
présentée par
l'Association du personnel aéronautique (APA)

Allégations: entraves à la négociation collective
- discrimination antisyndicale

67. La plainte faisant l'objet du présent cas figure dans une communication de l'Association du personnel aéronautique (APA) en date du 21 novembre 1997. Le gouvernement a fait parvenir ses observations par des communications en date des 22 mai, 6 et 28 octobre 1998.

68. L'Argentine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

69. Dans sa communication en date du 21 novembre 1997, l'Association du personnel aéronautique (APA) allègue que l'entreprise Aerolíneas Argentinas (S.A.) a créé une entreprise sous contrôle (Aerohandling) destinée au fret, et où ont été transférés des travailleurs d'une autre entreprise qui travaille dans les aéroports. L'APA ayant décidé d'entamer des négociations avec l'entreprise pour la signature d'une convention collective, ladite entreprise, après de multiples manœuvres dilatoires, de retards et d'obstruction dans la négociation, a désigné des représentants, mais ces derniers n'ont pas répondu au projet présenté par l'organisation syndicale, ni reçu les représentants syndicaux, méconnaissant ainsi les droits de l'organisation syndicale.

70. L'organisation plaignante ajoute qu'au cours de la période de négociation l'entreprise a licencié le dirigeant syndical M. Sergio Irigoyen qui participait à la négociation.

B. Réponse du gouvernement

71. Dans ses communications en date du 22 mai et des 6 et 28 octobre 1998, le gouvernement déclare que le conflit entre l'entreprise Aerohandling et l'Association du personnel aéronautique (APA) a abouti à la signature d'une convention collective entre les deux parties, et que le dirigeant syndical, M. Irigoyen, a lui-même demandé l'homologation de la convention en question.

72. En ce qui concerne le licenciement de M. Sergio Irigoyen, le gouvernement a fourni: 1) une copie de la décision no 60 du Tribunal de première instance du travail retirant à ce délégué syndical l'immunité syndicale figurant dans l'article 52 de la loi no 23551; les attendus de cette décision de justice mentionnent notamment que l'intéressé n'a pas contesté la remise de l'acte d'accusation formulé par l'employeur (obstruction au travail d'autrui, agressions verbales et physiques, etc.), ce qui oblige à considérer que les faits allégués par l'entreprise pour justifier la mesure prise à l'encontre de M. Sergio Irigoyen n'ont pas été contestés; 2) une copie de l'arrêt de la Cour d'appel concernant le recours intenté par M. Sergio Irigoyen contre la décision de première instance; cet arrêt confirme la décision contestée en se fondant en particulier sur le fait que M. Sergio Irigoyen n'a rien déclaré concernant les événements survenus le 29 octobre 1997 et dont il a été le protagoniste; 3) une copie de la décision de justice dans laquelle il est pris note du désistement de M. Sergio Irigoyen au sujet de sa demande de réintégration dans son poste, adressée à l'employeur, d'où il ressort que M. Sergio Irigoyen se désiste expressément de toute action juridique qu'il pourrait faire valoir contre les mesures prises par l'entreprise, ce qui implique qu'il reconnaît tacitement que l'entreprise a raison.

C. Conclusions du comité

73. Le comité note que, dans le présent cas, l'organisation plaignante allègue que l'entreprise Aerohandling a gêné et retardé la négociation d'une convention collective et que, durant la période de négociation, elle a licencié un délégué syndical (M. Sergio Irigoyen) qui participait à ladite négociation.

74. En ce qui concerne l'allégation relative au comportement d'obstruction de l'entreprise Aerohandling dans la négociation de la convention collective, le comité note avec intérêt que le gouvernement indique que le conflit s'est terminé par la signature d'une convention collective entre les parties. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l'examen de cette allégation.

75. En ce qui concerne l'allégation relative au licenciement du délégué syndical, M. Sergio Irigoyen, durant le processus de négociation collective auquel participait l'entreprise Aerohandling, le comité note que le gouvernement déclare que M. Sergio Irigoyen s'est expressément désisté devant l'autorité judiciaire de toute demande de réintégration à son poste de travail. Le comité note également que, devant les instances judiciaires successives auxquelles M. Sergio Irigoyen a eu recours, ce dernier n'a pas contesté l'accusation portée par l'entreprise (obstruction au travail d'autrui, agressions verbales et physiques, etc.) ni répondu de façon expresse aux faits qui lui sont reprochés. Dans ces conditions le comité ne poursuivra pas l'examen de cette allégation.

Recommandation du comité

76. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à décider que le présent cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.


Cas no 1982

Rapport définitif

Plainte contre le gouvernement du Brésil
présentée par
la Centrale unique des travailleurs (CUT)

Allégation: suspension d'un dirigeant syndical

77. La plainte figure dans une communication de la Centrale unique des travailleurs (CUT) en date du 4 août 1998. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication datée du 20 octobre 1998.

78. Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

79. Dans sa communication en date du 4 août 1998, la Centrale unique des travailleurs (CUT) allègue que, en violation flagrante des principes de la liberté syndicale, la direction de l'entreprise Volkswagen Do Brasil Ltda. a ordonné la suspension d'un membre du comité d'entreprise, M. Renan Cavalcante Santana, et a ouvert une enquête à son sujet pour faute grave. L'organisation plaignante fait savoir que M. Cavalcante Santana travaille dans l'entreprise en question depuis vingt-cinq ans et qu'il accomplissait son second mandat au sein du comité d'entreprise créé en vertu d'une convention collective. Selon l'organisation plaignante, l'entreprise a argué que le dirigeant syndical en question a tenté de nuire au bon climat de l'entreprise en critiquant et mettant en doute dans l'exercice de sa fonction de dirigeant syndical le bien-fondé de décisions internes.

B. Réponse du gouvernement

80. Dans sa communication du 20 octobre 1998, le gouvernement déclare que les parties au conflit, l'entreprise Volkswagen Do Brasil Ltda. et M. Renan Cavalcante Santana, sont arrivées à un accord qui met fin au contrat de travail de M. Cavalcante Santana et traite d'autres questions connexes; cet accord a été avalisé par la 5e commission de conciliation et de jugement de San Bernardo del Campo. L'accord entre les parties s'est fait librement et spontanément, et l'entreprise s'est engagée à indemniser M. Cavalcante Santana et à lui remettre le document signifiant la cessation de son contrat - pour qu'il puisse récupérer les versements faits au Fonds de garantie durant ses années de service -, un opuscule relatif à l'assurance chômage ainsi que la demande d'indemnité de chômage nécessaire aux autorités compétentes. Une fois l'indemnisation payée, l'entreprise et le dirigeant syndical considéreront qu'il y aura eu cessation du contrat de travail. Enfin, le gouvernement informe que l'accord en question a été validé par l'autorité judiciaire pour donner effet à ses conséquences juridiques et ordinaires. (Le gouvernement joint à sa réponse copie de l'accord conclu entre les parties devant la commission de conciliation ainsi que de la décision du tribunal régional du travail de la deuxième région de San Pablo.)

C. Conclusions du comité

81. Le comité observe que dans le cas présent l'organisation plaignante avait allégué que le dirigeant syndical, M. Cavalcante Santana, avait été frappé de suspension parce qu'il critiquait et mettait en doute le bien-fondé des décisions de l'entreprise Volkswagen Do Brasil Ltda. dans l'exercice de ses fonctions de dirigeant syndical.

82. Le comité observe que le gouvernement a fait savoir que: 1) les parties au conflit ont abouti à un accord validé devant la 5e commission de conciliation et de jugement de San Bernardo del Campo; 2) l'accord a été réalisé entre les parties de façon libre et spontanée; 3) l'entreprise s'est engagée à indemniser M. Cavalcante Santana (53 200 reales) et à lui remettre le document signifiant la cessation de son contrat pour lui permettre de récupérer les versements faits au Fonds de garantie lors de ses années de service, un opuscule relatif à l'assurance chômage ainsi que le formulaire nécessaire pour obtenir ces prestations auprès de l'autorité compétente, et 4) qu'une fois l'indemnisation versée l'entreprise et le dirigeant syndical considéreront qu'il y aura eu terminaison du contrat de travail.

83. Dans ces conditions, observant que l'organisation plaignante n'a pas envoyé d'informations complémentaires critiquant l'accord entre l'entreprise et le dirigeant syndical en question dans le cadre d'une transaction judiciaire, le comité considère que ce cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.

Recommandation du comité

84. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à décider que le présent cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.


Cas no 1987

Rapport définitif

Plainte contre le gouvernement d'El Salvador
présentée par
l'Internationale des communications (IC)

Allégations: refus d'octroi de la personnalité juridique
à plusieurs syndicats

85. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans une communication de l'Internationale des communications (IC) du 26 août 1998.

86. Le gouvernement a envoyé ses observations par des communications datées des 2 novembre et 17 décembre 1998.

87. El Salvador n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective.

A. Allégations de l'organisation plaignante

88. Dans sa communication du 26 août 1998, l'Internationale des Communications (IC) signale que l'Association salvadorienne des travailleurs de l'Administration nationale des télécommunications ANTEL (ASTA), l'une de ses organisations affiliées, lui a demandé de présenter une plainte contre le gouvernement d'El Salvador pour violation des droits syndicaux.

89. L'IC indique que, le 27 août 1997, les syndicats ASTA-ASTTEL ont demandé au ministère du Travail de reconnaître l'existence juridique du Syndicat national des travailleurs des télécommunications et apparentés (ATANTEL) et que, le 2 septembre de la même année, ledit ministère a refusé d'accorder cette reconnaissance, au motif que l'Administration nationale des télécommunications (ANTEL) était une institution autonome de droit public et qu'il était illégal de reconnaître des syndicats ne se trouvant pas dans le champ de l'«entreprise». A cet égard, les membres d'ATANTEL ont interjeté un recours en révision de la situation auprès dudit ministère, qui a été rejeté. Au cours des mois de septembre et d'octobre 1997, le projet de loi sur la privatisation d'ANTEL a fait l'objet de diverses modifications, ce qui a retardé les décisions relatives aux nouvelles demandes déposées par ATANTEL en vue d'obtenir sa reconnaissance juridique. Au cours de cette période, l'Internationale des communications et ses organisations affiliées de la région ont adressé aux autorités d'El Salvador divers messages de solidarité pour soutenir les travailleurs des télécommunications et notamment pour qu'ils obtiennent le droit syndical.

90. Selon l'IC, le processus de liquidation d'ANTEL a débuté le 29 décembre 1997. A cette occasion, tous les travailleurs de l'ancienne ANTEL ont été payés puis licenciés, et ensuite ils ont été embauchés à nouveau par la nouvelle Compañía de Telecomunicaciones de El Salvador (CTE, S.A. à C.V.). Néanmoins, le 2 janvier 1998, 72 travailleurs, tous dirigeants ou anciens dirigeants des syndicats ASTA-ASTTEL, ATTES et SINTEL, ont été licenciés. L'entreprise a déclaré que ces travailleurs étaient opposés au processus de privatisation, et justifié ces licenciements en invoquant l'inefficacité des travailleurs en question, étant donné que ces derniers consacraient leur temps à des activités incompatibles avec ses nouvelles fonctions (c'est-à-dire des activités syndicales). L'organisation plaignante ajoute qu'un groupe de travailleurs membres des syndicats ASTA-ASTTEL a convoqué une assemblée aux fins de constituer un syndicat au sein de l'entreprise. Par le décret no 53, amendé, l'Administration nationale des télécommunications (ANTEL) a été dissoute et liquidée. Tous ses actifs et obligations en cours ont été transférés à la Compañía de Telecomunicaciones de El Salvador, société anonyme à capital variable (CTE, S.A. à C.V.), et à l'Internacional de Telecomunicaciones, société anonyme à capital variable (INTEL, S.A. à C.V.). Le 13 février 1998, le ministère du Travail a rejeté la demande déposée par les travailleurs d'ASTA-ASTTEL. En conséquence, le 22 février 1998, 39 travailleurs se sont réunis en assemblée et ont approuvé la constitution d'un syndicat dénommé ASTTEL. La nouvelle demande a également été rejetée par le ministère du Travail, au motif que le sigle ASTTEL n'avait rien à voir avec le nom officiel du syndicat (Syndicat d'entreprise des travailleurs des télécommunications). Le 1er mai 1998, 44 travailleurs se sont réunis et ont approuvé la création du «Syndicat Unité des travailleurs de l'entreprise Compañía de Telecomunicaciones de El Salvador, S.A. à C.V. (SUTTEL)». Toutefois, le 24 juin de la même année, le ministère du Travail a refusé d'accorder la reconnaissance légale à ce syndicat, au motif que la législation nationale n'autorise la consultation d'un syndicat que lorsque six mois se sont écoulés depuis la précédente demande de reconnaissance.

91. L'IC souligne que, bien que les travailleurs aient utilisé tous les moyens prévus par la loi, les autorités ont toujours trouvé des arguments pour refuser d'accorder leur reconnaissance au syndicat. L'IC fait savoir que les travailleurs ont déposé un recours judiciaire auprès de la Cour suprême de justice d'El Salvador.

92. Selon l'IC, les agissements du ministère du Travail d'El Salvador dans le présent cas - et peut-être aussi la législation nationale pertinente - sont incompatibles avec le droit des travailleurs de constituer, sans autorisation préalable, les organisations de leur choix. En outre, le licenciement des travailleurs de l'entreprise constitue un acte de discrimination antisyndicale.

B. Réponse du gouvernement

93. Dans sa communication du 2 novembre 1998, le gouvernement déclare que, le 7 août 1997, le président du comité exécutif provisoire du syndicat dénommé Syndicat des travailleurs de l'industrie des télécommunications et apparentés (ATANTEL) a demandé par écrit la reconnaissance de la personnalité juridique. Ce dernier, selon son acte de fondation, a été constitué le 31 juillet 1997 par 46 travailleurs de l'Administration nationale des télécommunications, quatre travailleurs de l'Agence de presse et d'information d'El Salvador et deux travailleurs de la radio de l'Université centraméricaine José Simeón Cañas. Le 2 septembre 1997, cette demande de personnalité juridique a été déclarée non recevable, au motif que les travailleurs des institutions officielles autonomes - telles que l'Administration nationale des télécommunications (ANTEL) - ne peuvent constituer d'autres syndicats que «des syndicats d'entreprise», conformément à l'alinéa 20 de l'article 209 du Code du travail, dont le texte est le suivant: «Est considéré comme syndicat d'entreprise tout syndicat constitué par des travailleurs qui exercent leur fonction au sein d'une même entreprise, société commerciale ou institution officielle autonome». Le recours en annulation de cette décision présenté par le comité exécutif provisoire du syndicat a été déclaré irrecevable, non parce que le droit de constituer un syndicat était refusé aux travailleurs de l'Administration nationale des télécommunications (ANTEL), mais parce qu'il leur était indiqué que le Code du travail exigeait qu'ils s'organisent en syndicat d'entreprise. Par décision du 27 avril 1998, le procureur chargé de la défense des droits de l'homme a exempté le ministère du Travail et de la Sécurité sociale de toute responsabilité dans cette affaire.

94. Le gouvernement signale que le texte de l'article 2 de la loi sur la privatisation de l'Administration nationale des télécommunications (ANTEL) est le suivant: «Il sera procédé à la liquidation d'ANTEL par le transfert de ses biens, de ses droits et de ses obligations en cours aux sociétés Compañía de Telecomunicaciones de El Salvador, société anonyme à capital variable, abrégée ci-après CTE, S.A. à C.V., qui pourra faire usage de la marque d'ANTEL, et Internacional de Telecomunicaciones, société anonyme à capital variable, abrégée ci-après INTEL, S.A. à C.V.» Ces deux entreprises sont chargées du service public des télécommunications. Elles sont considérées, du point de vue juridique, comme des entités de droit privé réglementées par les dispositions de la loi susmentionnée, du Code du commerce et des autres lois pertinentes de la République. Le texte de loi en question désigne ces entreprises comme «les sociétés».

95. Le texte de l'article 43 de la loi susmentionnée est le suivant: «Une fois effectuée la procédure indiquée par les deux articles précédents, la société CTE, S.A. à C.V. établira des contrats de travail avec les ex-employés d'ANTEL, excepté ceux de l'hôpital d'ANTEL, le nouvel employeur étant tenu de maintenir les salaires à leur niveau antérieur au minimum. Si, après l'établissement de ces contrats, des travailleurs engagés sous ce nouveau régime venaient à être licenciés pour les motifs dits «de cessation de contrat sous la responsabilité de l'employeur», motifs définis par le Code du travail, l'employeur versera à chaque travailleur concerné une indemnité extraordinaire équivalant à la somme des salaires mensuels correspondant au temps restant à courir pour que la durée de son emploi atteigne 18 mois. Les travailleurs employés à l'hôpital d'ANTEL non réembauchés par l'ISSS toucheront une gratification supplémentaire correspondant à 25 pour cent de l'indemnité définie par l'article 41 de la présente loi.»

96. Le gouvernement ajoute que, le 5 janvier 1998, le président du comité exécutif provisoire du Syndicat d'entreprise des travailleurs des télécommunications d'El Salvador, dont le sigle est ASTTEL, a demandé que soit octroyée la personnalité juridique au syndicat en question, lequel, selon son acte de fondation, a été créé le 2 janvier 1998 par 43 travailleurs de CTE, S.A. à C.V. A la suite de cette demande, il a été procédé à une inspection du travail dans cette entreprise afin de vérifier si les fondateurs du syndicat se trouvaient à leur travail le 2 janvier 1998 à 9 heures. Les éléments réunis par le rapport établi à l'issue de cette inspection ont permis d'établir pleinement les faits suivants: a) le Syndicat d'entreprise des travailleurs des télécommunications d'El Salvador (ASTTEL) a été constitué devant notaire (en l'occurrence, Mme Lilian Guadrón) dans les locaux de l'Association salvadorienne des travailleurs des télécommunications; b) à la date de l'établissement de cet acte notarié (2 janvier 1998), date à laquelle ont débuté les activités de la société CTE, S.A. à C.V., dix des fondateurs du syndicat n'avaient exercé aucune fonction auprès de ladite société, et en conséquence il n'y avait pas de relation de travail étant donné que les dix personnes en question ne se sont pas présentées à leur poste de travail au jour indiqué, raison pour laquelle la législation du travail ne s'applique pas à ces personnes, qui ne pouvaient être considérées comme des travailleurs; c) vingt autres fondateurs du syndicat n'étaient pas présents, le 2 janvier 1998 à 9 heures, dans les locaux où, selon l'acte notarié, s'est tenue l'assemblée constitutive du syndicat; de ce fait, et vu que ces personnes ont affirmé catégoriquement avoir signé l'acte en question à des dates et en des lieux différents de ceux indiqués sur ce dernier mais que, sur ce document, leurs signatures figurent comme si elles avaient été présentes, et vu que le même document présente d'autres anomalies et irrégularités, celui-ci semble présenter des signes évidents d'inexactitude; d) de plus, il est établi que cinq des fondateurs ont touché l'indemnité extraordinaire prévue par l'article 43 de la loi sur la privatisation de l'Administration nationale des télécommunications, suite au licenciement dont ils ont fait l'objet le 2 janvier 1998, selon ce qu'il ressort des bordereaux correspondants, délivrés conformément aux dispositions de l'article 402, alinéa 20, du Code du travail; par conséquent, ces personnes n'avaient plus qualité de salariés de la CTE, S.A. à C.V. à la date où cette société a présenté le certificat joint au rapport.

97. Par ailleurs, l'acte notarié susmentionné présente diverses irrégularités au regard de la législation, en particulier les suivantes: a) la profession ou qualité des signataires supposés n'a pas été consignée, contrairement aux dispositions de l'alinéa 40 de l'article 32 de la loi sur le notariat; b) dans le préambule de cet acte, le notaire, au lieu de consigner la profession ou qualité des signataires, indique que ceux-ci sont des employés de la CTE, S.A. à C.V., contrairement à l'alinéa 60 de l'article 32 suscité, qui précise que «le notaire ne peut porter aucune sorte d'indication concernant les signataires sans l'accord exprès de ces derniers»; or, selon le document lui-même, à aucun moment les fondateurs n'ont manifesté un tel accord au notaire; c) l'alinéa 90 du même article 32 a également été enfreint; en effet, celui-ci dispose que «les brouillons, modifications, annotations portées entre les lignes, en-têtes et corrections de quelque nature que ce soit doivent être reportés et conservés intégralement à la fin du document, en présence des intéressés et avant que leurs signatures soient apposées»; or, dans l'acte notarié dont il est ici question, les brouillons du notaire et du syndicat n'ont pas été conservés, ce qui suffit à invalider le document, conformément aux dispositions de l'article 263 du Code de procédure civile, applicable au droit du travail en ce qu'il renvoie expressément à l'article 602 du Code du travail; d) l'alinéa 10 de l'article 32 suscité a également été enfreint; cet alinéa dispose que «le notaire doit exposer aux signataires les effets juridiques de l'acte ou du contrat concerné et mentionner qu'il l'a fait dans le document»; or, l'acte notarié lui-même indique que les effets juridiques de l'acte de fondation du syndicat n'ont pas été expliqués aux signataires, et rien n'a été consigné à cet égard; e) les dispositions de l'article 51 de la loi sur le notariat n'ont pas davantage été respectées; en effet, la signature du notaire ne figure dans aucun des feuillets que compte l'acte notarié et, de plus, son sceau manque au feuillet numéro 3.

