L'OIT est une institution spécialisée des Nations-Unies
ILO-fr-strap

Travail forcé au Myanmar (Birmanie)

Rapport de la commission d'enquête instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner le respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 Organisation internationale du Travail
Genève, 2 juillet 1998


Partie IV

Examen de l'affaire par la commission


9. Droit international général et exigences
posées par la convention (n
o 29)
sur le travail forcé, 1930

A. Droit international général -- esclavage,
travail forcé et autres pratiques connexes

198. En droit international, la genèse de l'interdiction de recourir au travail forcé s'inscrit dans le contexte des efforts de la communauté internationale aux fins d'éradiquer l'esclavage ainsi que les institutions et pratiques analogues, étant entendu que le travail forcé a été classé parmi ces pratiques(188) . Nombre de conventions et traités internationaux proscrivent le recours à l'esclavage en temps de paix comme en période de conflits armés. Bien que certains instruments, surtout ceux qui ont été adoptés au début du XIXe siècle, définissent l'esclavage de manière restrictive, l'interdiction doit aujourd'hui être comprise comme couvrant l'ensemble des manifestations contemporaines de cette pratique.

199. Les premiers efforts en vue de supprimer la traite des esclaves remontent à 1815 lorsque les Puissances participant au Congrès de Vienne ont manifesté leur souhait, au nom des principes d'humanité et de moralité universelle, de «mettre un terme à un fléau qui [avait] si longtemps désolé l'Afrique, dégradé l'Europe et affligé l'humanité»(189) . Dans la foulée du Congrès de Vienne, des lois nationales ont été adoptées et des traités bilatéraux conclus portant engagement d'interdire la traite des esclaves et de la frapper de sanctions pénales(190) . En outre, des instruments multilatéraux ont été signés sous les auspices du concert des grandes puissances aux fins d'interdire et de coordonner les efforts pour réprimer cette pratique, notamment le Traité de Londres du 20 décembre 1841 sur la suppression de la traite d'esclaves(191) , l'Acte général de la Conférence de Berlin du 26 février 1885 interdisant la traite des esclaves dans le bassin du Congo(192) , l'Acte général de la Conférence anti-esclavagiste réunie à Bruxelles du 18 novembre 1889 au 2 juillet 1890 pour amener la suppression de la traite des esclaves(193) , l'Arrangement international du 18 mai 1904, la Convention internationale du 4 mai 1910 relative à la traite des Blanches(194)  et la Convention internationale de 1921 pour la répression de la traite des femmes et des enfants(195) .

200. Au lendemain de la première guerre mondiale, l'esclavage et les pratiques analogues font partie des premières questions traitées par la Société des Nations. Le travail de cette organisation a été déterminant à cet égard puisque, sous son impulsion, presque tous les Etats ont adopté des législations aux fins de prévenir l'esclavage sur leur territoire et l'importation d'esclaves. En outre, la Convention relative à l'esclavage conclue le 25 septembre 1926(196)  a précisé pour la première fois les éléments constitutifs de l'esclavage en le définissant comme étant «l'état ou condition d'un individu sur lequel s'exercent les attributs du droit de propriété ou certains d'entre eux»(197) . Aux termes de la convention de 1926, les Etats parties s'engagent à prévenir et réprimer la traite des esclaves, à poursuivre la suppression complète de l'esclavage sous toutes ses formes d'une manière progressive et aussitôt que possible et à prendre les mesures nécessaires pour que les infractions aux lois et aux règlements édictés en vue de donner effet aux dispositions de la convention soient punies de peines sévères(198) . Conscients des graves conséquences que peut avoir le recours au travail forcé, les Etats s'engagent «à prendre des mesures utiles pour éviter que le travail forcé ou obligatoire n'amène des conditions analogues à l'esclavage»(199) . La convention tente de limiter le plus possible les circonstances aux termes desquelles le travail forcé ou obligatoire peut être exigé, ce dernier ne devant être autorisé que dans les seuls cas où les autorités centrales compétentes en assument la responsabilité(200) . C'est du reste dans ce contexte que la convention no 29 sur le travail forcé de l'OIT, dont les dispositions sont examinées plus loin, a été adoptée par la Conférence internationale du Travail en 1930(201) . Il y est expressément stipulé que «le fait d'exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales» qui doivent être «réellement efficaces et strictement appliquées»(202) .

201. Trente ans plus tard, la Convention supplémentaire relative à l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des institutions analogues à l'esclavage, conclue à l'initiative du Conseil économique et social des Nations Unies le 7 septembre 1956, supplée la convention de 1926 en condamnant cette pratique de façon plus générale et en organisant de manière exhaustive l'incrimination de l'esclavage, de la traite et des pratiques connexes(203) ; parmi ces dernières, la convention cite, entre autres, la servitude pour dettes, le servage et l'exploitation du travail d'un adolescent de moins de dix-huit ans par un tiers auquel il a été remis à cette fin par ses parents ou son tuteur(204) . Pour sa part, la convention no 29 sur le travail forcé a été complétée par la convention no 105 sur l'abolition du travail forcé adoptée par la Conférence internationale du Travail en 1957(205) .

202. Depuis 1945, nombre d'Etats ont élevé au niveau constitutionnel l'interdiction de recourir au travail forcé(206) . De plus, plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme proscrivent expressément cet avilissement de la personne humaine(207) . Ces instruments ne définissent pas ce qu'est le travail forcé; il convient dès lors de se référer aux conventions et résolutions pertinentes de l'OIT(208) . L'interdiction de recourir au travail forcé, qui comprend le droit de choisir librement son emploi, est intimement liée à la protection d'autres droits fondamentaux de la personne humaine: le droit de ne pas être soumis à la torture ou à d'autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, voire le droit à la vie. Dans le cas de conflits armés, les civils et les prisonniers de guerre se voient aussi offrir une protection contre le travail forcé au regard des conventions applicables(209) .

203. La commission conclut qu'il existe aujourd'hui en droit international une norme qui interdit de manière impérative tout recours au travail forcé, le droit de ne pas être astreint à accomplir un travail ou service comptant parmi les droits fondamentaux de la personne humaine. L'Etat qui commandite, incite, accepte ou tolère le travail forcé sur son territoire commet un fait illicite et voit sa responsabilité internationale engagée; en outre, ce fait illicite résulte d'une violation d'une obligation internationale si essentielle pour la sauvegarde d'intérêts fondamentaux de la communauté internationale qu'il pourrait être qualifié, s'il est commis à grande échelle, de crime international aux termes de l'article 19 du projet d'articles de la Commission du droit international sur la responsabilité des Etats(210) . La Cour internationale de Justice a qualifié l'obligation de protéger la personne humaine contre la pratique de l'esclavage d'obligation erga omnes jugeant que, vu l'importance de ce droit, tous les Etats peuvent être considérés comme ayant un intérêt juridique à ce qu'il soit protégé(211) .

204. Enfin, tout individu qui contrevient à cette norme se rend coupable d'une infraction au regard du droit international et engage de ce fait sa responsabilité pénale individuelle. Plus précisément, la réduction à l'esclavage, qui est définie par la Commission du droit international comme le «fait de placer ou de maintenir des personnes en état d'esclavage, de servitude ou de travail forcé, à l'encontre des normes établies et généralement reconnues du droit international»(212)  constitue, dans la mesure où elle est commise sur une grande échelle ou de manière systématique, un crime contre l'humanité et qui est punissable aux termes des statuts constitutifs des quatre tribunaux pénaux internationaux institués depuis la seconde guerre mondiale en vue de juger les responsables de violations graves du droit international humanitaire(213) , des projets de statut d'une cour criminelle internationale et de code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité adoptés par la Commission du droit international, respectivement, en 1994(214)  et 1996(215) .

B. Obligations au titre de la convention (no 29)
sur le travail forcé, 1930

1) Mesures prévues par les articles 1,
paragraphe 1, et 25 de la convention

205. Les Etats qui ratifient la convention sur le travail forcé, 1930, prennent l'engagement fondamental de «supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes, dans le plus bref délai possible»(216) . Cette obligation de supprimer le recours au travail forcé ou obligatoire, tel que défini dans la convention(217) , implique pour l'Etat à la fois une obligation de s'abstenir et une obligation d'agir. Tout d'abord, l'Etat doit s'abstenir d'imposer du travail forcé ou obligatoire et ne pas tolérer son imposition par d'autres, et il doit abroger toutes les lois et tous les textes réglementaires ou administratifs qui prévoient ou tolèrent le recours au travail forcé ou obligatoire, de sorte que tout recours à un tel travail, qu'il soit le fait de personnes privées ou de fonctionnaires publics, s'avère illégal en droit national. Deuxièmement, l'Etat doit assurer que «le fait d'exiger illégalement du travail forcé ou obligatoire sera passible de sanctions pénales» et «que les sanctions imposées par la loi sont réellement efficaces et strictement appliquées»(218) .

2) Définition du travail forcé et obligatoire
et portée des exceptions

206. Aux termes de la convention, le «travail forcé ou obligatoire» désigne «tout travail ou service exigé d'un individu sous la menace d'une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de plein gré»(219) . Comme l'a noté la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations(220) , il a été précisé lors de l'examen du projet d'instrument par la Conférence que la peine dont il est question ici ne doit pas revêtir forcément la forme d'une sanction pénale, mais qu'il peut s'agir également de la privation de quelques droits ou avantages(221) . A propos du critère énoncé par les termes «ne s'est pas offert de son plein gré», la commission d'experts a relevé qu'en ce qui concerne le travail des enfants la question se pose de savoir si un mineur peut être considéré comme s'étant offert «de son plein gré» pour un travail ou un service et, dans l'affirmative, dans quelles conditions; si le consentement des parents est nécessaire à cet égard et s'il est suffisant, et quelles sont les sanctions en cas de refus. Dans ce contexte, la commission a également rappelé que, en réglementant le recours au travail forcé pendant une période transitoire suivant l'entrée en vigueur de la convention (le 1er mai 1932), la Conférence avait spécifiquement disposé, à l'article 11 de cet instrument, qu'aucune personne de moins de 18 ans ne pouvait être asujettie à un tel travail(222) .

207. La convention prévoit spécifiquement l'exclusion de certaines formes de service obligatoire(223)  qui seraient autrement tombées dans la définition générale du travail forcé ou obligatoire, mais qui sont ainsi exclues de la portée des obligations imposées aux Etats qui ratifient la convention, sous réserve du respect de certaines conditions qui seront examinées ci-dessous.

a) Le service militaire obligatoire

208. La convention exclut de son champ d'application «tout travail ou service exigé en vertu des lois sur le service militaire obligatoire et affecté à des travaux d'un caractère purement militaire»(224) . Comme l'a noté la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations dans son étude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé(225) , les discussions qui ont eu lieu lors de l'examen du projet de convention par la Conférence aident à expliquer à la fois le but et la portée de cette exception. De l'avis général, le service militaire obligatoire, en tant que tel, devait rester en dehors des limites de la convention. Toutefois, une large discussion eut lieu au sujet des systèmes qui existaient alors dans plusieurs territoires et selon lesquels des personnes astreintes au service militaire, mais non incorporées effectivement dans les forces armées, pouvaient être requises pour l'exécution de travaux publics. On releva que le fait de sanctionner implicitement cette forme de travail en l'excluant du champ d'application de la convention équivaudrait à sanctionner un système incompatible avec le but déclaré de l'instrument, à savoir l'abolition du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes, tant à des fins publiques qu'au profit d'employeurs privés. On fit valoir également que l'objet de la justification du service militaire obligatoire était la nécessité d'assurer la défense nationale, mais qu'il n'existait aucun motif ou justification analogue pour un service obligatoire destiné à l'exécution de travaux publics. La Conférence décida en conséquence que le service militaire obligatoire ne serait exclu du champ d'application de la convention que s'il était affecté à des travaux d'un caractère purement militaire(226) .

