Promouvoir des pratiques commerciales durables et responsables dans quatre chaînes de valeur agricoles du Népal

La promotion des entreprises durables dans les quatre chaînes de valeur agricoles du thé, de la cardamome, du gingembre et des produits laitiers au Népal après le conflit a aidé à renforcer les capacités locales pour plaider en faveur de pratiques de travail socialement responsables. L'expérience réussie dans la chaîne de valeur du thé a eu des effets d'entraînement positifs en favorisant une culture de dialogue et de collaboration dans d'autres chaînes de valeur agricoles, donnant un coup de pouce à la promotion des entreprises durables au Népal.

Briefing note | 20 October 2020
En 2015, le Népal était un pays se remettant d'une décennie de conflit. Les faiblesses structurelles de l'économie et le manque d'incitations à l'investissement entravaient le développement du secteur privé et la création d'emplois. Reconnaissant le rôle essentiel du secteur privé dans la création d’emplois, le programme UNNATI-Croissance inclusive au Népal, financé par le Danemark, visait à promouvoir une croissance durable et inclusive pour réduire la pauvreté et à élever le niveau de vie dans le pays. L'OIT a dirigé Le plaidoyer pour les droits et la bonne gouvernance d'entreprise (2015-2018), une sous-composante du projet UNNATI promouvant le développement responsable des entreprises.

Croissance inclusive et création d'emplois dans le secteur agricole: une priorité de développement

Le secteur agricole népalais est le pilier économique du pays. Il fournit des moyens de subsistance aux deux tiers de la population et représente un tiers du produit intérieur brut. Les activités de l'OIT dans les principales chaînes de valeur des industries du thé, du gingembre, des produits laitiers et de la cardamome - toutes prioritaires dans les plans de développement du gouvernement - ont porté sur la sensibilisation en matière de travail et de responsabilité sociale des entreprises (RSE) sur la base des principes de la Déclaration de l'OIT sur les EMN et la Déclaration de 1998 sur les principes et droits fondamentaux au travail. La Déclaration de l'OIT sur les EMN a notamment servi d'instrument directeur pour aider à maximiser les avantages que le commerce à travers les chaînes de valeur productives peut apporter en termes de création d'emplois et de développement socio-économique, tout en abordant les défis du travail décent qui découlent des opérations commerciales et les complexités associées aux structures des chaînes de valeur. En 2015, une conférence nationale tripartite élargie sur les pratiques commerciales durables et responsables a été organisée, touchant les différents ministères concernés ainsi que les représentants des employeurs et des travailleurs.

Renforcer la capacité des acteurs de la chaîne de valeur à plaider pour des pratiques commerciales responsables

L’OIT a soutenu un effort conjoint du gouvernement népalais, des organisations de travailleurs et d’employeurs, des coopératives, des ONGs, des associations d’agriculteurs, des médias ainsi que des associations agricoles pour faire avancer les entreprises durables et responsables. Grâce au Fonds d’Aide au Plaidoyer, l'assistance technique de l'OIT a favorisé le dialogue entre les parties prenantes de la chaîne de valeur. Pour ce faire, il les a engagées via un plaidoyer fondé sur des données factuelles et des dialogues politiques tout en aidant à renforcer leurs capacités à défendre et à mettre en pratique les principes de la Déclaration de l'OIT sur les EMN, y compris les principes et droits fondamentaux au travail. Des ateliers de formation de formateurs ont été organisés pour développer un pool d'experts locaux sur ces sujets afin de faciliter la promotion du travail décent dans les industries cibles. Au total, 821 activités ont été organisées avec le soutien du Fonds d’Aide au Plaidoyer, dont 232 ateliers, 208 formations et 18 dialogues public-privé.
Les experts de l'OIT ont fourni une assistance technique directe en tant que personnes ressources aux mandants de l'OIT lors de dialogues multipartites, de séminaires de sensibilisation et d'un programme de formation d'une semaine sur la Déclaration sur les EMN. En outre, un spécialiste du BIT en matière de sécurité et de santé au travail (SST) a dispensé une formation pratique dans les chaînes de valeur cibles afin d'améliorer la sécurité et les conditions de vie et de travail des travailleurs.

Création d'un groupe de travail sur le thé pour un dialogue social renforcé

En 2017 et 2018, l'OIT a soutenu 13 ateliers et activités de formation sur la Déclaration de l'OIT sur les EMN pour renforcer les capacités des acteurs du secteur du thé à appliquer les principes de la Déclaration sur les EMN. Étant donné que la sécurité et la santé au travail constituaient un défi prioritaire pour le travail décent, plus de 60 événements ont été organisés pour aider à améliorer la sécurité et les conditions de vie et de travail des femmes et des hommes agriculteurs dans le secteur du thé.

