Gérer les connaissances ou comment améliorer le bénéfice de la micro-assurance pour les ménages à faibles revenus

En 2010, le Fonds pour l’innovation en micro-assurance du BIT a mis en place un cadre de gestion des connaissances, adoptant une nouvelle approche pour ses stratégies de recherche et de communication en vue d’améliorer la formalisation, l’analyse et le partage des enseignements tirés de ses activités. BIT en ligne s’est entretenu avec Craig Churchill, Chef de l’équipe du Fonds pour l’innovation en micro-assurance sur les bienfaits de cette nouvelle approche.

Article | 1 novembre 2011

Pourquoi vous êtes-vous lancés dans la gestion des connaissances ?

Craig Churchill: La mission du Fonds a toujours concerné l’apprentissage. Alors que nous achevons nos cinq cycles de subventions à l’innovation, il nous fallait maximiser le potentiel des informations que nos 55 bénéficiaires avaient amassées en réalisant leurs projets.

L’objectif du cadre de GC est d’apprendre comment l’assurance peut le mieux bénéficier aux ménages à faibles revenus, et d’utiliser ces connaissances pour participer à l’élaboration de produits d’assurance adaptés aux besoins des personnes les plus démunies, de modèles économiques et d’éducation efficaces. Concrètement, il nous fallait un modèle associant des mécanismes et des outils appropriés pour formaliser et diffuser les enseignements venus du terrain. La stratégie de GC va nous aider à dépasser la simple mise en œuvre des projets de micro-assurance que nous finançons pour dupliquer les réussites et apprendre des échecs de la communauté de la micro-assurance au sens large.

Concrètement, comment extrayez-vous l’information pour la présenter sous forme de connaissance?

Craig Churchill: Le Fonds s’appuie essentiellement sur son programme de subventions à l’innovation pour générer des enseignements utiles. Chaque bénéficiaire tient à jour un carnet d’apprentissage s’efforçant de résoudre les problèmes qui sont au cœur de l’organisation. La formalisation des connaissances résulte de la mise en œuvre d’une série de processus et d’outils permettant de relater et d’extraire des informations. L’un des principaux outils est le journal d’apprentissage, un outil simple, de réflexion, utilisé pour transcrire les enseignements tirés au fur et à mesure du franchissement des étapes du projet.

Les activités de formalisation des connaissances sont soutenues par la composante KCapture du portail de gestion des connaissances du Fonds sur lequel les bénéficiaires peuvent poster des informations, les enrichir et les partager. Cette composante KCapture, qui est encore en version préliminaire et accessible à nos seuls partenaires pour des raisons de confidentialité, permet au Fonds de centraliser l’information en un seul lieu, ce qui facilite non seulement les comptes rendus des bénéficiaires mais nous permet d’organiser, de consolider et d’analyser les enseignements et les tendances qui émergent de manière plus efficace.

Que faites-vous des enseignements que vous collectez?

Craig Churchill: Nous avons créé sur notre site web (www.ilo.org/microinsurance) un Centre de ressources qui est une plateforme globale de partage d’informations sur la micro-assurance: il permet aux utilisateurs non seulement de tirer parti de ce que font les autres mais aussi de partager leur propre expérience et d’entrer en contact avec d’autres praticiens. De plus, le Fonds utilise toute une série d’outils pour présenter ces connaissances. Les enseignements propres aux bénéficiaires sont partagés grâce à la mise en ligne de leur parcours d’apprentissage, un compte-rendu chronologique et narratif de tous les enseignements tirés pendant la mise en œuvre de leur projet, intégrant les difficultés comme les succès rencontrés. Les enseignements de nature thématique sont mis en commun sur les pages thématiques en ligne et dans des publications telles que les documents ou les notes d’information sur la micro-assurance.

Des bulletins d’information de la collection «Emerging insights» sont également envoyés par courriel aux acteurs de la micro-assurance; ils fournissent des enseignements succincts sur un large éventail de thèmes comme l’utilisation de coupons à gratter ou pourquoi il vaut mieux cibler les migrants plutôt que leurs familles. Tous ces outils sont accessibles via le Centre de ressources du Fonds. D’autres outils, plus participatifs, sont également utilisés: des séminaires virtuels (présentations et conférences en ligne) sur les principaux enjeux de la micro-assurance, des vidéos sur des enseignements spécifiques disponibles sur YouTube, des forums de discussion pour échanger en ligne, et autres médias sociaux. Les conférences et les ateliers, de même que les activités de renforcement des capacités, sont autant d’occasions saisies pour faire connaître les nouvelles expériences des bénéficiaires et des partenaires.

Quel but poursuivez-vous en rassemblant et en diffusant ces enseignements?

Craig Churchill: Générer des enseignements revient à accomplir la moitié du chemin. Nous devons également veiller à promouvoir énergiquement les expériences émergentes de ce qu’il convient de faire et de ne pas faire. Si nous voulons influer sur les praticiens de la micro-assurance, il ne suffit pas de publier un livre ni de mettre en ligne des informations sur un site internet. Ces méthodes passives de diffusion du savoir doivent s’accompagner de mesures pour encourager explicitement l’adoption de bonnes pratiques. Nous pourrons sans doute faire davantage évoluer les mentalités et les comportements grâce à des outils de diffusion interactifs. Les activités de renforcement des capacités menées par le Fonds constituent dès lors une stratégique de diffusion essentielle en vue d’influer sur les pratiques des prestataires de micro-assurance au sens large.

D’un côté, nous avons besoin d’un plus grand vivier de spécialistes qui comprennent ces enseignements et s’impliquent professionnellement dans la diffusion des conclusions tirées des bonnes et des mauvaises pratiques. Ils agiront comme des promoteurs des enseignements. Mais nous nous occupons aussi de créer des programmes pour les centres de formation en micro-assurance, d’organiser des formations avec les écoles de commerce (comme le Gordon Institute of Business en Afrique du Sud) et d’utiliser la méthodologie de l’école de commerce d’Harvard dans les ateliers pour partager avec les praticiens une partie des connaissances qui leur permette de réfléchir sur la viabilité de leur activité et d’améliorer la valeur pour leurs clients. Evaluer l’impact des connaissances que nous produisons n’est pas chose facile. Le problème n’est pas tellement d’imaginer combien de personnes les ont utilisées mais – et c’est plus important – la façon dont elles les utilisent afin qu’un plus grand nombre de personnes à faibles revenus puissent bénéficier de mécanismes de protection de qualité.