209. La commission d'experts a également rappelé que les dispositions de la convention de 1930 relative au service militaire obligatoire ne s'appliquent pas aux militaires de carrière. Ainsi, d'une part, la convention ne s'oppose pas à l'exécution de travaux non militaires par des soldats enrôlés volontairement; d'autre part, le fait que le service militaire obligatoire soit exempté du champ d'application de la convention ne saurait être invoqué pour priver des militaires de carrière du droit de quitter le service soit à des intervalles raisonnables, soit moyennement un préavis approprié(227) . Bien que, dans ces cas, l'emploi soit, à l'origine, le résultat d'un accord conclu librement, le droit d'un travailleur au libre choix de son emploi reste inaliénable(228) . En conséquence, la commission a estimé que les dispositions légales empêchant un travailleur engagé pour une durée indéterminée de mettre fin à son emploi moyennant un préavis raisonnable ont pour effet de transformer une relation contractuelle fondée sur la volonté des parties en un service imposé par la loi, et sont donc incompatibles avec les conventions concernant le travail forcé. Il en est de même lorsque le travailleur est tenu de servir au-delà de l'échéance d'un contrat de durée déterminée(229) .

b) Obligations civiques normales

210. La convention sur le travail forcé exempte de ses dispositions «tout travail ou service faisant partie des obligations civiques normales des citoyens d'un pays se gouvernant pleinement lui-même»(230) . Comme l'a noté la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, trois exceptions spécifiquement prévues dans la convention concernent certaines formes de travail ou de service qui constituent également des obligations civiles normales: le service militaire obligatoire(231) , le travail ou service exigé dans des cas de force majeure(232)  et les menus travaux de village(233) . Les autres exemples d'obligations civiques normales mentionnés par la commission d'experts sont la participation obligatoire à un jury et le devoir d'assister une personne en danger ou d'aider à assurer le respect de la loi et de l'ordre public. La commission a relevé que ces exceptions doivent être interprétées à la lumière d'autres dispositions de la convention et ne sauraient être invoquées pour justifier le recours à des formes de service obligatoire qui sont contraires à ces autres dispositions(234) .

c) Travail pénitentiaire

211. La convention exempte de son champ d'application «tout travail ou service exigé d'un individu comme conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire, à condition que ce travail ou service soit exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privés»(235) . A la différence des autres exceptions prévues dans la convention et qui concernent des cas où des personnes sont appelées pour exécuter des travaux ou des services particuliers, il s'agit en l'occurrence des conséquences d'une peine infligée en raison de la conduite des intéressés. Toutefois, comme l'a relevé la commission d'experts, deux des conditions fixées au sujet du travail pénitentiaire, à savoir que le travail pénitentiaire ne peut être imposé que comme conséquence d'une condamnation prononcée par une décision judiciaire et que la personne condamnée ne soit pas mise à la disposition de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées sont des garanties importantes contre le risque de voir le fonctionnement du système pénal s'écarter de son véritable rôle pour devenir un moyen de répondre aux besoins de main-d'œuvre(236) .

d) Cas de force majeure

212. La convention exempte de son champ d'application «tout travail ou service exigé dans les cas de force majeure, c'est-à-dire dans les cas de guerre, de sinistre ou menaces de sinistres tels qu'incendies, inondations, famines, tremblements de terre, épidémies et épizooties violentes, invasions d'animaux, d'insectes ou de parasites végétaux nuisibles, et en général toute circonstance mettant en danger ou risquant de mettre en danger la vie ou les conditions normales d'existence de l'ensemble ou d'une partie de la population»(237) . La commission d'experts a relevé que, comme l'indiquent les exemples énumérés dans la convention, la notion de force majeure implique un événement soudain et imprévu qui appelle une intervention immédiate(238) . Pour respecter les limites de l'exception prévues dans la convention, le pouvoir de mobiliser de la main-d'œuvre devrait être restreint aux véritables cas de force majeure. En outre, la durée et l'importance du service imposé ainsi que des fins pour lesquelles il est utilisé devraient être limitées strictement en fonction des exigences de la situation(239) .

e) Menus travaux de village

213. Sont également exemptés du champ d'application de la convention «les menus travaux de village, c'est-à-dire les travaux exécutés dans l'intérêt direct de la collectivité par les membres de celle-ci, travaux qui, de ce chef, peuvent être considérés comme des obligations civiques normales incombant aux membres de la collectivité, à condition que la population elle-même ou ses représentants directs ait le droit de se prononcer sur le bien-fondé de ces travaux»(240) . La commission d'experts a attiré l'attention sur les critères qui déterminent les limites de cette exception et servent à la distinguer d'autres formes de services obligatoires qui, aux termes de la convention, devraient être abolies (comme le travail forcé pour des travaux publics d'intérêt général ou local). Ces critères sont les suivants:

3) Statut actuel de l'article 1, paragraphe 2,
et des articles 4 et suivants de la convention

214. Les Etats qui ratifient la convention sont obligés «de supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes(242)  dans le plus bref délai possible»(243) ; toutefois, la convention, telle qu'adoptée en 1930, prévoit que «En vue de cette suppression totale, le travail forcé obligatoire pourra être employé, pendant la période transitoire, uniquement pour des fins publiques et à titre exceptionnel, dans les conditions et avec les garanties stipulées par les articles qui suivent» (article 1, paragraphe 2). Il n'y a pas de définition de ce que l'on entend par période transitoire ni de sa durée éventuelle, encore que, aux termes de l'article 1, paragraphe 3, la «possibilité de supprimer sans nouveau délai le travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes» et la décision de savoir «s'il y a lieu d'inscrire cette question à l'ordre du jour de la Conférence», devaient être examinées par le Conseil d'administration «à l'expiration d'un délai de cinq ans à partir de l'entrée en vigueur de la présente convention»(244) . Le but essentiel de la période transitoire était de ménager une certaine marge de manœuvre, en particulier aux Etats Membres colonisateurs, dans les limites de laquelle il fallait parvenir à l'abolition totale de tout travail forcé ou obligatoire.

215. L'article 1, paragraphe 2, qualifiait dans une mesure limitée l'obligation prévue à l'article 1, paragraphe 1, en permettant d'employer le travail forcé ou obligatoire pendant la période transitoire, uniquement pour des fins publiques et à titre exceptionnel, dans les conditions et avec les garanties fixées par la convention(245) . Ces conditions et garanties visent à réserver le pouvoir d'imposer le travail ou le service en question à certaines autorités déterminées(246) , à s'assurer qu'il ne soit exigé que dans des cas de nécessité actuelle ou imminente et pour des travaux d'un intérêt direct et important pour la collectivité appelée à l'exécuter(247) , à sauvegarder les conditions sociales et physiques de la population(248)  et à assurer le respect de certaines normes minima en ce qui concerne la durée du travail, le repos hebdomadaire, la rémunération, la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles, la santé et le bien-être des travailleurs(249) . Des conditions spéciales sont fixées pour le portage et les cultures obligatoires(250) .

216. A la lumière de ces conditions et garanties, plusieurs formes de travail forcé ou obligatoire devaient être abolies immédiatement, sans aucune période transitoire. Tel est le cas du travail forcé ou obligatoire exécuté au profit de particuliers, de compagnies ou de personnes morales privées(251) , du travail forcé imposé aux femmes ou aux hommes de moins de 18 ans ou de plus de 45 ans, ou invalides(252) , du recours aux cultures obligatoires à d'autres fins que pour prévenir la famine ou une disette de produits alimentaires(253) , du travail forcé ou obligatoire pour des travaux souterrains dans les mines(254)  et du travail forcé ou obligatoire exigé par des personnes ou des autorités auxquelles, aux termes de la convention, un tel pouvoir ne devrait pas être accordé(255) .

217. Comme la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations l'a fait observer en 1962, 1964 et 1968, en s'engageant «à supprimer le travail forcé ou obligatoire sous toutes ses formes dans le plus bref délai possible», les Etats qui ont ratifié la convention se sont interdit toute possibilité de recourir à de nouvelles formes de travail forcé ou obligatoire rentrant dans le champ d'application de la convention ou à des formes qui, si elles existaient au moment de l'entrée en vigueur de la convention pour le pays intéressé, ont été abolies dans l'intervalle(256) . En 1968, la commission a noté également que, compte tenu de cet effet de l'engagement découlant de la ratification, et aussi de la nature des formes de contrainte trouvées dans certaines lois existantes, relativement peu de pays liés par la convention étaient encore à même de se prévaloir des arrangements transitoires autorisés par cet instrument.

218. En 1997, la commission d'experts a observé que:

La Commission d'enquête partage cet avis, compte tenu également du statut de l'abolition du travail forcé et obligatoire en droit international général(258) , en tant que norme impérative à laquelle aucune dérogation n'est admise.

10. Brève description du Myanmar

1) Présentation générale

219. Le Myanmar est situé en Asie du Sud-Est entre la Chine au nord et au nord-est, le Laos et la Thaïlande à l'est, la mer d'Andaman et la baie du Bengale au sud et le Bangladesh et l'Inde à l'ouest. Le pays est divisé en 14 régions administratives de premier ordre à savoir: sept Etats dont la population est en majorité non birmane, et sept divisions dont la majorité de la population est birmane(259) . Ces Etats et divisions sont eux-mêmes divisés en districts qui comprennent chacun plusieurs circonscriptions (en anglais: townships: régions administratives entourant une ville). Les circonscriptions sont subdivisées en arrondissement ruraux (en anglais: village tracts) et urbains (en anglais: wards)(260) . L'arrondissement rural comprend normalement plusieurs villages et il est désigné d'après le nom du principal de ces villages.

220. Selon une estimation du gouvernement portant sur les années 1996-97, le pays compte 47,6 millions d'habitants(261) , dont 26 pour cent seulement vivent dans les villes, et une population active de 18,8 millions de travailleurs (4,2 millions pour la main-d'œuvre urbaine et 14,6 millions pour la main-d'œuvre rurale). L'agriculture représente 63 pour cent de l'emploi total.

221. Le gouvernement reconnaît officiellement 135 groupes nationaux. Les Birmans représentent près des deux tiers de la population, les autres groupes principaux étant les Karen, les Shan, les Mon, les Rakhin, les Rohingya, les Chin, les Kachin et les Karenni(262) . L'importance numérique de ces différents groupes est controversée car aucun recensement détaillé n'a été fait depuis 1931 et les estimations actuelles varient considérablement(263) .

222. La principale religion du Myanmar est le bouddhisme. Il est pratiqué par la plupart des Birmans, mais il est également majoritaire chez plusieurs autres groupes ethniques (en particulier chez les Mon, les Rakhin, les Shan et chez de nombreux Karen). On trouve également des chrétiens et des animistes, la plupart du temps parmi les groupes ethniques non birmans; il y a aussi un nombre important de musulmans, notamment les Rohingyas et parmi d'autres populations le plus souvent originaires du sous-continent indien.

223. La monnaie du Myanmar est le kyat. Le taux de change officiel était en moyenne de 6,2 kyats pour un dollar en 1997 tandis que le taux le plus courant sur le marché libre était d'environ 250 kyats pour un dollar durant la même période(264) .

2) Aperçu historique

224. A l'issue des trois guerres anglo-birmanes qui se sont déroulées entre 1824 et 1885, les Britanniques ont pris le contrôle de la Birmanie. A partir de cette date et jusqu'en 1948, le pays a été administré comme faisant partie de l'Inde britannique, à l'exception d'une brève occupation par les Japonais au cours de la seconde guerre mondiale. En juillet 1947, Aung San, chef de la lutte pour l'indépendance de la Birmanie et Premier ministre présomptif de la Birmanie indépendante, a été assassiné. La première Constitution de la Birmanie a été adoptée en septembre 1947. Quelques mois plus tard, le 4 janvier 1948, la Birmanie a accédé à l'indépendance avec U Nu comme premier chef d'Etat.

225. Une brève période de gouvernement civil a suivi mais qui a été fortement perturbée par des insurrections ethniques et des désaccords au sein du gouvernement. En mars 1962, un coup d'Etat militaire a porté au pouvoir le Général Ne Win. Un conseil révolutionnaire a été constitué sous la présidence du Général Ne Win et a investi celui-ci des pleins pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif. Le Parti du programme socialiste birman (BSPP) est devenu le parti officiel du nouveau gouvernement. C'est en janvier 1974 qu'une nouvelle Constitution a été officiellement adoptée pour remplacer la gestion par décrets du Conseil révolutionnaire.

226. En 1988, le mécontentement général suscité par la stagnation économique et de la suppression de la liberté politique s'est développé en un mouvement national de masse. Aung San Suu Kyi, fille de l'ancien leader indépendantiste Aung San, a été portée à la tête de ce mouvement. En juillet 1988, le Général Ne Win a démissionné de ses fonctions de président du BSPP mais les protestations n'ont cessé de grandir. Le 8 août 1988, un ordre de grève générale a été lancé dans tout le pays par suite duquel la troupe a reçu l'ordre d'ouvrir le feu sur la foule des manifestants; des milliers d'entre eux ont été tués ou blessés. Les démonstrations se sont poursuivies malgré tout et, le 18 septembre 1988, un coup d'Etat militaire a aboli tous les organes de l'Etat et a constitué à leur place le Conseil d'Etat pour le rétablissement de l'ordre public (SLORC -- State Law and Order Restoration Council)(265) . La Constitution de 1974 a été suspendue. Les démonstrations ont été violemment réprimées mais le SLORC a promis que des élections auraient lieu et que des partis politiques seraient autorisés à s'enregistrer.

227. Des élections ont eu lieu en mai 1988. Plus de 200 partis ont été enregistrés dont les plus importants étaient la Ligue nationale pour la démocratie (NLD -- National League for Democracy), dont la secrétaire générale était Aung San Suu Kyi, et le Parti de l'unité nationale (NUP -- National Unity Party) des militaires. Les élections se sont déroulées dans des conditions très difficiles. Plusieurs leaders politiques ont été arrêtés, y compris Aung San Suu Kyi qui a été assignée à résidence au mois de juillet 1989. Malgré tout, la NLD a été très largement victorieuse avec 60 pour cent des votes populaires et plus de 80 pour cent des 485 sièges du Parlement. Le NUP n'a obtenu que 10 sièges.

228. Le SLORC n'a pas accepté ces résultats et a refusé de convoquer la nouvelle assemblée, déclarant que les élections n'avaient pour seul objectif que d'élire les représentants à une convention nationale chargée de rédiger une nouvelle Constitution. Cette convention nationale s'est réunie pour la première fois au mois de janvier 1993. Toutefois, 15 pour cent seulement de ses membres étaient des représentants élus. A la suite du boycott ordonné par la NLD et l'expulsion de ce parti qui a suivi, 3 pour cent seulement des membres de la convention ont été élus lors de l'élection de 1990. La convention ne s'est plus réunie depuis mars 1996 et le Myanmar n'a toujours pas de Constitution.

