Microseguro

Assurer le bétail pour protéger les plus démunis

L’assurance bétail a la capacité de réduire la vulnérabilité des populations pauvres. Les défis sont immenses mais les nouvelles technologies sont porteuses d’espoir.

Reportage | 12 octobre 2012
GENEVE (OIT Info) – L’élevage assure les moyens d’existence d’un milliard de pauvres à travers le monde. Pour nombre d’entre eux, c’est un moyen de sortir de la pauvreté, mais une voie semée d’embûches.

De récentes innovations ont attiré l’attention sur le potentiel qu’offre l’assurance bétail pour réduire cette vulnérabilité.

Malgré les défaillances initiales, les progrès technologiques et la demande croissante laissent augurer une «assurance bétail viable du point de vue commercial et contribuant au bien-être», selon le second volume de «Protéger les plus démunis: guide de la micro-assurance» publié conjointement par l’OIT et la Munich Re Foundation.

La mort d’un animal est le pire risque encouru par ceux qui n'ont d'autre moyen de subsistence que leur petit troupeau, surtout dans les zones exposées à la sécheresse où les pénuries d’eau et de fourrage sont une menace constante.

Les animaux constituent souvent l’actif le plus précieux des ménages pauvres et leur mort peut avoir des conséquences désastreuses. Si l’animal a été acheté à crédit, le ménage doit alors rembourser un emprunt sur un bien qu’il ne possède plus.

La mortalité du bétail due à la famine et à la maladie est le type d’assurance le plus courant mais il n’existe que quelques mécanismes d’assurance bétail dans les pays en développement.

Le potentiel est énorme mais la pénétration du marché reste très limitée, signe que l’assurance bétail est soit trop onéreuse soit qu’elle ne répond pas aux besoins des clients.

Lutter contre la fraude

Les défis sont redoutables.

Pour commencer, les clients potentiels ont peu ou pas d’expérience en matière d’assurance et n’en comprennent pas les atouts.

«Si l’assurance bétail répond à un besoin flagrant parmi les éleveurs à faibles revenus, elle ne se traduit pas toujours par une demande», explique Pranav Pradash, du Fonds pour l’innovation en micro-assurance de l’OIT. La sensibilisation et la compréhension sont un enjeu majeur».

La fraude est un autre obstacle de taille.

Dans certaines régions d’Inde, par exemple, les assureurs craignent qu’une partie substantielle des demandes d’indemnisation des assurés ne soient frauduleuses, tirant parti des taux de mortalité élevés des animaux.

C’est pourquoi les assureurs instaurent des contrôles plus stricts qui non seulement augmentent le coût des primes mais qui sont plus difficiles à respecter, ce qui décourage d’éventuels clients.

Afin de prévenir la fraude, les assureurs ont besoin de savoir quels animaux ils assurent et de suivre leur parcours, ce qui est difficile dans les zones rurales isolées.

Des innovations pleines de promesses

La compagnie d’assurance indienne IFFCO-Tokio a testé l’usage de la technologie d’identification par radiofréquence (RFID) pour prévenir la fraude. Les données contenues dans la puce implantée sous la peau de l’animal sont accessibles via un lecteur. Quand un client déclare la mort d’un bovin, un représentant de la compagnie d’assurance vérifie que la lecture de la RFID coïncide avec le numéro d’identification qui figure sur la police d’assurance.

Les clients se sont montrés très réceptifs à la technologie de ce projet pilote, «mais pas le personnel bancaire ni les vétérinaires parce qu’il ne leur est plus possible de déclarer frauduleusement des sinistres», indique le guide.

Autre innovation prometteuse, l’assurance indexée dans laquelle l’indemnisation des clients d’une région spécifique est déclenchée par un indicateur externe. En Mongolie, un produit pilote d’assurance bétail indexée couvre les pertes causées par des conditions hivernales extrêmes. Au Kenya, dans la région de Marsabit, un produit similaire est indexé sur les possibilités de forage repérées par des images satellite.

Le rapport avertit toutefois que ce type d’assurance indexée du bétail pourrait n’être efficace qu’en zone semi-aride; il n’est pas certain qu’elle puisse fonctionner sans subvention.

Mais le rapport demeure optimiste. «Des subventions seront peut-être nécessaires, mais le fait que l’assurance bétail subventionnée serve de filet de sécurité productif pour faciliter l’entrée des pauvres dans l’élevage et la commercialisation du bétail pourrait être un argument décisif.»