98. Sur la base des considérations qui précèdent et des dispositions légales, et compte tenu de ce que le quorum fixé par la loi pour constituer une association professionnelle, ainsi que le prescrit l'article 211 du Code du travail, n'a pas été atteint, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale déclare que «l'octroi de la personnalité juridique au Syndicat d'entreprise des travailleurs des télécommunications d'El Salvador est sans objet».

99. Le gouvernement indique que, le 23 février 1998, le président du comité exécutif provisoire du Syndicat d'entreprise des travailleurs des télécommunications d'El Salvador ASTTEL (syndicat constitué devant notaire le 22 février 1998 à 9 heures) a demandé que soit concédée la personnalité juridique à ce syndicat. Une décision a été prise à ce sujet le 30 mars 1998, décision dont voici une partie du texte: «selon ce qui est consigné, des démarches ont été effectuées le 2 janvier 1998 en vue de fonder le Syndicat d'entreprise des travailleurs des télécommunications d'El Salvador; l'octroi de la personnalité juridique à ce syndicat a été déclaré non recevable pour les raisons figurant dans le texte de la décision de ce ministère, datée du 11 février 1998; le 22 février 1998, des démarches similaires ont été effectuées en vue de constituer un deuxième syndicat, ayant le même nom et le même siège social que le premier; la demande de personnalité juridique de ce deuxième syndicat a été présentée au ministère le 23 février 1998 par une autre personne agissant en tant que président du comité exécutif provisoire. Or cette démarche enfreint les dispositions de l'article 248 du Code du travail, selon lequel «aucune démarche ne pourra être effectuée en vue de constituer un nouveau syndicat lorsque l'intervalle écoulé depuis sa précédente demande de reconnaissance est inférieur à six mois».

100. De plus, ce deuxième syndicat a été fondé par 39 personnes, parmi lesquelles 14 avaient participé à la création du premier; quatre autres personnes sont des employés de confiance et une dernière est un représentant patronal de la Compañía de Telecomunicaciones de El Salvador, société anonyme à capital variable. Pour ces deux raisons (l'une seule de ces raisons suffisant d'ailleurs à justifier ce qui suit), le nombre des membres fondateurs se réduit à moins de 35 personnes, ce qui contrevient à l'article 211 du Code du travail, lequel dispose que «tout syndicat de travailleurs doit compter, en vue de sa constitution et de son fonctionnement, 35 membres au minimum».

101. Par conséquent, pour les raisons invoquées ci-dessus et conformément aux dispositions légales susmentionnées, le secrétariat d'Etat au Travail a refusé l'octroi de la personnalité juridique au Syndicat d'entreprise des travailleurs des télécommunications d'El Salvador.

102. Toujours selon le gouvernement, trois membres du comité exécutif provisoire du Syndicat Unité des travailleurs de l'entreprise Compañía de Telecomunicaciones de El Salvador, S.A. à C.V. (SUTTEL) ont demandé, le 28 mai 1998, que soit accordée la personnalité juridique à ce syndicat. Le 17 juin 1998, la décision administrative suivante a été rendue: «en application des dispositions légales susmentionnées, la constitution du syndicat en question n'a pas été autorisée car l'intervalle écoulé depuis la demande de reconnaissance du Syndicat d'entreprise des travailleurs des télécommunications d'El Salvador est inférieur à six mois, et les buts du syndicat SUTTEL n'ont pas été indiqués. Par conséquent, conformément à ce qui précède et aux dispositions légales susmentionnées, le secrétariat d'Etat a refusé l'octroi de la personnalité juridique au syndicat SUTTEL.

103. Le 30 juin 1998, une décision administrative a déclaré irrecevable la demande déposée par trois membres du comité exécutif provisoire de SUTTEL en vue d'obtenir la révocation du refus de l'octroi de la personnalité juridique au syndicat, étant donné que cette demande, conformément au Code de procédure civile, aurait dû être déposée le jour même ou le lendemain de la décision contestée.

104. En dernier lieu, le gouvernement déclare que, le 7 septembre 1998, le président et le vice-président du comité exécutif provisoire du Syndicat d'entreprise des travailleurs des télécommunications d'El Salvador, dont le sigle est «SITTEL», fondé le 23 août 1998 à 9 heures, ont demandé que soit concédée la personnalité juridique à ce syndicat. Cette demande est actuellement en cours d'examen.

105. En ce qui concerne les allégations relatives au licenciement de 72 travailleurs, tous dirigeants ou ex-dirigeants des syndicats ASTA, ASTTEL, ATTES et SINTEL, licenciement effectué le 2 janvier 1998, le gouvernement, par une communication du 17 décembre 1998, renvoie à une communication de la Compañía de Telecomunicaciones de El Salvador, S.A. à C.V., dont le résumé figure ci-après.

106. Conformément à la loi sur la privatisation de l'Administration nationale des télécommunications, les contrats de travail de l'ensemble des employés d'ANTEL ont pris fin le 31 décembre 1997, date à laquelle les biens, droits et obligations en cours d'ANTEL ont été transférés à la société CTE, S.A. à C.V., et tous les employés ont perçu les indemnités, primes et congés proportionnels dont la forme et les montants ont été établis par la loi sur la privatisation. Ces différents versements ont été consignés dans des documents où chacun des travailleurs indemnisés a accepté la cessation de son contrat de travail et déclare qu'ANTEL avait pleinement appliqué les obligations créées par la loi sur la privatisation de l'Administration nationale des télécommunications; les travailleurs ont déclaré celle-ci libre de toute responsabilité relevant du droit du travail et attestent amplement de sa bonne conduite. En conséquence de ce qui précède, l'ensemble des travailleurs d'ANTEL ont été considérés comme démissionnaires à compter du 31 décembre 1997; tous ont été indemnisés conformément à la loi et, à la même date, ANTEL a mis fin à l'ensemble de ses activités. Le versement des indemnités a été contrôlé par la Cour des comptes de la République, étant donné qu'aucun versement non conforme à la loi ne pouvait être effectué. ANTEL a mis fin à toutes ses activités.

107. Les 72 personnes mentionnées par l'organisation plaignante ont touché les indemnités en question pour un montant total de 7 353 113 colones et 91 centimes. L'article 43 de la loi sur la privatisation précise qu'une fois «accomplie la procédure indiquée par les deux articles précédents la société CTE, S.A. à C.V. passera des contrats de travail avec les ex-employés d'ANTEL. Au cas où, après l'établissement de ces contrats, de travailleurs ainsi engagés venaient à être licenciés pour les motifs dits «de cessation de contrat sous la responsabilité de l'employeur», motifs définis par le Code du travail, l'employeur versera à chaque travailleur concerné une indemnité extraordinaire équivalant à la somme des salaires mensuels correspondant au temps restant à courir pour que la durée de son emploi atteigne 18 mois». C'est en vertu de cette loi que CTE, S.A. à C.V. a engagé la totalité des ex-employés d'ANTEL par l'établissement d'un nouveau contrat de travail, entièrement distinct et sans aucun lien avec le contrat précédent. Parmi les travailleurs engagés figuraient ceux mentionnés par l'organisation plaignante. Etant donné que ces derniers ont été licenciés, chacun a touché la compensation extraordinaire correspondant à 18 mois de salaire, excepté deux travailleurs qui ne se sont pas présentés, bien que les sommes qui leur sont dues se trouvent à leur disposition. C'est ainsi que CTE, S.A. à C.V. a versé aux 72 travailleurs concernés la somme de 5 185 226 colones et 90 centimes. Chacun des travailleurs concernés a signé le reçu correspondant sur le feuillet que la Direction générale de l'Inspection du travail présente à cet effet, conformément à l'article 402, alinéa 2, du Code du travail, faisant ainsi foi de la cessation de son contrat individuel de travail et de ce que CTE, S.A. à C.V. a appliqué totalement les dispositions de l'article 43 susmentionné. De cette manière, chacun des travailleurs a déclaré ladite société libre de toute responsabilité relevant du droit du travail. L'institution du licenciement en tant que cause de cessation du contrat individuel de travail est réglementée par les articles 55 et suivants du Code du travail et se fonde sur l'article 38, alinéa 11, de la Constitution de la République, selon lequel le Code du travail «comprendra en particulier les droits suivants (...) 11. L'employeur qui licencierait un travailleur sans motif justifié est obligé de l'indemniser conformément à la loi.»

108. Il ressort de tout ce qui précède qu'aucune violation des droits syndicaux n'a été commise.

C. Conclusions du comité

109. Le comité observe que, dans le cadre du processus de privatisation de l'Administration nationale des télécommunications (ANTEL), l'organisation plaignante allègue les faits suivants: 1) refus de reconnaître le syndicat ATANTEL en septembre 1997; 2) refus de reconnaître un autre syndicat constitué par un groupe de travailleurs d'ASTA-ASTTEL le 13 février 1998; 3) refus de reconnaître un autre syndicat nommé ASTTEL, qui avait été constitué le 22 février 1998; 4) refus de reconnaître le syndicat SUTTEL, le 24 juin 1998; 5) licenciement de 72 travailleurs, tous dirigeants ou ex-dirigeants des syndicats ASTA-ASTTEL, ATTES et SINTEL, le 2 janvier 1998 (le processus de privatisation d'ANTEL s'est terminé fin décembre 1997) par l'entreprise Compañía de Telecomunicaciones de El Salvador, S.A. à C.V., à laquelle ont été transférés les biens, droits et obligations en cours de l'entreprise privatisée (ANTEL).

110. Le comité prend note de ce que, selon le gouvernement: 1) le syndicat ATANTEL n'a pas été reconnu par les autorités au motif que les travailleurs de l'ancienne ANTEL ne s'étaient pas constitués en syndicat d'entreprise, ce qui était obligatoire étant donné qu'ANTEL était une institution officielle autonome; sur les 52 fondateurs, six étaient employés dans des entreprises autres qu'ANTEL; 2) le syndicat ASTTEL n'a pas été reconnu pour les raisons suivantes: à la date de la constitution du syndicat, 10 de ses fondateurs n'avaient exercé aucune fonction au sein de l'entreprise considérée; 20 fondateurs n'étaient pas présents dans les locaux où l'assemblée constitutive s'est tenue; cinq fondateurs ont touché l'indemnité extraordinaire prévue par la loi sur la privatisation d'ANTEL et ont perdu, de ce fait, la qualité de salariés; de plus, l'acte notarié comportait diverses infractions au regard de la législation (la profession ou qualité des signataires n'a pas été consignée, les brouillons n'ont pas été joints aux noms du notaire et du syndicat, la signature du notaire ne figure pas sur les feuillets de l'acte notarié et son sceau manque à l'un de ces feuillets); de plus, le quorum des travailleurs-fondateurs n'était pas atteint; 3) le syndicat ASTTEL s'est vu, plus tard, refuser une deuxième fois la personnalité juridique, faute du quorum légal, fixé à 35 membres par l'article 211 du Code du travail (sur les 39 fondateurs, 14 avaient participé à la fondation du premier syndicat, quatre étaient des employés de confiance et un autre était un représentant patronal), ainsi qu'au motif que l'article 248 du Code du travail précise «qu'aucune démarche ne pourra être effectuée en vue de constituer une nouveau syndicat lorsque l'intervalle écoulé depuis sa précédente demande de reconnaissance est inférieur à six mois»; 4) les démarches effectuées en vue de la constitution du syndicat SUTTEL ont été considérées comme non conformes à la loi, et la personnalité juridique a été refusée, au motif que l'intervalle écoulé depuis la demande de reconnaissance du syndicat ASTTEL (auquel la personnalité juridique avait été refusée) était inférieur à six mois; par la suite, la demande effectuée par trois membres fondateurs de SUTTEL en vue d'obtenir la révocation de cette décision administrative a été déclarée irrecevable au motif qu'elle n'avait pas été faite dans les délais fixés par la loi. Le comité prend également note de ce que la demande d'octroi de la personnalité juridique au syndicat SITTEL, présentée le 7 septembre 1998, se trouve actuellement en cours d'examen, mais constate que ce fait n'a pas été signalé par l'organisation plaignante.

111. Le comité constate qu'entre septembre 1997 et juin 1998 les autorités ont refusé de concéder la personnalité juridique à plusieurs syndicats qui ont tenté de se constituer au sein d'ANTEL ou de l'une des deux entreprises auxquelles, suite à sa privatisation, ont été transférés ses droits et obligations (Compañía de Telecomunicaciones de El Salvador, S.A. à C.V.); l'un de ces syndicats en cours de constitution s'est vu refuser par deux fois la personnalité juridique. Le comité constate que les motifs suivants figurent parmi ceux invoqués pour refuser la personnalité juridique: tentative de création d'un syndicat ne relevant pas de la catégorie dite des «syndicats d'entreprise» (mais constitué par des travailleurs issus de plusieurs entreprises) au sein d'une institution officielle autonome où seuls sont autorisés les «syndicats d'entreprise»; non-respect du quorum prévu par la loi pour constituer un syndicat (35 travailleurs); impossibilité de constituer un nouveau syndicat lorsque l'intervalle écoulé depuis sa précédente demande de reconnaissance est inférieur à six mois (même si cette précédente demande a été rejetée); et vice de forme de l'acte notarié établi lors de l'assemblée constitutive du syndicat. De l'avis du comité, il s'agit d'entraves graves à l'enregistrement des syndicats. A cet égard, le comité signale à l'attention du gouvernement que les prescriptions ne doivent pas équivaloir en pratique à une autorisation préalable, ni s'opposer à la création d'une organisation au point de constituer en fait une interdiction pure et simple. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 244.]

112. A cet égard, le comité a déjà indiqué que «s'il est vrai que les fondateurs d'un syndicat doivent respecter les formalités prévues par la législation, ces formalités, de leur côté, ne doivent pas être de nature à mettre en cause la libre création des organisations». [Voir Recueil, op. cit., paragr. 248.] Le comité estime qu'il ressort du présent cas que la législation d'El Salvador impose une série de conditions excessives à la reconnaissance et à l'acquisition de la personnalité juridique d'un syndicat, contraires au principe de libre constitution des organisations syndicales (l'obligation faite aux syndicats des institutions officielles autonomes d'appartenir à la catégorie des «syndicats d'entreprise»), entravant la constitution des syndicats (quorum fixé à 35 travailleurs pour constituer un syndicat d'entreprise) ou, dans tous les cas, rendant provisoirement impossible la constitution d'un syndicat (nécessité d'un intervalle de six mois pour demander la reconnaissance d'un nouveau syndicat, même si la première demande a été rejetée).

113. Dans ces conditions, le comité conclut que la législation viole les principes de la liberté syndicale et déplore qu'en application de cette législation les autorités aient refusé d'accorder la personnalité juridique à plusieurs syndicats qui étaient en train de se constituer au sein de l'entreprise ANTEL ou de l'entreprise Compañía de Telecomunicaciones de El Salvador, S.A. à C.V. Le comité demande donc instamment au gouvernement de prendre des mesures en vue de modifier la législation de manière à ce que soient abolies les conditions excessives qui restreignent actuellement la constitution des organisations syndicales et à ce qu'il soit possible de les constituer autrement qu'au sein d'une seule entreprise, si tel est le choix des travailleurs. Enfin, en ce qui concerne le syndicat SITTEL, dont la constitution se trouve en cours d'examen (selon le gouvernement), le comité regrette que la demande d'octroi de reconnaissance et d'enregistrement déposée par le syndicat SITTEL en août 1998 n'ait pas encore été accordée et que la procédure soit encore en cours. Le comité demande au gouvernement d'accélérer la procédure et l'enregistrement de ce syndicat.

114. En ce qui concerne l'allégation relative au licenciement de 72 travailleurs (tous dirigeants d'ASTA-ASTTEL, ATTES et SINTEL) le 2 janvier 1998 (le processus de privatisation d'ANTEL s'étant achevé à la fin du mois de décembre 1997) par l'entreprise Compañía de Telecomunicaciones de El Salvador, S.A. à C.V., à laquelle les biens, droits et obligations de l'entreprise privatisée (ANTEL) ont été transférés, le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles: les indemnisations et prestations prévues ont été versées aux intéressés, qui les ont acceptées et ont confirmé par écrit la cessation de leur contrat de travail le 31 décembre 1997; par la suite, conformément à la loi sur la privatisation, les intéressés ont été engagés par la nouvelle entreprise puis licenciés le 2 janvier 1998 aux motifs dits «de cessation de contrat sous la responsabilité de l'employeur», motifs définis par le Code du travail et conformes à la loi sur la privatisation, laquelle prévoyait, en pareil cas, le versement d'une indemnité supplémentaire (en l'occurrence, 70 des 72 travailleurs concernés ont accepté cette indemnisation et ont déchargé l'entreprise de toute responsabilité); les travailleurs qui n'ont pas accepté les indemnités en question sont M. Luis Wilfredo Berrios et Mme Gloria Mercedes González. A cet égard, le comité constate que le gouvernement n'a pas contesté aux 72 travailleurs licenciés les titres de dirigeants et d'ex-dirigeants syndicaux, et que ces licenciements ont été fondés sur les motifs dits «de cessation de contrat sous la responsabilité de l'employeur», selon lesquels ce dernier n'est pas tenu d'en indiquer les raisons.

115. Dans ces conditions, le comité déplore profondément ces licenciements et signale à l'attention du gouvernement que les changements de propriétaire ne doivent pas menacer directement ou indirectement les travailleurs syndiqués et leurs organisations. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 715.] Le comité signale également qu'en cas de réduction du personnel il a lui-même rappelé le principe énoncé dans la recommandation no 143 sur la protection et les facilités qui devraient être accordées aux représentants des travailleurs dans l'entreprise, qui propose, parmi les mesures spécifiques de protection, la «reconnaissance d'une priorité à accorder au maintien en emploi des représentants des travailleurs en cas de réduction du personnel» (art. 6, 2, f)). [Voir Recueil, op. cit., paragr. 960.] De même, dans un cas antérieur où le gouvernement expliquait que les licenciements de neuf dirigeants syndicaux étaient intervenus dans le cadre de programmes de restructuration de l'Etat, le comité a souligné l'importance qu'il attache à la priorité à accorder au maintien dans l'emploi des représentants des travailleurs en cas de réduction du personnel afin de garantir la protection effective de ces dirigeants. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 961.]

116. Dans ces conditions, étant donné que 70 des 72 dirigeants et ex-dirigeants syndicaux licenciés ont accepté les indemnités prévues par la loi, seul sera poursuivi l'examen du cas des deux syndicalistes qui ne les ont pas acceptées. Le comité demande au gouvernement de prendre des initiatives en vue d'obtenir la réintégration de ces dirigeants syndicaux (M. Luis Wilfredo Berrios et Mme Gloria Mercedes González) à leur poste de travail et pour qu'à l'avenir les changements de propriétaire effectués dans le cadre d'une privatisation ne portent pas préjudice directement ou indirectement à la situation des travailleurs syndiqués et à leurs organisations.

Recommandations du comité

117. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver le présent rapport et, en particulier, les recommandations suivantes:


Cas no 1927

Rapport définitif

Plainte contre le gouvernement du Mexique
présentée par
le Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex (STGRS)

Allégations: actes de discrimination antisyndicale dans le cadre
d'une négociation collective avec un syndicat minoritaire

118. Le comité a examiné ce cas à sa session de novembre 1997 où il a présenté un rapport intérimaire. [Voir 308e rapport, paragr. 541 à 555, approuvé par le Conseil d'administration à sa 270e session (novembre 1997).]