229. Le 15 novembre 1997, le SLORC s'est dissous lui-même et a désigné le nouveau Conseil d'Etat pour la paix et le développement (SPDC -- State Peace and Development Council), composé de 19 membres(266) . Les quatre membres principaux du SLORC ont conservé leur poste et les postes restants ont été donnés à d'autres officiers plus jeunes, et notamment aux chefs militaires des 12 commandements militaires régionaux (voir paragraphe 232 ci-dessous). Les anciens membres du SLORC ont été écartés et ont été faits membres d'un conseil consultatif qui a ensuite été dissous(267) .

3) Structure administrative

230. A son arrivée au pouvoir en 1988, le SLORC a créé des Conseils régionaux pour le rétablissement de l'ordre public (LORC) aux niveaux de l'Etat/Division, du district, de la circonscription administrative et de l'arrondissement urbain ou rural. Lorsque le SLORC a été remplacé par le SPDC, ces LORC régionaux ont été rebaptisés Conseils pour la paix et le développement (PDC)(268) .

231. Depuis 1988, le gouvernement du Myanmar a entrepris de développer et moderniser les forces armées (Tatmadaw) dont les effectifs sont passés de 186 000 hommes au milieu de 1988(269)  à 429 000 au milieu de 1997(270) . La majorité de ces forces armées sont des militaires et elles comptent un effectif de près de 400 000 hommes(271) .

232. L'armée du Myanmar est divisée en 12 commandements régionaux dont relèvent en tout 145 bataillons d'infanterie (les KaLaYa, ou BI)(272) ; et 10 divisions mobiles d'infanterie légère dont relèvent encore, en tout, 100 bataillons d'infanterie (les KaMaYa, ou BIL)(273) . Il y a aussi un petit nombre de bataillons spécialisés et plusieurs unités de renseignement (Military Intelligence-MI)(274) .

233. En plus de la Tatmadaw, les forces militaires du gouvernement comprennent la milice du peuple et la NaSaKa, une force de sécurité des frontières créée en 1992 qui comprend le Département de l'immigration et de la main-d'œuvre et des unités de la police, des Lone Htein (Troupes d'intervention anti-émeutes), des services de renseignement militaires et des douanes; elle n'existe que dans les circonscriptions de Buthidaung et de Maungdaw (bien que les organismes dont elle regroupe des unités fonctionnent dans tout le Myanmar); elle est placée sous les ordres du Commandement occidental de l'armée basé à Sittway (Akyab)(275) .

234. Une organisation ethnique armée, la Democratic Kayin Buddhist Army (DKBA), s'est alliée au gouvernement peu après sa constitution en décembre 1994 et fait office de milice gouvernementale dans sa zone d'influence de l'Etat Kayin.

235. Note à propos des noms. En juin 1989, le gouvernement a changé le nom du pays remplaçant «Union de Birmanie» par «Union du Myanmar». L'orthographe anglaise de plusieurs autres noms de lieux a aussi été modifiée ultérieurement(276) . Dans son rapport, la commission utilise les orthographes révisées mais elle donne également d'autres noms à la suite du nom officiel, lorsqu'elle le juge nécessaire pour éviter des confusions quant au lieu dont il est question. En ce qui concerne les noms utilisés pour les différents groupes ethniques du pays, la commission a décidé de suivre l'usage des personnes concernées avec lesquelles elle était en contact.

4) Les forces d'opposition

236. Depuis l'indépendance, de nombreux groupes armés se sont constitués pour s'opposer au gouvernement, dont certains ont réussi à plusieurs reprises à contrôler de vastes régions du territoire. Ainsi, des cessez-le-feu ont été acceptés en 1989 par l'Armée unie de l'Etat Wa (UWSA -- United Wa State Army) et l'Armée de l'Etat shan (SSA -- Shan State Army), en 1994 par l'Organisation pour l'indépendance Kachin (KIO -- Kachin Independance Organization), en 1995 par le Nouveau parti de l'Etat Mon (NMSP -- New Mon State Party), et en 1996 par l'armée Mon Tai du baron de la drogue Khun Sa. Parmi les groupes qui sont toujours actifs et n'ont pas encore conclu de cessez-le-feu, on peut citer l'Union nationale Karen (KNU -- Karen National Union) qui existe depuis 1940, le Front démocratique des étudiants de toute la Birmanie (ABSDF -- All Burma Students' Democratic Front), le Front national Chin (CNF -- Chin National Front) et l'Organisation de solidarité Rohingya (RSO -- Rohingya Solidarity Organization). En outre, il a été annoncé en janvier 1998 dans l'Etat Shan que, suite à un accord conclu en septembre 1997, l'Armée révolutionnaire unie Shan (SURA -- Shan United Revolutionary Army) s'était jointe à deux groupes ayant conclu des cessez-le-feu avec le gouvernement, l'armée de l'Etat Shan (SSA) et l'Armée nationale de l'Etat Shan (SSNA -- Shan State National Army), pour former une «nouvelle» armée de l'Etat Shan (encore désignée par le sigle SSA); cette nouvelle organisation se trouve actuellement en opposition armée au gouvernement(277) .

11. Législation du Myanmar
intéressant l'affaire

1) Réquisition de main-d'œuvre en vertu de la loi
sur les villages et de la loi sur les villes
ainsi que des ordonnances d'exécution
et directives ultérieures

237. Après avoir déclaré pendant de nombreuses années que les dispositions de la loi de 1908 sur les villages et de la loi de 1907 sur les villes, qui autorisent les chefs d'arrondissement et les policiers ruraux à imposer du travail obligatoire aux résidents de la classe laborieuse, étaient devenues obsolètes et n'étaient plus appliquées(278) , le gouvernement a indiqué, en octobre 1993, que «le recours au travail volontaire, dont on allègue qu'il s'agit de travail obligatoire ou forcé, est limité aux cas de nécessité urgente, conformément aux dispositions suivantes: a) article 8(1)(g)(n) et (o) de la loi de 1908 sur les villages; b) article 9(b) de la loi sur les villes»(279) .

238. Les dispositions pertinentes de l'article 8(1) de la loi de 1908 sur les villages, telles que soumises par le gouvernement(280) , sont rédigées comme suit:

L'article 7(1)(m) de la loi de 1907 sur les villes correspond à l'article 8(1)(n) de la loi de 1908 sur les villages et il est aussi précédé d'une réserve selon laquelle «aucun chef ne doit réquisitionner pour un service personnel les résidents de ces arrondissements qui ne font pas partie des classes laborieuses et ne sont pas habitués à faire le travail qu'il peut être nécessaire d'effectuer».

239. Aux termes de l'article 11(d) de la loi sur les villages:

En vertu de l'article 12 de la même loi:

240. De même, l'article 9(b) de la loi de 1907 sur les villes dispose que:

L'article 9A de cette loi dispose que:

241. La commission note l'indication donnée par Daw Aung San Suu Kyi(281)  selon laquelle des circonstances telles que d'avoir à moissonner, ou devoir travailler au champ, auraient été acceptées comme une «excuse acceptable» aux termes de l'article 12 de la loi sur les villages, dans sa version originale, telle que reproduite ci-dessus, mais qu'aujourd'hui cette disposition traduite en birman ne contient plus le membre de phrase «en l'absence d'une excuse acceptable», si bien que «en vertu de cette loi, les autorités ont le pouvoir de contraindre la population des villages à faire tout ce qu'il leur plaît d'imposer». La commission n'avait pas à sa disposition le texte birman de la loi sur les villages, ni celui de la loi sur les villes (dont le texte anglais faisait lui aussi référence à l'absence d'une excuse acceptable)(282) .

242. En ce qui concerne l'étendue des obligations que chaque chef est tenu de remplir et pour l'exécution desquelles les résidents sont tenus de l'assister sur réquisition de sa part (ou de celle d'un policier rural), l'article 8(1)(g) de la loi sur les villages se réfère expressément à l'obligation de fournir des guides, des messagers, des porteurs, etc., et l'article 8(1)(n) et (o) de la même loi ainsi que l'article 9(b) de la loi sur les villes, également invoqués par le gouvernement(283)  en 1993, contiennent des références générales à des «obligations publiques» et à «toutes mesures exigées par les besoins du village». A cet égard, l'attention de la commission a été attirée sur le fait que la disposition relative à la réquisition de «travailleurs pour la construction ou la réparation de routes, berges ou autres travaux publics», que prévoyait à l'origine l'article 8(1)(h) de la loi de 1908 sur les villages(284) , avait été expressément éliminée par la loi IV de 1924 de la Birmanie(285) .

243. Des instructions émises ultérieurement concernant l'application de la loi sur les villages indiquent, au paragraphe 76, que l'alinéa n) de l'article 8(1) de la loi sur les villages:

En vertu du paragraphe 78 des mêmes instructions(287) :

244. Le paragraphe 70 des mêmes instructions(288)  souligne à propos de l'alinéa g) de l'article 8 de la loi sur les villages que «tous les approvisionnements qui impliquent un coût en argent ou en main-d'œuvre et tous les transports doivent être payés à plein tarif».

245. Plus d'un demi-siècle plus tard, les «misères et souffrances causées à la population locale» et la non-rémunération du travail obtenu «des populations locales pour l'exécution de projets de développement national tels que la construction de routes, de ponts et de voies ferrées, ainsi que la construction de barrages et de remblais» (c'est-à-dire de projets pour lesquels la réquisition de main-d'œuvre en vertu de l'ancien article 8(1)(h) de la loi sur les villages avait été totalement abolie par la loi IV de 1924 de la Birmanie)(289)  ont donné lieu à la préoccupation exprimée dans un décret daté du 2 juin 1995, adressé par le président du SLORC aux LORCs d'Etat et de division et portant «interdiction des contributions de travail non rémunéré dans les projets de développement national»(290) . Bien que marqué «secret», ce décret a, selon le gouvernement(291) , «la pleine force légale et déploie ses effets juridiques en droit administratif». Le décret ne fait pas référence à la loi sur les villages ou à la loi sur les villes. Il note, au paragraphe 1, qu'«il a été rapporté qu'en obtenant de la main-d'œuvre auprès des populations locales dans l'exécution des projets de développement national, tels que la construction de routes, de ponts et de voies ferrées, ainsi que la construction de barrages et de digues, la pratique est qu'elles doivent fournir leur travail sans rémunération». Tout en observant (au paragraphe 3) que «causer misères et souffrances à la population des zones rurales en raison du travail dit forcé et non rémunéré est hautement contre-indiqué», le décret ne remet pas en question la réquisition de main-d'œuvre pour les projets de développement national, mais souligne (au paragraphe 2) qu'«il est impératif qu'en obtenant la main-d'œuvre nécessaire auprès de la population locale il faut lui payer sa juste part».

246. Une directive (no 82) du 27 avril 1995 émise par le président du SLORC à l'intention du ministère de l'Agriculture, du président du LORC de la division de Yangon et du commandant du quartier général de la division d'infanterie légère no 11, visant à «mettre un terme à l'obtention de travail non rémunéré de la population locale pour des projets d'irrigation», déclarait que:

Egalement marquée «secret», cette directive a été soumise au Rapporteur spécial des Nations Unies(292) .

247. Aux termes du paragraphe 72 des instructions concernant l'application de la loi sur les villages:

248. Bien que le gouvernement ait indiqué que la loi sur les villages et la loi sur les villes restent en vigueur, il n'a pas précisé le statut actuel des instructions concernant l'application de la loi sur les villages. Toutefois, il a déclaré à plusieurs reprises que les porteurs blessés étaient indemnisés conformément à la loi en vigueur(294) .

2) Restrictions à la liberté
de mouvement et à la citoyenneté

249. Lorsque du travail obligatoire peut être imposé aux personnes résidant dans un arrondissement rural ou urbain(295) , les restrictions concernant la liberté de mouvement de ces habitants ont une incidence sur leur sujétion à ce travail obligatoire. La commission a reçu des indications selon lesquelles non seulement tous les mouvements sont soumis à des obligations de déclaration et chaque habitant est tenu de déclarer aux autorités locales les invités passant la nuit chez lui(296) , mais aussi, et qui plus est, la liberté de mouvement est limitée aux seuls habitants détenteurs de documents d'identité les identifiant comme citoyens.

250. En vertu de l'article 10 de la loi sur les étrangers, aucun étranger ne peut se déplacer à travers le Myanmar sans autorisation; en vertu de l'article 12, cette autorisation doit spécifier le nom de la personne à laquelle elle est délivrée, la nation à laquelle elle appartient, le ou les districts par lesquels elle est autorisée à passer ou les limites dans lesquelles elle est autorisée à se déplacer, ainsi que la période (le cas échéant) pendant laquelle cette autorisation doit produire son effet(297) . En vertu de l'article 13, l'autorisation peut être délivrée avec les réserves que le fonctionnaire qui la délivre juge nécessaires, et elle peut être révoquée à tout moment par ce fonctionnaire.

251. Dans l'Etat de Rakhine, un groupe important, les Rohingyas se sont vus progressivement dénier le statut de citoyen.

252. L'article 11 de la Constitution de l'Union birmane du 24 septembre 1947 disposait:

Nonobstant les dispositions de l'article 11 de la Constitution de 1947, les Rohingyas n'ont pas été reconnus comme citoyens par le gouvernement, sauf ceux qui ont pu établir leur citoyenneté conformément à l'alinéa iv). Cependant, l'article 12 de la Constitution disposait:

En 1948 a été adoptée une nouvelle loi sur la citoyenneté qui restreignait la portée de l'article 11, alinéa iv), de la Constitution à toute personne «dont les ancêtres, pendant deux générations au moins, ont tous fait de l'un des territoires faisant partie de l'Union leur résidence permanente et dont les parents, ainsi que la personne elle-même, sont nés dans l'un de ces territoires»(300) .

