Reportage: De bonnes ondes pour développer les petites entreprises en Ouganda

L’accès à l'information est crucial pour que les affaires soient fructueuses et le marché efficace. Un projet de l’OIT en Ouganda donne les moyens aux plus pauvres de défendre leurs intérêts économiques et de développer leur entreprise en mettant en pratique ce qu’ils ont appris à la radio. C’est l’une des nombreuses «success stories» en matière de développement des petites entreprises citées dans le rapport du BIT qui sera débattu lors de la Conférence internationale du Travail.

Article | 24 mai 2007

L’accès à l'information est crucial pour que les affaires soient fructueuses et le marché efficace. Un projet de l’OIT en Ouganda donne les moyens aux plus pauvres de défendre leurs intérêts économiques et de développer leur entreprise en mettant en pratique ce qu’ils ont appris à la radio. C’est l’une des nombreuses «success stories» en matière de développement des petites entreprises citées dans le rapport du BIT Note 1 qui sera débattu lors de la Conférence internationale du Travail.

KAMPALA, Ouganda (BIT en ligne) – «Au temps de l’Internet, il est important que nous, villageois, ne soyons pas à la traîne», déclare l’un des 7 millions d’auditeurs de la radio des petites entreprises d’Ouganda.

Grâce au projet SEMA du BIT (Médias pour les petites entreprises d’Afrique), 75 pour cent des auditeurs ougandais sont régulièrement à l’écoute de la fréquence des petites entreprises. Tout en délivrant une information de qualité sur le marché et les opportunités commerciales, les émissions permettent aux petits entrepreneurs de s’exprimer.

«Les conseils pour monter des affaires nous font prendre conscience que nous pouvons essayer de faire quelque chose», affirme un autre entrepreneur. Comme lui, la plupart des auditeurs confirment que les programmes de la radio sont bénéfiques pour leurs affaires, le tiers d’entre eux témoignant qu’ils ont développé leur entreprise en appliquant ce qu’ils avaient appris grâce à la radio.

Avec une part de marché de 65 pour cent dans sa catégorie de programme, le SEMA touche la portion la plus déshéritée de la population. «La radio est de loin la principale source d’information en Ouganda, les journaux n’atteignant que 5 pour cent des foyers et la télévision 6 pour cent», explique Karl-Oskar Olming du Programme du BIT pour la promotion de l’emploi par le développement des petites entreprises (SEED).

En 1999, le BIT a lancé le SEMA à titre expérimental, prenant appui sur l’industrie radiophonique en plein essor pour établir un programme à destination des petites entreprises. Le projet a pris la forme d’un partenariat avec le Service central de radiodiffusion (CBS), une station de radio privée émettant depuis la capitale de l’Ouganda, Kampala.

Le programme a été lancé sous le nom de Nekolera Gyange, qui signifie «Je gère ma propre entreprise» en Luganda – la langue utilisée dans le centre de l’Ouganda. Il est très vite devenu non seulement une source d’information économique mais aussi un forum de débats sur les entreprises et un porte-voix pour les petits entrepreneurs. Le programme a connu un tel succès que son titre, Nekolera Gyange, est devenu le terme usuel pour désigner les PME, dans la rue, sur le marché, comme au Parlement ougandais.

L’OIT a continué à soutenir l’essor d’autres programmes de radio pour les PME. En 2001, des programmes similaires ont vu le jour sur trois stations de radio rurales. Depuis 2003, avec le soutien de l’Agence suédoise pour le développement international, l’OIT s’est lancée dans un projet de plus grande envergure pour appuyer le développement de programmes radiophoniques pour les PME et pour développer le marché global.

Depuis le début du projet ougandais, le travail de l’OIT dans l’utilisation des médias pour développer les PME a atteint une dimension considérable en touchant des millions d’entrepreneurs parmi les plus modestes dans les pays les plus pauvres du monde. A côté du projet ougandais, l’OIT a soutenu le développement de programmes de radios commerciales pour les PME au Ghana et en Zambie, une formation sur les ondes de GERME (Gérez mieux votre entreprise) au Viet Nam ainsi qu’un feuilleton télévisé pour encourager les migrants en Chine à s’inscrire à une formation de GERME Note 2.

Les activités de l’OIT au Zimbabwe, en Ouganda et, plus récemment, en Zambie, ont également couvert la création de journaux spécialisés. «Alors que toutes les activités comprenant les médias papier touchaient ou s’adressaient aux petites entreprises, l’expérience montre que les journaux tournent autour des entreprises les plus importantes du secteur formel. Les éditeurs de journaux africains pensent que leur public potentiel ce sont les plus grandes entreprises, et les études effectuées sur la consommation des médias confirment cette hypothèse», déclare Karl-Oskar Olming.

Promouvoir les entreprises durables

Le rapport du BIT à la Conférence va au-delà d’un état des lieux de l’évolution des approches contemporaines du développement des entreprises. Apportant une contribution majeure au débat général sur le rôle du secteur privé dans le développement économique et social global, il contient également une évaluation de la pertinence des tendances récentes pour la mise en œuvre de l’Agenda de l’OIT pour le travail décent. Il propose aussi des recommandations pour le travail de l’OIT en termes de promotion du travail décent à travers le développement d’entreprises durables.

Selon le rapport du BIT pour la Conférence, les micro et petites entreprises (MPE) représentent, et de loin, dans presque tous les pays, la plus large part de l’activité économique et de l’emploi. En Europe, 91 pour cent des entreprises sont classées comme de très petites entreprises employant de 1 à 9 salariés et seulement 1 pour cent des entreprises emploient plus de 250 personnes.

«Mais ce n’est pas seulement une question de taille. La raison du soutien aux MPE repose aussi sur leur dynamisme, leur potentiel d’innovation, leur compétitivité et plus globalement sur leur rôle pour générer du progrès économique et réduire la pauvreté», déclare Michel Henriques, Directeur du Département création d’emplois et du développement de l’entreprise au BIT.

«L’OIT compte parmi les organisations qui ont été à l’avant-garde des nouvelles bonnes pratiques dans le développement des petites entreprises. Nous avons adopté une approche de développement de marché, en particulier pour les entreprises de l’économie informelle qui sont souvent les plus nombreuses dans les pays en développement», ajoute-t-il.


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- Note 1 - La promotion d’entreprises durables, Rapport VI, Conférence internationale du Travail, 96e session, Bureau international du Travail, Genève, 2007.
/public/french/standards/relm/ilc/ilc96/pdf/rep-vi.pdf

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- Note 2 -Voir l’article de fond du BIT «Mon avenir n’est pas un rêve»: les migrants chinois créent leur propre entreprise