Des migrants thaïlandais poursuivent leurs recruteurs en justice

Souvent, les travailleurs thaïlandais paient très cher pour obtenir un emploi à l’étranger dont la réalité est parfois bien éloignée des promesses des recruteurs. Une initiative de l’OIT a aidé d’anciens émigrés à obtenir une compensation financière.

Article | 17 juillet 2012
Province de Tak, Thaïlande (OIT Info) – Pirom Boonyorat, mécanicien auto de 35 ans, fronce les sourcils au souvenir du désastre financier dans lequel s’est achevée sa dernière période d’émigration.

Il avait versé 580 000 bahts (17 000 € de l’époque) à des recruteurs pour s’occuper de son voyage et de son contrat pour un emploi en Espagne. L’agence de recrutement lui avait dit qu’il serait payé 1 500 € par mois et travaillerait pendant cinq ans.

Son salaire s’est révélé être de moitié de ce montant et, au bout d’un an, il n’avait plus de travail. Sans le sou ni perspectives en Espagne, M. Boonyorat est retourné en Thaïlande, en colère contre le recruteur.

«J’ai pensé que la société ne voulait que notre argent. Ils n’assumaient aucune responsabilité par rapport à leurs promesses. Ils auraient dû faire de leur mieux pour nous trouver un nouvel emploi», dit-il.

Des histoires comme celles-ci ne sont pas rares en Thaïlande où les recruteurs, qui travaillent à la commission, embellissent souvent les conditions des emplois qu’ils arrangent.

Mais M. Boonyorat et d’autres ont maintenant obtenu une indemnisation de la part de leur agence de recrutement, grâce à un projet de l’OIT soutenu par la Commission européenne qui les a aidés à intenter des poursuites devant le tribunal du travail de Thaïlande.

Le projet «Going back – Moving on» (Rentrer et aller de l’avant) a pour but d’assister les migrants de retour dans leur réinsertion économique et sociale. Il collabore aussi avec des avocats thaïlandais pour aider les migrants à obtenir une juste indemnisation s’ils estiment avoir été lésés.

Une avancée pour les droits des travailleurs migrants

La réparation financière marque une avancée décisive dans la conception qu’ont les tribunaux thaïlandais des droits des travailleurs migrants et des obligations des agences de recrutement qui les envoient à l’étranger.

«Davantage de migrants rentrent chez eux, et ceux qui considèrent avoir été trompés vont devant les tribunaux», explique Siriwan Vongkietpaisan, l’avocat thaïlandais qui représente M. Boonyorat.

L’avocat agit aussi au nom d’Oonjai Thiwong qui a versé 250 000 bahts (7 000 € de l’époque) à un recruteur pour un emploi en Pologne. Début 2012, le tribunal du travail thaïlandais a statué en faveur de Mme Thiwong et de 17 autres femmes après l’annulation brutale de leurs contrats par leur employeur polonais.

Mme Vongkietpaisan dit qu’au départ elle aidait ses clients à négocier directement avec leurs recruteurs mais sans succès. «Nous avons donc porté leurs cas devant les tribunaux et nous obtenons de meilleurs règlements.»

Mme Kusumal Rachawong, coordonatrice du projet de l’OIT pour l’autonomisation économique et sociale des migrants, déclare que «l’OIT, avec le soutien de la Commission européenne, a prouvé que les droits au travail des travailleurs migrants pouvaient être protégés par les lois nationales, même lorsqu’ils travaillent à l’étranger».

«Cette protection est maintenant reconnue par les tribunaux de Thaïlande.»

Mme Thiwong a rencontré M. Boonyorat alors qu’elle déposait plainte au tribunal. Les deux anciens émigrés sont maintenant mariés et attendent leur premier enfant.

Dans l’immédiat, ils n’ont pas de projet d’expatriation, mais affirment que cela reste une option envisageable pour l’avenir puisqu’ils connaissent dorénavant leurs droits.

Allan Dow travaille pour l’Unité régionale des partenariats au sein du Bureau régional de l’OIT pour l’Asie et le Pacifique.