Le Forum global sur l'emploi de l'OIT confronté à un marché de l'emploi déprimé
GENÈVE (Nouvelles du BIT) - L'état du marché mondial de l'emploi, ébranlé par les conséquences des attaques terroristes du 11 septembre dernier sur les Etats-Unis, constituera le thème principal des discussions du Forum global sur l'emploi qui se déroulera du 1 er au 3 novembre 2001 au Bureau international du Travail (BIT) à Genève.
GENÈVE (Nouvelles du BIT) - L'état du marché mondial de l'emploi, ébranlé par les conséquences des attaques terroristes du 11 septembre dernier sur les Etats-Unis, constituera le thème principal des discussions du Forum global sur l'emploi qui se déroulera du 1 er au 3 novembre 2001 au Bureau international du Travail (BIT) à Genève.
Initié par l'Organisation internationale du Travail (OIT), le Forum global sur l'emploi est le premier du genre. Un rapport * préparé pour la circonstance invite les Etats Membres «à parvenir, malgré le climat agité, à des résultats acceptables en termes d'emploi». Selon des estimations du BIT, 24 millions d'emplois risquent de disparaître d'ici la fin de l'année prochaine du fait du ralentissement de la croissance économique. Déjà perceptible avant le mois de septembre, cette baisse de régime restreint la capacité de création de nouveaux emplois.
Des orateurs de premier plan vont prendre la parole au cours de ce Forum, dont deux récents lauréats du Prix Nobel: Kofi Annan, Secrétaire général des Nations Unies (Paix) et Joseph Stiglitz (Economie). Interviendront également des directeurs d'agences des Nations Unies, des personnalités éminentes du monde des affaires et de la politique, des syndicalistes, des professeurs d'université et autres personnalités influentes.
Le Directeur général du BIT, Juan Somavia, fera naturellement partie des orateurs-clé. Ce dernier estime qu'il faut affronter la crise de l'emploi à bras-le-corps et d'ajouter que, même si de plus en plus de personnes à travers le monde se sentent menacées dans leur intégrité physique, «le plus grand danger pour la majorité des gens aujourd'hui reste celui du chômage et de la pauvreté».
Selon lui, le ralentissement économique actuel a révélé de façon flagrante à quel point nous avons besoin de «politiques qui reflètent de manière adéquate l'importance du travail dans la vie des gens et leur aspiration à ce que cet emploi soit décent, équitable, sécurisant et digne».
«Le passage à vide que traversent l'économie et le marché de l'emploi est à ce point sérieux qu'il doit provoquer un remaniement global des politiques en matière d'emploi, leurs buts ultimes étant d'alléger le fardeau de la pauvreté et d'assurer la croissance de l'économie», indique Juan Somavia.
Avec un tiers de la main-d'œuvre mondiale au chômage, sous-employée ou sous-payée, le Directeur général du BIT a qualifié ce sous-emploi généralisé de «perte de potentiel humain».
«Si les taux de croissance de l'économie et de la productivité restent jusqu'en 2010 comparables à ceux des années 90, le tableau de l'emploi apparaîtra alors clairement comme déprimant», prévient le rapport du BIT. «Les travailleurs pauvres et sous-payés seront encore plus nombreux sur une terre toujours plus peuplée. Au moins 160 millions de personnes sont totalement sans emploi, plus de 300 millions ont un emploi mais cherchent un travail complémentaire et plus d'un milliard de personnes vivent avec moins d'un dollar par jour».
Depuis les attaques sur New York et Washington, des pertes directes de centaines de milliers d'emplois ont été annoncées. Dans les seuls secteurs de l'aviation et du tourisme, certains experts estiment que les mises à pied pourraient bientôt se chiffrer à un million.
Les Etats-Unis, l'Union européenne et le Japon ont déjà revu à la baisse leurs prévisions de croissance. Selon le BIT, il est probable que ces pays seront confrontés à des revers économiques plus importants encore. «La réduction des dépenses d'investissement dans les entreprises majeures a atteint un seuil critique; les investissements étrangers directs devraient baisser; les pays en voie de développement auront plus de mal encore à écouler leurs produits dans les pays industrialisées. De ce fait, les négociations pour l'allégement ou la suppression de leurs dettes risquent de rencontrer de nouvelles complications».
Le rapport du BIT sera soumis aux 400 délégués du Forum: des représentants de haut niveau des gouvernements, des organisations internationales, du monde syndical, patronal et universitaire, mais aussi des organisations non gouvernementales. Il met en lumière ce «défaut mondial qui consiste à considérer la création d'emplois comme un produit résiduel d'autres objectifs économiques et non pas un but en soi».
Le rapport indique également que, malgré une économie assez forte dans les années 90, l'économie mondiale n'a créé que 40 millions de nouveaux emplois par an alors que 48 millions de personnes entraient chaque année sur le marché de l'emploi. Si l'on veut assurer des emplois plus productifs à ceux qui sont actuellement sous-payés, «l'économie mondiale devra absorber les 500 millions de personnes qui, dans la prochaine décennie, viendront grossir les rangs de la main-d'œuvre des pays en voie de développement».
Au cours du Forum global sur l'emploi, le BIT insistera sur l'énorme défi qui attend les dirigeants de ce monde: redresser la situation et faire preuve de la volonté politique nécessaire pour mettre en œuvre des politiques qui pallieront le manque d'emplois.
Le Forum vise à formuler des politiques pour:
- inscrire l'emploi au cœur des politiques sociales et économiques aux niveaux national et mondial;
- s'assurer que le travail des femmes soit reconnu et apprécié et que les femmes puissent contribuer pleinement au développement économique et social;
- galvaniser les énergies pour que partout dans le monde les emplois augmentent en quantité et en qualité;
- construire une plate-forme commune où pourront se nouer des alliances stratégiques entre les institutions de Bretton Woods et les autres agences des Nations Unies afin de garantir, pour les problèmes liés à l'emploi, une approche intégrée aux niveaux national et international.
En dépit de l'ampleur de ces défis, le BIT estime qu'il est «possible d'envisager un avenir favorable pour l'emploi en se basant sur quelques tendances à long terme de l'économie mondiale qui justifient un certain optimisme. Parmi ces signes encourageants, on peut énumérer les perspectives de croissance du commerce international, la révolution des technologies de l'information et de la communication qui ne concernent jusqu'à présent qu'un faible pourcentage de la main-d'œuvre mondiale et les gains substantiels de productivité dans l'industrie ces dernières années».
Dans sa tentative de repousser la crise à laquelle font face des millions de personnes en quête d'un travail décent, le BIT appelle à la création d'une cellule stratégique, dénommée «Alliance mondiale pour l'emploi», regroupant toutes les agences des Nations Unies, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. Cette Alliance devra s'assurer que les politiques nationales s'intègrent dans un plan d'ensemble international et cohérent.
* A Global Agenda for Employment: Discussion paper. Secteur de l'emploi. Bureau international du Travail, novembre 2001.