L'emploi lié à l'hôtellerie, à la restauration et au tourisme est en plein essor au niveau mondial, mais la mondialisation laisse nombre de PME hors course

GENÈVE (Nouvelles du BIT) - Alors que les secteurs de l'hôtellerie, de la restauration et du tourisme comptent pour environ 3 à 4 pour cent du PIB dans la plupart des économies mondiales et emploient près de 3 pour cent de la main-d'œuvre mondiale totale, les personnes qui y travaillent touchent des salaires qui sont, en moyenne, inférieurs d'au moins 20 pour cent à ceux des travailleurs des autres secteurs de l'économie. C'est ce qui ressort d'un rapport du Bureau international du Travail (BIT), préparé en vue d'une réunion tripartite d'experts du secteur qui s'ouvre aujourd'hui à Genève.

Communiqué de presse | 2 avril 2001

GENÈVE (Nouvelles du BIT) - Alors que les secteurs de l'hôtellerie, de la restauration et du tourisme comptent pour environ 3 à 4 pour cent du PIB dans la plupart des économies mondiales et emploient près de 3 pour cent de la main-d'œuvre mondiale totale, les personnes qui y travaillent touchent des salaires qui sont, en moyenne, inférieurs d'au moins 20 pour cent à ceux des travailleurs des autres secteurs de l'économie. C'est ce qui ressort d'un rapport * du Bureau international du Travail (BIT), préparé en vue d'une réunion tripartite d'experts du secteur qui s'ouvre aujourd'hui à Genève.

Si la technologie, la déréglementation et la mondialisation nourrissent des perspectives de croissance dans certaines branches haut de gamme du marché touristique, les perspectives pour les petites et moyennes entreprises (qui assurent la grande majorité des emplois nouveaux) sont de plus en plus incertaines.

La différence de salaire dont pâtit l'ensemble de la main-d'œuvre du secteur de l'hôtellerie, de la restauration et du tourisme est due à la forte proportion de travailleurs non qualifiés qui sont employés dans ce secteur où l'emploi à temps partiel ou faiblement rémunéré caractérise souvent les conditions de travail. Le rapport du BIT relève que la moitié des travailleurs du secteur ont moins de 25 ans et près de 70 pour cent sont des femmes.

Les travailleurs migrants constituent un autre groupe vulnérable ayant tendance à être sur-représenté dans le secteur. En raison de facteurs tels que la langue ou la mauvaise connaissance de la culture du pays d'accueil, on les retrouve dans les branches les moins stables et les moins bien payées du marché de l'emploi de ce secteur.

Souvent, de très jeunes enfants travaillent dans le secteur du tourisme, en particulier dans les petites entreprises de type familial, mais souvent tout seul en tant que vendeur ou assistant. «Le commerce sexuel constitue la pire forme de travail des enfants dans le secteur du tourisme», note le rapport. Bien que le problème soit très répandu, le rapport souligne l'indignation croissante de la communauté internationale face à cette exploitation et met l'accent sur la participation croissante des organisations internationales d'employeurs et de travailleurs ainsi que de l'Organisation mondiale du Tourisme dans la lutte contre la prostitution infantile liée au tourisme.

Parmi les autres problèmes affectant le travail dans l'industrie du tourisme, figurent l'importance du taux de rotation du personnel, l'irrégularité des horaires de travail, la faiblesse des taux de syndicalisation (moins de 10 pour cent), ainsi que l'intensité de la pression exercée sur les ressources humaines et environnementales à mesure que le tourisme devient un secteur de plus en plus compétitif et touche des destinations sans cesse plus éloignées et variées où les ressources institutionnelles s'avèrent faibles ou inappropriées.

On peut mesurer la véritable importance du tourisme pour l'économie et pour l'emploi lorsqu'on prend conscience que chaque emploi dans le secteur génère (indirectement) un emploi et demi supplémentaire dans des secteurs liés au tourisme et que, dans certaines régions, le tourisme fournit un emploi direct à 10 pour cent de la main-d'œuvre.

Si l'on tient compte à la fois des emplois directs et des emplois indirects, on estime que l'ensemble de l'économie liée au tourisme produit jusqu'à 11 pour cent du PIB et emploie 8 pour cent de la main-d'œuvre à travers le monde, selon le World Travel and Tourism Council.

Le rapport du BIT décrit un secteur en forte croissance - environ 3 pour cent par an - avec des disparités régionales marquées. Ces dernières années, les taux de croissance les plus élevés ont été enregistrés en Asie du Sud (9 pour cent), dans les Caraïbes (7 pour cent) et en Europe orientale (5 pour cent). Par comparaison, le secteur touristique progresse à un rythme d'environ 2 pour cent en Europe et de seulement 1,4 pour cent en Asie-Pacifique, suite à la crise financière asiatique.

