Plan russe de relance de la création d’emplois: les défis à relever

La Russie a récemment annoncé un plan ambitieux pour créer 25 millions d’emplois à haute productivité d’ici à 2020. Olga Koulaeva, spécialiste de l’emploi au Bureau de l’OIT à Moscou, analyse les enjeux du marché du travail russe.

Actualité | 21 mai 2012

1. Quelles sont les tendances actuelles du marché du travail russe?


Il est clair que la Russie sort de la crise, en termes de croissance du PIB et de situation du marché du travail.

Le nombre total des chômeurs a atteint son niveau maximum de 7,1 millions en février 2009 quand le taux de chômage avait grimpé à 9,4 pour cent. Fin mars 2012, il est retombé à 6,5 pour cent – retrouvant ainsi le niveau qu’il avait avant la crise.

2. Quelles difficultés les demandeurs d’emploi russes rencontrent-ils aujourd’hui?


Il existe des régions de la Fédération de Russie où le taux de chômage est beaucoup plus élevé que la moyenne. C’est particulièrement le cas dans le Nord Caucase où le chômage se situait à 14,9 pour cent en avril 2012 et dans la République de Tchétchénie où le taux de chômage officiel a atteint 32,32 pour cent. La proportion de jeunes étant forte dans ces régions, la crise de l’emploi des jeunes est l’un des principaux enjeux. L’OIT a donc été sollicitée pour fournir un appui technique.

Un autre problème est la pénurie de qualifications dans certains secteurs et professions clés qui peut constituer un obstacle à la modernisation de l’économie et limiter ses capacités d’innovation. De même, il existe toujours un net décalage entre la demande de compétences sur le marché du travail et l’offre du système éducatif. La situation pourrait s’améliorer en adaptant l’enseignement et la formation techniques et professionnels aux besoins réels des entreprises.

Nous devrions aussi mentionner la croissance de l’emploi informel. Selon les estimations, sa part s’est accrue, passant de 20 à 25 pour cent entre 2000 et 2010. Cela vient du fait que dans de nombreuses régions du pays il est difficile de trouver un emploi convenable dans le secteur formel.

3. Quelles sont les perspectives de création d’emplois en Russie?


Ce thème figure actuellement en bonne place sur l’agenda politique de la Russie. Le 7 mai 2012, le Président Vladimir Poutine a signé un décret sur «La politique économique d’Etat sur le long terme». Il prévoit, entre autres, une hausse des investissements à 25 pour cent du PIB en 2017 et à 27 pour cent en 2018. Il fixe aussi pour objectif d’augmenter la productivité du travail d’une fois et demie entre 2011 et 2018. Déjà en juin 2011, dans son allocution à la 100e session de la Conférence internationale du Travail à Genève, M. Poutine avait fait référence à l’ambitieux objectif de créer «au moins 25 millions d’emplois modernes et bien rémunérés» dans l’économie russe.
En créant des conditions de travail qui correspondent aux besoins et aux exigences du travailleur moderne, nous agissons en conformité avec l'Agenda de l'OIT pour le travail décent. "
V. Poutine


«C’est un défi, mais nous pouvons le relever. Je fais référence à la création de nouveaux emplois et à la restauration des anciens», avait déclaré celui qui était alors Premier ministre de la Fédération de Russie.

4. Quel a été le rôle de l’Etat dans la promotion de l’emploi?


Le gouvernement russe a été très actif dans ce domaine. Des politiques dynamiques en faveur du marché du travail sont actuellement mises en œuvre partout dans le pays. Le portefeuille des programmes et des services comprend le soutien aux demandeurs d’emploi et aux employeurs, des informations concernant la situation sur les marchés régionaux du travail, des salons de l’emploi, l’orientation professionnelle, ainsi que la formation, la reconversion et le renforcement des compétences des chômeurs.

Pendant la crise, de nouvelles mesures ont été adoptées. Elles concernaient la promotion des programmes de travaux publics, la création d’emplois temporaires pour les jeunes, le soutien à l’auto-emploi et l’aide à la mobilité du travail dans les zones rurales.

Il faut encore souligner que les politiques du marché du travail sont appliquées en concertation avec les partenaires sociaux. Le dialogue social est essentiel pour le succès de toute réforme en matière sociale et de travail, en particulier dans cette période difficile d’après-crise que la Russie travers actuellement.