119. Le gouvernement a fait parvenir de nouvelles observations dans des communications en date des 10 mars et 10 novembre 1998.

120. Le Mexique a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche il n'a pas ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

121. A sa session de novembre 1997, le comité avait formulé, à propos des allégations en instance, les conclusions et recommandations suivantes [voir 308e rapport, paragr. 550 à 554]:

Le comité relève dans le présent cas que, selon les allégations de l'organisation plaignante (le Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex (STGRS)), l'entreprise du groupe Roche Syntex de México S.A. de C.V. a négocié une convention collective pour l'ensemble de son personnel avec un syndicat minoritaire (le Syndicat progressiste «Justo Sierra» des travailleurs des services de la République mexicaine (SPJSTS)), que 19 dirigeants syndicaux et syndicalistes ont été licenciés et que les travailleurs de l'entreprise ont été menacés de licenciement s'ils ne se désaffiliaient pas de l'organisation plaignante.

En ce qui concerne l'allégation relative à la négociation d'une convention collective pour l'ensemble des travailleurs avec un syndicat minoritaire (SPJSTS) au détriment de l'organisation plaignante, le comité constate que, selon le gouvernement, le syndicat minoritaire SPJSTS et l'entreprise du groupe Roche Syntex de México ont déclaré échue le 27 mai la convention collective de travail qu'ils avaient conclue et ont reconnu que la représentation syndicale majoritaire appartenait à une autre organisation syndicale; ultérieurement, le syndicat majoritaire (le Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex, soit en l'occurrence l'organisation plaignante) aurait signé une convention concernant un ajustement des salaires avec l'entreprise le 6 juin 1997, après avoir présenté la plainte devant le comité. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de fournir une copie de la convention signée à laquelle il se réfère. Le comité demande aussi au gouvernement de fournir des précisions sur les relations entre les deux syndicats existant dans l'entreprise et sur leurs différends éventuels.

Pour ce qui est de l'allégation relative au licenciement de 19 syndicalistes (y compris 4 membres du comité directeur de l'organisation plaignante), le comité observe que, selon le gouvernement, l'organisation plaignante a demandé l'intervention du secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale, et «les négociations n'ont pas abouti en raison des mauvaises relations qui régnaient entre le syndicat et l'entreprise et qui se sont détériorées au cours de la procédure annuelle d'ajustement des salaires». A cet égard, le comité demande au gouvernement de fournir des informations détaillées et des observations sur les faits qui ont motivé ces licenciements et sur l'allégation selon laquelle ils avaient un caractère antisyndical.

S'agissant de l'allégation relative aux menaces de licenciement proférées par la direction de l'entreprise du groupe Roche Syntex de México S.A. de C.V. afin que les travailleurs quittent l'organisation plaignante et adhèrent au Syndicat progressiste «Justo Sierra» des travailleurs des services de la République mexicaine (SPJSTS), le comité constate avec regret que le gouvernement n'a pas communiqué ses observations sur le sujet. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement d'envoyer le plus rapidement possible ses observations à cet égard.

Enfin, en ce qui concerne le licenciement de M. Eladio Pérez Rubí, secrétaire général de l'organisation plaignante qui, selon les allégations, aurait fait suite au dépôt de la présente plainte, le comité note que le gouvernement déclare qu'il n'était pas au courant du licenciement de ce travailleur, qui n'était pas le secrétaire général de l'organisation plaignante au moment du licenciement allégué. Dans ces conditions, le comité prie le gouvernement d'ouvrir une enquête sur l'allégation concernant le licenciement de M. Eladio Pérez Rubí par le groupe Roche Syntex et sur les faits qui l'auraient motivé et de le tenir informé à cet égard. Il le prie également d'indiquer si le travailleur en question a introduit un recours en justice.

B. Réponse du gouvernement

122. Dans sa communication du 10 mars 1998, le gouvernement transmet la copie de la convention collective révisée sur les salaires du 6 juin 1997, intervenue entre le groupe Roche Syntex de México S.A. de C.V. et le Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex, enregistrée par le Comité fédéral de conciliation et d'arbitrage qui contient les clauses suivantes:

Premièrement. Les parties reconnaissent mutuellement et réciproquement que leur personnalité juridique est celle dont il est fait état dans la présente convention, à toutes fins juridiques ou autres.

Deuxièmement. L'entreprise augmentera de 24 pour cent les salaires journaliers des travailleurs syndiqués qui sont occupés dans l'usine de produits pharmaceutiques sise au no 2822 de la route México-Toluca, Col. Lomas de Bezares, Delegación Miguel Hidalgo, D.F., et qui sont membres du Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex. Cette augmentation prend effet à partir du 1er juin 1997.

Troisièmement. L'entreprise s'engage à respecter toutes les clauses de la convention collective, sans préjudice d'éventuelles révisions de ladite convention.

Quatrièmement. Le syndicat prend note que l'entreprise, qui a plusieurs activités et usines, a le droit de conclure d'autres conventions collectives dans les zones, usines et localités autres que celle visée dans la présente convention, à savoir l'usine de produits pharmaceutiques sise au no 2822, de la route México-Toluca, Col. Lomas de Bezares, Delegación Miguel Hidalgo, D.F., avec les catégories de travailleurs mentionnées dans la présente convention et qui, actuellement, recouvrent 157 personnes.

Cinquièmement. Par conséquent, le syndicat signataire renonce aux revendications qu'il avait présentées à l'entreprise le 28 avril 1997, ainsi qu'au préavis de grève correspondant.

Sixièmement. Les parties s'engagent à conclure devant le Comité fédéral de conciliation et d'arbitrage la présente convention, qui est portée au dossier no III-2298/97, et sollicitent l'approbation de la convention qui ne contient aucune disposition contraire à la morale, au droit et aux bonnes mœurs. Elles s'engagent à respecter toutes les dispositions de la convention, comme s'il s'agissait d'une décision de justice ayant l'autorité de la chose jugée.

Lu et approuvé. La présente convention a été lue par les parties qui ont pris connaissance de son contenu et de sa portée juridique. Elles l'ont signée, indiquant ainsi qu'elles en approuvaient les dispositions.

123. Dans sa communication du 10 novembre 1998, le gouvernement indique que le conflit entre le Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex et le Syndicat progressiste «Justo Sierra» n'a pas eu lieu, d'autant que, depuis le 27 mai 1997, le Syndicat progressiste «Justo Sierra» a mis un terme à la convention collective qu'il avait conclue avec l'entreprise (la convention collective, dont le texte est reproduit au paragraphe précédent et à laquelle est partie le Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex, date du 6 juin 1997).

124. A propos des faits qui ont conduit au licenciement de 19 dirigeants du Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex, faits qui auraient un caractère antisyndical, le gouvernement déclare avoir pris connaissance du fait que l'entreprise avait décidé de supprimer le service d'emballage, d'approvisionnement, de distribution et d'entreposage. Les travailleurs et le syndicat en question se sont opposés à la suppression de ce service. De son côté, conformément à la loi, l'entreprise a proposé de verser une indemnité de départ aux travailleurs qui y étaient occupés, touchés par cette mesure. Le secrétariat au Travail et à la Prévoyance sociale a convoqué des réunions de conciliation entre les parties et y a participé vainement. Ces faits laissent supposer que, faute d'accord sur la suppression du service susmentionné, le licenciement des travailleurs en question était justifié et qu'ils ont conservé leur droit, à titre individuel, d'intenter une action devant le Comité fédéral de conciliation et d'arbitrage pour licenciement injustifié. Il s'ensuit que les motifs qui ont donné lieu au licenciement n'étaient pas d'ordre syndical mais qu'il s'est agi d'un manque d'accord entre les parties. En outre, il convient de préciser que ces travailleurs n'étaient pas tous des dirigeants syndicaux et que ceux qui l'étaient ont conservé leurs fonctions syndicales jusqu'au 3 juin 1997, date à laquelle a été élu le nouveau comité directeur du syndicat. Les travailleurs investis de fonctions syndicales les ont conservées en vertu du deuxième paragraphe de l'article 376 de la loi fédérale sur le travail qui dispose que les membres du comité directeur d'un syndicat qui sont licenciés par l'employeur ou qui mettent fin à leur emploi pour un motif imputable à celui-ci continueront d'exercer leurs fonctions.

125. A propos des allégations selon lesquelles l'entreprise aurait menacé de licenciement des travailleurs pour les pousser à quitter l'organisation plaignante et à s'affilier au Syndicat progressiste «Justo Sierra», le gouvernement indique que les informations qu'il avait fournies dans sa réponse précédente ont probablement été mal interprétées: en fait, le conflit qui aurait pu se produire avec le Syndicat progressiste «Justo Sierra» n'a pas eu lieu puisque ce syndicat et l'entreprise ont décidé de mettre un terme à la convention collective du travail qu'ils avaient conclue, comme il a été indiqué précédemment. On peut donc en déduire que l'entreprise n'a pas proféré de menaces de licenciement à l'égard de membres du Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex pour les pousser à s'affilier au Syndicat progressiste «Justo Sierra».

126. En ce qui concerne les motifs du licenciement de M. Eladio Pérez Rubí, le gouvernement indique que cette personne n'a pas été licenciée. En fait, le 27 juin 1997, M. Eladio Pérez Rubí a démissionné de son plein gré pour des raisons de convenance personnelle, comme il l'a précisé dans une lettre manuscrite que le gouvernement a jointe à sa communication. Conformément à la loi fédérale sur le travail, l'entreprise lui a versé une indemnité de départ. Cette indemnité a donné satisfaction à M. Pérez Rubí qui a renoncé à son droit d'intenter une action en justice.

C. Conclusions du comité

127. Dans le présent cas, l'organisation plaignante (le Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex (STGRS)) avait affirmé que l'entreprise du groupe Roche Syntex de México S.A. de C.V. avait négocié une convention collective pour l'ensemble de son personnel avec un syndicat minoritaire (le Syndicat progressiste «Justo Sierra» des travailleurs des services de la République mexicaine (SPJSTS)), que 19 dirigeants syndicaux et syndicalistes, ainsi que le dirigeant syndical Eladio Pérez Rubí, avaient été licenciés et que les travailleurs de l'entreprise avaient été menacés de licenciement s'ils ne se désaffiliaient pas de l'organisation plaignante.

128. Le comité observe que la convention collective entre l'entreprise du groupe Roche Syntex de México S.A. de C.V. et le Syndicat progressiste «Justo Sierra» (syndicat minoritaire, selon l'organisation plaignante) a été conclue le 4 mars 1997. [Voir 308e rapport, paragr. 543.] Le comité note que, dans sa réponse, le gouvernement indique qu'il a été mis un terme le 27 mai 1997 à cette convention collective et que l'organisation plaignante (le Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex) et l'entreprise ont conclu le 6 juin 1997 une convention collective révisée sur les salaires. Cette convention, qui a été conclue devant le Comité fédéral de conciliation et d'arbitrage, réglemente l'ajustement des salaires et prévoit que le syndicat (dans le présent cas l'organisation plaignante) renonce à ses revendications, lesquelles étaient assorties d'un préavis de grève. Le comité note également que, selon le gouvernement, il n'y a pas eu de conflit entre le syndicat plaignant et le Syndicat progressiste «Justo Sierra», étant donné que ce dernier syndicat et l'entreprise avaient décidé de mettre un terme à la convention collective qu'ils avaient conclue et que, par conséquent, selon le gouvernement, l'entreprise n'a pas proféré de menaces de licenciement à l'encontre de travailleurs pour les pousser à s'affilier au Syndicat progressiste «Justo Sierra». Dans ces conditions, les parties ayant résolu les différents problèmes qui avaient découlé dans un premier temps de la conclusion d'une convention collective avec un syndicat minoritaire, le comité ne poursuivra pas l'examen de ces allégations.

129. A propos du caractère prétendument antisyndical du licenciement de 19 dirigeants ou membres de l'organisation plaignante (le Syndicat des travailleurs du groupe Roche Syntex), le comité note que, dans sa réponse, le gouvernement déclare que: 1) ce licenciement ne revêt pas de caractère antisyndical mais qu'il fait suite à la décision de l'entreprise de supprimer le service d'emballage, d'approvisionnement, de distribution et d'entreposage; 2) que les travailleurs licenciés pouvaient, en tout état de cause, introduire des recours devant le Comité fédéral de conciliation et d'arbitrage; 3) que les travailleurs licenciés n'étaient pas tous dirigeants syndicaux et que ceux qui l'étaient ont conservé leurs fonctions syndicales jusqu'à l'élection, le 3 juin 1997, du nouveau comité directeur du syndicat. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l'examen de ces allégations.

130. Au sujet du licenciement allégué du dirigeant syndical Eladio Pérez Rubí, le comité note que le gouvernement affirme qu'il n'a pas été licencié mais qu'il a renoncé au poste qu'il occupait dans l'entreprise le 27 juin 1997 et qu'il n'a pas introduit d'action en justice. Le comité a pris connaissance de la lettre manuscrite de M. Pérez Rubí que le gouvernement a jointe en annexe à sa réponse confirmant les déclarations en question.

Recommandation du comité

131. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à décider que ce cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.


Cas no 1967

Rapport dans lequel le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation

Plainte contre le gouvernement du Panama
présentée par
la Confédération internationale des syndicats libres (CISL)

Allégations: refus des autorités de reconnaître l'affiliation
d'une fédération syndicale à une centrale syndicale

132. La plainte de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) figure dans une communication datée du 20 mai 1998. Le gouvernement a envoyé ses observations par une communication du 29 octobre 1998.

133. Le Panama a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de la confédération plaignante

134. Dans sa communication du 20 mai 1998, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) allègue que le gouvernement panaméen refuse de reconnaître l'affiliation de la Fédération nationale des associations et organisations d'employés publics (FENASEP) à la Centrale «Convergence syndicale», en violation du Code du travail et d'autres lois nationales, ainsi que de la convention no 87 de l'OIT, qui ne permettent pas à l'autorité administrative de refuser de reconnaître l'affiliation d'une fédération de travailleurs à une centrale syndicale.

135. La CISL demande l'abrogation de la résolution no 042-DOS-97 du 28 avril 1997 par laquelle il est décidé de ne pas enregistrer la demande d'affiliation de la FENASEP à la Centrale «Convergence syndicale». Le texte de cette résolution est reproduit ci-après:

Le chef du Département des organisations sociales, s'exprimant au nom de la délégation de la Direction générale du travail,

Considérant:

Que, le 18 mars 1997, la Centrale «Convergence syndicale» a demandé à ce département d'enregistrer, au nombre de ses affiliés, la Fédération nationale des associations et organisations d'employés publics (FENASEP);

Que les travailleurs du secteur privé et leurs organisations sont régis par le Code du travail, alors que les employés publics ainsi que leurs associations sont régis par le Code administratif, à l'exception des cas qui relèvent de lois spéciales;

Que, après avoir analysé les pièces justificatives présentées, il a été constaté qu'elles ne répondent pas aux exigences du Code du travail, car il existe des normes particulières régissant séparément les associations d'employés publics et les organisations syndicales de travailleurs,

Décide:

Article unique: De ne pas enregistrer la demande d'affiliation de la Fédération nationale des associations et organisations d'employés publics (FENASEP) à la Centrale «Convergence syndicale», étant donné qu'elle ne répond pas aux exigences du Code du travail.

Base légale: Articles 2, 351 et 376 du Code du travail.

David Tejada,
Chef du Département
des organisations sociales.

B. Réponse du gouvernement

136. Dans sa communication du 29 octobre 1998, le gouvernement rappelle que la plainte a pour origine le fait que le ministère du Travail n'a pas accepté l'«affiliation de la Fédération nationale des associations et organisations d'employés publics (FENASEP) à la Centrale «Convergence syndicale», en vertu de la résolution no 042-DOS-97 du 28 juillet 1997 du chef du Département des organisations sociales du ministère, confirmée par la résolution no D.M. 27/98 du 14 mai 1998 du Bureau supérieur. Comme mentionné dans cette dernière résolution, bien que les autorités soient «conscientes de l'intérêt que les employés du secteur public manifestent pour la constitution d'un syndicat... des raisons de nature juridique font qu'il est impossible, pour le moment, d'accéder à cette demande». En effet, l'article 2 du Code du travail en vigueur prévoit très clairement, de manière expresse et sans équivoque, que «Les employés publics seront régis par les normes de la carrière administrative, sauf dans les cas où il est expressément spécifié qu'il doit leur être appliqué l'un des articles du présent Code. En fait, aucune disposition du Code du travail ne mentionne expressément, comme le prévoit l'article 2, que les employés publics puissent constituer un syndicat. En tout état de cause, et à moins de vider l'Etat de droit, il est impossible d'accepter la constitution d'un syndicat pour lesdits employés publics.

137. Le gouvernement précise que ce qui précède n'a nullement empêché les employés publics de jouir du droit d'association. La Fédération nationale des associations et organisations d'employés publics (FENASEP) est une fédération, et, en tant que telle, elle réunit un très grand nombre d'associations d'employés publics de divers ministères et entités décentralisées. A cet égard, il n'y a pas dans la convention no 87 de l'OIT de développement relatif au concept de «syndicalisation», mais bien à celui d'«organisation», qu'elle définit en outre, dans son article 10, de la manière suivante: «le terme 'organisation' signifie toute organisation de travailleurs ou d'employeurs ayant pour but de promouvoir et de défendre les intérêts des travailleurs ou des employeurs». Par ailleurs, l'article 6 de la convention no 98 énonce que «la présente convention ne traite pas de la situation des fonctionnaires publics et ne pourra, en aucune manière, être interprétée comme portant préjudice à leurs droits ou à leur statut». De ce qui précède il s'ensuit que le droit des fonctionnaires ou des employés publics de s'organiser est reconnu, mais que n'est pas clairement reconnu leur droit de s'organiser en syndicat, de manière équivalente à ce qui est prévu dans les dispositions pertinentes du Code du travail. Cela n'empêche pas, bien sûr, que chaque Etat est souverain et peut décider d'octroyer le droit de se syndiquer à ses employés publics, mais ce n'est pas le cas au Panama.

138. La Constitution du Panama fait état dans son article 300 «de diverses carrières dans les services publics, qui sont régies par les principes du système des mérites, et parmi elles la carrière administrative, étant entendu que la législation décide de la structure et de l'organisation de ces carrières, conformément aux besoins de l'administration». En vertu de ce principe, la loi no 9 du 20 juin 1994 a été promulguée, qui établit et réglemente la carrière administrative», et dont l'article 174 énonce que:

Les employés publics appartenant à la carrière administrative pourront créer des associations ou s'affilier à des associations d'employés publics de nature socioculturelle et économique, dans le cadre de leurs institutions respectives; ces associations ont pour but de promouvoir la formation, l'acquisition de compétences, le perfectionnement et la protection de leurs affiliés et de leur apporter une aide juridique face à la Commission d'appel et de conciliation de la carrière administrative et à la Direction générale de cette entité. Il ne pourra y avoir plus d'une association par institution.

Le nom de l'association des employés publics de la carrière administrative doit correspondre à l'institution qu'elle représente ou à laquelle elle appartient.

L'affiliation ou la désaffiliation de ces associations sont réglementées par la Direction générale de la carrière administrative, afin de garantir que ces mouvements sont volontaires et authentiques.

139. D'autres dispositions font référence à la constitution d'associations, à leur reconnaissance par les autorités et à la capacité des fonctionnaires de se regrouper en fédérations et confédérations. Un chapitre porte également sur «la solution des conflits collectifs», et il reconnaît implicitement le droit de grève. Par conséquent, le droit d'association, de négociation (art. 180) et même celui de grève (art. 185) sont reconnus.

140. Le gouvernement ajoute que la loi no 12 du 10 février 1998 «détaille la carrière du service législatif». Elle comprend une section particulière sur les «relations collectives» qui confère aux employés publics de la carrière du service législatif le droit de «créer une association d'employés publics de caractère socioculturel et économique, qui aura pour but la formation, l'acquisition de compétences, le perfectionnement, la protection et la défense des intérêts économiques et sociaux de ses affiliés, et de s'y affilier...» (art. 80); elle reconnaît à deux membres de sa direction et à leurs adjoints «le droit à une protection spéciale jusqu'à un an après la cessation de leur fonction. Par conséquent, ils ne pourront être licenciés sans une autorisation préalable du Conseil de la carrière du service législatif, fondée sur un motif juste, prévu par la loi. Une destitution allant à l'encontre des dispositions de cet article constitue une violation de cette protection spéciale et entraînera la réintégration immédiate de l'employé public licencié en contravention de cette disposition... Par ailleurs, la modification unilatérale des conditions de travail constitue aussi une violation de cette protection spéciale, ainsi que le transfert du fonctionnaire occupé dans une carrière, à une autre unité administrative, lorsque ce transfert n'est pas prévu dans l'exercice de ses fonctions ou, dans le cas où il est prévu, s'il empêche ou rend difficile l'exercice de ses fonctions syndicales; dans ce cas, l'autorisation préalable du Conseil de la carrière du service législatif est également nécessaire» (art. 181). Ne s'agit-il pas d'une protection contre la discrimination antisyndicale? En outre, «les employés publics de la carrière du service législatif ont le droit de négocier collectivement la solution de conflits et les éléments du régime des employés publics qui ne sont pas expressément interdits par la loi» (art. 82). De toute évidence, il s'agit là du droit à la négociation collective.

