La Conférence internationale du Travail adopte une résolution visant le travail forcé au Myanmar (Birmanie)

GENÈVE (Nouvelles du BIT) - Les délégués participant à la Conférence internationale du Travail ont voté aujourd'hui pour prendre des mesures visant à obliger le gouvernement du Myanmar (Birmanie) à appliquer la convention no 29 sur le travail forcé. La Birmanie a ratifié cette convention de l'Organisation internationale du Travail (OIT) en 1955.

Communiqué de presse | 14 juin 2000

GENÈVE (Nouvelles du BIT) - Les délégués participant à la Conférence internationale du Travail ont voté aujourd'hui pour prendre des mesures visant à obliger le gouvernement du Myanmar (Birmanie) à appliquer la convention no 29 sur le travail forcé. La Birmanie a ratifié cette convention de l'Organisation internationale du Travail (OIT) en 1955.

Dans une résolution sans précédent fondée sur l'article 33 de la Constitution de l'OIT, qui n'avait jamais encore été utilisé, la Conférence - par 257 voix pour, 41 contre et 31 abstentions - a demandé au Myanmar de prendre une «action concrète» pour mettre en œuvre les recommandations de la commission d'enquête de 1998 qui avait constaté que la pratique du travail forcé dans ce pays était «généralisée et systématique».

Dans une lettre au Directeur général du BIT, datée du 27 mai 2000 et remise aux membres de la mission de coopération technique dépêchée par le BIT au Myanmar, le ministre du Travail de ce pays, le Major-général Tin Ngwe, indiquait: «… nous avons pris et continuons à prendre les mesures nécessaires pour qu'aucun cas de travail forcé ne se produise au Myanmar». Il ajoutait que son pays «est prêt à envisager des mesures administratives, gouvernementales et législatives propres à assurer que de telles pratiques ne se reproduiront pas dans l'avenir».

Tout en reconnaissant que la lettre du ministre «contient des éléments qui semblent refléter des intentions encourageantes des autorités du Myanmar de prendre des mesures en vue de donner effet aux recommandations de la commission d'enquête», la Conférence a jugé que «la situation de fait … n'en demeure pas moins inchangée à ce jour». Par 52 voix pour, 242 voix contre et 27 abstentions, la Conférence a rejeté des amendements visant à ce que, à sa présente session, elle diffère sa décision.

Aux termes de la résolution adoptée aujourd'hui, une série de mesures prendront effet le 30 novembre 2000 sauf si, avant cette date, le Conseil d'administration a pu se convaincre que les intentions manifestées par le ministre du Travail se sont traduites en un dispositif d'ensemble législatif, gouvernemental et administratif «suffisamment concret et détaillé pour montrer que les recommandations de la commission d'enquête ont été mises en œuvre».

Les mesures énoncées dans la résolution sont les suivantes:

• Inscrire la question de la mise en œuvre des recommandations de la commission d'enquête à l'ordre du jour des futures sessions de la Conférence en consacrant une séance spéciale de la Commission de l'application des conventions et recommandations de l'OIT à l'examen de cette question tant qu'il n'est pas avéré que le Myanmar (Birmanie) s'est acquitté de ses obligations;

• Recommander à l'ensemble des mandants de l'Organisation, gouvernements, employeurs et travailleurs, d'examiner leurs relations avec le Myanmar (Birmanie) et de prendre des mesures appropriées afin que ces relations ne puissent être mises à profit par ce pays pour perpétuer ou développer le système de travail forcé ou obligatoire, et de faire rapport au Conseil d'administration du BIT;

• Inviter le Directeur général du BIT, M. Juan Somavia, à informer les organisations internationales travaillant avec l'OIT et à leur demander d'examiner la coopération qu'elles peuvent entretenir avec le Myanmar (Birmanie) et, le cas échéant, de mettre fin le plus rapidement possible à toute activité qui pourrait avoir pour effet de conforter, directement ou indirectement, le travail forcé ou obligatoire;

• Inviter le Directeur général à demander l'inscription d'une question à l'ordre du jour de la session de juillet 2001 du Conseil économique et social (ECOSOC) qui concernerait le non-respect par le Myanmar (Birmanie) des recommandations contenues dans le rapport de la commission d'enquête et viserait l'adoption de recommandations adressées soit par l'ECOSOC, soit par l'Assemblée générale, soit par les deux, aux gouvernements et aux autres institutions spécialisées, en vue de s'assurer que leurs activités ne confortent pas directement ou indirectement la pratique du travail forcé;

• Inviter le Directeur général à présenter au Conseil d'administration un rapport périodique sur le résultat des mesures visant les organisations internationales et l'Organisation des Nations-Unies et à informer celles-ci de tout développement survenu dans la mise en œuvre des recommandations de la commission d'enquête par le Myanmar (Birmanie).

La commission d'enquête avait demandé au gouvernement du Myanmar (Birmanie) de veiller à ce que les autorités et notamment les militaires n'imposent plus de travail forcé ou obligatoire et que des mesures juridiques ainsi que des sanctions soient prises à l'encontre de ceux qui imposent du travail forcé ou obligatoire.

Aux termes de la résolution, le Directeur général est autorisé à répondre positivement à toute demande du Myanmar (Birmanie) qui aurait pour seul objet de mettre sur pied, avant le 30 novembre 2000, le dispositif nécessaire. De nouvelles missions de coopération technique pourraient ainsi être envoyées dans le pays et une présence durable de l'OIT sur place pourrait être envisagée si le Conseil d'administration confirme que les conditions se trouvent réunies pour qu'une telle présence puisse être réellement utile et efficace.

C'est la première fois dans l'histoire de l'OIT, organisation créée il y a 81 ans, que la Conférence adopte des mesures au titre de l'article 33, procédure qui ne peut être utilisée que dans le cas où un pays ne se conforme pas dans le délai prescrit aux recommandations d'une commission d'enquête, ces commissions d'enquête n'étant instituées qu'en cas de violations graves et persistantes des normes internationales du travail.

La commission d'enquête de 1998, qui était composée de trois juristes internationaux renommés, avait conclu que «l'obligation … de supprimer l'emploi du travail forcé ou obligatoire est violée au Myanmar dans la législation nationale … ainsi que dans la pratique, de façon généralisée et systématique, avec un mépris total de la dignité humaine, de la sécurité, de la santé et des besoins essentiels du peuple du Myanmar».