GRAVES VIOLATIONS DES NORMES DE L'OIT AU MYANMAR, AU NIGERIA ET EN IRAN

GENÈVE (Nouvelles du BIT) - Les délégués à la 83e Conférence internationale du Travail ont à nouveau critiqué avec force les pratiques en vigueur au Myanmar et au Nigéria dans les domaines du travail et des droits de l'homme. La République islamique d'Iran est également citée dans un paragraphe spécial qui reprend des allégations concernant l'inégalité d'accès à l'emploi et à l'éducation, fondée sur la religion et le sexe.

Communiqué de presse | 20 juin 1996

GENÈVE (Nouvelles du BIT) - Les délégués à la 83e Conférence internationale du Travail ont à nouveau critiqué avec force les pratiques en vigueur au Myanmar et au Nigéria dans les domaines du travail et des droits de l'homme. La République islamique d'Iran est également citée dans un paragraphe spécial qui reprend des allégations concernant l'inégalité d'accès à l'emploi et à l'éducation, fondée sur la religion et le sexe.

La Conférence a approuvé les décisions de la Commission de l'application des normes qui s'est déclarée profondément préoccupée par le très fréquent recours au travail forcé au Myanmar. Dans son rapport, la commission déplore «la grave situation qui sévit au Myanmar» depuis de très nombreuses années, où l'on recourt systématiquement au travail forcé, en violation de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930. Elle a aussi «demandé fermement au gouvernement d'abroger formellement et de toute urgence les dispositions légales et d'abandonner toutes les pratiques qui sont contraires à la convention».

Par ailleurs, une procédure de plainte a été engagée contre le Myanmar en vertu de l'article 26 de la Constitution de l'OIT. Une lettre signée par 24 délégués des travailleurs, demandant qu'une procédure soit engagée en vertu de l'article 26, indiquait qu'au Myanmar, le travail forcé est «systématique, atteint des proportions sans précédent et sévit dans un nombre croissant de secteurs». Selon les auteurs de cette lettre, «de nombreux travailleurs sont astreints au travail forcé dans la construction des chemins de fer et des routes, dans le bâtiment et dans d'autres projets d'infrastructure qui résultent souvent des efforts déployés par le gouvernement pour promouvoir le tourisme».

L'article 26 dispose qu'une commission spéciale d'enquête peut être instituée en cas de non-respect des normes internationales du travail et d'allégations faisant état de violations des droits de l'homme dans les Etats membres de l'OIT. Le Myanmar fait de longue date l'objet de très sérieuses plaintes ayant trait au travail forcé et à d'autres violations graves des droits de l'homme. L'article 26 n'est généralement invoqué qu'en cas de violations persistantes et d'inobservation des décisions des organes de contrôle de l'OIT.

En particulier, l'OIT a enjoint le gouvernement du Myanmar d'abroger la loi sur les villages et les villes, en vertu de laquelle quiconque ne se soumet pas à l'obligation de travailler ou de fournir un service est passible de sanctions. Le Myanmar a ratifié la convention de l'OIT sur le travail forcé en 1955.

Le Myanmar est également mis en cause pour «de sérieuses carences» dans l'application de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. La Commission constate qu'«il n'existe pas, dans le pays, de syndicats ayant pour objectif la défense et la promotion des intérêts des travailleurs». Elle demande instamment au gouvernement de «prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir aux travailleurs et aux employeurs le droit de constituer les organisations de leur choix». En outre, la commission appelle l'attention sur l'absence de progrès en dépit des observations formulées à ce sujet depuis de nombreuses années et regrette que «la mission du BIT programmée d'un commun accord pour mai 1996 n'ait pu finalement être reçue au Myanmar». Elle exprime le ferme espoir que le gouvernement coopérera étroitement avec le BIT afin que «les très graves divergences entre la loi et la pratique d'une part et la convention de l'autre soient levées dans un proche avenir».

Le gouvernement du Nigéria est lui aussi cité dans un paragraphe spécial pour inobservation de la convention no 87. La commission constate «une fois encore qu'aucun progrès n'a pu être observé en dépit des observations formulées de longue date par la commission d'experts (de l'OIT)» au sujet de «très graves violations des droits de l'homme à l'encontre de syndicalistes ainsi que des principes fondamentaux contenus dans la convention». En conclusion, la commission «déplore que les dispositions législatives prévoyant un système de syndicat unique et permettant l'ingérence du gouvernement dans l'organisation et l'activité des syndicats demeurent inchangées». Elle insiste pour que «le gouvernement prenne des mesures immédiates en vue du respect absolu des libertés publiques essentielles aux droits syndicaux».

En ce qui concerne la République islamique d'Iran, la commission conclut à l'existence de graves manquements à la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958, notamment pour ce qui est de la politique de l'emploi appliquée aux membres de la communauté baha'i et d'autres religions, qui ne bénéficient pas de l'égalité de traitement dans la pratique. La Commission prie le gouvernement de l'Iran «de fournir des indications complètes sur l'adoption d'une politique nationale de promotion de l'égalité sans discrimination fondée sur la religion, notamment dans les domaines des postes du Corps judiciaire, de l'élection au Conseil islamique du travail et de l'admission à l'éducation universitaire». Elle note avec intérêt l'abolition des restrictions relatives à l'admission des femmes à l'université, mais exprime d'une manière générale sa «préoccupation quant à l'absence d'égalité pour les femmes dans la société et au travail».

La commission a noté que le gouvernement était disposé à accepter l'assistance technique du Bureau international du Travail et a proposé à celui-ci d'inviter une mission de contacts directs. Elle a dû constater que le gouvernement n'était pas en mesure de s'engager à ce sujet durant la Conférence.

En tout, 52 gouvernements ont fourni des informations et ont participé aux discussions concernant la situation dans leurs pays respectifs. La commission de l'application des normes examine la manière dont les pays remplissent les obligations stipulées dans les normes de l'OIT et plus particulièrement dans les conventions qu'ils ont ratifiées. Cette année, la commission était composée de 207 membres (115 membres gouvernementaux, 20 membres employeurs et 72 membres travailleurs).