141. Ces droits sont inscrits dans la résolution de l'Assemblée législative no 31 du 11 juin 1998, par laquelle cet organisme prévoit d'«approuver dans sa totalité le Règlement de l'administration des ressources humaines de l'Assemblée législative»; en outre, il est prévu que l'institution «concédera des facilités touchant à l'espace physique, à l'équipement, au matériel et autres éléments utiles du fonctionnement de l'association ... (art. 121); la protection spéciale s'étend «aux principaux représentants des employés publics et à leurs suppléants devant le Conseil de la carrière du service législatif» (art. 122); les «normes ne pourront affecter l'exercice du droit d'association des fonctionnaires législatifs ni de ceux qui sont protégés aux termes de la protection spéciale prévue par le présent Règlement» (art. 128); la résolution prévoit que la protection, la formation et le perfectionnement des fonctions, et la défense des intérêts économiques et sociaux communs des employés publics sont autant de droits» et qu'ils ont aussi celui «de négocier collectivement les conflits et les éléments du régime de leur carrière qui ne sont pas expressément interdits par la loi» (art. 240, nos 6 et 7).

142. En outre, le gouvernement fait savoir que lorsque, en application des Traités Torrijos-Carter, le chemin de fer et les ports de Balboa et Cristóbal ont été rendus à la République du Panama, des lois ont été promulguées aux termes desquelles le droit syndical a été accordé aux travailleurs concernés, bien qu'ils eussent le statut d'employé public (loi nos 38 et 39 du 27 septembre 1979). Par ailleurs, lors de la rationalisation des services de l'énergie et du téléphone, une loi spéciale (no 8 du 25 février 1975) a été promulguée qui permet aux travailleurs de ces services, qui sont également des employés publics, de se syndiquer. Aujourd'hui, lorsque, pour cause de mondialisation, ce type de services est privatisé, l'Etat négocie collectivement avec chacun des syndicats, et il est précisé que la convention collective continuera d'être applicable à l'acquéreur (loi no 5 du 9 février 1995 et loi no 6 du 3 février 1997 sur l'énergie électrique).

143. Le gouvernement explique que, bien qu'il n'ait pas été possible de légiférer pour octroyer le droit de se syndiquer à l'ensemble des employés publics, l'Etat s'est efforcé d'accorder ce droit à certains secteurs de la fonction publique, bien que la convention no 98 «ne traite pas de la situation des fonctionnaires publics».

144. Le gouvernement conclut en affirmant que sa politique n'a pas consisté, ne consiste pas et ne consistera jamais à méconnaître ses obligations en vertu des conventions nos 87 et 98, et qu'au contraire il est allé au-delà de leurs prescriptions.

C. Conclusions du comité

145. Le comité observe que, dans la présente plainte, la confédération plaignante allègue que les autorités ont refusé de reconnaître l'affiliation de la Fédération nationale des associations et organisations d'employés publics (FENASEP) à la Centrale «Convergence syndicale», en vertu de la résolution du ministère du Travail no 042-DOS-97 du 28 juillet (confirmée par la résolution du 14 mai 1998 du Bureau supérieur).

146. Le comité observe que le gouvernement souligne que les serviteurs et employés publics peuvent s'organiser en associations pour protéger et défendre les intérêts de leurs membres mais non pas en syndicats, sauf dans certains cas, expressément prévus par la loi. Selon le gouvernement, les associations d'employés publics jouissent des droits fondamentaux consacrés dans les conventions nos 87 et 98 de l'OIT, y compris le droit de négociation collective et de grève. Cependant, d'après le gouvernement, les employés publics relèvent de la loi de la carrière administrative et non du Code du travail, ce qui rend légalement impossible l'affiliation de la FENASEP à la Centrale «Convergence syndicale». En outre, de l'avis du gouvernement, l'article 6 de la convention no 98 (qui dispose «la présente convention ne traite pas de la situation des fonctionnaires publics et ne pourra, en aucune manière, être interprétée comme portant préjudice à leurs droits ou à leur statut») autorise les Etats à octroyer ou non à leurs employés publics le droit de se syndiquer.

147. A cet égard, le comité souhaite rappeler que la constitution de fédérations et de confédérations et leur fonctionnement sont réglementés par la convention no 87 et non pas par la convention no 98, et que la convention no 87 (qui s'applique à tous les travailleurs à la seule exception éventuelle des forces armées et de la police (art. 9.1) et, par conséquent, aux fonctionnaires publics) dispose expressément dans son article 5 que «les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit de constituer des fédérations et des confédérations ainsi que de s'y affilier...». En outre, l'article 6 de la convention no 87 prévoit que «les dispositions des articles 2, 3 et 4 de cette convention s'appliquent aux fédérations et aux confédérations des organisations de travailleurs et d'employeurs», et précisément l'article 2 de la même convention prévoit pour les travailleurs et les employeurs le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières. Par conséquent, les organisations de fonctionnaires publics devraient pouvoir s'affilier, si elles le souhaitent, à des fédérations ou des confédérations de travailleurs du secteur privé, si les statuts de ces dernières le permettent.

148. A cet égard, le comité a fait référence à d'autres occasions à l'opinion de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations selon laquelle une disposition d'une loi nationale qui interdit aux organisations de fonctionnaires publics de s'affilier à des fédérations ou à des confédérations d'ouvriers de l'industrie et des travailleurs agricoles est difficilement conciliable avec l'article 5 de la convention no 87. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 615.] En outre, lors de sa réunion de novembre 1997, la commission d'experts a adressé une demande directe au gouvernement du Panama dans le cadre de l'examen de l'application de la convention no 87, lui demandant d'adopter des mesures afin de modifier sa législation si les organisations d'employés publics ne peuvent s'associer à d'autres organisations du niveau des fédérations qui ne soient pas des organisations d'employés publics.

149. Dans ces conditions, le comité prie le gouvernement de reconnaître et d'enregistrer sans délai l'affiliation de la FENASEP à la Centrale «Convergence syndicale», et de le tenir informé à cet égard, et il signale l'aspect législatif de ce cas à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.

Recommandations du comité

150. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:


Cas no 1880

Rapport intérimaire

Plainte contre le gouvernement du Pérou
présentée par
la Fédération des travailleurs de l'électricité du Pérou (FTLFP)

Allégations: plusieurs actes de discrimination
et d'ingérence antisyndicales,
entraves à la négociation collective

151. Le comité a examiné ce cas à ses sessions de novembre 1997 et de juin 1998, et il a présenté à ces deux occasions un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 308e et 310e rapport, paragr. 577 à 596 et 517 à 544, respectivement approuvés par le Conseil d'administration à sa 270e session (novembre 1997) et à sa 272e session (juin 1998).]

152. Le gouvernement a envoyé de nouvelles observations dans une communication datée du 13 octobre 1998.

153. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

154. A l'issue de la session du comité de novembre 1997, certaines allégations sont restées en instance. Elles concernaient plusieurs actes de discrimination et d'ingérence antisyndicales qui auraient été commis par les entreprises Electro Ucayali SA, Servicio Público de Electricidad del Oriente SA, Electro Sur Este SA et Electrosur SA, ainsi que des entraves à la négociation collective, qui auraient été le fait de l'entreprise Electro Ucayali SA.

155. Lors de son dernier examen du cas, le comité avait formulé les recommandations suivantes [voir 310e rapport, paragr. 544]:

B. Réponse du gouvernement

156. Dans sa communication du 13 octobre 1998, le gouvernement déclare qu'il souscrit aux remarques du comité en ce sens qu'en ratifiant la convention no 98 l'Etat péruvien s'est engagé à garantir l'application des articles 1 et 2 de cet instrument, lesquels prévoient que tous les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale dans le cadre de leur emploi, et que leurs organisations doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes d'ingérence de la part des employeurs. De même, il pense, à l'instar du comité, que la protection mentionnée doit non seulement être incorporée dans la législation, mais également se traduire dans les faits. C'est la raison pour laquelle le gouvernement réitère les observations formulées antérieurement, selon lesquelles les actes de discrimination antisyndicale sont proscrits par la législation péruvienne, dans la Constitution de l'Etat, dans le Code pénal, dans la loi sur les relations collectives de travail (décret-loi no 25593) et son règlement d'application adopté en vertu du décret suprême no 011-92-TR. Les deux derniers textes législatifs cités font actuellement l'objet d'une révision, en vue de les rendre plus conformes aux conventions et traités internationaux rectifiés par le Pérou.

157. Le gouvernement ajoute qu'en outre il convient de mentionner que l'article 4 du décret-loi no 25593, la loi sur les relations collectives de travail, garantit la protection de la liberté syndicale en ces termes: «l'Etat, les employeurs et leurs représentants devront s'abstenir de tous actes tendant à limiter, restreindre ou porter atteinte, de quelque manière que ce soit, au droit syndical des travailleurs, et d'intervenir de quelque manière que ce soit dans la création, l'administration ou le financement des organisations syndicales». De même, en vertu de différents textes législatifs, les sujets de droit qui s'estiment lésés ont la possibilité d'engager des recours judiciaires pour faire valoir leurs droits en tant que travailleurs.

158. En ce qui concerne l'enquête sur les actes de discrimination et d'ingérence antisyndicales, demandée par le comité, le gouvernement précise que toute décision concernant les procès en cours relève de la compétence exclusive du pouvoir judiciaire et que, par conséquent, toute espèce d'intervention de sa part constituerait une atteinte à l'indépendance et à l'autonomie des magistrats dans l'exercice de leur fonction juridictionnelle. Cela étant, il informera le comité de l'issue des procès en question en temps opportun.

159. Le gouvernement indique que des conventions collectives ont été signées entre l'entreprise Electro Ucayali SA et le Syndicat unique des travailleurs de l'électricité d'Electro Ucayali SA, pour les périodes de 1996 à 1997 et de 1997 à 1998; ainsi qu'entre la société Electrocentro SA et la Fédération des travailleurs de l'électricité du Pérou, convention pour la période de 1995 à 1996 et applicable aux travailleurs de la société Electro Ucayali SA.

160. En ce qui concerne le licenciement du dirigeant syndical Walter Linares Sanz, le gouvernement déclare que cette mesure fait suite, conformément au règlement intérieur de l'entreprise Electro Sur SA, à une faute grave commise par le travailleur en question. Aux termes de l'article 32 du décret-loi no 25593, la loi sur les relations collectives de travail, l'immunité syndicale protège certains travailleurs contre toutes mesures de licenciement ou de transfert dans un autre établissement de la même entreprise, appliquées sans motif valable dûment établi ou contre leur gré. Dans le présent cas, il semble que le licenciement était motivé par la commission des fautes graves suivantes: manquement à ses obligations professionnelles, transmission de fausses informations à l'employeur et infraction grave à la discipline. En conséquence, ce licenciement est valable, bien que ce travailleur soit un dirigeant syndical et jouisse de l'immunité syndicale. La véracité des allégations faites par l'entreprise Electro Sur SA pour motiver le licenciement ou non relève de la compétence exclusive du pouvoir judiciaire. Dans le présent cas, la procédure judiciaire est entamée, et elle est toujours en cours. En conséquence, les recours internes n'ayant pas été épuisés, le plaignant peut difficilement saisir le comité ou le gouvernement péruvien à propos de violations présumées des droits syndicaux qui n'ont aucun fondement.

161. Quant à la suspension du versement des indemnités de déplacement au dirigeant syndical M. Guillermo Barrueta Gómez, le pouvoir judiciaire ne s'est pas encore prononcé dans le pourvoi en cassation. A cet égard, le gouvernement transmettra au comité l'arrêt de la Cour suprême de justice de la République dès qu'il sera rendu.

162. Le gouvernement signale qu'il ressort de ce qui précède qu'il a agi dans le respect des dispositions de la convention no 98 de l'Organisation internationale du Travail et qu'à aucun moment il n'a tenté de faire obstacle aux droits d'organisation et de négociation collective.

C. Conclusions du comité

163. Le comité note que les questions restées en instance dans le cadre de la présente plainte se rapportent à plusieurs actes de discrimination et d'ingérence antisyndicales de la part des entreprises Electro Ucayali SA, Servicio Público de Electricidad del Oriente SA, Electro Sur Este SA et Electro Sur SA, ainsi qu'à des entraves à la négociation collective de la part de l'entreprise Electro Ucayali SA.

164. En ce qui concerne les actes présumés de discrimination et d'ingérence antisyndicales, le comité constate que la réponse du gouvernement ne contient aucun élément nouveau par rapport à la réponse déjà envoyée à l'occasion du premier examen du cas, si ce n'est la déclaration selon laquelle, étant donné que les décisions judiciaires relatives aux procès en cours sont de la compétence exclusive du pouvoir judiciaire, tout type d'ingérence de la part du gouvernement (il est fait allusion à une éventuelle enquête administrative) constituerait une atteinte à l'indépendance et à l'autonomie des magistrats dans l'exercice de leur fonction juridictionnelle. Le comité fait observer au gouvernement que les allégations en question datent de 1997, et il constate que ce dernier n'a pas communiqué d'informations spécifiques sur d'éventuelles procédures judiciaires engagées. Dans ces conditions, le comité ne peut que réitérer ses conclusions antérieures, lesquelles sont reproduites ci-après [voir 310e rapport, paragr. 537 à 540]:

Le comité note que les allégations relatives à des actes de discrimination antisyndicale restées en instance à l'issue de sa précédente session sont les suivantes:

[...] Le comité déplore profondément que les autorités n'aient pas procédé à une enquête sur les allégations et que le gouvernement - sans faire parvenir d'observations spécifiques - se contente d'invoquer à nouveau l'existence de normes protégeant la liberté syndicale et portant sur les recours judiciaires, ou invoque le fait que les organisations plaignantes n'ont pas fourni des preuves suffisantes. A cet égard, le comité souligne que «le gouvernement a la responsabilité de prévenir tous actes de discrimination antisyndicale». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 738.] De même, le comité signale à l'attention du gouvernement que, «lorsqu'elles sont saisies de plaintes pour discrimination antisyndicale, les instances compétentes doivent mener immédiatement une enquête et prendre les mesures nécessaires pour remédier aux conséquences des actes de discrimination antisyndicale qui auront été constatées». [Voir Recueil, op. cit., paragr. 754.] De plus, «le respect des principes de la liberté syndicale exige que les travailleurs qui estiment avoir subi des préjudices en raison de leurs activités syndicales disposent de moyens de recours expéditifs, peu coûteux et tout à fait impartiaux». [Voir Recueil, op. cit., paragr. 741.] Dans ces conditions, le comité prie instamment une nouvelle fois le gouvernement de diligenter immédiatement une enquête sur les allégations de discrimination antisyndicale au sein des entreprises Electro Ucayali SA, Servicio Público de Electricidad del Oriente SA et Electro Sur Este SA, et de prendre toutes les mesures nécessaires pour remédier à ces actes graves de discrimination antisyndicale. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.

165. En ce qui concerne les informations demandées concernant les accords collectifs conclus par l'entreprise Electro Ucayali SA, le comité prend note des trois accords collectifs conclus, y compris celui concernant la période de 1998.

166. Quant au licenciement du dirigeant syndical M. Walter Linares Sanz (entreprise Electro Sur SA), le comité note que, selon le gouvernement, l'entreprise justifie cette mesure en invoquant les fautes graves suivantes: manquement aux obligations professionnelles, transmission de fausses informations à l'employeur et infraction grave à la discipline, et que la procédure judiciaire en cours n'est pas encore achevée. Le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir le texte du jugement correspondant dès que celui-ci sera rendu.

167. S'agissant de la suspension du versement des indemnités de déplacement de M. Guillermo Barrueta Gómez, au titre de ses activités syndicales, le comité prend note du fait que le gouvernement transmettra l'arrêt de la Cour suprême de justice dès qu'il sera rendu, et il attend cette décision.

Recommandations du comité

168. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:


Cas no 1906

Rapport définitif

Plainte contre le gouvernement du Pérou
présentée par
- la Fédération syndicale mondiale (FSM)
- la Fédération des travailleurs de la construction civile
du Pérou (FTCCP) et
- le Syndicat des travailleurs de la construction civile de Lima
et des stations balnéaires (STCCLB)

Allégations: limitations du droit de négociation collective
(secteur de la construction) - persécution antisyndicale

169. Le comité a examiné ce cas où il a formulé des conclusions intérimaires à ses réunions de novembre 1997 et juin 1998. [Voir 308e rapport, paragr. 597 à 609, et 310e rapport, paragr. 545 à 556, approuvés par le Conseil d'administration à sa 270e session (novembre 1997) et à sa 272e session (juin 1998), respectivement.]

170. Le gouvernement a fait parvenir de nouvelles observations par des communications du 19 novembre 1998 et du 4 février 1999.

171. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

172. Les allégations restées en instance se réfèrent à la condamnation à des peines de prison de dirigeants syndicaux et de syndicalistes ainsi qu'à un avant-projet portant modification de la loi sur les relations collectives de travail. A sa session de juin 1998, le comité avait demandé au gouvernement de lui envoyer une copie des jugements prononcés par l'instance judiciaire concernant la peine de deux ans de prison prononcée contre les dirigeants syndicaux de la Fédération des travailleurs de la construction civile du Pérou (FTCCP), José Luis Risco Montalván, Mario Huamán Rivera et Víctor Herrera Rubiños, ainsi que contre 30 autres syndicalistes. Le comité avait également demandé au gouvernement de lui fournir des précisions sur les «règles de conduite» auxquelles seraient soumis les dirigeants syndicaux ou syndicalistes en raison de la condamnation prononcée contre eux pour avoir commis un délit d'atteinte à la sécurité publique suite aux troubles graves survenus en novembre 1991 en participant à une manifestation au Congrès de la République (le gouvernement avait toutefois indiqué que la peine n'impliquera pas l'emprisonnement pour les condamnés). [Voir 310e rapport, paragr. 552 et 553.] Le comité avait également demandé au gouvernement d'assurer que le nouvel avant-projet portant modification de la loi sur les relations collectives de travail soit en pleine conformité avec les conventions nos 87 et 98 et en particulier en ce qui concerne les restrictions à la négociation collective mentionnées dans le présent cas (secteur de la construction). Enfin, le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation relative à l'état d'avancement de l'avant-projet de loi devant le Congrès et il soumet cet aspect du cas à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations. [Voir 310e rapport, paragr. 555.]

B. Réponse du gouvernement

173. Dans ses réponses des 19 novembre 1998 et 4 février 1999, le gouvernement fait savoir, s'agissant de la condamnation des dirigeants syndicaux, MM. José Luis Risco Montalván, Mario Huamán Rivera et Víctor Herrera Rubiños, ainsi que des trente autres syndicalistes (comme conséquence des entraves à la libre circulation des véhicules et des personnes et des dommages matériels aux véhicules (la décision de justice est jointe)), que ce cas est définitivement clos en raison de la prescription pénale. Ainsi, les peines prononcées antérieurement ont été annulées et les travailleurs en question n'ont subi aucune sanction.

174. S'agissant des garanties demandées par le comité afin que le nouvel avant-projet portant modification de la loi sur les relations collectives de travail soit pleinement conforme aux conventions nos 87 et 98 et en particulier en ce qui concerne la négociation collective, le gouvernement réaffirme qu'il est en permanence soucieux de s'en tenir à ce qui est fixé dans les conventions nos 87 et 98 de l'OIT et de veiller au respect de leurs obligations, ayant adopté une législation appropriée pour en garantir le plein respect. Ainsi, le gouvernement signale que toute modification de la législation en vigueur aura lieu sur la base des principes inscrits dans ces conventions et qu'il s'engage à tenir rapidement le comité informé des suites données par le Congrès à l'avant-projet portant modification de la loi sur les relations collectives de travail.