253. Une autre loi sur la citoyenneté a été adoptée en 1982, abrogeant celle de 1948 et définissant trois catégories de citoyens: les «citoyens», les «citoyens par association» et les «citoyens par naturalisation». Les «citoyens» se limitaient aux «nationaux tels que les Kachin, Kayah, Karen, Chin, Birman, Mon, Rakhine ou Shan ainsi qu'aux groupes ethniques qui se sont établis sur l'un des territoires faisant partie de l'Union pour y résider de manière permanente avant l'an 1185 de l'ère du Bouddha, c'est-à-dire l'an 1823 de l'ère chrétienne». Par la suite, une liste des groupes ethniques reconnus a été publiée, incluant les Kaman et les Zerbadee mais non les Rohingyas. Une personne ne pouvant faire la preuve de la résidence dans le pays de tous ses ancêtres avant l'an 1823 de notre ère pouvait être classée dans la catégorie des «citoyens par association» si l'un de ses grands-parents ou de ses ancêtres d'avant 1823 était citoyen d'un autre pays. Les personnes qui avaient satisfait aux conditions requises pour acquérir la citoyenneté en vertu de la loi de 1948 mais qui ne satisfaisaient plus aux conditions prévues par la nouvelle loi (c'est-à-dire les personnes dont les ancêtres sont venus en Birmanie deux générations avant 1948) ont été classées dans les «citoyens par association» dans la mesure où elles avaient demandé la citoyenneté en 1948. Cependant, en vertu de la nouvelle loi, la demande de statut de «citoyen par association» devait être faite dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi, après quoi toutes les personnes ayant jusque-là le statut d'étranger ou d'apatride ne pouvaient que demander leur naturalisation(301) .

254. En vertu de la nouvelle loi, peu de Rohingyas peuvent prétendre au statut de «citoyen» et beaucoup ne peuvent prétendre ni à celui de «citoyen par association» ni à celui de «citoyen par naturalisation» en raison non seulement de leur histoire personnelle, mais encore de la difficulté de fournir des preuves de leur lignage. Ainsi, la plupart des Rohingyas n'ont que le statut de résidents étrangers(302) . Ceci a été confirmé par les témoignages donnés par des témoins Rohingyas à la commission, lesquels ont déclaré qu'ils avaient besoin de demander une autorisation chaque fois qu'ils devaient quitter leur village(303) .

3) Service militaire obligatoire et conscription forcée

255. Il existe une loi de 1959 sur la milice populaire, qui a été publiée au Journal officiel. Aux termes de cette loi(304) , les nationaux du Myanmar peuvent être appelés à un service à plein temps ou à temps partiel dans les forces armées. Aux termes de l'article 3 a), alinéas 1 et 2, tous les hommes de 18 à 35 ans et toutes les femmes de 18 à 27 ans peuvent être appelés à un service à plein temps dans les forces armées pour une période non inférieure à six mois et non supérieure à 24; aux termes des alinéas 4 et 5, les médecins, ingénieurs et personnes possédant toutes autres qualifications peuvent être appelés à un service militaire d'une durée de 24 mois entre l'âge de 27 et 35 ans dans le cas des femmes et de 18 mois entre l'âge de 35 et 56 ans dans le cas des hommes(305) . Aux termes de l'article 3 b), tous les hommes de 18 à 46 ans et toutes les femmes de 18 à 35 ans peuvent être appelés pour un service à temps partiel, c'est-à-dire pour un service n'excédant pas au total 30 jours par an, pouvant être majoré de sept jours dans certains cas.

256. La loi sur la milice populaire, telle qu'adoptée en 1959, ne contient aucune disposition en vertu de laquelle un travail ou service doit être imposé pour des tâches à caractère non militaire(306) .

257. Aux termes de l'article 1, alinéa 2), de la loi sur les milices populaires, «la présente loi entre en vigueur à une date devant être annoncée par le gouvernement». La commission ignore si une telle annonce a été faite et si la loi est entrée en vigueur(307) .

4) Sanctions pour imposition illégale
de travail forcé ou obligatoire

258. Aux termes de l'article 374 du Code pénal(308) , celui qui contraint illégalement une personne de travailler contre son gré sera puni d'une peine d'emprisonnement simple ou rigoureux d'une durée pouvant atteindre un an, ou d'une amende, ou encore des deux peines.

12. Conclusions de la commission
concernant les faits
(309) 

A. Recevabilité et valeur probante
des éléments de preuve
testimoniale et documentaire

259. Outre les témoignages entendus au cours des audiences de novembre 1997 et de la visite de la commission dans la région en janvier 1998, 274 documents, totalisant près de 10 000 pages dans les registres officiels, ont été communiqués à la commission depuis le début de la procédure. Ces informations documentaires ont été transmises par les parties et par d'autres sources sollicitées(310)  ainsi que par des témoins et d'autres personnes au cours des audiences(311)  ou pendant la visite de la commission dans la région(312) . Ces documents ont été soigneusement répertoriés par le secrétariat et indexés selon la date à laquelle ils ont été reçus par la commission; les listes des documents transmis à la commission figurent aux annexes IV, V et VI du présent rapport(313) .

260. La commission dispose ainsi d'éléments de preuve soumis aussi bien sous forme documentaire que testimoniale. Bien que la commission, dans son effort pour rassembler une information complète et détaillée, privilégie le contact direct avec un témoin qui dit avoir vécu ou observé le fait à prouver, elle estime néanmoins que la volumineuse documentation qui lui a été communiquée constitue une source importante d'informations qui peut aussi servir à appuyer ou réfuter d'une manière ou d'une autre les allégations contenues dans la plainte. La commission rappelle qu'il n'existe pas de règle en droit international qui restreigne l'admissibilité des moyens de preuve documentaire ou testimoniale. En fait, c'est la souplesse qui est de règle devant la Cour internationale de Justice; les tribunaux internationaux ne sont pas liés par des règles de preuve aussi strictes que celles des tribunaux nationaux dont beaucoup ne conviennent pas à des litiges internationaux(314) . Dans cet esprit, le règlement de la Cour internationale de Justice vise à rendre la procédure aussi simple et expéditive que possible et ses dispositions «ont trait au respect des délais et autres questions qui ont pour but 'd'assurer une bonne administration de la justice, dans le respect de l'égalité des parties'. Elles ne concernent pas les types d'éléments de preuve qui peuvent être jugés recevables ni les principes sur la base desquels les éléments de preuve sont appréciés par la Cour»(315) .

261. De plus, le Conseil d'administration du BIT a laissé toute liberté à la commission de fixer ses propres règles en ce qui concerne l'admissibilité des éléments de preuve dans la mesure où elles sont conformes aux dispositions de la Constitution de l'OIT. Dès lors, en adoptant ses propres règles de procédure, la commission a suivi la coutume établie par les neuf commissions d'enquête qui l'ont précédée. Dans ces conditions, la commission considère que les modes écrit et oral de preuve doivent être admis.

262. Eléments de preuve testimoniale. La préférence de la commission va avant tout au témoignage oral direct d'un temoin qui dit avoir vécu ou constaté les faits. Pour elle, c'est ce type de témoignage qui a la valeur probante la plus élevée.

263. Au cours de l'enquête, des témoignages ont été donnés par des témoins à Genève, et plus tard dans les lieux respectivement décrits aux chapitres 2 et 5 du présent rapport.

264. En ce qui concerne les preuves recueillies par la commission avec l'aide décrite au paragraphe 81 ci-dessus, la commission les considère comme des témoignages oraux directs dotés d'une valeur probante élevée en raison des conditions dans lesquelles ils ont été reçus, mais évidemment moins élevée que ceux que la commission a elle-même entendus.

265. Eléments de preuve documentaire. Les éléments de preuve documentaire qui ont été soumis à la commission et qu'elle a admis peuvent être classés en plusieurs catégories:

  1. les déclarations écrites de personnes qui ont elles-mêmes reçu les déclarations d'autres personnes qui ont vécu ou observé les faits en question («témoignages secondaires») et qui ont été interrogées devant la commission. Les déclarations présentées comprennent tant des informations statistiques, historiques et des données de recherche que des analyses;
  2. les communications écrites contenant les témoignages secondaires de personnes disant avoir vécu ou observé les faits en question, ainsi que celles qui contiennent des données statistiques ou des analyses historiques ou matérielles. Toutefois, les personnes ayant fourni cette documentation n'ont pas été entendues par la commission;
  3. les communications écrites des parties, personnes ou organisations qui contiennent des affirmations, une documentation ou des analyses statistiques, historiques et de recherche, mais pas de témoignages secondaires. Certaines des personnes qui ont fourni cette documentation ont été entendues par la commission et d'autres pas;
  4. d'autres documents tels que a) des originaux ou des copies d'ordres émanant des autorités militaires, b) des bandes vidéo et des photos, et c) des coupures de presse.

266. D'une façon générale, cette documentation a été considérée par la commission comme moins probante sur les faits consignés que les éléments de preuve testimoniale. Par ailleurs, certaines catégories de documents étaient, à première vue, eux-mêmes moins probants que d'autres.

267. Pour ce qui est de la documentation de la catégorie 1, elle était certainement admissible et avait, à première vue, une valeur probante plus grande que les autres catégories de documents, à l'exception de la catégorie 4 a). Les personnes ayant fourni les déclarations écrites ont également témoigné sur la façon dont elles ont recueilli les témoignages secondaires et les conditions dans lesquelles ces témoignages leur ont été donnés. En l'occurrence, ces documents auraient pu être décrits comme étant des éléments de preuve testimoniale mais, par commodité, ils ont été classés comme éléments de preuve documentaire.

268. En ce qui concerne la documentation de la catégorie 2, elle a aussi été considérée comme admissible mais comme ayant, à première vue, une valeur probante moins grande que celle de la catégorie 1 car la commission n'a pas eu la possibilité de s'assurer du caractère volontaire et véridique de ces déclarations.

269. Pour la documentation de la catégorie 3, elle est de nature plus générale que spécifique mais a fourni un contexte fort utile lorsqu'elle pouvait être corroborée par d'autres documents.

270. Quant à la documentation de la catégorie 4, les documents rassemblés sous a) étant les ordres des autorités militaires, ils ont une très grande valeur probante sur les questions considérées. Pour les documents groupés sous b), sauf lorsque leur contenu faisait l'objet de témoignages explicatifs, leur valeur probante est faible. Les documents classés sous c) consistent pour la plupart en publications du gouvernement telles que The New Light of Myanmar ou son prédécesseur, le Working People's Daily, et reflètent les positions du gouvernement.

271. Pour parvenir aux conclusions quant aux faits formulés à la partie B, la commission s'est fondée sur la documentation figurant dans les quatre catégories décrites ci-dessus. Ces documents font apparaître le contexte et les lignes de conduite générales.

272. Pour parvenir aux conclusions quant aux faits formulés à la partie C, la commission s'est de nouveau fondée sur les mêmes documents que pour la partie B et a signalé ceux de ces documents relevant de la partie C. Cette partie fait apparaître elle aussi les lignes de conduite générales. En outre, dans la partie C, la commission s'est fondée sur des éléments de preuve testimoniale et a identifié ces documents dans la partie C. Ces éléments de preuve testimoniale confirment les lignes de conduite qui se dégageaient des éléments de preuve documentaire.

273. Cette division de la documentation avait pour but de replacer les éléments de preuve testimoniale dans le contexte général des pratiques prévalant au Myanmar, mais aussi d'isoler ces preuves qui présentent pour la commission la plus grande valeur probatoire.

B. Ligne de conduite générale
des autorités du Myanmar

274. Les informations fournies à la commission montrent que les autorités du Myanmar, y compris l'administration locale et régionale, l'armée et les différentes milices, ont forcé la population du Myanmar à accomplir toute une série de tâches. Hommes, femmes et enfants, dont certains d'un très jeune âge, ont été mis de force au travail. Les travailleurs n'ont été ni payés ni indemnisés de quelque manière que ce soit pour ce travail, si ce n'est dans quelques cas exceptionnels, et ils ont très souvent été victimes de diverses formes de sévices verbaux et physiques pouvant aller jusqu'au viol ou à la mort. Dans leur grande majorité, les informations fournies portent sur la période qui s'est écoulée depuis 1988, année au cours de laquelle le Conseil pour le rétablissement de l'ordre public (SLORC) est arrivé au pouvoir. Bien que des informations indiquent que le recours au travail forcé à toutes les fins examinées, datent d'au moins de 1988, l'utilisation du travail forcé pour les travaux d'infrastructures paraît avoir été beaucoup moins fréquente avant 1992. Dans les paragraphes qui suivent, un certain nombre d'indications seront données sur la gamme des objectifs pour lesquels de la main-d'œuvre a été réquisitionnée, tel qu'il ressort des différents documents et témoignages d'experts fournis à la commission.

