Conditions de travail

La dynamique en faveur de la législation sur les travailleurs domestiques s’accélère

Au Brésil, une nouvelle loi garantissant l’égalité des droits pour les travailleurs domestiques entre en vigueur le 2 avril. Plusieurs pays ont d’ores et déjà adopté une législation protégeant les travailleurs domestiques – signe que la dynamique enclenchée par la convention de l’OIT sur les travailleurs domestiques gagne du terrain.

Actualité | 2 avril 2013
GENEVE (OIT Info) – Les six millions et demi de travailleurs domestiques que compte le Brésil sont dorénavant couverts par une nouvelle loi qui leur accorde les mêmes droits qu’aux autres travailleurs.

La loi, qui amende la Constitution, a été adoptée à l’unanimité par le Sénat brésilien fin mars. Les nouvelles dispositions garantissent désormais 16 droits aux travailleurs domestiques, dont le paiement des heures supplémentaires, avec un plafond de 8 heures de travail quotidien et 44 heures hebdomadaires.

Ces dispositions entrent en vigueur à partir du 2 avril et seront complétées par un système de contribution qui oblige les employeurs à verser 8 pour cent de la rémunération mensuelle de leur domestique à un fonds qui sera mis à disposition de ces derniers en cas de licenciement économique, de décès ou autres aléas.

Les syndicats de travailleurs domestiques au Brésil ont fait pression pour ces réformes législatives depuis de nombreuses années.
Il s’agit de la dernière d’une série de modifications législatives entreprises par plusieurs pays après l’adoption en juin 2011 de la convention n° 189 et de la recommandation n° 201 de l’OIT sur le travail domestique.

Lutter contre les abus
Les travailleurs domestiques sont souvent exploités et peuvent être victime d’abus et de violences. La convention vise à éliminer de tels abus et à garantir des conditions de travail et de rémunération décentes pour les travailleurs domestiques du monde entier.

Manuela Tomei, Directrice du programme des Conditions de travail et d’égalité de l'OIT, s’est félicitée du vote du Sénat brésilien qui s’est prononcé à l’unanimité fin mars, après l’approbation du texte par la Chambre basse.

«L’adoption de cette loi fait date dans le processus par lequel le Brésil a reconnu la dignité et la valeur du travail et des travailleurs domestiques – qui sont le plus souvent des femmes de couleur; un processus qui a débuté en 1998 quand, pour la première fois, la Constitution a intégré plusieurs garanties sociales essentielles pour ces travailleurs. La décision du Sénat actuel est une nouvelle étape vers le comblement du fossé historique qui sépare la couche la plus riche et la plus ‘blanche’ de la population de la catégorie la plus pauvre et la plus ‘sombre’ au bas de l’échelle», précise Mme Tomei.

Cela prend une importance particulière compte tenu de la hausse massive du nombre de travailleurs domestiques au Brésil au cours des dernières années – passé de 5,1 millions à 6,6 millions entre1995 et 2011. Le travail domestique y représente 17 pour cent de l’emploi des femmes. Et l’Amérique latine est l’une des régions qui connaît la plus forte croissance du secteur du travail domestique.

Faits et chiffres sur les travailleurs domestiques
Dans le monde Par région
  • 52,6 millions dans le monde
  • 83 pour cent sont des femmes
  • 29,9 pour cent sont exclus de la législation nationale du travail
  • 45 pour cent n’ont droit à aucun repos hebdomadaire ni congé annuel payé
  • Plus d’un tiers des travailleuses domestiques n’ont aucune protection de la maternité
  • Asie et Pacifique: 21,4 millions;
  • Amérique latine et Caraïbes: 19,6 millions
  • Afrique: 5,2 millions
  • Pays développés: 3,6 millions 
  • Moyen-Orient: 2,1 millions



Une dynamique mondiale
L’Argentine a elle aussi adopté une loi en mars qui limite la durée du travail et garantit aux travailleurs domestiques un congé payé annuel et un congé de maternité. Le Parlement indien a inclus les travailleurs domestiques dans la législation contre le harcèlement sexuel au travail, qui a été adoptée février dernier.

Au total, ce sont neuf pays qui ont voté de nouvelles lois, notamment le Venezuela, Bahreïn, les Philippines, la Thaïlande, l’Espagne et Singapour. Des processus législatifs ont aussi été amorcés en Namibie, au Chili, aux Etats-Unis et en Finlande, entre autres.

Jusqu’à présent, quatre pays ont ratifié la convention n° 189 de l’OIT – l’Uruguay, les Philippines, Maurice et l’Italie. D’autres ont entamé le processus de ratification, y compris l’Afrique du Sud, le Costa Rica, et l’Allemagne.

La Commission européenne invite aussi les autres pays de l’UE à mettre en œuvre la convention de l’OIT et appelle à prendre des mesures de protection des jeunes travailleurs domestiques.

Selon une étude Les travailleurs domestiques dans le monde, publiée par l’OIT en janvier 2013, au moins 52 millions de personnes dans le monde – essentiellement des femmes – sont employées comme travailleurs domestiques. Au moment de la recherche, seuls 10 pour cent d’entre elles étaient couvertes par la législation générale du travail au même titre que les autres travailleurs. Plus du quart était complètement exclu de la législation nationale du travail.

Juriste spécialiste des conditions de travail à l’OIT, Martin Oelz décèle des signes encourageants: «La convention et la recommandation sur les travailleurs domestiques ont effectivement commencé à jouer leur rôle en tant que catalyseurs du changement. En donnant au dialogue social une place centrale, ces normes internationales servent désormais de base minimum pour l'élaboration de nouvelles politiques dans un nombre croissant de pays.»

Convention 189
Les travailleurs domestiques qui prennent soin des familles et des foyers doivent jouir des mêmes droits fondamentaux au travail que les autres travailleurs. Parmi ces droits figurent:
  • Une durée du travail raisonnable
  • Un repos hebdomadaire d’au moins 24 heures consécutives
  • Une limitation des paiements en nature
  • Une information claire sur les termes et conditions d’embauche
  • Le respect des principes et droits fondamentaux au travail, notamment de la liberté syndicale et du droit de négociation collective.