C. Conclusions du comité

175. Le comité note les indications du gouvernement selon lesquelles les poursuites judiciaires en rapport avec la condamnation de dirigeants syndicaux et de syndicalistes de la Fédération des travailleurs de la construction civile du Pérou ont été définitivement closes. De plus, le comité prend note avec intérêt de la volonté du gouvernement de respecter les dispositions des conventions nos 87 et 98 dans toute modification de la législation en vigueur, notamment en matière de négociation collective, ainsi que de son engagement à le tenir rapidement informé des suites données par le Congrès à l'avant-projet portant modification de la loi sur les relations collectives de travail. Dans ces conditions, le comité veut croire que l'avant-projet de loi portant modification de la loi sur les relations professionnelles sera en pleine conformité avec les conventions nos 87 et 98. Le comité signale à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations les nouveaux développements en matière législative.

Recommandations du comité

176. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:


Cas no 1983

Rapport définitif

Plainte contre le gouvernement du Portugal
présentée par
le Syndicat des cadres techniques de l'Etat (STE)

Allégations: ingérence du gouvernement dans le processus
de négociation collective et remplacement de grévistes
au cours de grèves

177. La plainte du Syndicat des cadres techniques de l'Etat (STE) figure dans des communications datées des 11 et 21 août 1998. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications des 15 et 21 janvier 1999.

178. Le Portugal a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations du syndicat plaignant

179. Dans sa plainte des 11 et 21 août 1998, le Syndicat des cadres techniques de l'Etat (STE) allègue la violation de l'article 7 de la convention no 151 sur la protection du droit d'organisation et les procédures de détermination des conditions d'emploi dans la fonction publique, ratifiée par le Portugal. Il rappelle que cette convention prévoit que des mesures doivent être prises pour développer et utiliser les plus larges procédures permettant la négociation des conditions d'emploi entre les autorités publiques intéressées et les organisations d'agents publics, ou toute autre méthode permettant aux représentants des agents publics de participer à la détermination desdites conditions.

180. Le syndicat plaignant souligne que le décret-loi no 45/A/84 du 3 février 1984 reconnaît en son article 5 (1) aux travailleurs de la fonction publique le droit de négociation collective de leurs conditions d'emploi.

181. Il explique que dans cette affaire il représente le Syndicat des pilotes de l'Institut national de pilotage dans les ports, qui exerce ses fonctions dans plusieurs ports maritimes du pays, et qu'en cette qualité il s'est efforcé de négocier avec l'Institut national de pilotage dans les ports les conditions de travail des pilotes pour l'année 1998. Il a formulé des propositions qui n'ont pas fait l'objet de négociation à cause du refus systématique de l'institut employeur. Le STE joint en annexe à sa plainte un résumé chronologique des démarches qu'il a entreprises à partir du mois de décembre 1997 jusqu'à l'adoption de l'arrêté no 395/98 du 11 juillet 1998 du ministère de l'Equipement, de la Planification et de l'Administration territoriale. Cet arrêté fixe les rémunérations des pilotes sans, selon lui, de véritables négociations avec le syndicat. L'arrêté en question, dont le texte est également joint, porte ses effets rétroactivement au 1er janvier 1998 alors que, selon le STE, le syndicat n'a pas été entendu sur le projet.

182. Le STE poursuit en alléguant aussi que des préavis de grève nationale des pilotes des ports et des entrées de ports ont été déclarés les 22 mai, 10 juillet et 30 juillet 1998 pour onze jours de grève en juin, sept jours de grève en juillet et seize jours de grève en août, avec maintien du service minimum. Ces grèves avaient pour but de demander à participer à la révision de la loi organique relative à l'institut et de critiquer l'absence de réponse satisfaisante aux propositions de négociation des conditions d'emploi pour 1998. L'Institut national de pilotage dans les ports et le gouvernement auraient remplacé les pilotes en grève dans plusieurs circonstances. Selon le STE, ces remplacements visaient à diminuer l'impact de la grève et à réduire, en conséquence, les droits des travailleurs qui sont essentiels à l'exercice normal de la liberté syndicale. Le STE joint à sa plainte des photocopies de documents prouvant selon lui le remplacement des travailleurs en grève entre le 18 et le 25 juin 1998.

183. Le syndicat plaignant demande au BIT d'intervenir auprès de l'Institut national de pilotage dans les ports et du gouvernement pour qu'ils respectent la convention no 151, ainsi que le décret-loi no 45/A/84 du 3 février sur la négociation des conditions d'emploi dans la fonction publique et la loi no 65/77 du 26 août sur le droit de grève, ainsi que la Constitution de la République portugaise qui consacre ce droit et interdit le remplacement des travailleurs grévistes.

B. Réponse du gouvernement

184. Dans ses communications des 15 et 21 janvier 1999, le gouvernement fournit, au sujet de la première allégation selon laquelle l'arrêté no 395/98 du 11 juillet 1998 du ministère de l'Equipement, de la Planification et de l'Administration territoriale actualisant le tableau des rémunérations des pilotes des ports et des entrées de ports avec effet rétroactif au 1er janvier 1998 aurait été publié sans que le syndicat ait été entendu et en violation de la convention no 151 et du décret-loi no 45/A/84, les informations suivantes.

185. D'après le gouvernement, le règlement général du Service de pilotage dans les ports et les entrées de ports est régi par le décret-loi no 166/89 du 19 mai. Le gouvernement déclare que dans ce cas le processus de négociation collective s'est ouvert en décembre 1997 entre l'Institut national de pilotage dans les ports et le Syndicat des cadres techniques de l'Etat qui représentent une partie du personnel des pilotes des ports et des entrées de ports de cet institut. Il explique que le syndicat plaignant a alors présenté une proposition d'actualisation des conditions de travail du personnel pour l'année 1998. Cependant, au contraire de ce que prévoit l'article 7 du décret-loi no 45/A/84, la proposition d'augmentation de salaire présentée par ce syndicat n'avait pas de minimum de fondement. L'Institut national de pilotage l'a pourtant acceptée comme base de négociation le 2 février 1998 et a convoqué le syndicat pour une réunion le 13 février 1998. Cette réunion n'a pas eu lieu étant donné que le syndicat n'avait pas confirmé sa présence, ce qu'il reconnaît.

186. Face à cette situation, et afin d'obtenir une solution consensuelle, l'institut a envoyé le 6 mars une contre-proposition au syndicat plaignant tenant compte des limitations budgétaires de l'institut et des pourcentages d'actualisation salariale et autres prestations pécuniaires contenus dans un accord salarial qui avait été signé entre les représentants du gouvernement et la Fédération des syndicats de l'administration publique, et même le Syndicat des cadres techniques de l'Etat (STE) (plaignant dans la présente affaire) pour l'année 1998 en date du 8 janvier 1998. Le gouvernement joint à sa réponse une copie de cet accord qui porte sur l'actualisation des tableaux de rémunération du régime général, des régimes spéciaux et des corps spéciaux d'une valeur de 2,75 pour cent. Le Syndicat des cadres techniques n'a, selon le gouvernement, pas répondu à la contre-proposition, et l'institut a convoqué pour le 14 avril une nouvelle réunion, qui a eu lieu cette fois avec le syndicat sans que, cependant, un accord puisse être dégagé.

187. Le 6 mai 1998, l'institut a donc transmis au syndicat les décisions suivantes:

188. Le gouvernement précise que l'actualisation des salaires a eu lieu conformément à l'article 53 du décret-loi no 361/78 et 40 de l'annexe I, par arrêté du ministre de l'Equipement, de la Planification et de l'Administration territoriale, qui a pris pour référence les valeurs constantes de 2,75 pour cent d'augmentation contenues dans l'accord salarial de 1998, signé entre autres par le syndicat plaignant.

189. Sur le second point selon lequel l'Institut national de pilotage dans les ports et le gouvernement auraient remplacé les pilotes en grève dans plusieurs circonstances, le gouvernement indique que l'article 6 de la loi no 65/77 du 26 août 1977 sur le droit de grève interdit à l'employeur de remplacer les grévistes pendant une grève par des personnes qui, à la date de l'annonce de la grève, ne travaillent pas dans l'établissement ou le service intéressé, et il ne pourra, à compter de cette date, embaucher de nouveaux travailleurs.

190. D'après le gouvernement, ce que l'arrêté no 238/A/97 du 4 avril permet n'est pas le remplacement des grévistes mais que certains navires puissent manœuvrer sans le recours au Service de pilotage, autorisation qui a été prorogée à plusieurs reprises. Aux termes de cet arrêté, les mouvements et les manœuvres décrits dans le règlement général du Service de pilotage dans les ports et les entrées de ports, approuvé dans le décret-loi no 166/89 du 19 mai, peuvent être exécutés librement par des commandants de la marine marchande qui ont une expérience reconnue, qu'ils soient ou non titulaires de la licence de pilotage. Ces commandants de la marine marchande, autorisés à manœuvrer les navires conformément aux termes prévus par l'arrêté, n'ont aucun lien avec l'Institut national de pilotage dans les ports et ne sont ni fonctionnaires, ni employés, ni même collaborateurs de l'institut. D'ailleurs, les navires qui ont manœuvré ou qui manœuvrent sans pilote à bord ne paient évidemment pas de taxe de pilotage puisqu'ils n'effectuent pas de service de pilotage.

191. En conclusion, d'après le gouvernement, sur le premier point il n'y a pas eu de violation du droit de négociation collective dans le processus d'actualisation des salaires des pilotes des ports et des entrées de ports puisque l'actualisation a été, en fait, précédée d'un processus de négociation dont ont fait partie le syndicat plaignant et l'institut sans, toutefois, qu'ils parviennent à un accord. En l'absence d'accord, l'actualisation a été faite selon les termes de référence de l'accord salarial de 1998 élaboré entre le gouvernement, la Fédération des syndicats de l'administration publique et le syndicat plaignant. Sur le second point, il n'y a pas eu remplacement des travailleurs grévistes étant donné que l'arrêté no 238/A/97, qui a fait l'objet de prorogation, a permis précisément de ne pas rendre obligatoire le Service de pilotage pour l'entrée et la sortie de navires dans les ports, ce qui est totalement différent.

C. Conclusions du comité

192. La présente plainte du Syndicat des cadres techniques de l'Etat (STE) a trait à des allégations d'ingérence du gouvernement dans le processus de négociation collective, d'une part, et de remplacement de grévistes au cours de plusieurs grèves, d'autre part.

193. Les versions du syndicat plaignant et du gouvernement sur la première allégation dans cette affaire diffèrent considérablement. Pour le syndicat plaignant, le ministère de l'Equipement, de la Planification et de l'Administration territoriale a, par arrêté en date du 11 juillet 1998, fixé les rémunérations des pilotes des ports et des entrées de ports avec effet rétroactif au 1er janvier 1998 sans véritable négociation avec le syndicat et sans qu'il ait été entendu. En revanche, pour le gouvernement, par un accord écrit en date du 8 janvier 1998 portant sur l'actualisation des salaires et autres prestations pécuniaires pour 1998, signé par le gouvernement, la Fédération des syndicats de l'administration publique et le Syndicat des cadres techniques de l'Etat (plaignant dans cette affaire), une actualisation de 2,75 pour cent de la valeur des indices 100 des tableaux du régime général, des régimes spéciaux et des corps spéciaux a été acceptée par l'ensemble des partenaires. Les négociations, qui se sont engagées en ce qui concerne le pilotage dans les ports et les entrées de ports, n'ayant pas abouti, le gouvernement a procédé à l'actualisation des salaires de ce corps spécial par arrêté du ministère de l'Equipement, de la Planification et de l'Administration territoriale, en prenant pour termes de référence les valeurs constantes de l'accord salarial de 1998.

194. Le comité observe que le syndicat plaignant avait accepté, en date du 8 janvier 1998, une augmentation des salaires de 2,75 pour cent pour le régime général, les régimes spéciaux et les corps spéciaux. Dans ces circonstances, le comité estime qu'il n'y a pas eu atteinte à la liberté syndicale sur ce point et que cet aspect du cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.

195. Sur la deuxième allégation, les observations du syndicat plaignant et celles du gouvernement sont contradictoires. Pour le syndicat plaignant, l'employeur et le gouvernement ont à plusieurs reprises, au cours des grèves des pilotes des ports et des entrées de ports, remplacé les grévistes pour affaiblir le mouvement syndical. Pour le gouvernement, par contre, le droit de grève est respecté et les grévistes n'ont pas été remplacés conformément aux prescriptions légales sur le droit de grève contenues dans l'article 6 de la loi no 65/77 du 26 août 1977 sur le droit de grève qui interdit à l'employeur de remplacer les grévistes pendant une grève par des personnes qui, à la date de l'annonce de la grève, ne travaillent pas dans l'établissement ou le service intéressé. Cependant, un arrêté no 238/A/97 du 4 avril, qui a été prorogé à plusieurs reprises, a permis d'autoriser les commandants expérimentés de la marine marchande d'entrer et de sortir des ports sans pilote. Ces commandants n'ont, d'après le gouvernement, aucun lien avec l'employeur, à savoir l'Institut national de pilotage dans les ports, et ne sont ni fonctionnaires, ni employés, ni collaborateurs de l'institut et n'ont d'ailleurs pas payé de taxe de pilotage pour entrer dans les ports.

196. Le comité note que la législation portugaise contient une disposition spécifique interdisant aux employeurs d'embaucher des travailleurs pour remplacer leurs propres employés en grève. En outre, le comité constate, à la lumière des observations du gouvernement, que le gouvernement a seulement autorisé les commandants expérimentés à entrer et sortir des ports sans avoir recours à l'Institut de pilotage. Il n'appartient pas au comité de se prononcer sur l'opportunité d'une telle décision qui ne constituait pas un remplacement de la main-d'œuvre gréviste de l'Institut de pilotage.

Recommandation du comité

197. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à décider que le présent cas n'appelle pas un examen plus approfondi.


Cas no 1959

Rapport intérimaire

Plainte contre le gouvernement du Royaume-Uni (Bermudes)
présentée par
le Syndicat fraternel des Bermudes (FUB)

Allégations: violations du droit d'organisation et de négociation
collective du personnel d'encadrement et protection insuffisante
contre l'ingérence des employeurs

198. Dans une communication datée du 26 mars 1998, le Syndicat fraternel des Bermudes (FUB) a soumis une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Royaume-Uni (Bermudes). Le Congrès des syndicats britanniques (TUC) s'est associé à cette plainte dans une communication du 2 avril 1998.

199. Le gouvernement du Royaume-Uni a transmis les observations du gouvernement des Bermudes dans une communication du 22 octobre 1998; il a transmis des informations additionnelles dans une communication datée du 3 mars 1999.

200. Le Royaume-Uni a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, et les a déclarées applicables sans modification aux Bermudes.

A. Allégations du syndicat plaignant

201. Dans sa communication du 26 mars 1998, le Syndicat fraternel des Bermudes (FUB) allègue que le gouvernement des Bermudes n'a pas été en mesure de garantir en droit et en pratique le droit fondamental de s'affilier à un syndicat indépendant aux cadres moyens. Le FUB cite en particulier les cadres moyens de la compagnie du téléphone des Bermudes auxquels la compagnie a déclaré «qu'en attendant sa réorganisation il n'était pas souhaitable qu'ils s'affilient à l'Association des fonctionnaires des Bermudes (affiliée au FUB)». Le FUB fait également référence au peu d'empressement que les propriétaires de l'Hôtel Southampton Princess mettent à reconnaître le Syndicat des Bermudes (BIU - qui est, lui aussi, affilié au FUB), bien que le personnel ait voté pour être représenté par le BIU à des fins de négociation collective, ainsi qu'au refus du gouvernement d'intervenir en faveur des droits de ces travailleurs. Enfin, le FUB note que le gouvernement n'a pas accordé la reconnaissance du BIU par la Hamilton Val Cleaners, bien que le personnel de cette entreprise ait voté en faveur d'une telle reconnaissance.

202. Par ailleurs, le FUB se dit préoccupé par le projet d'amendement de la loi sur les syndicats (apparemment adopté par le Parlement en mars 1998, mais pas encore promulgué) qu'il considère comme une attaque à peine voilée contre les organisations syndicales et la négociation collective, dans la mesure où ce projet permet à des agents provocateurs ne faisant pas partie d'un syndicat de battre en brèche la reconnaissance de ce syndicat et à des employeurs de pousser des salariés, soit en faisant pression sur eux, soit en les soudoyant, à voter en faveur du rejet d'un syndicat qui a été reconnu. Dans une note explicative jointe à sa plainte, le FUB se dit préoccupé par l'article 30C(b), qui demande de joindre à la requête en reconnaissance comme agent négociateur une description des faits sur lesquels le syndicat s'appuie pour dire que 35 pour cent au moins du personnel d'une unité donnée souhaitent l'avoir comme agent de négociation exclusif, quand il remet cette requête à l'employeur, craignant qu'il ne donne lieu à des mesures d'intimidation. Le FUB renvoie par ailleurs à un amendement qui prévoit la possibilité, pour tout salarié syndiqué ou pas de l'unité de négociation, de rejeter le syndicat, et note que des employeurs peu scrupuleux ou récalcitrants risquent d'encourager une telle pratique en faisant pression sur les salariés ou en les soudoyant. Enfin, toujours selon le syndicat plaignant, cette nouvelle loi déchargerait les employeurs, contrairement à ce qui est prévu par les conventions nos 87 et 98, de l'obligation d'assurer la reconnaissance d'un syndicat et la représentation des travailleurs.

B. Réponse du gouvernement

203. Dans une communication datée du 22 octobre 1998, le gouvernement du Royaume-Uni a transmis les observations du gouvernement des Bermudes.

204. Celui-ci fait tout d'abord remarquer que la plainte repose sur l'incapacité présumée du gouvernement de garantir aux cadres moyens de la Compagnie de téléphone des Bermudes, en droit et en pratique, le droit fondamental de s'affilier à un syndicat indépendant.

205. Le gouvernement ajoute que le but du projet d'amendement à la loi sur les syndicats a bien été expliqué par le ministre du Travail, des Affaires intérieures et de la Sécurité publique dans le discours qu'il a prononcé devant l'Assemblée législative le 27 février 1998. Dans ce discours, le ministre a expliqué que jusqu'ici les relations professionnelles aux Bermudes reposaient sur un système de négociations volontaires dans lequel les deux parties, à savoir l'employeur et le syndicat, reconnaissaient les procédures, coutumes et pratiques généralement acceptées. Malgré le succès enregistré par cette approche au fil des années, il s'est avéré que certains employeurs refusaient de reconnaître les syndicats, ce qui a entraîné des troubles sociaux. Le projet d'amendement fournit un cadre juridique qui garantit aux travailleurs le droit de choisir un syndicat donné pour les représenter à des fins de négociation collective et qui permet à ce syndicat d'être reconnu en tant que tel par l'employeur. Il fournit également un mécanisme légal pour le rejet d'un syndicat lorsque celui-ci n'a plus le soutien des travailleurs. Ces amendements donnent aux travailleurs la possibilité de choisir un syndicat donné pour représenter leurs intérêts et de mettre fin à cet arrangement soit pour se faire représenter par un autre syndicat, soit pour ne plus être représentés du tout.

206. Selon le gouvernement, cet amendement n'est nullement un obstacle à l'exercice du droit qu'ont les salariés, quels qu'ils soient, de s'organiser pour promouvoir leurs propres intérêts. En outre, la Constitution des Bermudes garantit la liberté syndicale et le droit des individus de s'affilier à un syndicat.

207. S'agissant de la convention no 98, le gouvernement estime que l'amendement va au-delà de la promotion des procédures de négociation volontaire puisqu'il prévoit un mécanisme pour forcer un employeur réticent à négocier avec un syndicat. Alors que la convention vise à promouvoir le développement de négociations collectives, le texte de loi en question crée, pour sa part, un dispositif permettant d'assurer qu'il y ait effectivement négociation collective, et ne viole en aucune façon la lettre ou l'esprit de la convention.

