Rapport du comité de la liberté syndicale: Entretien avec Yves Veyrier, porte-parole travailleur

Le Conseil d’administration du Bureau International du Travail a adopté lors de sa 316ème session, le rapport du comité de la liberté syndicale.Au total, 32 cas de violations des droits relatifs à la liberté syndicale et la négociation collective ont examinés dans ce rapport.Explications avec Yves Veyrier, porte-parole travailleur de ce comité…

Communiqué de presse | Geneva, Switzerland | 14 novembre 2012

Sur une liste de 32 pays, le comité de la liberté syndicale a désigné cinq pays comme les cas les plus graves et les plus urgents en ce qui concerne le respect de la liberté syndicale, de la négociation collective et du dialogue social. Il s’agit de l’Argentine, du Cambodge, de l’Ethiopie, de Fidji et du Pérou. Quelles sont les attentes du comité vis-à-vis de ces pays?


Yves Veyrier :
Il faut que des actions soient prises de manière urgente puisque ce sont des cas à la fois urgents et très graves. Nous attendons une réaction immédiate des gouvernements concernés pour rétablir les syndicalistes concernés par les atteintes graves de leurs libertés syndicales qui peuvent atteindre leur intégrité physique. Il faut donc que les gouvernements agissent avant qu’il ne soit trop tard comme c’est le cas au Cambodge où trois syndicalistes ont été assassinés .Lorsqu’il est trop tard comme c’est le cas dans ce pays, il faut des enquêtes sérieuses et indépendantes soient ouvertes pour identifier les responsabilités et que les sanctions soient prises. Parce qu’il faut que justice soit faite vis-à-vis de ces assassinats et que les gens comprennent dans ce pays que les agressions contre les syndicalistes ne restent pas impunis. C’est un moyen de prévention d’actes d’agressions de cette nature.

Pour les cas du Pérou et de l’Argentine où il y a des violences physiques assez graves, nous attendons que des enquêtes soient rapidement menées pour que des sanctions soient prises.

Pour l’Ethiopie, il s’agit de l’enregistrement officiel Syndicat national des enseignants (SNE) et le comité espère que les autorités concernées enregistrent le SNE afin de garantir pleinement les droits syndicaux des fonctionnaires, y compris ceux des enseignants des écoles publiques.

Pour Fidji, c’est un cas très médiatisé qu’on connait depuis plusieurs années dans un contexte de coup d’Etat militaire et les droits syndicaux sont mis en cause. Récemment des syndicalistes ont été détenus par le gouvernement de Fidji avant d’être libérés sous la pression de l’OIT qui est relayée par d’autres pays. Aujourd’hui, il y a très peu de progrès aux îles Fidji et dernièrement une mission de contact du BIT qui s’est rendue dans ce pays, a été expulsée par le gouvernement de ce pays. Nous attendons donc que le gouvernement de Fidji se comporte différemment, qu’une mission du BIT puisse s’y rendre pour exercer le

Le comité a évoqué dans son rapport certains cas de progrès notamment la réintégration des 50 travailleurs licenciés pour avoir exercer la liberté syndicale en Colombie. Selon vous, quel est l’impact du comité de la liberté syndicale dans la protection des droits syndicaux?


Yves Veyrier :
Le rapport du comité n’est pas toujours un moment agréable durant le conseil, parce qu’on y examine des violations des droits syndicaux et certains cas très graves; mais en réalité c’est aussi un moyen de rétablir les syndicalistes dans leurs droits pour mener à bien leurs activités. Et nous obtenons des résultats, des progrès qui sont importants. Quand un syndicaliste peut agir librement, un syndicat peut se constituer, si une négociation sincère peut se mener au sein de l’entreprise; ce sont des conditions pour une justice sociale et un développement économique plus stable. Dans mon rapport, j’en ai souligné quelques progrès comme le cas d’un syndicat qui demandait depuis plus de 10 ans son enregistrement en Algérie et qui l’a finalement obtenu ; il y a aussi les travailleurs et syndicalistes en Colombie qui ont été réintégrés alors qu’ils étaient licenciés depuis 2004.Donc même si c’est parfois très long, on peut obtenir des résultats positifs. Sur d’autres cas, nous sommes à l’attente des réponses des gouvernements concernés, qu’ils suivent nos recommandations et conclusions afin que des progrès soient obtenus.

D’une manière générale, au niveau de l’utilisation du comité et de sa procédure, quel message adressez vous aux syndicats et travailleurs dans le cadre de la protection de leurs droits?


Yves Veyrier :
D’une part, c’est qu’il faut toujours agir au niveau national pour essayer de résoudre le plus vite possible les petites discriminations et entraves aux libertés syndicales, car si on ne les combat pas rapidement, elles risquent de s’aggraver au fil du temps. Il ne faut pas qu’il y ait l’impunité, quelque soit la gravité de la discrimination subie par les syndicalistes. S’il n’y a pas de solution au niveau national, il faudra faire appel à l’OIT à travers les bureaux régionaux pour avoir des conseils et un appui; les syndicats peuvent également contacter la Confédération syndicale internationale (CSI) qui a des équipes formées sur le plan de l’assistance juridique et qui peut engager une action de solidarité immédiate à l’intention du syndicat si elle l’estime nécessaire. Et puis si les choses ne progressent pas, il faut demander conseil auprès de l’OIT pour pouvoir déposer une plainte auprès du comité pour violation de la liberté syndicale .S’il y a urgence, il faudra alerter l’OIT et le comité de la liberté syndicale se saisira de la situation.