275. Les informations fournies indiquent que les forces armées ainsi que les différentes milices du Myanmar ont fait appel à des civils de façon systématique et généralisée pour qu'ils leur fournissent un appui logistique. Le plus souvent, ces porteurs étaient utilisés pour transporter toute une variété de matériels et d'équipements. Par rapport aux autres formes de travail obligatoire, le traitement imposé aux porteurs, surtout durant les opérations militaires, a été particulièrement brutal. Ces porteurs ont également été exposés au danger en cas de combats(316) .

276. En plus des services de portage fournis aux forces armées, dans tout le pays, les habitants des villages et dans une moindre mesure les habitants des villes, ont été contraints d'ériger et de réparer des camps militaires et de fournir à ces camps une main-d'œuvre en permanence. Un certain nombre de villageois ont dû rester de garde dans ces camps ou servir de messagers. Les villageois ont dû également fournir les matériaux nécessaires pour la construction et la réparation des camps, au nombre desquels il faut compter les camps de certaines milices, telles que l'Armée bouddhiste démocratique Kayind (DKBA)(317) .

277. La commission a également été informée de toute une variété d'autres tâches pour lesquelles, dans tout le Myanmar, les habitants ont été réquisitionnés par les militaires notamment pour servir de guides, monter la garde ou détecter les mines. Il semble que des personnes ont également été utilisées comme boucliers humains, en ce sens qu'elles étaient envoyées à l'avant des troupes pour attirer le feu ennemi, ou faire exploser les mines ou comme otages pour empêcher que l'on attaque les colonnes ou les camps militaires. Ceci a eu lieu le plus souvent dans le contexte du portage mais s'est également produit indépendamment. En outre, les propriétaires de véhicules ont été régulièrement tenus de les mettre à disposition des militaires(318) .

278. La question de la conscription forcée dans la Tatmadaw et dans différentes milices a également été portée à l'attention de la commission. Dans certains cas, il semble que ces recrues ont été réquisitionnées arbitrairement sans aucun lien avec la législation sur le service militaire obligatoire et que parmi elles, on comptait des mineurs(319) .

279. Des informations ont également été reçues sur l'utilisation de civils pour toute une série de projets entrepris par les autorités du Myanmar, et très souvent par les autorités militaires, apparemment à des fins de création de revenus. Ceci allait du recours au travail forcé pour des travaux d'agriculture ou de production de biens jusqu'à l'extorsion ou le vol de biens personnels(320) .

280. Il ressort des informations que, durant ces dix dernières années, le gouvernement du Myanmar a mis en œuvre un grand nombre de projets nationaux et locaux d'infrastructures, en particulier pour la construction et l'amélioration de diverses routes et voies ferrées et d'infrastructures connexes telles que des ponts. Il semble que ces projets ont été construits en grande partie grâce au travail forcé, impliquant parfois des centaines de milliers de travailleurs(321) .

281. De même, il semble que le gouvernement a eu recours au travail forcé pour toute une série d'autres projets d'infrastructures et de travaux publics tels que barrages, travaux d'irrigation et aéroports(322) .

282. Pour leur part, les résidents des villes ont été réquisitionnés, une fois par semaine en général, pour le nettoyage et l'entretien des zones urbaines. Ce travail a été organisé par les autorités municipales mais souvent effectué sous la surveillance des militaires(323) .

283. Les informations fournies indiquent que le recours au travail forcé aux fins mentionnées ci-dessus a eu lieu dans tout le Myanmar et a affecté les Birmans et les autres groupes ethniques du pays. Il apparaît toutefois qu'il y avait sensiblement plus de travail forcé dans les zones rurales, en particulier dans les zones moins développées telles que celles des sept Etats. Puisque la majorité de la population de ces Etats n'est pas birmane, le fardeau de ce travail forcé a pesé de façon disproportionnée sur les groupes ethniques non birmans du Myanmar.

284. Il semble que les personnes qui ont exigé du travail forcé au Myanmar n'ont fait l'objet d'aucune sanction légale et qu'elles ont donc joui d'une totale impunité. Plusieurs témoins qui avaient entrepris des recherches générales et investigations ont informé la commission qu'à leur connaissance il n'y avait eu aucun cas où une personne aurait été punie pour en avoir forcé d'autres à fournir leur travail ou pour avoir commis des brutalités à l'égard des personnes ainsi contraintes au travail(324) .

285. Le nombre de personnes au Myanmar qui ont été contraintes d'effectuer du travail forcé paraît considérable. En 1995, Human Rights Watch/Asia a estimé que depuis 1992, ce sont au moins deux millions de personnes qui ont été forcées de travailler sans rémunération à la construction de routes, de voies ferrées et de ponts(325) . Les statistiques publiées par le gouvernement du Myanmar dans son organe de presse officiel, le New Light of Myanmar donnent une indication de l'importance de certains des projets pour lesquels il est affirmé qu'il a été fait usage de travail forcé(326) .

286. Dans les zones rurales, les ordres de réquisition étaient transmis aux villageois par l'intermédiaire de leur chef de village. Le chef de village recevait des instructions, parfois verbalement, mais le plus souvent sous forme écrite, soit de l'administration locale (au niveau de l'arrondissement rural et parfois de la circonscription), soit des militaires (le camp militaire local ou l'état-major du bataillon)(327) . Ces instructions précisaient généralement qu'un certain nombre de personnes devaient être fournies pour une date donnée et qu'une quantité donnée de travail devait être accomplie dans un délai donné. C'était ensuite au chef du village à prendre les mesures nécessaires. Souvent le chef du village demandait à un certain nombre de foyers du village de fournir une personne pour un certain temps, généralement pour une à deux semaines; à la fin de cette période, les travailleurs étaient remplacés par des villageois d'autres familles du même village. Dans certains cas, l'ordre donné au chef du village précisait que chaque foyer devait envoyer une personne, ce qui ne laissait aucune possibilité de rotation entre les foyers du village.

287. Dans les zones urbaines, les ordres de réquisition étaient transmis aux intéressés par les fonctionnaires de l'administration de l'arrondissement urbain. Ces fonctionnaires recevaient des instructions de l'administration de la circonscription ou des autorités militaires locales. Ces instructions spécifiaient le nombre de travailleurs ou la quantité de travail à accomplir dans un délai donné. Les fonctionnaires de l'administration de l'arrondissement prenaient alors les arrangements nécessaires. Souvent, ils faisaient arrêter des personnes arbitrairement ou envoyaient des gens travailler à titre de punition pour quelque contravention mineure, mais, fréquemment aussi, des loteries étaient organisées pour tirer au sort ceux des résidents de l'arrondissement qui devaient partir. La seule manière pour ceux-ci d'éviter de prendre part à la loterie ou d'éviter l'obligation de partir s'ils étaient choisis était de verser une somme d'argent leur permettant d'être exemptés.

288. Les réquisitions de main-d'œuvre de faible importance provenaient en général des bataillons ou de la circonscription tandis que les demandes plus importantes venaient d'un niveau plus élevé de la hiérarchie administrative ou militaire. Pour la main-d'œuvre à affecter aux grands projets d'infrastructure ou pour les porteurs appelés à participer à des opérations militaires importantes, l'ordre venait parfois du niveau national et était ensuite répercuté par l'intermédiaire des responsables aux niveaux de l'Etat ou de la division, du district et de la circonscription(328) . La commission a reçu copie d'un grand nombre de ces ordres (provenant la plupart du temps d'un camp militaire local, d'un bataillon, d'un arrondissement rural ou d'une circonscription)(329) .

289. Les ordres écrits visant à obtenir des porteurs ou des travailleurs qui étaient envoyés aux chefs de villages par les autorités militaires locales contenaient souvent quelque menace ouverte ou implicite. Parmi les exemples de menaces ouvertes figurent des déclarations telles que: «Quiconque refuse de venir construire la route sera passible des sanctions prévues par la loi», ou encore: «Si vous ne venez pas parce que vous avez peur des rebelles Mon, nous, l'armée, devons vous montrer que nous sommes pires qu'eux», ou encore: «Je vous préviens que si vous trouvez des excuses et que vous ne vous présentez pas, des mesures violentes seront prises contre vous» ou: «Si personne ne vient cette fois-ci [vous] serez détruits par une attaque d'artillerie»(330) . Un jour où deux villageois avaient fui alors qu'ils faisaient du portage pour l'armée, un ordre adressé par la colonne des militaires au chef du village pour exiger leur retour était libellé comme suit: «Si cela se reproduit à l'avenir, nous prendrons des mesures appropriées et vous serez accusés de perturber et de retarder les opérations militaires»(331) . Parmi les exemples de menaces implicites, on peut citer des déclarations telles que: «Si vous ne venez pas, c'est vous-mêmes qui en supporterez les conséquences» , ce dont les villageois savaient d'expérience que cela voulait dire qu'ils auraient à faire face à de graves sanctions, ou encore: «Si vous ne venez pas, nous déclinons toute responsabilité pour votre village» , ce que les villageois savaient être une menace de destruction de leur village)(332) . Une autre forme courante de menace était d'accompagner l'ordre de certains objets tels qu'une cartouche, un piment ou un morceau de charbon, ce qui signifiait que les destinataires seraient tués par balle, auraient des problèmes ou que leurs maisons ou leurs villages seraient incendiés s'ils n'obéissaient pas à l'ordre donné(333) .

290. Les autorités locales ont périodiquement demandé aux chefs de village de fournir des informations détaillées sur le nombre de foyers dans leur zone et sur leur composition. Ces listes pouvaient alors être utilisées pour décider combien de travailleurs pouvaient être demandés à un village ou la quantité de travail qu'un village était tenu de fournir(334) . Quand un travailleur était requis dans chaque foyer, il n'était pas tenu compte du nombre de personnes valides dans le foyer ni de combien il comptait d'hommes et de femmes, ce qui posait des problèmes particulièrement difficiles aux foyers ne comportant pas de personnes valides; dans de tels cas, c'était les enfants ou les vieillards qui devaient aller travailler s'ils ne parvenaient pas à trouver un substitut.

291. Il semble que, faute de coordination suffisante entre les unités militaires locales, les autorités locales et régionales et les divers organismes exigeant du travail forcé, les demandes de main-d'œuvre étaient quelquefois impossibles à satisfaire. Cette accumulation de demandes ont forcé des femmes, des enfants et des vieillards à aller effectuer du travail forcé et ont parfois empêché les familles de gagner leur vie. L'une des manières de résoudre ce problème était de payer quelqu'un pour effectuer le travail forcé à leur place ou, lorsque c'était possible, de verser de l'argent aux autorités afin d'être exemptés. Mais la plupart des villageois des régions rurales qui gagnent à peine de quoi survivre n'avaient pas les moyens d'effectuer très souvent ou longtemps de tels versements. De plus, il était parfois très difficile de trouver quelqu'un qui accepte de travailler comme porteur pour des opérations militaires, parce que ce travail était particulièrement dangereux et parce que la demande de porteurs était très forte à ces moments-là(335) .

292. Il ressort des informations devant la commission que les sanctions infligées pour ne pas avoir répondu aux demandes de travail forcé étaient extrêmement dures. Il s'agit notamment de la détention, dans le camp militaire, souvent les fers aux pieds, ou dans un trou creusé dans la terre, généralement assortie de passages à tabac ou d'autres formes de tortures, telles que la privation de nourriture, d'eau, de soins médicaux ou d'autres droits fondamentaux. A ces occasions, les femmes étaient exposées à être violées ou victimes d'autres sévices sexuels. La première personne à être punie si un village n'obéissait pas aux demandes de travail forcé était généralement le chef du village. Aussi la position de chef du village était-elle peu prisée et était assumée par rotation entre les villageois capables d'assumer cette tâche, souvent au rythme d'à peine deux semaines chacun. Il a également été mentionné que les villages choisissaient souvent les femmes âgées pour être chefs du village, les villageois estimant qu'en tant que femmes elles seraient peut-être traitées moins brutalement, et qu'en raison de leur âge elles risquaient moins d'être violées ou de subir d'autres sévices sexuels(336) .

293. Il ressort des informations devant la commission que les populations qui avaient été déplacées et réinstallées de force risquaient de ce fait d'avoir à faire face à des demandes de fournir leur travail. Le déplacement et la réinstallation forcée de populations a été une stratégie couramment pratiquée par les militaires dans les zones d'insurrection active. Des villages éloignés ont souvent reçu l'ordre de se réinstaller dans des zones soumises à un contrôle gouvernemental plus ferme, généralement dans des villes plus importantes ou dans des régions rurales proches de camps militaires. Ces réinstallations pouvaient affecter des centaines de milliers de personnes. Il appert qu'étant donné la proximité des militaires ces populations déplacées étaient particulièrement vulnérables aux exigences de portage et d'autres types de travail forcé(337) . Dans certains cas, il semble que ces déplacements forcés de populations ont été utilisés pour constituer une source de main-d'œuvre facilement accessible à côté d'un grand projet d'infrastructure, ou du moins que l'on a profité de la présence de vastes populations déplacées dans les zones de certains projets pour les contraindre à du travail forcé sur ces projets. Ce fut le cas dans l'Etat Kayah pour la construction du chemin de fer de Aungban à Loikaw, pour la construction de routes dans la division Tanintharyi (Tenasserim), et pour la construction de routes et de voies ferrées dans l'Etat Shan(338) .

294. Tout en fournissant du travail à des fins diverses, les habitants de tout le Myanmar devaient également verser différents impôts et taxes. Il a été indiqué à la commission que, dans certains cas, ces prélèvements étaient faits de façon arbitraire et discriminatoire. Il apparaît que ce type de discrimination a frappé tout particulièrement la population Rohingya de l'Etat Rakhine(339) .