208. Cet amendement permet de reconnaître un syndicat lorsque celui-ci prétend avoir 35 pour cent des travailleurs dans une unité de négociation. L'«unité de négociation» est définie comme comportant le personnel autre que le personnel d'encadrement, et les termes «personnel d'encadrement et de direction» désignent toute personne responsable dans l'exercice de sa fonction de la direction et de la gestion de l'entreprise ou habilitée à nommer ou licencier des employés de l'entreprise, ou à exercer sur eux un contrôle disciplinaire. Il n'est pas rare qu'une unité de négociation reconnue à des fins de négociation collective soit limitée aux seules personnes qui ne font pas partie du personnel d'encadrement et de direction. Cela se fait même dans la plupart des pays. Les cadres et dirigeants doivent former les salariés, diriger leur travail et corriger leurs erreurs chaque fois que des problèmes se posent. Dans un secteur syndiqué, ils doivent également représenter les intérêts de l'employeur dans la négociation collective, et traiter des plaintes et des relations au jour le jour avec les salariés. Il est tout simplement impossible d'avoir un encadrement et une direction qui fonctionnent bien si les cadres et les dirigeants ont une double allégeance, servant comme membres du personnel d'encadrement et de direction, tout en obéissant aux règles syndicales.

209. Le gouvernement note par ailleurs l'absence, dans les conventions, de toute référence à la négociation collective obligatoire et considère, de ce fait, que la référence, dans la définition des mots «unité de négociation», aux personnes qui peuvent être reconnues à des fins de négociation collective obligatoire ne saurait en aucun cas violer les dispositions de ces conventions. Les cadres moyens sont toujours libres de créer des organisations pour négocier volontairement dans le but de conclure un accord collectif.

210. En résumé, le gouvernement des Bermudes estime que le projet d'amendement de la loi sur les syndicats n'entre en conflit ni avec la lettre ni avec l'esprit des conventions nos 87 et 98, et qu'il respecte au contraire les droits et principes énoncés dans ces conventions. Le gouvernement souligne enfin que ce projet de loi s'écarte radicalement de l'approche volontariste consacrée par la législation du travail et marque un tournant décisif dans la sauvegarde des intérêts des travailleurs.

211. Dans une communication en date du 3 mars 1999, le gouvernement du Royaume-Uni (Bermudes) a indiqué que le gouvernement des Bermudes a déclaré que la question relative au projet d'amendement de la loi sur les syndicats avait été soumise à la commission consultative tripartite du travail qui prendra en considération tous les points soulevés par le Syndicat fraternel des Bermudes (FUB) en relation avec le projet de loi proposé. La loi n'entrera pas en vigueur avant que cette consultation tripartite ne soit terminée; tous amendements émergeant de cette consultation seront intégrés à la loi grâce à un amendement au projet de loi. Un rapport complet sur l'évolution de ces consultations tripartites sera fourni en temps opportun.

C. Conclusions du comité

212. Le comité note que les allégations dans ce cas concernent le fait que le gouvernement n'aurait pas assuré la reconnaissance par certains employeurs de syndicats dûment choisis par les salariés, ainsi que l'exclusion dans le projet d'amendement de la loi sur les syndicats des cadres moyens de la représentation par des agents de négociation collective reconnus. Le syndicat plaignant se réfère également au risque d'ingérence et d'intimidation de la part de l'employeur dans le processus de reconnaissance et de rejet des agents de négociation collective contenu dans le projet de loi.

213. Le comité note tout d'abord avec intérêt que, selon la dernière communication du gouvernement, le gouvernement des Bermudes a soumis le projet d'amendement de la loi sur les syndicats à la commission consultative tripartite du travail en vue d'un examen complet des questions soulevées par l'organisation plaignante en relation avec la loi proposée. Il note également que la loi n'entrera pas en vigueur avant que cette consultation tripartite ne soit terminée et que les amendements émergeant de ce processus tripartite seront intégrés à la loi grâce à un amendement au projet de loi. Il n'est pas clair pour le comité au regard de ces dernières informations de déterminer si le projet d'amendement de la loi sur les syndicats a été adopté depuis la réponse initiale du gouvernement au plaignant. Dans tous les cas, le comité se propose d'examiner le projet de loi afin de faire connaître son point de vue sur les questions soulevées dans la plainte.

214. Le comité regrette cependant que le gouvernement n'ait fourni aucune information concernant les allégations selon lesquelles il n'a pas été en mesure de garantir aux cadres moyens le droit de s'affilier à un syndicat indépendant ainsi que son refus d'intervenir afin de garantir la reconnaissance par l'employeur des syndicats dûment choisis pour représenter les travailleurs dans la compagnie du téléphone des Bermudes, dans l'Hôtel Southampton Princess et de la Hamilton Val Cleaners à des fins de négociation collective. Le comité demande au gouvernement de fournir des informations additionnelles à cet égard afin qu'il puisse examiner ces allégations à la lumière de tous ces faits.

215. Le comité note que la réponse du gouvernement, en ce qui concerne les questions mentionnées ci-dessus, évoque uniquement la question de la reconnaissance obligatoire des agents de négociation collective et de l'exclusion des cadres moyens. A cet égard, le comité prend note de l'explication donnée par le gouvernement, à savoir que, jusqu'à l'adoption de ce projet de loi, les relations professionnelles aux Bermudes reposaient sur un système de reconnaissance volontaire à des fins de négociation collective. Bien que ce système ait connu un certain succès, certains employeurs ont refusé de reconnaître les syndicats, ce qui a entraîné des troubles sociaux. Le comité note que, d'après le gouvernement, si le projet de loi en question a été adopté, c'est précisément pour fournir un cadre juridique qui garantisse aux travailleurs le droit de choisir un syndicat donné pour les représenter à des fins de négociation collective, et pour assurer à un tel syndicat sa reconnaissance par l'employeur.

216. Le comité note que les amendements prévoient un système de reconnaissance obligatoire comme agent de négociation exclusif de tout syndicat que soutiennent plus de 50 pour cent des travailleurs de l'unité de négociation (art. 30F(2)). Il note également qu'aux fins de l'article 30A(2) l'expression «unité de négociation» désigne tout groupe d'au moins deux travailleurs d'une entreprise ne faisant pas partie du personnel d'encadrement et de direction, au nom desquels la négociation collective peut avoir lieu, et que l'expression «personnel d'encadrement et de direction» désigne toute personne qui est habilitée, dans l'exercice de ses fonctions dans une entreprise, à nommer ou licencier des employés de l'entreprise, ou à exercer sur eux un contrôle disciplinaire. Etant entendu qu'en vertu de ces amendements les membres du personnel d'encadrement et de direction ne peuvent pas être représentés par le syndicat reconnu comme agent de négociation exclusif et étant donné la déclaration du gouvernement et l'absence de toute disposition législative contraire, le comité conclut que les cadres moyens demeurent libres de créer des organisations pour engager des négociations volontaires dans le but de conclure un accord collectif. Autrement dit, l'exclusion des membres du personnel d'encadrement et de direction ne concerne que le système, nouveau, de reconnaissance obligatoire des agents de négociation collective et ne remet nullement en question les droits dont ils jouissent dans le cadre du système volontaire, ni le droit que leur accorde la loi sur les syndicats de s'organiser en tant que travailleurs. Le comité note enfin qu'en vertu de l'article 30F tout syndicat reconnu avant l'entrée en vigueur du projet d'amendement doit être reconnu comme l'agent de négociation exclusif à l'égard duquel l'accord désigne ce syndicat comme l'agent de négociation exclusif, que l'unité de négociation inclue ou non des membres du personnel d'encadrement et de direction.

217. Pour ce qui est de l'allégation du syndicat plaignant selon laquelle le personnel d'encadrement et de direction aurait été privé de son droit d'organisation et de négociation collective du fait qu'il a été exclu du système de reconnaissance obligatoire établi par le projet d'amendement, le comité se doit de rappeler tout d'abord qu'aucune disposition de l'article 4 de la convention no 98 n'impose au gouvernement l'obligation de recourir à des mesures de contrainte pour obliger les parties à négocier avec une organisation déterminée. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 846.] Ceci ne signifie pas toutefois que, lorsqu'un système de reconnaissance obligatoire est proposé, des exclusions arbitraires peuvent être faites. Pour ce qui est de la représentation à part des membres du personnel d'encadrement et de direction en général, le comité a déjà précisé qu'il n'était pas nécessairement incompatible avec les dispositions de l'article 2 de la convention no 87 de dénier au personnel de direction ou d'encadrement le droit d'appartenir aux mêmes syndicats que les autres travailleurs, mais seulement à deux conditions; premièrement, qu'ils aient le droit de créer leurs propres organisations pour la défense de leurs intérêts et, deuxièmement, que ces catégories de personnel ne soient pas définies en termes si larges que les organisations des autres travailleurs de l'entreprise ou de la branche d'activité risquent de s'en trouver affaiblies, en les privant d'une proportion substantielle de leurs membres effectifs ou potentiels. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 231.] La réponse du gouvernement et le texte de loi montrent clairement que le personnel d'encadrement jouit bien du droit d'organisation et de négociation collective. Pour ce qui est de la définition de l'expression «personnel d'encadrement et de direction», le comité estime que le fait de limiter un tel groupe aux seules personnes qui sont habilitées à nommer ou licencier des employés est suffisamment restrictif pour que la deuxième condition susmentionnée soit satisfaite. Le comité se déclare toutefois préoccupé par la référence qui est faite, dans la définition de ces termes, à l'exercice d'un contrôle disciplinaire sur les travailleurs, une telle définition pouvant donner lieu à une interprétation très large qui exclurait un grand nombre de travailleurs du champ de négociation d'un agent de négociation reconnu, ce au détriment des intérêts des travailleurs concernés et du pouvoir de négociation de l'agent négociateur reconnu. A cet égard, le comité prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que l'exclusion du personnel d'encadrement et de direction du projet d'amendement, sous sa forme définitive, ne soit pas rédigée de manière à permettre l'exclusion d'un nombre important de travailleurs qui ne représentent pas véritablement les intérêts des employeurs.

218. S'agissant du risque d'ingérence et d'intimidation de la part de l'employeur que présenterait le projet d'amendement, le comité note tout d'abord que toute demande de rejet présentée par un travailleur faisant partie d'une unité de négociation doit être accompagnée des éléments prouvant que 35 pour cent au moins des travailleurs de cette unité ne soutiennent plus le syndicat et doit faire ultérieurement l'objet d'un vote (art. 30P). Le comité note également que, selon l'article 30I, qui concerne la protection du scrutin secret, toute menace ou tentative d'intimidation à l'égard d'une personne dans le but de la pousser ou l'obliger à voter ou à ne pas voter constitue un délit passible d'une amende ou d'une peine de prison. Notant les informations récemment fournies par le gouvernement selon lesquelles le projet d'amendement de la loi sur les syndicats ne sera pas adopté avant que la position du FUB ait été examinée par le conseil tripartite, le comité demande au gouvernement de le tenir informé de tout amendement qui pourrait être adopté afin d'accroître la protection contre d'éventuelles mesures d'intimidation de la part de l'employeur ou toute forme d'ingérence concernant les procédures ayant trait à la reconnaissance ou la non-reconnaissance d'un syndicat.

Recommandations du comité

219. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:


Cas no 1977

Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation

Plainte contre le gouvernement du Togo
présentée par
la Force ouvrière togolaise (FOT)

Allégations: atteintes au droit de constituer des organisations
sans autorisation préalable

220. Le 18 juillet 1998, la Force ouvrière togolaise (FOT) a déposé une plainte en violation des droits syndicaux contre le gouvernement du Togo.

221. Dans une communication en date du 21 octobre 1998, le gouvernement a fait parvenir ses observations.

222. Le Togo a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

223. La Force ouvrière togolaise (FOT) indique que, en date du 5 avril 1995 et conformément aux dispositions législatives pertinentes, ses statuts ont été déposés au Cabinet du Procureur de la République, à la direction générale du travail et des lois sociales et à la mairie de Lomé. La FOT rappelle que, aux termes de l'article 5 de l'Ordonnance no 16 du 8 mai 1974 portant Code du travail (ci-après «Code du travail»), un syndicat dont les statuts ont été dûment déposés acquiert une existence légale trois mois après la date du dépôt; la FOT soutient qu'elle a dès lors acquis de droit une existence légale à compter du 7 juillet 1995.

224. L'organisation plaignante ajoute que sa reconnaissance par les autorités du pays n'a souffert aucun doute au cours de sa première année d'existence; elle fournit à l'appui de ses prétentions différentes correspondances et documents démontrant notamment qu'elle a été associée à plusieurs activités organisées par le gouvernement togolais et autres organisations de promotion de défense et de protection des droits de l'homme au cours de la période courant du mois de mai 1995 au mois de décembre 1996.

225. Par ailleurs, l'organisation plaignante soutient que la situation a changé en 1996; elle ferait depuis lors l'objet de persécution de la part des autorités - en raison notamment de sa protestation relative à la désignation des délégués des travailleurs qui ont participé à la 83e Conférence internationale du Travail en juin 1996 - et ne serait plus associée aux diverses activités nationales sous prétexte qu'elle n'a pas de récépissé confirmant le dépôt de ses statuts.

226. Bien que la FOT ait écrit au ministre de l'Intérieur et de la Décentralisation en septembre 1995 afin d'obtenir la délivrance du récépissé prévu à la loi, aucune réponse ne lui est encore parvenue à cet égard. La FOT considère que l'attitude du gouvernement du Togo viole ses engagements internationaux en matière de liberté syndicale.

B. Réponse du gouvernement

227. Dans sa réponse, le gouvernement du Togo traite des questions relatives à l'existence légale de l'organisation plaignante, à sa non-association aux diverses activités sur le plan national et à la persécution dont elle serait victime de la part des autorités.

228. Pour ce qui est de l'existence légale de la FOT, le gouvernement soutient qu'elle n'a pas de véritable existence légale en raison des conditions dans lesquelles le congrès constitutif de la FOT s'est déroulé. En effet, le gouvernement indique qu'aux cérémonies d'ouverture et de clôture du congrès constitutif de cette centrale, seuls 12 et sept militants étaient présents respectivement. En outre, ni le bureau exécutif national ni le rapport sanctionnant le déroulement des travaux du congrès n'ont été présentés au représentant du ministre à cette occasion. Pour toutes ces raisons, le gouvernement s'étonne que l'organisation plaignante, qui ne mène aucune activité sur le terrain, ait protesté contre la désignation des délégués travailleurs à la 83e Conférence internationale du Travail tenue en juin 1996.

229. Toutefois, l'organisation plaignante s'étant conformée aux dispositions de l'article 5 du Code du travail, le gouvernement indique que les pouvoirs publics ont accepté de collaborer avec elle; c'est sur cette base que les différentes communications qu'elle a produites à l'appui de sa plainte lui ont été adressées.

230. Le gouvernement nie avoir violé ses obligations internationales relatives à la liberté syndicale et soutient que, si l'organisation plaignante estime avoir des problèmes, ceux-ci ne sauraient être liés ni à son existence légale ni à la non-délivrance d'un récépissé mais, au contraire, à son incapacité notoire à organiser la moindre activité ou le moindre séminaire de formation ou de sensibilisation pour ses membres.

231. Pour ce qui est de la non-association de la FOT aux diverses activités nationales depuis 1995, le gouvernement souligne la contradiction qui existe entre l'allégation de l'organisation plaignante à cet égard et les différentes correspondances datées de mai 1995 à décembre 1996 annexées à la plainte. Pendant toute l'année 1996, période coïncidant avec celle au cours de laquelle le secrétaire général de l'organisation plaignante a été éloigné de la vie publique, le gouvernement indique que la FOT s'est emmurée dans un silence persistant ne permettant plus de croire à son existence effective.

232. Enfin, en ce qui concerne la persécution dont feraient l'objet l'organisation plaignante et ses dirigeants, le gouvernement estime que cette allégation est sans objet et que l'organisation plaignante n'a fourni aucune preuve à cet égard.

233. Le gouvernement conclut en insistant sur le fait qu'il est respectueux des dispositions des conventions qu'il a ratifiées en matière de liberté syndicale et réaffirme son engagement à les respecter. Dans ce contexte, le secrétaire général de l'organisation plaignante ne saurait lui imputer les conséquences de sa propre turpitude.

C. Conclusions du comité

234. Le comité observe que les allégations de la plainte se réfèrent notamment au droit des travailleurs et des employeurs de constituer des organisations sans autorisation préalable ou ingérence des autorités publiques (convention no 87, art. 2, ratifiée par le Togo).

235. Le comité observe qu'au regard des dispositions pertinentes du Code du travail togolais les syndicats professionnels peuvent être constitués librement aux fins d'étude et de défense des intérêts économiques, industriels, commerciaux, agricoles et artisanaux de personnes exerçant la même profession, des métiers similaires ou des professions connexes (voir, à cet égard, Code du travail, art. 3 et 4).

236. Pour ce qui est des exigences formelles que doivent respecter les organisations syndicales au moment de leur création, l'article 5 du Code du travail dispose que «à peine de nullité, les fondateurs de tout syndicat professionnel doivent déposer les statuts et les noms de ceux qui, à un titre quelconque, sont chargés de son administration ou de sa direction». Cette disposition précise que «[c]e dépôt a lieu en quatre exemplaires à la mairie ou au siège de la circonscription administrative où le syndicat est établi, et un exemplaire des statuts est adressé respectivement à l'inspecteur du travail et des lois sociales et au Procureur de la République». Un récépissé est par la suite délivré dans un délai maximal de trois mois. Passé ce délai, le syndicat est considéré comme ayant une existence légale (art. 5 in fine).

237. Le comité rappelle qu'il a toujours considéré que les formalités prévues par les réglementations nationales concernant la constitution et le fonctionnement des organisations de travailleurs et d'employeurs sont compatibles avec les dispositions des conventions relatives à la liberté syndicale à condition, bien entendu, que ces dispositions réglementaires ne mettent pas en cause les garanties qui y sont prévues. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 247.]

238. Plus précisément, ces formalités ne doivent pas être utilisées par les autorités publiques de manière à empêcher les activités légitimes d'une organisation syndicale dûment constituée; une telle situation autoriserait l'ingérence des autorités publiques dans les activités des organisations syndicales et serait incompatible avec les principes de la liberté syndicale. En d'autres termes, ces prescriptions et formalités ne doivent pas équivaloir en pratique à une autorisation préalable ni faire obstacle à la création d'une organisation au point de constituer en fait une interdiction pure et simple. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 249 et 259.] En outre, le comité relève que, selon le gouvernement, ni le bureau exécutif national de la FOT ni le rapport sanctionnant le déroulement des travaux du congrès constitutif de cette centrale n'ont été présentés au représentant du gouvernement à l'occasion de ce congrès. Le comité rappelle qu'une telle procédure doit s'avérer n'être qu'une simple formalité ayant pour but d'assurer la publicité pour être conforme aux principes de la liberté syndicale ci-dessus mentionnés.

239. Le comité observe que l'organisation plaignante semble a priori avoir respecté les exigences formelles qui doivent être remplies pour qu'une organisation syndicale prétende à l'existence légale au regard de la loi togolaise. En outre, le comité relève que l'organisation plaignante aurait été associée à diverses activités organisées par le gouvernement togolais au cours des années 1995 et 1996, étant partie notamment aux négociations tripartites tenues en mai 1995 entre le gouvernement, le conseil national du patronat et les organisations syndicales.

240. Dans la mesure où les exigences formelles fixées pour la création d'un syndicat sont remplies, l'organisation syndicale ainsi créée doit pouvoir exercer ses activités légitimes sans aucune intervention de la part des autorités publiques, notamment pour ce qui est de la manière dont ses réunions sont tenues.

241. Par ailleurs, le comité prend note des observations du gouvernement concernant la représentativité de l'organisation plaignante. Bien que le comité n'ait pas les éléments pour se prononcer sur la représentativité de l'organisation plaignante, il doit souligner que le droit de constituer librement des organisations syndicales et la reconnaissance de la représentativité d'un syndicat selon des critères objectifs, préétablis et précis sont deux questions tout à fait distinctes; en outre, la reconnaissance de la représentativité de certains syndicats, aux fins d'octroi et de privilèges et d'avantages de portées variables, ne doit pas aboutir dans les faits à interdire l'existence d'autres organisations syndicales ne répondant pas à ces critères, privant les travailleurs de leur droit fondamental de constituer ou de s'affilier aux organisations de leur choix.

242. Dans ces circonstances, le comité prie le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer que les organisations syndicales togolaises légalement constituées, incluant l'organisation plaignante, puissent exercer leurs activités syndicales sans autorisation préalable ou ingérence des autorités publiques et que, conformément aux termes de l'article 5 du Code du travail, le récépissé de dépôt des statuts de l'organisation plaignante soit délivré. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des mesures prises à cet égard.

