Coopération contre la traite des êtres humains

De nouveaux moyens pour protéger les filles et les femmes contre «l'esclavage moderne»

L'OIT et le ministère du Développement international du Royaume-Uni (DFID) sont partenaires pour lutter contre la traite des filles et des femmes dans le cadre d’un nouveau grand projet en Asie du Sud et au Moyen-Orient.

Communiqué de presse | 15 juillet 2013
GENEVE – Un nouveau projet d'envergure pour contribuer à éviter que 100 000 filles et femmes dans toute l'Asie du Sud ne soient victimes des pires formes de trafic d’êtres humains a été inauguré aujourd'hui par le ministère britannique du Développement international et l'Organisation internationale du Travail (OIT).

Le gouvernement britannique investit 9,75 millions de livres sterling en cinq années dans l'initiative «Work in Freedom» (Travailler en liberté) pour contribuer à s'attaquer aux filières connues du trafic de main-d'œuvre entre l'Asie du Sud, du Bangladesh et du Népal par exemple, et le Moyen-Orient, notamment en Jordanie, aux Emirats arabes unis et au Liban. Environ 21 millions de personnes sont victimes de traite et de travail forcé dans le monde; elles viennent en majorité d'Asie, les filles et les femmes étant les plus touchées.

Chaque année, des millions de femmes et d'hommes de communautés pauvres émigrent pour trouver du travail et envoyer de l'argent chez eux afin de subvenir aux besoins de leurs familles. Ils trouvent des emplois de domestiques logés au domicile de leur employeur pour faire la cuisine, le ménage et s'occuper de la famille, ou dans des usines de confection. Mais beaucoup sont finalement victimes de tromperie, attirés dans des emplois extrêmement mal rémunérés voire ne touchent aucun salaire; leur liberté de mouvement est entravée; leurs conditions de vie et de travail sont très médiocres et ils souffrent souvent d'abus physiques et sexuels.

Le programme va toucher des dizaines de milliers de filles et de femmes et a pour objectif de:
  • Fournir à 50 000 femmes des compétences et une formation avant le départ, ou toute autre forme de soutien, pour les aider à éviter la traite et s'assurer qu'elles disposeront d’un contrat légal et d’un salaire décent;
  • Aider 30 000 femmes à acquérir une plus grande autonomie économique afin qu’elles puissent subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles. Cela se fera en aidant les femmes à comprendre quels sont leurs droits, à s’organiser sur le plan collectif et en leur donnant une formation professionnelle qui leur permette d’accéder à des emplois décent dans les pays de destination;
  • Aider des milliers d’autres femmes immigrées à éviter de payer des frais de recrutement illégaux et exorbitants en démantelant les pratiques de recrutement sans scrupules et en encourageant les agences de recrutement à souscrire à des principes et des pratiques éthiques.
  • Et prévenir le travail des enfants en aidant des milliers de jeunes filles de moins de 16 ans à rester scolarisées afin de ne pas être contraintes d’émigrer pour travailler.

La ministre du Développement international, Lynne Featherstone, a déclaré:

«Les revenus que gagnent les travailleurs migrants à l’étranger et qu’ils renvoient chez eux constituent une source vitale de soutien pour les familles dans les pays en développement; ils représentent plusieurs milliards de livres et bien plus que la totalité de l’aide au développement. Mais il est effroyable de constater qu’aujourd’hui – des centaines d’années après l’abolition du commerce de la traite – les femmes sont encore victimes de trafic et d’exploitation de main-d’œuvre par millions.

«Les femmes qui veulent partir travailler à l’étranger afin de se hisser elles et leurs familles au-dessus du seuil de pauvreté devraient pouvoir le faire en toute sûreté et sécurité. L’initiative Work in Freedom va aider plus de 100 000 femmes et jeunes filles en Asie du Sud, un haut lieu de la traite, grâce à un appui concret et à des conseils leur permettant de gagner leur vie et d’éviter les dangers de la traite».

Le Directeur général de l’OIT, Guy Ryder, a déclaré:

«La mobilité du travail est une réalité de notre économie mondialisée mais elle s’accompagne d’un risque accru de trafic de main-d’œuvre, en particulier pour les plus pauvres et les plus vulnérables.

«Nous estimons à plus de 12 milliards de dollars les revenus annuels qui sont confisqués à ceux qui sont enrôlés dans le travail forcé en Asie et au Moyen-Orient. Cet argent devrait permettre aux familles de sortir de la misère.

«Ce partenariat qui fera date avec le gouvernement britannique est une étape cruciale pour faire des migrations de main-d’œuvre un moyen sûr et légitime d’améliorer ses moyens de subsistance».

Le Centre pour la santé et contre les violences sexistes de l’Ecole d’hygiène et de médecine tropicale de Londres assurera le suivi et l’évaluation du projet. Le Professeur Peter Piot, directeur de l’Ecole d’hygiène et de médecine tropicale, a déclaré:

«Compte tenu des innombrables femmes et filles qui se mettent en péril pour venir en aide à leurs familles, il est extrêmement urgent de chercher à établir des solutions fiables pour prévenir la traite humaine et mettre fin à l’extrême exploitation.

«Le DFID reconnaît que, à ce jour, le domaine de la traite a peu fait l’objet de recherche. Nous sommes heureux de mener cette recherche et de nous appuyer sur notre expertise pour construire une base de données solidement étayées sur les moyens efficaces pour aider les travailleuses à améliorer leurs conditions de vie et leurs revenus.»

Le ministère du Développement international, l’OIT et l’Ecole d’hygiène et de médecine tropicale de Londres accueillent à partir d’aujourd’hui une conférence de deux jours qui rassemble des gouvernements, des institutions internationales et régionales, le secteur privé, des syndicats et des ONG en vue de créer un réseau d’organisations pour combattre la traite des êtres humains.


Notes aux rédacteurs
  • En 2010, les devises rapatriées dans les pays en développement par les travailleurs migrants étaient estimées à 242 milliards de livres, soit trois fois plus que le budget mondial de l’aide au développement.
  • La traite d’êtres humains est considérée par l’ONU comme la troisième plus importante activité criminelle dans le monde, derrière la drogue et le trafic d’armes. Jusqu’à présent, l’essentiel des efforts internationaux en matière de traite a été consacré à l’exploitation sexuelle alors que le trafic de main-d’œuvre est plus courant.