295. Les taxes et impôts les plus couramment imposés aux habitants du Myanmar étaient les taxes de portage, soi-disant pour payer les porteurs; les contributions en espèces pour les projets d'infrastructure (taxes routières, taxes sur les voies ferrées, etc.)(340) ; les taxes diverses à verser aux camps militaires locaux en espèces ou sous la forme de produits; et toute une série de taxes sur la production agricole telles que la vente obligatoire d'une partie de la récolte de riz aux autorités à un prix bien inférieur au prix du marché. En plus de tout cela, les gens devaient également payer régulièrement des sommes d'argent s'ils voulaient échapper aux assignations de travail forcé qui leur étaient adressées; en raison du caractère arbitraire de la taxation, il était souvent difficile de distinguer ces paiements des taxes et impôts véritables. Au cas où les gens n'étaient pas en mesure de payer ces taxes, ils étaient souvent tenus d'effectuer à la place du travail ou des services, ce qui augmentait d'autant la quantité de travail non indemnisé qu'ils devaient fournir(341) .

296. Les informations fournies à la commission indiquent que le système de réquisition forcée de main-d'œuvre était plus ou moins le même dans tout le pays et que, de par la nature même de ce système, certains groupes étaient particulièrement affectés par ces réquisitions. Il apparaît en particulier qu'il était presque toujours possible d'éviter le travail forcé en versant une somme suffisamment importante, ce qui veut dire que la charge du travail forcé tombait de façon disproportionnée sur les couches de la population les plus pauvres. L'existence d'une économie monétaire dans les zones urbaines signifie aussi que les habitants des villes étaient plus à même de pouvoir payer pour éviter le travail forcé(342) . De plus, les populations non birmanes paraissent avoir été particulièrement visées par le travail forcé, notamment dans les zones rurales (voir également paragr. 283 ci-dessus)(343) . Les discriminations de ce genre ont frappé tout particulièrement la population musulmane du Myanmar, notamment la population Rohingya de l'Etat Rakhine et les populations musulmanes d'autres régions du pays(344) . Le traitement infligé à cette population paraît également avoir été spécialement dur(345) .

297. La commission a reçu des informations relatives à l'impact social et financier du travail forcé sur les personnes qui y étaient assujetties(346) . Il apparaît qu'en raison du travail forcé qui leur était imposé les couches les plus pauvres de la société qui en accomplissaient la majeure partie n'ont cessé de s'appauvrir. Les journaliers qui doivent travailler chaque jour s'ils veulent gagner assez pour survivre ne le pouvaient plus lorsqu'ils étaient contraints de fournir gratuitement leur travail. Les familles qui n'ont pour toute ressource que leurs cultures de subsistance ont, elles aussi, besoin que chacun des membres de la famille participe à ce travail qui exige une forte intensité de main-d'œuvre, particulièrement à certains moments de l'année. L'exigence de travail forcé affecte donc gravement ces familles. Des familles qui ne pouvaient plus subvenir à leurs propres besoins déménageaient souvent dans une région dont elles pensaient que les obligations de travail forcé seraient moins lourdes; si elles ne le pouvaient pas, il était fréquent qu'elles fuient le Myanmar comme réfugiés. Les informations fournies à la commission indiquent que le travail forcé a été l'un des principaux motifs pour lesquels des personnes ont quitté le Myanmar et sont devenues des réfugiés(347) .

298. Enfin, la commission a reçu des informations portant sur le rapport entre les valeurs bouddhistes et la contribution de travail. Il ressort de ces informations que, s'il est vrai que diverses actions, y compris la contribution de travail à certaines fins, sont considérées comme nobles et méritoires au regard des valeurs que chérissent les bouddhistes du Myanmar, le travail effectué sur des routes ou sur des ponts ou le travail forcé de quelque nature que ce soit ne saurait être considéré comme noble et méritoire à ce titre. Selon les informations reçues, le bouddhisme est clair quant aux catégories d'actes qui sont méritoires, et des activités telles que la construction de routes et de ponts ne peuvent pas être considérées comme en faisant partie; il est également clair, selon la tradition bouddhiste, que le mérite ne vient pas de l'acte lui-même mais des intentions de la personne qui l'effectue, si bien qu'un acte que l'on est contraint d'accomplir ne peut être considéré comme méritoire. Qui plus est, étant donné que le travail forcé effectué dans le pays était en bonne partie exigé de groupes ethniques non bouddhistes, des considérations de cet ordre étaient sans pertinence dans de tels cas(348) .

Partie IV (suite)


188.  Rapport du Groupe de travail des formes contemporaines d'esclavage sur sa dix-neuvième session, doc. off. CES E/CN.4/sub.2/1994/33 (23 juin 1994), p. 25; rapport du Groupe de travail des formes contemporaines d'esclavage sur sa vingtième session, doc. off. CES E/CN.4/sub.2/1995/28 (13 juin 1995), p. 17. M. Benjamin Whitaker, Rapporteur spécial de la Sous-commission des droits de l'homme, a, dans sa mise à jour du rapport présenté à la sous-commission en 1966, identifié plus d'une dizaine de manifestations contemporaines de l'esclavage et des pratiques esclavagistes dont fait partie le travail forcé: rapport de M. Benjamin Whitaker, Rapporteur spécial, Mise à jour du rapport sur l'esclavage présenté à la sous-commission en 1966, doc. off. CES E/CN.4/sub.2/1982/20 (5 juillet 1982).

189.  Acte final du Congrès de Vienne reproduit in De Martens, Nouveau recueil de traités (N.R.T.) 1814-15, tome II, p. 433. L'Autriche, la France, la Grande-Bretagne, la Prusse et la Russie, réunies à Vérone en 1822, ont réitéré leur engagement à «chercher les moyens les plus efficaces pour prévenir un trafic que déjà les lois de la presque totalité des pays civilisés ont déclaré illicite et coupable; et pour punir rigoureusement ceux qui le poursuivent en contravention manifeste de ces lois»: De Martens, N.R.T., 1822-23, tome VI.1, pp. 136-137.

190.  A titre d'exemples, consulter les traités conclus par l'Angleterre pour la répression de la traite sur mer, soit notamment la convention additionnelle au traité du 22 janvier 1815 avec le Portugal, signée le 18 juillet 1817, remplacée le 3 juillet 1842 et modifiée par la convention additionnelle du 18 juillet 1871 (reproduite in De Martens, Nouveau recueil général de traités (N.R.G.), tome III, p. 511); avec l'Espagne le 23 septembre 1817 (reproduite in De Martens, N.R.T., 1808-1818, tome III, no 20, pp. 135-140), modifiée et étendue par celle du 28 juin 1835; avec les Pays-Bas le 4 mai 1818 (reproduite in De Martens, N.R.T., 1808-1819, tome IV; no 48, pp. 511-523); avec la Suède-Norvège le 6 novembre 1824 (reproduite in De Martens, N.R.T., 1824-1826, tome IV.2, no 128, pp. 619-655); avec la France le 30 novembre 1831, complétée le 22 mars 1833 et suspendue par un autre traité en date du 29 mai 1845 (reproduite in De Martens, N.R.G., 1845, tome VIII, no 30, pp. 284-311); avec les Etats-Unis d'Amérique en date du 7 avril 1862 (reproduite in De Martens, N.R.G., 1847-1864, tome XVII.2, no LI, pp. 259-277) qui fut modifiée et étendue en février 1863 et juin 1870 (reproduite in De Martens, N.R.G., 1837-1874, tome XX, pp. 504-511).

191.  Le Traité de Londres a été signé par la France, la Grande-Bretagne, l'Autriche, la Russie et la Prusse (reproduit in De Martens, N.R.G., 1841, tome II, no 96, pp. 508-534). Ce traité assimile la traite des esclaves à la piraterie. Il ne fut pas ratifié par le gouvernement français.

192.  Article 9, Acte général de la Conférence de Berlin reproduit in De Martens, N.R.G., 1853-1885, tome X, no 20, p. 419.

193.  Reproduit in De Martens, N.R.G., 1881-1890, deuxième série, tome XVI, no 7, pp. 3-29. L'Acte général de Berlin du 26 février 1885 et l'Acte général de la Conférence de Bruxelles ont été révisés par la convention signée à Saint-Germain-en-Laye le 10 septembre 1919 aux termes de laquelle «[les Puissances signataires] s'efforceront, en particulier, d'assurer la suppression complète de l'esclavage sous toutes ses formes et de la traite des Noirs, sur terre et sur mer» (reproduit in Recueil des traités de la Société des Nations (R.T.S.D.N.), 1922, vol. VIII, no 202, p. 35). Enfin, lors de la Conférence de Bruxelles, la Grande-Bretagne et l'Espagne ont signé le Traité relatif à la suppression de la traite des esclaves en Afrique (reproduit in De Martens, N.R.G., 1882-1893, deuxième série, tome XVIII, pp. 168-173).

194.  Arrangement international en vue d'assurer une protection efficace contre le trafic criminel connu sous le nom de traite des Blanches signé à Paris le 18 mai 1904 et Convention internationale relative à la répression de la traite des Blanches signée à Paris le 4 mai 1910 entre l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie, l'Autriche, la Hongrie, la Belgique, le Brésil, le Danemark, l'Espagne, la France, la Grande-Bretagne, l'Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la Russie et la Suède (reproduit in De Martens, N.R.G.,1894-1913, troisième série, tome VII, n° 21, pp. 252-264).

195.  A été signée par l'Albanie, l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Brésil, la Grande-Bretagne (avec le Canada, le Commonwealth d'Australie, l'Union sud-africaine, la Nouvelle-Zélande et l'Inde), le Chili, la Chine, la Colombie, Costa Rica, Cuba, l'Estonie, la Grèce, la Hongrie, l'Italie, le Japon, la Lettonie, la Lituanie, la Norvège, les Pays-Bas, la Perse, la Pologne (avec Dantzig), le Portugal, la Roumanie, le Siam, la Suède, la Suisse et la Tchécoslovaquie (reproduite in R.T.S.D.N., 1922, vol. IX, no 269, pp. 415-433). L'arrangement du 18 mai 1904 et les conventions du 4 mai 1910 et du 30 septembre 1921 ont été complétés par une convention additionnelle relative à la traite des femmes majeures signée à Genève le 11 octobre 1933 (reproduit in R.T.S.D.N., 1934, vol. CL, no 3476, pp. 433-456). La Convention pour la répression et l'abolition de la prostitution des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui signée le 2 décembre 1949 est venue unifier les instruments précédents.

196.  Reproduite in R.T.S.D.N, 1927, vol. LX, no 1414, pp. 253-270. La convention a été amendée en 1953 (reproduite in R.T.S.D.N, 1953, vol. CLXXXII, no 2422, pp. 51-72).

197.  Art. 1 (1).

198.  Art. 2 et art. 6.

199.  Art. 5.

200.  Art. 5 (3).

201.  Au 31 mai 1998, la convention no 29 a été ratifiée par 146 Etats. Voir ci-après, chap. 9, section B), paragr. 205-218.

202.  Art. 25 de la convention no 29.

203.  Reproduite in R.T.N.U., 1957, vol. CCLXVI, no 3822, pp. 3-87. Au 31 mai 1998, 117 Etats ont ratifié cette convention.

204.  Art. 1 a), b) et d) de la convention de 1956.

205.  Au 31 mai 1998, la convention no 105 a été ratifiée par 130 Etats.

206.  A titre d'exemples: Constitution des Barbades, art. 6; Constitution de la Colombie, art. 17; Constitution du Congo, art. 31; Constitution d'El Salvador, art. 9; Constitution des Etats-Unis d'Amérique, art. 13; Constitution de l'Ethiopie, art. 17; Constitution de la Georgie, art. 30; Constitution de la Grèce, art. 22 (3); Constitution de l'Inde, art. 23; Constitution de la Malaisie, art. 6; Constitution du Malawi, art. 27; Constitution de la Mongolie, art. 16; Constitution du Nigéria, art. 33; Constitution du Pakistan, art. 11; Constitution de la Fédération de Russie, art. 37 (2); Constitution du Rwanda, art. 17; Constitution du Suriname, art. 15; Constitution de la Turquie, art. 18; Constitution de l'Ukraine, art. 43.

207.  Instruments à vocation universelle: Déclaration universelle des droits de l'homme, 1948, art. 4. Même si le travail forcé n'y est pas expressément nommé, l'examen des discussions qui ont précédé l'adoption de cet article révèle qu'il était considéré comme une forme d'esclavage ou de servitude. Voir, à cet égard, procès-verbaux de la troisième session de la Commission des droits de l'homme (doc. off. CES E/CN.4/SR.53); Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 1966, art. 8; Convention internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid, 1973, art. II e); Convention relative aux droits des enfants, 1989, art. 32, 34 et 36; Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, 1990, art. 11. Instruments à vocation régionale: Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 1950, art. 4; Convention américaine relative aux droits de l'homme, 1969, art. 6; Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, 1981, art. 5.

208.  Pour un exemple de renvoi aux conventions de l'OIT dans le contexte de la Convention européenne des droits de l'homme, voir: Van der Mussele c. Belgique, 23 nov. 1983, série A, no 70.