Recommandation du comité

243. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver la recommandation suivante:


Cas no 1981

Rapport où le comité demande a être tenu informé
de l'évolution de la situation

Plainte contre le gouvernement de la Turquie
présentée par
le Bütün Belediye Memurlari Birlii Sendikasi (BEM-BIR-SEN)

Allégations: restrictions au droit de négociation collective
des fonctionnaires

244. Par une communication en date du 11 août 1998, le Bütün Belediye Memurlari Birlii Sendikasi - Syndicat général des fonctionnaires municipaux - (BEM-BIR-SEN) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement de la Turquie. Il a soumis de nouvelles allégations dans une communication datée du 25 septembre 1998.

245. Le gouvernement a fourni ses observations dans des communications datées des 23 et 26 novembre 1998.

246. La Turquie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, (1949).

A. Allégations du syndicat plaignant

247. Dans sa plainte datée du 11 août 1998, le BEM-BIR-SEN déclare qu'il exerce ses activités dans la fonction publique locale et qu'il représente les salariés ayant le statut de fonctionnaires et le personnel travaillant sous contrat dans les institutions gouvernementales locales. Il prétend que ses activités de négociation collective ont été entravées par le gouvernement et qu'il a fait obstacle à la mise en œuvre d'accords collectifs déjà conclus, violant ainsi la convention no 98.

248. Le BEM-BIR-SEN explique ensuite les faits qui sont à l'origine de sa plainte. Il indique qu'il a été créé le 10 janvier 1994 et qu'il compte actuellement 32 000 membres. Il est également affilié à la Confédération des syndicats de fonctionnaires (MEMUR-SEN), une organisation faîtière formée en 1995. Il souligne que le gouvernement a pour obligation, en vertu de divers instruments juridiques nationaux et internationaux - notamment les conventions nos 87 et 98 de l'OIT, la Constitution de la Turquie et la loi no 657 sur les fonctionnaires - de reconnaître aux syndicats de fonctionnaires le droit d'exercer leurs activités librement pour défendre les intérêts de leurs membres. Les fonctionnaires ont toutefois eu beaucoup de difficultés à s'organiser et à négocier collectivement par le passé à cause de l'attitude du gouvernement et des nombreuses restrictions qu'il a imposées aux organisations de fonctionnaires, et notamment au BEM-BIR-SEN. De plus, le gouvernement continue à ne pas respecter ses obligations nationales et internationales comme en témoigne le fait que la Commission pour l'application des normes de la Conférence a décidé en juin 1998 d'examiner le cas de la Turquie pour son défaut d'application de la convention no 98.

249. En dépit de ces graves obstacles, le BEM-BIR-SEN relève que certaines évolutions, de portée encore très limitée, sont intervenues en ce qui concerne les droits des syndicats de fonctionnaires. Le BEM-BIR-SEN même a été en mesure d'exercer des activités d'organisation dans plusieurs municipalités avec lesquelles il a conclu 26 «Accords d'équilibre social» (AES) à la suite de négociations collectives. Ces AES, qui octroient des droits économiques et sociaux aux membres du syndicat, sont comparables à des accords de négociation collective mais sont appelés AES pour surmonter les obstacles auxquels se heurtent les syndicats de fonctionnaires car le gouvernement ne reconnaît pas encore à ces organisations le droit explicite de négocier collectivement.

250. Le BEM-BIR-SEN affirme qu'un exemple concret de l'attitude du gouvernement est la décision du ministère de l'Intérieur d'interdire l'application de l'AES conclu entre l'employeur, la municipalité d'Elazi et le BEM-BIR-SEN avec effet au 15 janvier 1998 (une copie de cet AES est jointe à la plainte). Après avoir procédé à une enquête, les inspecteurs du ministère de l'Intérieur sont arrivés à la conclusion que les versements effectués en faveur des membres du BEM-BIR-SEN à la suite de la conclusion de l'AES ne sont pas conformes aux dispositions de la législation nationale et qu'ils devront être remboursés. Le BEM-BIR-SEN indique que dans leur rapport d'inspection les inspecteurs ont écrit «qu'une municipalité ne peut pas signer avec un syndicat un contrat prévoyant des paiements supplémentaires qui ne sont pas spécifiés dans la loi no 657 sur les fonctionnaires». Les inspecteurs concluent que les salaires des fonctionnaires sont régis par ladite loi et que, par conséquent, «les fonctionnaires ne peuvent pas bénéficier de versements ou d'avantages en plus du salaire qui leur est payé pour les tâches qu'ils assument ...» et que, en application de l'AES, «... certains salaires supplémentaires ont été versés illégalement au personnel des services des autobus et de l'eau de la municipalité de Elazi (une copie du rapport d'inspection est jointe à la plainte).

251. En conséquence, le rapport conclut que les versements effectués doivent être remboursés à la municipalité. Le BEM-BIR-SEN indique que le ministère de l'Intérieur a donné des ordres à l'employeur pour recouvrer les sommes versées et le gouvernorat de Elazi a été chargé de cette tâche. En plus de ces mesures, le ministère de l'Intérieur a diligenté une enquête pénale sur les activités du maire de la municipalité de Elazi au motif qu'il avait conclu cet accord collectif en tant qu'employeur. Le BEM-BIR-SEN affirme que toutes ces mesures constituent une violation du droit de négocier collectivement.

252. Dans une communication ultérieure datée du 25 septembre 1998, le BEM-BIR-SEN allègue que le ministère de l'Intérieur s'est à nouveau opposé à l'application d'un AES conclu dernièrement entre un employeur, la municipalité de Suluova, et le BEM-BIR-SEN après que des inspecteurs du ministère eurent procédé à une enquête (des copies de l'AES en question ainsi que du rapport d'inspection sont jointes à la communication du BEM-BIR-SEN).

B. Réponse du gouvernement

253. Dans sa réponse initiale du 23 novembre 1998, le gouvernement déclare qu'après la ratification par la Turquie, en 1993, de la convention no 151 concernant la protection du droit d'organisation et les procédures de détermination des conditions d'emploi dans la fonction publique, les dispositions pertinentes de la Constitution ont été amendées en 1995 par la loi no 4121 afin de reconnaître le droit d'organisation et de négociation collective aux fonctionnaires en tant que droit constitutionnel. L'article 53 de la Constitution, tel qu'il a été amendé par la loi no 4121, a la teneur suivante:

Les travailleurs et les employeurs ont le droit de conclure des accords collectifs de travail pour déterminer mutuellement leur statut économique et social et les conditions de travail.

La procédure à suivre pour la conclusion d'accords collectifs de travail sera prévue par la loi.

Les syndicats et leurs organisations supérieures, que peuvent former les employés de la fonction publique mentionnés au premier paragraphe de l'article 128 et qui ne sont pas visés par les dispositions des premier et deuxième paragraphes de cet article et de l'article 54, peuvent ester en justice au nom de leurs membres et peuvent négocier collectivement avec l'administration conformément à leurs objectifs. Si un accord est conclu à la fin de négociations collectives, le texte de l'accord sera rédigé et signé par les parties. Ce texte sera présenté au Conseil des ministres afin que des dispositions administratives et législatives puissent être prises. S'il n'est pas possible d'approuver un tel texte dans le cadre de négociations collectives, les points sur lesquels il y a accord et désaccord seront également soumis pour examen au Conseil des ministres par les parties concernées. Les dispositions régissant l'application de cet article seront énoncées par la loi.

Un seul accord de travail collectif sera conclu et mis en œuvre pour un même lieu de travail et une même période.

254. Le gouvernement explique que, conformément à l'amendement constitutionnel de 1995 susmentionné, la loi no 657 sur les fonctionnaires a également été amendée en 1997 afin de permettre aux fonctionnaires de former des syndicats, de s'y affilier et de s'affilier à des organisations de niveau supérieur conformément aux principes énoncés par la Constitution et la législation pertinente. Dans la phase finale des efforts qu'il a déployés pour assurer la concordance de la législation avec les dispositions des normes internationales du travail pertinentes, le gouvernement a soumis à la Grande Assemblée nationale un projet de loi sur les fonctionnaires en vue de sa promulgation. Le projet de loi a fait l'objet d'un long débat à l'Assemblée et la moitié des articles proposés ont été approuvés. Néanmoins, en raison des exigences des partis de l'opposition et de certains syndicats de fonctionnaires, la procédure législative est encore en cours car les autres articles doivent être réévalués et révisés et certains syndicats de fonctionnaires restent par conséquent sans cadre juridique pour mener des négociations et conclure des accords avec l'administration. Le bureau du Premier ministre a cependant publié une circulaire le 20 novembre 1997 pour faciliter le fonctionnement des syndicats de fonctionnaires, et des informations sur cette circulaire ont été fournies dans le rapport antérieur de la Turquie relatif à la convention no 98, conformément à l'article 22 de la Constitution de l'OIT.

255. Le gouvernement relève qu'en Turquie les fonctionnaires pouvaient déjà s'organiser en syndicats et en confédérations avant l'amendement constitutionnel de 1995, comme cela a été le cas pour la création du BEM-BIR-SEN (Syndicat général des fonctionnaires municipaux affilié à la Confédération MEMUR-SEN, qui est une des trois confédérations de fonctionnaires). Etant donné les dispositions législatives et administratives susmentionnées et les efforts déployés à cette fin, les allégations formulées à l'encontre du gouvernement qui mettent en doute sa bonne foi ne sont pas fondées.

256. Le gouvernement conclut qu'étant donné que les négociations et les accords entre les syndicats de fonctionnaires et l'administration (y compris les administrations locales) impliquent la prise de dispositions budgétaires, légales et administratives, les procédures pour le fonctionnement de tels syndicats et les dispositions réglementaires régissant leurs relations avec l'administration doivent d'abord être définies par la législation. Bien qu'un tel cadre juridique n'existe pas encore, le gouvernement ne s'oppose pas aux accords collectifs conclus, comme le montre l'existence de 26 accords conclus entre le BEM-BIR-SEN et des municipalités, dans la mesure où ils n'impliquent pas des paiements non prévus dans les budgets annuels et dans le cadre d'une législation telle que la loi n657/1965 sur les fonctionnaires. Cependant, dans le présent cas, l'accord collectif dont il s'agit prévoit des paiements qui n'avaient pas de base légale et qui n'étaient pas prévus par une ligne budgétaire.

257. Dans sa seconde communication du 26 novembre 1998, le gouvernement se réfère à l'allégation selon laquelle le ministère de l'Intérieur se serait opposé à l'application de l'Accord d'équilibre social (AES) conclu entre la municipalité de Suluova et le BEM-BIR-SEN, en chargeant des inspecteurs de ce ministère de procéder à une enquête. Le gouvernement affirme que le BEM-BIR-SEN a joint le rapport d'inspection original avec une traduction incorrecte qui induit en erreur. Selon le gouvernement, le paragraphe 59 du rapport d'inspection rappelle que l'article 146 de la loi no 657 sur les fonctionnaires contient la disposition suivante: «Les fonctionnaires ne peuvent pas être rémunérés pour les tâches que leur confèrent les lois, les ordonnances, les règlements et leurs supérieurs autrement qu'en vertu des droits énoncés par cette loi. Aucun avantage ne peut leur être accordé.». Le rapport précise que, aux termes de la disposition de cet article, les paiements susmentionnés n'ont pas de base légale; il ajoute que, conscient de ce fait, l'administration des finances a établi au moment des paiements des contrats écrits avec tous les fonctionnaires auxquels de tels versements ont été faits afin qu'au cas où ces paiements seraient considérés comme des dettes personnelles ils devraient être remboursés.

258. En fait, le rapport d'inspection ne comporte pas de déclaration et ne met pas en doute la validité de l'AES conclu entre la municipalité de Suluova et le BEM-BIR-SEN. Contrairement à la traduction fournie par le BEM-BIR-SEN, le texte original du 59e paragraphe du rapport, également fourni par le syndicat, ne contient pas les phrases suivantes ou toute déclaration similaire: «Conformément à la loi no 657 sur les fonctionnaires, les paiements que les municipalités font à leurs fonctionnaires pour des raisons économiques et sociales sont également mentionnés et certaines explications quant aux dispositions réglementaires qui les régissent sont données. Une municipalité ne peut pas signer de contrat avec un syndicat en vue de faire des versements supplémentaires.». De plus, le rapport d'inspection ne comporte pas d'ordre visant à empêcher l'application de l'AES.

C. Conclusions du comité

259. Le comité note que les allégations dans le présent cas ont trait à des restrictions du droit des organisations de fonctionnaires de négocier collectivement, résultant d'une intervention du gouvernement qui s'oppose à l'application d'accords collectifs ou d'«Accords d'équilibre social» (AES) conclus antérieurement.

260. Bien que le syndicat plaignant (BEM-BIR-SEN) ait conclu des AES avec 26 municipalités différentes, il allègue que le gouvernement s'est opposé à l'application de deux de ces AES conclus entre le BEM-BIR-SEN, d'une part, et les municipalités de Elazi et de Suluova, d'autre part. Le gouvernement, quant à lui, affirme que, bien qu'un cadre juridique - dans lequel les syndicats de fonctionnaires puissent mener des négociations et conclure des accords avec l'administration - n'existe pas, il ne s'immisce pas dans les accords collectifs déjà conclus, pour autant que ces accords n'impliquent pas des versements non prévus par la loi no 657/1965 sur les fonctionnaires ou par les budgets annuels.

261. Le gouvernement relève toutefois que, dans les deux cas en question, les AES contiennent des dispositions relatives à des paiements qui n'ont pas de base juridique et qui ne sont pas prévus par le budget. Le comité note par conséquent que la réponse du gouvernement reconnaît implicitement que les salaires supplémentaires versés au personnel des services des autobus et de l'eau de la municipalité de Elazi ainsi qu'au personnel des services des autobus de la municipalité de Suluova doivent être remboursés aux municipalités concernées, comme l'allègue le BEM-BIR-SEN et l'attestent les rapports d'inspection pertinents. De plus, bien que le gouvernement conteste la traduction du contenu du rapport d'inspection sur l'AES conclu entre la municipalité de Suluova et le BEM-BIR-SEN, le comité note que cela est quelque peu contradictoire avec le fait que la traduction du premier rapport d'inspection sur l'AES conclu entre la municipalité d'Elazi et le BEM-BIR-SEN, qui a un contenu similaire, n'a pas fait l'objet de réfutation de la part du gouvernement.

262. Le comité est donc conduit à comprendre qu'une des raisons pour lesquelles le gouvernement, par l'intermédiaire des inspecteurs du ministère de l'Intérieur, s'oppose à l'application de l'AES précité et que les salaires supplémentaires que ledit accord octroie au personnel des deux municipalités concernées ne sont pas prévus par la loi, en l'occurrence par la loi no 657 sur les fonctionnaires.

263. Dans ce contexte, le comité se voit dans l'obligation de rappeler au gouvernement que les agents de la fonction publique, à l'exception de ceux qui sont commis à l'administration de l'Etat, devraient bénéficier du droit de négociation collective, et qu'une priorité devrait être accordée à la négociation collective comme moyen de règlement des différends survenant à propos de la détermination des conditions et modalités d'emploi dans le secteur public. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 793.] Etant donné que le personnel des municipalités de Elazi et de Suluova - en l'occurrence, le personnel des services des autobus et de l'eau - ne peut pas être considéré comme des agents commis à l'administration de l'Etat, la législation ne devrait pas constituer un obstacle pour les droits de négociation collective des agents précités. Dans ces circonstances, le comité est d'avis qu'en empêchant l'application de l'AES librement conclu par le BEM-BIR-SEN et, respectivement, les municipalités de Elazi et de Suluova, le gouvernement a violé le principe de la négociation collective libre et volontaire énoncé par l'article 4 de la convention no 98.

264. Le gouvernement déclare en outre qu'il a soumis un projet de loi concernant les syndicats de fonctionnaires à la Grande Assemblée nationale. La moitié des articles de ce projet de loi ont été approuvés, et quand la loi entrera en vigueur elle fournira un cadre légal dans lequel les syndicats de fonctionnaires pourront mener des négociations et conclure des accords. Le gouvernement indique toutefois que la procédure législative n'a pas encore abouti à cause des exigences divergentes des partis de l'opposition et de certains syndicats de fonctionnaires. Dans ce contexte, le comité observe également que, dans ses rapports sur les conventions nos 98 et 151 soumis en vertu de l'article 22 de la Constitution de l'OIT, le gouvernement a fourni des informations selon lesquelles le projet de loi relatif aux syndicats de fonctionnaires a été soumis pour la première fois au Parlement le 14 mars 1994, mais que ce projet de loi a été approuvé avec un retard considérable en raison des divers changements de gouvernements qui sont intervenus depuis 1994. En tenant compte des facteurs susmentionnés, le comité estime qu'on ne peut pas exclure l'éventualité que le projet de loi relatif aux droits syndicaux et de négociation collective des fonctionnaires ne soit approuvé et ait force de loi avant un laps de temps considérable. On ne saurait exiger des syndicats qu'ils attendent cette promulgation pour exercer un droit de négocier librement les conditions et modalités d'emploi dans la fonction publique, un droit qui est garanti pour les agents de la fonction publique, à l'exception de ceux qui sont commis à l'administration de l'Etat, par l'article 4 de la convention no 98, que la Turquie a ratifiée en 1952. Le gouvernement affirme également qu'il n'y avait pas d'affectation budgétaire pour les versements supplémentaires dont ont bénéficié les fonctionnaires en question; le comité est toutefois d'avis qu'il incombe à l'employeur - en l'occurrence, les municipalités de Elazi et de Suluova - de prendre une telle décision. Etant donné que ces deux employeurs ont décidé, conformément à l'AES qu'ils ont conclu chacun de leur côté, d'accorder des paiements supplémentaires à leurs employés, le comité estime que la décision du gouvernement de modifier le contenu de ces AES qui ont été conclus librement et dont l'application avait déjà été négociée par les parties constitue une violation de la négociation volontaire d'accords collectifs, et par conséquent de l'autonomie de négociation des partenaires.

265. Pour toutes les raisons susmentionnées, le comité regrette que le gouvernement n'ait pas donné la priorité à la négociation collective comme moyen de déterminer les conditions d'emploi des agents employés par les municipalités de Elazi et de Suluova; il demande au gouvernement de s'abstenir à l'avenir de recourir à des mesures d'intervention dans le processus de négociation collective et dans son aboutissement pour ces catégories de travailleurs.

266. C'est pourquoi, le comité prie le gouvernement de veiller à ce que les travailleurs ne soient pas obligés de restituer les paiements supplémentaires effectués aux termes des AES conclus entre le BEM-BIR-SEN et les municipalités de Elazi et de Suluova. Il demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.

267. Enfin, notant que le ministère de l'Intérieur a ouvert une enquête pénale sur les activités du maire de la municipalité de Elazi au motif qu'il a conclu un accord collectif en tant qu'employeur, le comité demande instamment que le maire ne soit pas sanctionné pour avoir exercé des droits de négociation collective en vertu de la convention no 98. Il demande donc au gouvernement de mettre un terme à l'enquête pénale diligentée par le ministère de l'Intérieur.

268. Le comité signale les aspects législatifs de ce cas dans le contexte de l'application de la convention no 98 à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.

Recommandations du comité

269. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:


Cas no 1812

Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation

Plainte contre le gouvernement du Venezuela
présentée par
le Secrétariat international des syndicats des employés des arts,
de la communication et du spectacle/
Fédération internationale des syndicats des travailleurs
de l'audiovisuel (ISETU/FISTAV)

Allégations: ingérence patronale à l'occasion
de la création d'un syndicat

270. Le comité a examiné ce cas à ses sessions de mars 1996, juillet 1997 et mars 1998, où il a présenté des rapports intérimaires au Conseil d'administration. [Voir 302e rapport, paragr. 519 à 534; 307e rapport, paragr. 471 à 479, et 309e rapport, paragr. 387 à 403, approuvés par le Conseil d'administration à sa 265e session (mars 1996), à sa 269e session (juin 1997) et à sa 271e session (mars 1998).]