On s'attend à ce que le tourisme transfrontalier, qui - selon le rapport du BIT - s'est développé plus rapidement que le tourisme pris dans son ensemble, connaisse un taux de croissance de 4,5 pour cent sur les 20 prochaines années. Au cours de l'année 2000, note le rapport, près de 700 millions de touristes ont franchi une frontière et dépensé plus de 500 milliards de dollars à l'étranger. La déréglementation du transport aérien et la chute des prix des billets d'avion qui en résulte est un facteur déterminant de la mondialisation du tourisme. Dans les pays en développement, observe le rapport, pas moins de 80 pour cent des touristes internationaux arrivent par avion.

La qualité des services touristiques évolue aussi rapidement, le voyage devenant partie intégrante du mode de vie des populations dans les pays les plus riches et des nantis dans les pays en développement, note le rapport du BIT.

Les voyages ont tendance à être plus courts mais plus fréquents. De nouveaux créneaux apparaissent tels le tourisme de nature, l'éco-tourisme et le tourisme d'aventure, qui se développent en réponse à une demande de la part des consommateurs et rapportent des bénéfices substantiels aux populations vivant dans des zones reculées où les revenus tirés de l'agriculture ont tendance à décliner. Selon le rapport du BIT, le développement des technologies de l'information permet aux professionnels du tourisme de satisfaire plus efficacement une clientèle plus diversifiée. Ces bénéfices ne sont toutefois pas également répartis.

Le rapport fait état de préoccupations s'agissant du taux relativement faible de participation des pays en développement aux systèmes de réservation et de distribution électronique gérés par les grosses compagnies aériennes, qui ne tiennent pas suffisamment compte des besoins des petites et moyennes entreprises (PME).

Alors que les grandes chaînes hôtelières améliorent sans cesse la portée et l'efficacité de leurs opérations grâce aux fusions, aux accords de franchise et au resserrement des liens entre compagnies aériennes, hôtels, agences de voyage et détaillants, les entreprises indépendantes ont tendance à être laissées sur le carreau, selon le rapport du BIT. Ceci est très ennuyeux car ce sont précisément les PME qui, dans ce secteur, emploient au moins la moitié de la main-d'œuvre et constituent l'essentiel des entreprises.

L'un des principaux sujets de discussion de la réunion tripartite de l'OIT devrait être celui des besoins de formation, qui sont énormes dans ce secteur et sont considérés comme étant de plus en plus indispensables pour le succès de son développement. L'industrie de l'hôtellerie et de la restauration est consciente du fait que les ressources humaines sont en train de devenir un bien précieux pour le secteur, reconnaît le rapport. Il n'en demeure pas moins que des efforts supplémentaires doivent être consentis afin de rendre les conditions de travail plus attractives pour tous les groupes d'âges, et non pas simplement pour les jeunes travailleurs; d'accroître la responsabilité du travailleur; et de faire de l'emploi dans ce secteur le prodigieux engagement de toute une vie.

Parmi les évolutions les plus positives, le rapport note une tendance à un meilleur investissement dans la formation du personnel, avec près de 1 pour cent du revenu total affecté à cet objectif; le renforcement de l'éducation au niveau du secondaire ainsi qu'en matière de gestion; ainsi que la prolifération, à travers le monde, de programmes d'enseignement supérieur liés au tourisme qui sont en passe d'être reconnus comme discipline universitaire.

Dans certains cas, les exigences en matière de formation sont particulièrement complexes, comme cela peut être le cas lorsqu'il s'agit d'exploiter des environnements culturels délicats dans les parcs naturels, ce qui exige une implication adéquate des populations locales pour garantir leur préservation. En dépit de son indéniable contribution au maintien de moyens de subsistance durables, le tourisme dans les zones agricoles est une autre branche qui mérite d'être réglementée afin de réduire ou d'éviter toute compétition injuste avec les professionnels de l'hébergement.

Selon le rapport, il convient de rendre la formation et les nouvelles technologies plus accessibles aux petites et moyennes entreprises et de promouvoir encore davantage le dialogue social dans le secteur de l'hôtellerie, de la restauration et du tourisme. Le rapport fait état des préoccupations exprimées par les syndicats face aux attitudes antisyndicales de certaines sociétés multinationales dans les pays où les syndicats sont traditionnellement forts et face aux conséquences néfastes qu'ont sur la représentation des travailleurs les contrats de sous-traitance, de franchise et de gérance qui divisent les grandes entreprises en petites unités trop faibles pour pouvoir constituer des partenaires efficaces du dialogue social.

* La mise en valeur des ressources humaines, l'emploi et la mondialisation dans le secteur de l'hôtellerie, de la restauration et du tourisme. Rapport soumis aux fins de discussion à la Réunion tripartite sur la mise en valeur des ressources humaines, l'emploi et la mondialisation dans le secteur de l'hôtellerie, de la restauration et du tourisme. Bureau international du Travail, Genève, 2001. ISBN 92-2-212353-0. Prix: 22,50 francs suisses.