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Des téléphones mobiles pour mieux mobiliser les ouvriers du textile

En Asie, presque tous les ouvriers du textile possèdent maintenant un téléphone portable. Le Programme Better Work de l’OIT trouve des solutions pour utiliser cette technologie afin de diffuser les informations importantes.

Reportage | Cambodge et Indonésie | 2 mai 2016
OIT Info – Avant de posséder un smartphone, Kit Sopheak vivait dans un désert d’informations. Elle allait au travail, elle rentrait chez elle. De temps en temps, lui parvenaient des détails concernant les prestations santé ou une nouvelle règle sur les heures supplémentaires dans l’usine textile où elle travaille, transmis entre amis. Mais souvent une information importante lui échappait.

«Nous nous transmettons juste les informations relatives au travail comme ça, d’une personne à l’autre», raconte Mme Sopheak, 27 ans. «Ou bien il y a des annonces qui sont affichées sur le mur de l’usine. Mais nous n’avons pas le temps de rester pour les lire.»

Cependant, le partage d’information évolue rapidement au Cambodge comme ailleurs. La technologie des téléphones mobiles supplante les modes de communication plus lents, moins efficaces. De plus en plus de travailleurs comme Mme Sopheak économisent pour s’acheter un smartphone – même si cela coûte l’équivalent d’un mois de salaire pour la plupart des employés de l’usine – afin d’accéder directement à l’information.

«Je continuais d’entendre les autres tirer leurs informations d’Internet, alors j’ai pensé que je voulais moi aussi accéder à ce savoir», raconte Mme Sopheak. «Je n’ai guère d’instruction mais je veux améliorer mes connaissances. Maintenant, j’utilise les medias sociaux pour apprendre.»

En Asie, le programme Better Work – une initiative-phare de l’OIT gérée conjointement avec le groupe de la Banque mondiale – profite de l’engouement pour les smartphones et l’utilise pour mener des initiatives de formation des travailleurs au Cambodge et en Indonésie.

Toucher plus de travailleurs, plus rapidement


Better Factories Cambodge (BFC) comprend un projet téléphone mobile qui permet au programme d’atteindre plus rapidement un plus grand nombre d’employés.

«Kamako Chhnoeum» (ou «Travailleur d’exception») est un système de répondeur vocal qui informe les ouvriers d’usine de leurs droits au travail en testant leurs connaissances par le biais d’un questionnaire à choix multiples sur l’un des trois sujets suivants: salaires et allocations, santé personnelle, et sécurité et santé au travail. Une seconde partie du questionnaire permet aux travailleurs de nommer l’usine dans laquelle ils travaillent et de fournir des informations sur les conditions de travail qui y règnent.

Progressivement, les appels au service d’assistance téléphonique ont augmenté, partant de 1000 à 2000 travailleurs par mois pour atteindre un pic de 15 000 travailleurs en mars 2014 quand BFC a commandité un spot radio pour promouvoir la publicité du service. L’équipe de BFC est en train de mettre au point un système de notation qui va permettre aux travailleurs de noter leurs usines selon des critères comme les salaires, les avantages sociaux, la santé et la sécurité au travail. Ces informations seront mises à disposition via un serveur vocal interactif que les travailleurs pourront utiliser quand ils doivent choisir où aller travailler.

Pour Mme Sopheak, le fait de savoir à quel type de congés ou de prestations santé elle a droit – si la visite chez le médecin est couverte par son employeur ou non –, ou de pouvoir comparer sa rémunération avec celle de ses homologues dans d’autres usines, va l’aider à prendre d’importantes décisions personnelles, comme d’estimer si elle et ses collègues devraient demander une augmentation.

«Je veux comprendre ce qui se passe dans la société et je veux savoir ce qui se passe dans ma propre usine», déclare Mme Sopheak. «Disposer d’informations va m’aider à améliorer ma vie.»

L’utilisation des téléphones portables pour donner davantage d’autonomie aux travailleurs a aussi connu un grand succès en Indonésie où opère Better Work Indonésie, l’équivalent de BFC pour ce pays.

Es-ce la fin du tableau d’affichage?

Selon Mohamad Anis Agung Nugroho, le directeur des opérations de Better Work Indonésie, la communication constitue un défi chronique pour les usines de son pays. Les contremaîtres avaient l’habitude de poster des notes sur les tableaux d’affichage ou d’utiliser un porte-voix pour faire des annonces, ou les travailleurs étaient informés dans le cadre d’entretiens en tête-à-tête avec leurs supérieurs. Mais des informations cruciales n’atteignaient pas les employés.

«Les travailleurs expliquaient qu’ils ne savaient pas qu’ils avaient droit à tel congé ou ne savaient pas que l’assurance santé couvrait ceci ou cela», a déclaré M. Agung Nugroho.

Pour résoudre ce problème, Better Work Indonésie a mis en place un compte Facebook et une série d’applications mobiles qui permettent de pallier le manque de communication entre les dirigeants et les ouvriers des usines, ainsi que de doter les travailleurs d’outils et d’informations pratiques qui peuvent être mis immédiatement en pratique dans leur vie.

Les applications pour téléphone mobile de Better Work Indonésie permettent aux travailleurs d’accéder aux informations relatives à leurs salaires, droits et avantages, ainsi qu’aux questions liées à la sécurité et la santé au travail.

«La clé, c’était d’adapter l’information aux besoins des travailleurs. Notre priorité était d’améliorer le système de communication sur le lieu de travail et de renforcer les organisations de travailleurs pour qu’elles s’engagent davantage auprès de leurs adhérents, a déclaré M. Agung Nugroho, et nous avons réussi.»