271. Le gouvernement a fait parvenir de nouvelles observations par une communication du 4 novembre 1998.

272. Le Venezuela a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

273. Dans la présente plainte, l'organisation plaignante avait critiqué l'enregistrement d'un syndicat (SINATRAINCORACTEL) - enregistré très rapidement par les autorités, en dépit de plusieurs irrégularités - et avait fait valoir qu'il existait déjà un syndicat: le Syndicat professionnel des travailleurs de la radio, du théâtre, du cinéma, de la télévision et autres moyens de communication du district fédéral et de l'Etat de Miranda (SRTVA) dans l'entreprise de radiodiffusion CORAVEN-RCTV, et que cette entreprise publique avait soutenu la création du nouveau syndicat par diverses pratiques antisyndicales (représentants de l'entreprise présents à la réunion constitutive du nouveau syndicat, menaces de licenciement des travailleurs qui ne deviendraient pas membres de ce syndicat, négociation d'une nouvelle convention collective avec le nouveau syndicat, alors que la précédente, qui était encore en vigueur, avait été annulée par l'entreprise, etc.); selon les plaignants, il n'y avait pas eu d'assemblée constitutive proprement dite, et les membres de la direction du nouveau syndicat appartenaient à l'ancien syndicat. [Voir 309e rapport, paragr. 400.]

274. Le gouvernement avait déclaré: 1) une fois constitué le nouveau syndicat, 319 travailleurs se sont réunis pour élire le conseil de direction; 2) dans ce cas, la liberté syndicale a traduit dans les faits le pluralisme syndical qui est consacré par la législation; 3) le nouveau syndicat a satisfait à toutes les conditions prévues par la loi; 4) le nouveau syndicat n'a pas été enregistré en un temps record mais dans les délais prévus par la loi; 5) le fait que le nouveau syndicat compte des dirigeants de l'ancien syndicat est sans incidence; 6) quant au fait qu'une convention collective était déjà en vigueur, c'est à l'inspection du travail qu'il incombe de veiller au respect du principe d'intangibilité de la convention collective; 7) l'objet du présent cas est un conflit entre les membres d'un syndicat, conflit qui a donné lieu à la création d'un nouveau syndicat. [Voir 309e rapport, paragr. 401.] Par ailleurs, le gouvernement avait indiqué que l'organisation plaignante (SRTVA) avait interjeté appel (dont le texte figure en annexe) devant la Cour suprême de justice le 20 juillet 1996, et que ladite cour n'avait pas encore rendu son arrêt. Selon la documentation transmise par le gouvernement, le recours du SRTVA a été accepté par la Cour suprême de justice le 5 mai 1997 et celle-ci a demandé à la ministre du Travail de présenter un rapport à cet égard.

275. A sa réunion de mars 1998, le comité a formulé la recommandation suivante [voir 309e rapport, paragr. 403]:

Observant que les déclarations du gouvernement et les allégations des plaignants sont contradictoires en ce qui concerne la légalité de l'enregistrement du nouveau syndicat et que la réponse du gouvernement ne contient pas d'observations sur les allégations relatives à la présence de représentants de l'entreprise dans l'assemblée constitutive du nouveau syndicat ni sur les allégations concernant les menaces de licenciement des travailleurs qui ne deviendraient pas membres du nouveau syndicat, le comité prie le gouvernement de présenter ses observations sur ces allégations pour lui permettre de se prononcer en pleine connaissance de cause.

B. Réponse du gouvernement

276. Dans sa communication du 4 novembre 1998, le gouvernement indique à nouveau que l'enregistrement du Syndicat SINATRAINCORACTEL a eu lieu conformément à ce qui est prévu dans la loi organique du travail. En effet, l'allégation présentée par l'organisation syndicale plaignante selon laquelle la décision d'enregistrer le Syndicat SINATRAINCORACTEL a été prise en un «temps record», puisqu'elle a été accordée en 15 jours, est infondée étant donné que l'article 425 de la loi organique du travail dispose expressément que l'autorité administrative compétente doit accorder l'enregistrement de l'organisation syndicale candidate dans un délai de 30 jours à compter du dépôt de la demande; il est donc tout à fait possible - voire plausible - que l'enregistrement ait eu lieu dans le délai imparti par la loi. Ce qu'on ne peut pas dire c'est qu'en une telle circonstance le fait de recevoir une demande et d'y répondre, conformément à la loi, constitue un acte d'ingérence antisyndicale, comme prétend le faire remarquer l'organisation plaignante.

277. Le gouvernement ajoute que la mesure administrative, en vertu de laquelle a été accordé l'enregistrement de l'organisation syndicale susmentionnée, constitue un acte administratif et, comme tel, il peut être contesté par la voie judiciaire par quiconque s'estime de ce fait lésé dans ses droits.

278. Le gouvernement explique qu'il ne s'est pas prononcé sur l'allégation soutenue par l'organisation plaignante au sujet de la présence de représentants de l'entreprise lors de l'assemblée constitutive du nouveau syndicat non pas par omission involontaire mais parce qu'une opinion ou un avis en la matière constituerait une réelle ingérence de la part des organes administratifs du travail dans le domaine syndical. La plainte éventuelle concernant la présence de certains représentants de l'entreprise lors de l'assemblée constitutive du nouveau syndicat découlera de la contestation des minutes pertinentes de l'assemblée et devra obligatoirement passer par un organe judiciaire.

279. Le gouvernement signale qu'il n'est pas en mesure d'examiner la constitution interne des organisations syndicales, celles-ci étant des personnes juridiques autonomes capables de fixer leurs propres limites concernant l'admission de leurs membres, ce qui est essentiel à la liberté syndicale.

280. S'agissant de l'allégation de l'organisation syndicale plaignante sur la menace présumée de licenciement des travailleurs qui n'adhéreraient pas au nouveau syndicat, il s'agit aussi d'une plainte qui n'est pas du ressort de l'exécutif national. Il convient de noter que l'allégation porte sur une menace présumée qui, si elle se vérifiait, pourrait constituer un acte préjudiciable à la liberté syndicale. Une déclaration sur la survenance éventuelle d'un fait constituant une menace, c'est uniquement aux tribunaux qu'il appartient de dire si celle-ci constitue un acte d'ingérence patronale dans la constitution d'une organisation syndicale.

281. Enfin, le gouvernement souligne que l'ordre judiciaire vénézuélien comprend des mécanismes garantissant la tutelle judiciaire de la liberté syndicale afin d'éviter le dommage imminent que causerait un acte apparemment préjudiciable, ainsi que le dénonce l'organisation syndicale plaignante, conformément à la législation en vigueur. Elle dispose également du pouvoir d'intenter une action en protection constitutionnelle (amparo) pour empêcher la perpétration de tels actes.

C. Conclusions du comité

282. Le comité note que dans sa réponse le gouvernement n'affirme ni ne nie la présence alléguée de représentants de l'entreprise CORAVEN-RCTV lors de l'assemblée constitutive du nouveau syndicat (SINATRAINCORACTEL), ni la menace alléguée de licenciement des travailleurs qui n'adhéreraient pas à ce nouveau syndicat, et se borne à signaler qu'il existerait des mécanismes et des voies de recours à la disposition de l'autre syndicat SRTVA. Le comité demande au gouvernement d'effectuer une enquête sur ces allégations et de le tenir informé du résultat de l'enquête, le plus rapidement possible.

283. Compte tenu de ce qui précède, et du fait que le gouvernement dans ses réponses successives a maintenu que le présent cas traite d'un conflit interne au sein d'un syndicat qui a donné lieu à la création d'un autre syndicat qui réunit 319 travailleurs, le comité estime qu'il doit disposer de la décision de la Cour suprême de justice. Le comité prie le gouvernement de lui communiquer le texte de l'arrêt prononcé à ce sujet, avec ses attendus.

Recommandations du comité

284. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:


Cas no 1952

Rapport où le comité demande à être tenu informé
de l'évolution de la situation

Plainte contre le gouvernement du Venezuela
présentée par
le Syndicat «Association des pompiers professionnels
et activités connexes et apparentées» du district fédéral
et de l'Etat de Miranda (SINPROBOM)

Allégations: actes de discrimination antisyndicale et d'intimidation
de syndicalistes du service des sapeurs-pompiers

285. Le comité a examiné ce cas à sa session de mai-juin 1998 où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 310e rapport, paragr. 592 à 608, approuvé par le Conseil d'administration à sa 272e session (juin 1998).]

286. Par la suite, le Syndicat «Association des pompiers professionnels et activités connexes et apparentées» du district fédéral et de l'Etat de Miranda (SINPROBOM) a présenté de nouvelles allégations dans une communication du 6 octobre 1998. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication en date du 4 novembre 1998.

287. Le Venezuela a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

288. Lors de l'examen antérieur du cas, les allégations suivantes présentées par l'organisation plaignante sont restées en instance: 1) le licenciement de plusieurs dirigeants syndicaux (secteur des sapeurs-pompiers) - MM. Glácido Gutiérrez, Rubén Gutiérrez, Tomás Arencibia et Juan Bautista Medina - et d'un nombre significatif d'affiliés, ainsi que la mutation d'un autre dirigeant syndical (M. Ignacio Díaz), et 2) la citation à comparaître devant une préfecture de MM. Tomás Arencibia et Glácido Gutiérrez, ces derniers ayant été avertis qu'ils pourraient se voir imposer des mesures privatives de liberté.

289. Après avoir examiné les observations transmises par le gouvernement, le comité avait formulé les recommandations suivantes [voir 310e rapport, paragr. 608]:

B. Nouvelles allégations de l'organisation plaignante

290. Dans sa communication du 6 octobre 1998, le Syndicat «Association des pompiers professionnels et activités connexes et apparentées» du district fédéral et de l'Etat de Miranda (SINPROBOM) signale que les mesures de discrimination antisyndicale alléguées contre les dirigeants syndicaux (et qui datent de juillet 1997) n'ont pas été reportées, car le neuvième juge de première instance du travail de la zone métropolitaine de Caracas ne s'est pas encore prononcé définitivement en raison de l'inactivité et du retard dans les procédures (il s'est contenté de suspendre provisoirement l'ordre de réintégrer à leur poste de travail les dirigeants syndicaux donné par l'autorité administrative), bien que la Cour suprême ait déclaré dernièrement dans un cas similaire que les travailleurs de la Communauté du corps de pompiers de l'est sont soumis au régime de travail ordinaire et jouissent par conséquent des libertés et garanties syndicales prévues par la loi organique du travail et que la Commission permanente des affaires sociales de la Chambre des députés ait publié, en juillet 1996, un rapport dans lequel elle interprète correctement la portée et la signification de la décision du Comité de la liberté syndicale dans le présent cas.

291. Quant aux affiliés de SINPROBOM licenciés, l'inspecteur du travail n'a donné aucune suite aux requêtes soumises au ministère du Travail (réintégration et paiement des salaires), bien que 15 mois se soient écoulés; en vertu des dispositions de la législation, un décision aurait dû être prise dans un délai de 21 jours ouvrables car il s'agit d'une situation de déni de justice.

292. Par ailleurs, l'organisation plaignante allègue que, le 1er octobre 1998, le chef des opérations de la Communauté du corps de pompiers de l'est a demandé l'intervention d'unités de police quand les dirigeants syndicaux Tomás Arencibia et Rubén Gutiérrez se sont présentés afin de les empêcher de travailler.

C. Réponse du gouvernement

293. Dans sa communication du 4 novembre 1998, le gouvernement déclare qu'il n'a aucune responsabilité dans les faits dénoncés, car ces faits résultent de décisions prises par des organes d'autres pouvoirs publics (pouvoir judiciaire et pouvoir exécutif aux niveaux municipal et régional) et que ces organes agissent de manière autonome, sans que le gouvernement puisse s'ingérer dans leurs compétences, comme l'exige le système juridique. Cette communication confirme toutefois que jusqu'à cette date le gouvernement a reconnu l'existence juridique du syndicat SINPROBOM et de ses droits syndicaux par le truchement de diverses décisions administratives du ministère du Travail que le syndicat plaignant a reconnues. La communication attire également l'attention sur la façon dont SINPROBOM s'est défendu avec ténacité pour obtenir la reconnaissance de ses droits - et qu'il y est effectivement parvenu - au niveau administratif, tout en étant conscient des limites que la législation impose à l'intervention de l'administration. En revanche, le syndicat précité s'est contenté de présenter des allégations de violations de la liberté syndicale devant l'OIT, alors que plusieurs moyens de recours judiciaires efficaces sont reconnus par les dispositions juridiques internes (par exemple un recours invoquant la protection des droits constitutionnels (accíon de amparo)).

294. Au sujet de la suspension des effets de l'ordonnance administrative de l'inspection du travail demandant la réintégration des dirigeants syndicaux, le gouvernement déclare que le juge du travail chargé de l'affaire a pris cette décision après que les représentants de la communauté eurent fait appel, car ils estiment que l'ordonnance dudit fonctionnaire du travail lèse leurs droits. La révision de la décision de l'inspecteur par l'autorité judiciaire est admise par le système juridique, car il s'agit d'un acte administratif, et en tant que tel il peut être annulé par la décision d'un tribunal. Il s'agit d'une garantie contre d'éventuels actes arbitraires ou illégitimes de l'autorité administrative. Cette garantie qu'offre le système juridique ne peut pas accorder inexorablement la priorité aux mécanismes de tutelle de la liberté syndicale. Ces deux garanties méritent l'une et l'autre une protection adéquate.

295. Le gouvernement ajoute que la suspension des effets de l'acte administratif de l'inspecteur du travail est une mesure de protection demandée par une des parties au conflit, dont la nature correspond à une disposition de précaution prise par un juge en raison du risque que la sentence qui mettra un terme à l'affaire annule la décision antérieure. Cela signifie que, dans le présent cas, le juge devait forcément évaluer, de manière autonome (et l'exécutif national ne pouvait pas s'immiscer dans cette décision sans empiéter sur les compétences d'un autre pouvoir public), la validité de ladite décision; c'est pourquoi il a accepté de suspendre les effets de l'acte administratif. Cette façon de procéder est reconnue par le système juridique et elle doit, que le gouvernement soit d'accord ou non, être respectée par cet acte judiciaire qui ne peut y contrevenir sous prétexte de garantir la réintégration des dirigeants du SINPROBOM ordonnée par une instance administrative de l'exécutif national. Cette question doit être tranchée par les organes judiciaires.

296. Par ailleurs, le gouvernement signale, au sujet des licenciements prétendument arbitraires de certains affiliés du syndicat, que les intéressés disposent de divers moyens de recours administratifs et judiciaires pour obtenir le redressement d'une situation juridique résultant de violations au cas où des mesures antisyndicales auraient été prises. Le ministère du Travail examinera attentivement toute requête dont il sera saisi et agira dans le cadre des procédures et limites de ses compétences si tel était le cas. Quant aux retards qui seraient intervenus dans le travail de quelques fonctionnaires en ce qui concerne les licenciements d'affiliés du syndicat, les instructions pertinentes ont été données pour faire la lumière sur ces faits et, si cela est nécessaire, des mesures correctives seront prises.

297. Au sujet des allégations relatives à la citation à comparaître de MM. Tomás Arencibia et Glácido Gutiérrez, ces derniers ayant été avertis qu'ils pourraient se voir imposer des mesures privatives de liberté, le gouvernement indique que, le syndicat plaignant n'ayant pas précisé les circonstances dans lesquelles ces citations sont intervenues, il peut seulement affirmer que l'ordre juridique interne offre suffisamment de garanties pour éviter que n'importe quel citoyen puisse être arbitrairement privé de liberté. Le gouvernement suivra attentivement cette affaire, mais il souligne qu'un tel fait - mesures privatives de liberté à l'encontre des dirigeants mentionnés - ne s'est pas produit.

D. Conclusions du comité

298. Le comité observe que, dans le présent cas, les allégations encore en instance ont trait: 1) au licenciement d'un nombre significatif de dirigeants syndicaux (secteur des sapeurs-pompiers) - MM. Glácido Gutiérrez, Rubén Gutiérrez, Tomás Arencibia et Juan Bautista Medina - et de plusieurs affiliés, ainsi qu'à la mutation d'un autre dirigeant syndical (M. Ignacio Díaz); 2) à la citation à comparaître devant deux préfectures de MM. Tomás Arencibia et Glácido Gutiérrez, ces derniers ayant été avertis qu'ils pourraient se voir imposer des mesures privatives de liberté; 3) à la demande d'intervention des unités de police de la part des responsables de la Communauté du corps de pompiers de l'est quand des dirigeants de SINPROBOM se sont présentés au siège de ladite communauté. Le comité note que le gouvernement déclare qu'il a reconnu l'existence légale de SINPROBOM et des droits syndicaux dont il jouit.

299. En ce qui concerne les licenciements et les actes de discrimination à l'encontre de dirigeants de SINPROBOM, le comité note que le gouvernement déclare que l'autorité judiciaire est autonome et qu'il ne peut pas s'immiscer dans sa façon d'agir, que ladite autorité judiciaire a suspendu par précaution l'ordre de réintégration des dirigeants syndicaux qu'avait donné l'autorité administrative et que l'affaire en instance sera jugée par l'autorité judiciaire. Quant aux licenciements des affiliés de SINPROBOM, le comité note que le gouvernement indique que les intéressés ont diverses possibilités de recourir auprès d'instances administratives et judiciaires et que les retards, dont se seraient rendus coupables quelques fonctionnaires, ont fait l'objet d'instructions pour tirer les choses au clair et, si cela est nécessaire, pour prendre des mesures correctives.

300. En ce qui concerne la déclaration du gouvernement selon laquelle la justice est autonome et l'exécutif ne peut s'immiscer dans ses décisions sans empiéter sur les compétences d'un autre pouvoir public, le comité estime qu'il est certes important qu'une autorité judiciaire indépendante statue sur les licenciements illégaux, mais il estime qu'il appartient au gouvernement de veiller à l'application des Conventions internationales du Travail sur la liberté syndicale librement ratifiées dont le respect s'impose à toutes les autorités de l'Etat y compris aux autorités judiciaires.

301. Au vu de ces informations, et en tenant compte du fait que les mesures prises à l'encontre de syndicalistes résultaient d'une interprétation de la législation qui privait les pompiers du droit syndical et du droit de négociation collective [voir 310e rapport, paragr. 596 et 605], le comité ne peut que réitérer ses conclusions antérieures, à savoir qu'il considère que les dirigeants syndicaux licenciés ou mutés en juillet 1997 devraient être réintégrés à leur poste de travail [voir 310e rapport, paragr. 606] et qu'il regrette que l'autorité judiciaire n'ait pas jugé cette affaire et ait suspendu provisoirement la décision administrative de réintégration de ces dirigeants. Le comité regrette également que le ministère du Travail ne se soit pas encore prononcé sur l'allégation de licenciements antisyndicaux d'affiliés de SINPROBOM en dépit du fait que ces licenciements datent de 1997. Dans ces circonstances, le comité prie à nouveau le gouvernement, comme il l'a fait lors de son examen antérieur du cas, de prendre les mesures et les initiatives nécessaires pour garantir la réintégration à leur poste de travail des dirigeants syndicaux de l'organisation plaignante qui ont été licenciés ou mutés, ainsi que des affiliés qui avaient été licenciés, et qu'il le tienne informé de toute décision ou sentence prise à cet égard. Le comité rappelle que «les affaires soulevant des questions de discrimination antisyndicale contraire à la convention no 98 devraient être examinées promptement afin que les mesures correctives nécessaires puissent être réellement efficaces. Une lenteur excessive dans le traitement des cas de discrimination antisyndicale et, en particulier, l'absence de jugement pendant un long délai dans les procès relatifs à la réintégration des dirigeants syndicaux licenciés équivalent à un déni de justice et, par conséquent, à une violation des droits syndicaux des intéressés.» [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 749.]

302. Enfin, en ce qui concerne les allégations selon lesquelles MM. Tomás Arencibia et Glácido Gutiérrez ont été cités à comparaître devant deux préfectures et que les responsables de la Communauté du corps de pompiers de l'est ont demandé l'intervention d'unités de police quand les dirigeants précités se sont présentés au siège, le comité note que le gouvernement indique que le syndicat plaignant n'a pas précisé les circonstances dans lesquelles les deux dirigeants syndicaux ont été cités à comparaître et qu'ils n'ont en tout cas pas été privés de liberté. Le comité observe en outre que le gouvernement n'a pas mentionné que les responsables de la communauté ont demandé l'intervention des unités de police quand les deux dirigeants se sont présentés au siège de la communauté. Le comité demande au gouvernement de procéder à une enquête au sujet de ces allégations et, si des actes d'intimidation ou des mesures antisyndicales étaient avérés, de prendre les mesures nécessaires pour éviter la répétition de telles pratiques et pour sanctionner les responsables.

Recommandations du comité

303. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:

Genève, le 17 mars 1999

Max Rood,
Président.

Points appelant une décision:


Mise à jour par VC. Approuvée par NdW. Dernière modification: 21 février 2000.