209.  Pour les prisonniers de guerre, se référer notamment à la Convention de Genève (III) relative au traitement des prisonniers de guerre du 12 août 1949, art. 49-57 et art. 130. Pour les civils se référer à la Convention de Genève (IV) relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre du 12 août 1949, art. 40, 51 et 52 ainsi qu'au Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés internationaux, art. 75 et 76. Enfin, le Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux prévoit expressément, en son article 4, que sont et demeurent prohibées «en tout temps et en tout lieu» «f) l'esclavage et la traite des esclaves sous toutes leurs formes.»

210.  Annuaire de la CDI, 1980, vol. II, 2e partie, pp. 29 et suiv. L'article 19 du projet d'articles se lit:

1. Le fait d'un Etat qui constitue une violation d'une obligation internationale est un fait internationalement illicite quel que soit l'objet de l'obligation violée.

2. Le fait internationalement illicite qui résulte d'une violation par un Etat d'une obligation internationale si essentielle pour la sauvegarde d'intérêts fondamentaux de la communauté internationale que sa violation est reconnue comme un crime par cette communauté dans son ensemble constitue un crime international.

3. Sous réserve des dispositions du paragraphe 2 et d'après les règles du droit international en vigueur, un crime international peut notamment résulter:

[...]

c) d'une violation grave et à une large échelle d'une obligation internationale d'importance essentielle pour la sauvegarde de l'être humain, comme celles interdisant l'esclavage, le génocide, l'apartheid;

[...]

211.  Barcelona Traction, Light and Power Company, limited, arrêt, C.I.J., Recueil 1970, p. 33. La Commission des droits de l'homme estime pour sa part que l'esclavage et ses manifestations modernes représentent quelques-unes des violations des droits de l'homme les plus graves: résolution 1991/58, préambule 8 (6 mars 1991); résolution 1994/25, préambule 13 (4 mars 1994).

212.  Projet de code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité adopté par la Commission du droit international en 1996: rapport de la CDI sur les travaux de sa quarante-huitième session (6 mai - 26 juillet 1996), doc. off. AGNU, suppl. no 10 (A/51/10), pp. 30-144. Pour définir l'esclavage, la Commission du droit international se réfère notamment à la convention de 1926 relative à l'esclavage, à la Convention supplémentaire de 1956 relative à l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l'esclavage, au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et à la convention no 29 de l'Organisation internationale du Travail. Voir également Annuaire de la CDI 1991, vol. II, 2e partie, p. 108.

213.  Statut du Tribunal militaire de Nuremberg, art. 6 c); Charte du Tribunal militaire international pour l'Extrême-Orient, art. 5 c); Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, art. 5 c); Tribunal pénal international pour le Rwanda, art. 3.

214.  Rapport de la CDI sur les travaux de sa quarante-sixième session (2 mai - 22 juillet 1994), doc. off. AGNU, suppl. no 10 (A/49/10), pp. 76-85. Sur la notion de crime contre l'humanité, consulter également La Rosa, Dictionnaire de droit international pénal, Termes choisis, Paris, PUF, 1998, pp. 17-26.

215.  Art. 18 d) du projet de code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité, op. cit., note 212, p. 119.

216.  Art. 1, paragr. 1, de la convention.

217.  Pour la définition du travail forcé ou obligatoire donnée dans la convention ainsi que les exceptions à cette obligation, voir paragr. 198 et suiv. ci-dessus.

218.  Art. 25 de la convention.

219.  Art. 2, paragr. 1, de la convention.

220.  CIT, 65e session 1979, Etude d'ensemble des rapports concernant la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 (désignée ci-après Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé), paragr. 21.

221.  Compte rendu de la Conférence, 14e session, Genève, 1930, p. 691.

222.  CIT, 83e session, 1996, rapport III (partie 4A), rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations (désigné ci-après R.C.E., 1996), p. 94.

223.  Art. 2, paragr. 2, de la convention.

224.  Art. 2, paragr. 2 a), de la convention.

225.  Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 24.

226.  CIT, 14e session, Genève, 1930, Rapport I: Travail forcé, pp. 142-146; CIT, 14e session, Genève, 1930, Compte rendu des travaux, vol. I, p. 301. On relèvera par ailleurs que la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957, ratifiée par 130 Etats, mais non par le Myanmar, prévoit en son article 1 b) la suppression et le non-recours à toute forme de travail forcé ou obligatoire en tant que méthode de mobilisation et d'utilisation de la main-d'œuvre à des fins de développement économique.

227.  Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 33.

228.  A titre d'illustration de ce principe, la commission d'experts a rappelé que l'article 1 a) de la convention supplémentaire de 1956 sur l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l'esclavage se réfère à l'état ou la condition résultant du fait qu'un débiteur s'est engagé à fournir en garantie d'une dette ses services personnels si la durée de ces services n'est pas limitée ni leur caractère défini.

229.  Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 68.

230.  Art. 2, paragr. 2 b).

231.  Voir paragr. 208 ci-dessus.

232.  Voir paragr. 212 ci-dessous.

233.  Voir paragr. 213 ci-dessous.

234.  Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 34.

235.  Art. 2, paragr. 2 c).

236.  Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 35.

237.  Art. 2, paragr. 2 e).

238.  Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 36.

239.  Ibid.. La commission a noté qu'une formule analogue a été adoptée dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dont l'article 4 permet des dérogations à ces dispositions dans le cas où un danger public exceptionnel menace l'existence de la nation, dans la stricte mesure où la situation l'exige.

240.  Art. 2, paragr. 2 e).

241.  Etude d'ensemble de 1979 sur l'abolition du travail forcé, paragr. 37.

242.  Autres que celles spécifiquement exclues du champ d'application de la convention (voir ci-dessus paragr. 197 à 203).

243.  Art. 1, paragr. 2 (voir ci-dessus paragr. 205).

244.  La convention est entrée en vigueur le 1er mai 1932, mais cela n'a été fait ni en 1937 ni ultérieurement.

245.  CIT, 52e session, 1968, rapport III (partie IV), rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, partie III: Travail forcé, étude d'ensemble des rapports concernant la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, et la convention (no 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957; également publié sous forme de tiré à part: Travail forcé, extrait du rapport de la 38e (1968) session de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations (désignée ci-après: Etude d'ensemble de 1968 sur le travail forcé), paragr. 19 b) et c).

246.  Art. 7 et 8.

247.  Art. 9 et 10.

248.  Art. 9 à 12.

249.  Art. 13 à 17.

250.  Art. 18 et 19.

251.  Art. 4 et 6.

252.  Art. 11.

253.  Art. 19.

254.  Art. 21.

255.  Art. 7 et 8.

256.  BIT, Rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, rapport III (partie IV), CIT, 46e session, Genève, 1962, partie III: Travail forcé, paragr. 69; R.C.E., 1964, pp. 78, 80 et 85; Etude d'ensemble de 1968 sur le travail forcé, paragr. 22.

257.  R.C.E., 1998, p. 106.

258.  Voir paragr. 198 à 204 ci-dessus.

259.  Il s'agit des Etats Chin, Kachin, Kayah, Kayin, Mon, Rakhine et Shan; et des divisions de Ayeyarwady, Bago, Magway, Mandalay, Sagaing, Tanintharyi et Yangon. On trouvera à l'annexe IX des cartes montrant où se trouvent ces Etats et ces divisions, ainsi que les lieux mentionnés dans le présent rapport.

260.  Egalement désignées sous le nom de quartiers.

261.  Estimation du gouvernement citée dans EIU Country Profile 1997-98, pp. 20 et suiv.

262.  Le gouvernement reconnaît officiellement 135 «races nationales» différentes.

263.  Pour certaines de ces estimations, voir Anti-Esclavage International, doc. 153 à la page 4746.

264.  EIU Country Report, premier trimestre 1998, p. 10.

265.  Composition du SLORC au 20 décembre 1995: le général en chef Than Shwe (président), le général Maung Aye (vice-président), le lieutenant général Khin Nyunt (premier secrétaire), le lieutenant général Tin Oo (deuxième secrétaire), le vice-amiral Maung Maung Khin, le lieutenant général (armée de l'air) Tin Tun, le lieutenant général Aung Ye Kyaw, le lieutenant général Phone Myint, le lieutenant général Sein Aung, le lieutenant général Chit Swe, le lieutenant général Kyaw Ba, le lieutenant général Maung Thint, le lieutenant général Myint Aung, le lieutenant général Mya Thin, le lieutenant général Tun Kyi, le lieutenant général Aye Thaung, le lieutenant général Myo Nyunt, le lieutenant général Maung Hla, le lieutenant général Kyaw Min, le général de division Soe Myint et le général de division Myan Lin.

266.  Selon la notification du SPDC no 1/97 du 15 novembre 1997 portant création du SPDC, la composition du conseil était la suivante: le général en chef Than Shwe (président), le général Maung Aye (vice-président), le lieutenant général Khin Nyunt (premier secrétaire), le lieutenant général Tin Oo (deuxième secrétaire), le lieutenant général Win Myint (troisième secrétaire), le contre-amiral Nyunt Thein (commandant en chef de la marine), le brigadier général Kyaw Than (commandant en chef de l'armée de l'air), le général de division Aung Htwe (commandant, commandement occidental), le général de division Ye Myint (commandant, commandement du centre), le général de division Khin Maung Than (commandant, commandement de Yangon), le général de division Kyaw Win (commandant, commandement du Nord), le général de division Thein Sein (commandant, commandement de la zone du triangle), le général de division Thura Thiha Thura Sitt Maung (commandant, commandement de la zone côtière), le brigadier général Thura Shwe Mann (commandant, commandement du sud-ouest), le brigadier général Myint Aung (commandant, commandement de la région du sud-est), le brigadier général Maung Bo (commandant, commandement oriental), le brigadier général Thiha Thura Tin Aung Myint Oo (commandant, commandement du nord-est), le brigadier général Soe Win (commandant, commandement du nord-ouest), le brigadier général Tin Aye (commandant, commandement du sud).

267.  Voir la notification no 1/97 du 15 novembre 1997 sur le Conseil pour le rétablissement de l'ordre public, ainsi que les notifications nos 1/97 et 3/97 sur le Conseil d'Etat pour la paix et le développement. Ils figurent au registre officiel sous H01-5652 et H01-5655. Voir également EIU Country Profile, premier trimestre 1998, p. 11.

268.  La loi sur l'adaptation des expressions (no 1/97), qui est entrée en vigueur le 15 novembre 1997, a ordonné le remplacement de l'expression «Conseils pour le rétablissement de l'ordre public» par «Conseils pour la paix et le développement» dans tous les textes légaux, «par commodité».

269.  The Military Balance 1988/89, Institut international d'études stratégiques, pp. 159-60.

270.  The Military Balance 1997/98, Institut international d'études stratégiques, p. 158.

271.  Ibid.

272.  Ces bataillons constituent plusieurs régiments; néanmoins, c'est le bataillon qui est la principale unité de combat, le régiment étant un regroupement plus traditionnel et symbolique.

273.  Chaque commandement régional et chaque division d'infanterie comprend environ 3 commandements d'opérations tactiques (TOC), qui contrôlent chacun 3 ou 4 bataillons d'infanterie (Heppner, XII/27, s'y réfère sous le terme de «commandements stratégiques»).

274.  The Military Balance 1997/98, Institut international d'études stratégiques, p. 158. Voir également Andrew Selth, Transforming the Tatmadaw, Australian National University Strategic and Defense Studies Centre, 1996.

275.  Voir Human Rights Watch/Refugees International, 154 à 5404.

276.  Une liste des diverses orthographes des noms cités dans le présent rapport figure à l'annexe X. Bien que la commission se soit efforcée dans ce domaine de donner des désignations aussi précises et aussi complètes que possible, elle ne disposait pas d'informations officielles du gouvernement malgré la demande présentée à la Mission permanente du Myanmar pour que ces informations lui soient fournies.

277.  Voir EIU Country Profile, 1997/98, p. 10. Voir également EIU Country Report, premier trimestre 1998, pp. 14 à 15, et Karen Human Rights Group, doc. 174, p. 8601.

278.  Voir paragr. 121 à 123 ci-dessus.

279.  Voir paragr. 145 ci-dessus.

280.  Voir le rapport du comité créé pour examiner la réclamation présentée par la CISL en vertu de l'article 24 de la Constitution alléguant le non-respect par le Myanmar de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 (cité à la note 84 ci-dessus), paragr. 45.

281.  Transcription de la déclaration faite par Daw Aung San Suu Kyi lors des auditions du GSP des Etats-Unis, 129-4283.

282.  Article 9A de la loi sur les villes, voir paragr. 240 ci-dessus.

283.  Voir paragr. 237 ci-dessus.

284.  Ce texte figure au doc. H9, p. 5843.

285.  Doc. H10, p. 5858.

286.  Doc. H7, p. 5802, et doc. H10, pp. 5870 et 5871.

287.  Doc. H10, p. 5871.

288.  Ibid.

289.  Voir paragr. 242 ci-dessus.

290.  Le texte intégral de ce décret figure à l'annexe XII. Ce décret a été transmis par le gouvernement du Myanmar en tant qu'annexe de son «Rapport sur le progrès des mesures prises par le gouvernement du Myanmar en vue d'abolir le recours au travail forcé», daté du 30 septembre 1996 et soumis au Directeur général du BIT.

291.  «Rapport sur le progrès des mesures prises par le gouvernement du Myanmar en vue d'abolir le recours au travail forcé», 30 sept. 1996, paragr. 15.