Lors d'un atelier tripartite-plus soutenu par l'OIT sur les entreprises responsables organisé dans le secteur du thé d'Ilam dans l'est du Népal en mai 2016, les partenaires ont identifié les principaux défis du travail décent dans leurs chaînes de valeur, ce qui a abouti à la création du « Groupe de travail sur le thé de qualité par la promotion de pratiques commerciales responsables et durables dans le secteur du thé. » Le groupe de travail visait à promouvoir la production de thé de haute qualité tout en améliorant les conditions de travail tout au long du processus de production. Cette initiative fut portée au niveau national lorsque l'OIT organisa en juillet 2017 une réunion tripartite élargie du Groupe de travail sur le thé à Katmandou. Des représentants du gouvernement, des organisations de travailleurs et d'employeurs et d'autres parties prenantes concernées se réunirent ensuite pour discuter et identifier les défis à relever pour faire avancer les pratiques commerciales responsables ainsi que les actions conjointes concrètes pour les résoudre tout au long de la chaîne de valeur du thé. À la suite de ce dialogue tripartite élargi impliquant des partenaires au niveau national et au niveau des districts dans les sept districts, le représentant de la Fédération de la Chambre de commerce et d'industrie du Népal (FNCCI) fut élu à l'unanimité Président du groupe de travail, et les termes de référence furent adoptés par le groupe.

En 2018, le Groupe de Travail sur le Thé plaida avec succès pour que le gouvernement prenne des mesures contre les usines de thé réticentes à payer le salaire minimum aux travailleurs du thé conformément à la nouvelle loi de 2017 sur le travail. Le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale (MoLESS) annonça la formation d'un groupe de travail de haut niveau en septembre 2018 pour s'attaquer aux problèmes et défis plus larges existants dans la chaîne de valeur du thé, y compris la question du salaire minimum. Le MoLESS coordonna ce groupe de travail de haut niveau et ses membres composés de représentants du gouvernement, du Centre conjoint de coordination syndicale (JTUCC), de la Fédération des chambres de commerce et d'industrie népalaises (FNCCI) et de l’Association des fabricants de thé du Népal.

Aujourd'hui, le Groupe de travail sur le thé, créé en 2016 avec le soutien de l'OIT, agit comme une entité autonome. Le dialogue entre les acteurs de la chaîne de valeur se poursuit après la clôture du programme UNNATI. Le groupe de travail fonctionne comme un groupe de plaidoyer pour défendre les droits des acteurs de l'industrie et négocier leur intérêt commun avec les autres parties prenantes. Par exemple, il a initié des propositions de politiques avec les gouvernements local, provincial et fédéral pour améliorer la compétitivité du secteur du thé. Il s'agissait notamment de l'enregistrement et de la promotion d'un logo de marque de thé (Nepal Tea: la qualité de l'Himalaya); de la révision des taxes foncières et des politiques liées au thé; et de la mise en œuvre des pratiques de SST dans le secteur. À la suite d’efforts de plaidoyer auprès des gouvernements à différents niveaux, le gouvernement fédéral a révisé sa politique sur le thé et élaboré et diffusé des lignes directrices pour éviter les taxes multiples aux niveaux provincial et local. De plus, le cabinet provincial a déclaré la province zone prioritaire n° 1 pour le thé et la municipalité de Suryodaya, l'un des principaux centres de production de thé, a réussi à fixer un taux de base pour les feuilles de thé afin de protéger les revenus des petits exploitants.

Effet ricochet sur les chaînes de valeur népalaises

Les interventions de l'OIT pour promouvoir des pratiques commerciales responsables ont eu un effet d'entraînement bénéfique à la fois au sein des différentes chaînes de valeur et entre elles. Le succès remporté par le Groupe de travail sur le thé en matière de révision des salaires dans les fermes et usines de thé a inspiré les acteurs des secteurs du gingembre et de la cardamome à installer une plateforme de dialogue similaire pour une action commune. Un groupe de travail sur la cardamome a été créé, ainsi qu’un réseau Gingembre. Les deux visent à promouvoir le travail décent en mettant en valeur les bonnes pratiques, en améliorant la compétitivité et en renforçant le dialogue dans leurs chaînes de valeur.
De plus, une retombée positive a été observée parmi les coopératives qui étaient des partenaires cruciaux du projet. Premièrement, la Confédération des industries népalaises, la Fédération nationale des coopératives (NCF) et l’Union coopérative des districts (DCUL) ont élaboré avec le soutien technique du BIT un «code de conduite» sur les pratiques commerciales responsables pour les quatre chaînes de valeur agricoles. Plus de 500 dirigeants et militants de coopératives membres du NCF et du DCUL ont participé à des ateliers de sensibilisation pour son lancement. Deuxièmement, la formation de l'OIT sur la gestion comptable a aidé les coopératives du secteur laitier à mieux gérer leur entreprise grâce à l'élaboration de plans d'entreprise. 75% des coopératives laitières ayant participé à la formation ont préparé des plans d’affaire et ont ensuite partagé leur expérience et leur apprentissage avec leurs pairs. De toute évidence, les interventions de l'OIT ont permis de favoriser une culture de collaboration entre les coopératives et un dialogue avancé entre les différentes parties prenantes locales opérant le long des chaînes de valeur.

La voie à suivre

Grâce aux activités du projet, l'OIT a réuni de nombreuses organisations pour dialoguer et répondre à l'objectif commun de créer plus d'emplois de meilleure qualité grâce à des pratiques de travail socialement responsables. Les acteurs de la chaîne de valeur continuent à échanger les uns avec les autres pour promouvoir des entreprises durables et responsables et recherchent des moyens de développer davantage leurs plateformes de dialogue pour une action commune visant à promouvoir le travail décent.