292.  Le texte de cette directive figure au document CES/E/CN.4/1996/65, p. 42 (annexe III).

293.  Doc. H10, p. 5870.

294.  Voir paragr. 112 ci-dessus.

295.  Voir paragr. 237 et suiv. ci-dessus.

296.  Par exemple, aux termes de l'ordonnance no 1/90 prise par la division du LORC de Rangoon le 22 mai 1990 et diffusée par la radiodiffusion birmane le même jour, «les fonctionnaires responsables sont tenus de déclarer aux conseils pour le rétablissement de la loi et de l'ordre les personnes absentes de même que les invités et étrangers dans les quelque 42 localités urbaines de la division de Rangoon. Toute défaillance entraînera des mesures effectives à l'encontre du fonctionnaire responsable et de la partie coupable. Cette disposition a déjà été annoncée par l'ordonnance no 1/89 de la division de Rangoon du Conseil pour le rétablissement de la loi et de l'ordre du 18 juillet 1989, premier jour de la lune descendante de Waso, de l'an 1351 de l'ère birmane». Voir également art. XIX, Burma Beyond the Law, août 1996, p. 56 (joint aux éléments de preuve supplémentaires présentés par les plaignants le 31 octobre 1996 mais non inclus dans l'annexe I au présent rapport), et déclarations de témoin(s).

297.  Extrait de: Burma Code, 1943, vol. 1, p.18.

298.  Extrait de: Nations Unies, Annuaire des droits de l'homme pour 1947, p. 53.

299.  Ibid.

300.  Cité d'après Human Rights Watch/Asia, doc. 154, p. 4918. Selon cet organisme, «c'est à titre de prévention d'une immigration continue d'Indiens en Birmanie que tous les habitants de la Birmanie étaient tenus de demander leur enregistrement dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la loi de 1948 et se sont vu délivrer des cartes d'identité. De nombreux Rohingyas se sont faits enregistrer et ont reçu une carte d'identité qui leur a permis de voter pendant la période démocratique comprise entre 1950 et 1962. Les Rohingyas font valoir qu'après le coup d'Etat militaire en 1962 il est devenu de plus en plus difficile pour des enfants de citoyens reconnus de recevoir la citoyenneté. La loi demandait aux parents d'enregistrer leurs enfants lorsque ceux-ci atteignaient l'âge de dix ans, de sorte que, dans de nombreuses familles, ceux qui sont nés avant 1952 ont une carte tandis que leurs cadets se sont vu simplement opposer une fin de non-recevoir. En 1974, une nouvelle Constitution a été adoptée pour consacrer l'Etat unipartite existant de fait depuis 1962. Ceux des Rohingyas qui n'étaient pas considérés comme citoyens en vertu de la loi de 1948 et ne pouvaient justifier de la résidence de leurs familles en Birmanie pendant deux générations avant cette date n'ont eu d'autre solution que de demander une attestation d'enregistrement en qualité d'étrangers (FRC). A nouveau, de nouvelles cartes d'identité ont été délivrées et, à nouveau, selon les déclarations de Rohingyas qui ont été entendus, lorsqu'ils ont remis leur carte pour renouvellement, celle-ci ne leur a jamais été restituée. Lorsque 200 000 Rohingyas se sont enfuis au Bangladesh en 1976, le gouvernement birman a déclaré qu'ils étaient tous des immigrants illégaux qui se sont enfuis lorsqu'ils se sont trouvés dans l'impossibilité de produire leurs documents d'identité à l'occasion de contrôles d'immigration de routine. Peu après le retour forcé des derniers réfugiés en Birmanie, en 1980, le gouvernement a élaboré une nouvelle loi sur la citoyenneté, qui a été promulguée en 1982. Aussi bien la teneur de cette loi de 1982 que le moment où elle a été adoptée révèlent que cet instrument visait délibérément les Rohingyas, tout en établissant une discrimination aussi à l'égard d'autres immigrants asiatiques entrés dans le pays pendant la période coloniale britannique, et qui comprennent d'autres personnes originaires du Sud asiatique ainsi que des Chinois ethniques. Au total, la population d'immigrants est estimée à environ un million de personnes» (à cet égard, Human Rights Watch/Asia se réfère également à: Martin Smith: Ethnics groups of Burma, Anti-Slavery International, doc. 153, pp. 4728 et suiv.).

301.  Blaustein et Flanz (éditeurs): Constitutions of the World, New York, 1990, Union du Myanmar, p. 8; voir également Human Rights Watch/Asia, doc. 154, p. 4919. Selon ce dernier organisme, la loi définit le citoyen par naturalisation comme étant celui dont l'un des parents a été citoyen de plein droit et l'autre citoyen par association (ou qui a été admis à la nationalité en vertu de la loi de 1948). Mais un citoyen par naturalisation doit également «bien parler l'une des langues nationales», «avoir eu un bon naturel» et «être sain d'esprit». Seuls les citoyens à part entière et les citoyens par naturalisation sont admis à «jouir des droits de citoyen prévus par la loi, à l'exception, de temps en temps, des droits stipulés par l'Etat».

302.  Human Rights Watch/Asia, ibid.

303.  Voir déclaration des témoins nos 53, 54, 61, 76, 86 et 88.

304.  Traduction non officielle de la commission d'enquête, établie à partir du texte birman à sa disposition. L'intitulé de la loi se réfère à ceux qui sont employés dans la milice et non à la milice elle-même, et se traduit donc littéralement par: «loi sur les membres de la milice».

305.  Selon un rapport de 1964 du Département d'Etat des Etats-Unis au travail concernant la législation et la pratique dans l'Union birmane (BLD Report No. 264), «les médecins sont désormais soumis à la conscription dès qu'ils sont diplômés de la faculté de médecine et doivent servir pour une période indéfinie, en fonction des besoins de l'armée». La loi sur la milice populaire, telle qu'adoptée en 1959, ne prévoit pas que les médecins servent pour une période indéfinie, mais seulement dans les limites indiquées ci-dessus.

306.  C'est-à-dire, pour du travail incompatible avec l'art. 2, paragr. 2 a), de la convention.

307.  Selon le rapport de 1964 du département d'Etat des Etats-Unis au Travail, op. cit., note 305, la loi n'était alors pas encore entrée en vigueur. Voir également les indications plus récentes données au paragr. 389.

308.  Extrait de Burma Code, 1944, vol. IV, p. 93.

309.  Les références du registre officiel des conclusions donnent la source de l'information ainsi que le numéro du document et le numéro de la page du registre officiel, séparés par un tiret. Les références au registre des audiences qui ont eu lieu lors de la seconde session de la commission indiquent le nom du témoin ainsi que la séance et la page par des chiffres romains et arabes, respectivement. Les références au témoignage des témoins interrogés par la commission au cours de sa visite dans la région indiquent le numéro du témoin; les résumés de ces témoignages figurent à l'annexeVI du présent rapport.

310.  Voir chap. 3, paragr. 28-54.

311.  Voir chap. 4, paragr. 55-76.

312.  Voir chap. 5, paragr. 77-98.

313.  Trois registres ont été établis: le premier répertorie les documents reçus à la suite de la première session de la commission; le second se réfère aux documents qui ont été soumis par des témoins lors des audiences qui ont eu lieu à Genève en novembre 1997 et le troisième donne la liste des documents communiqués à la commission pendant sa visite dans la région.

314.  A cet égard, voir Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited, deuxième phase, C.I.J., Recueil 1970, paragr. 58, opinion individuelle de Sir Gerald Fitzmaurice. L'opinion de Sir Fitzmaurice a été citée avec approbation dans l'affaire relative à l'application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Yougoslavie (Serbie et Monténégro)), ordonnance du 13 septembre 1993, C.I.J., Recueil 1993, page 357, opinion individuelle du juge Shahabuddeen.

315.  Affaire relative à l'application de la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Yougoslavie (Serbie et Monténégro)), ibid. Le juge Shahabuddeen s'est également référé à l'affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d'Amérique), C.I.J., Recueil 1986, paragr. 59.

316.  Voir paragr. 300-350 ci-dessous.

317.  Karen Human Rights Group, 001-0189 à 0190, 001-0489 à 0490, Lin, VII/30; voir paragr. 351-373 ci-dessous.

318.  Voir paragr. 374-388 ci-dessous.

319.  Voir paragr. 389-393 ci-dessous.

320.  Voir paragr. 394-407 ci-dessous.

321.  Voir paragr. 408-443 ci-dessous.

322.  Voir paragr. 444-457 ci-dessous.

323.  Voir paragr. 458-461 ci-dessous.

324.  Guest, II/24; Liddell, V/34; Lin, VII/47; Heppner, XII/62.

325.  Human Rights Watch/Asia, 001-0050.

326.  Par exemple, 364 224 personnes auraient fourni du travail pour la construction de la voie ferrée Nahtogyi-Mingyan dans la division de Mandalay; 799 447 personnes pour la voie ferrée Aungban-Loikaw dans les Etats Shan et Kayah; plus de 4 000 personnes en un seul jour pour la voie ferrée Ye à Dawei (Tavoy) dans l'Etat Mon et dans la division de Tanintharyi; plus de 85 000 personnes pour la route allant de Yenangyaung à Namauk; et 2,3 millions de personnes pour le curage de douves et la construction d'une ceinture routière à Mandalay. Voir document H14 pour la copie de certains de ces rapports du New Light of Myanmar et de son prédécesseur le Working People's Daily. Selon une estimation fournie à la commission et établie à partir de chiffres publiés par ces journaux, ce sont plus de 4 millions de personnes qui ont été contraintes de travailler sur des projets d'infrastructure au cours de la période 1992-1995. Voir Steele, VIII/5. En outre, l'ambassade des Etats-Unis à Yangon a estimé la quantité de travail forcé utilisé sur les projets de développement local calculée sur la base de la valeur des «contributions populaires» (non rémunérée) figurant dans les données économiques publiées par le gouvernement du Myanmar. La valeur de ces contributions a atteint son maximum au cours de l'exercice financier 1995-96, date à laquelle elles étaient évaluées à 186,9 millions de kyats, ce qui, au prix officiel de la journée de travail établi par le gouvernement à vingt kyats par jour, équivaut à plus de 9,3 millions de journées de travail. Voir ambassade des Etats-Unis à Rangoon, 101-3905 et suiv., H13-6009 à 12; Steele, VIII/5-7 pour d'autres éléments de la discussion.

327.  Min Lwin, VI/14; Ka Hsaw Wa, X/9.

328.  Mirante, I/48, 59; Heppner, XII/25-28; Heppner, XIII/6.

329.  Copies de ces ordonnances figurent, entre autres, dans les documents 001, 015 à 020, 022 à 028, 130, H6, H21, H25 et M50.

330.  Voir les ordres 5, 7, 8 et 4 reproduits à l'annexe XI.

331.  Voir l'ordre 2 reproduit à l'annexe XI.

332.  Voir par exemple l'ordre 3 reproduit à l'annexe XI; voir également Heppner, XII/35-39.

333.  Ka Hsaw Wa, X/9, 43 à 44; Heppner, XII/38 à 39; pour un exemple d'ordre auquel étaient jointes des cartouches, voir ordre 4 reproduit à l'annexe XI.

334.  Pour le texte d'un ordre demandant de fournir cette information, voir ordre 1 reproduit à l'annexe XI.

335.  Karen Human Rights Group, 032-2428 à 2429; UNHCR, 033-2435; Lin, VII/23-25; Heppner, XII/11-14, 49-51.

336.  Karen Human Rights Group, 016-2147 à 2148 et 031-2393; Wa Wa, III/7-8; Min Lwin, V/6; Heppner, XII/31-35.

337.  Pour des exemples de populations déplacées, utilisées pour le portage, voir Karen Human Rights Group, 001-0307, 001-0481 à 0482; voir également Guest, II/9-10.

338.  Karen Human Rights Group, 001-0028 à 30, 032-2429; Human Rights/Asia, 065-2965; Mirante, I/47-48; Guest, II/9-10, 20-21; Heppner, XII/46-49, 54.

339.  Human Rights Watch/Asia, 154-5406.

340.  Karen Human Rights Group, 001-0027 à 0028.

341.  Voir, à titre d'exemple, Karen Human Rights Group, 016-2148; Heppner, XII/17.

342.  Karen Human Rights Group, 032-2427 à 2428; Liddell, V/10; Heppner, XII/49-51.

343.  Guest II/6; Lin VII/30-31; Heppner XIII/20-21.

344.  Human Rights Watch/Asia a relevé, par exemple, un nombre particulièrement disproportionné de musulmans parmi les porteurs déserteurs qu'ils avaient questionnés. Voir Human Rights Watch/Asia, 001-0054.

345.  Lin, VII/31-32; Heppner, XIII/21.

346.  Karen Human Rights Group, 032-2430; Guest II/7-9; Heppner, XII/63-64.

347.  Karen Human Rights Group, 001-0028, 032-2430; Human Rights Watch/Asia, 001-0051 à 0052; Guest, II/7-9, 14-16; Min Lwin III/21; Liddell, V/29-30; Lin, VII/27-28; Heppner, XII/10-11, 49-51.

348.  Australian Council for Overseas Aid, 001-0266; Human Rights Watch/Asia, 001-0050 à 0051, H07-5805 à 5806; Liddell, V/20-22.


Mise à jour par VC. Approuvée par NdW. Dernière modification: 21 février 2000.